• Aucun résultat trouvé

3 La consécutivité d’un mécanisme : le procès du livre magistral

« J’avais trouvé ma voie. J’étais votre élève »63.

Ainsi s’exprime Robert Greslou dans la lettre-confession qu’il adresse à son maître. La citation remonte à l’année 1885. Le jeune homme, alors élève-vétéran de phiosophie au lycée de Clermont-Ferrand, découvre et dévore la Psychologie de Dieu, la

Théorie des passions ainsi que l’Anatomie de la volonté, livres-phares du philosophe Adrien Sixte.

Cet appétit de lecture est aussi une aspiration et une attirance : aspiration du lycéen à trouver en un livre un mode de pensée et une conception de l’individu conformes à ses vues (et ses rêves), formulés dans un discours magistral qui coïncide avec sa propre intelligence de jeune disciple. Attirance aussi pour la personne même de l’auteur et besoin d’approcher le maître qui trouveront forme dans les deux modalités de l’épistolaire (cinq ou six lettres seront échangées entre les deux hommes) et de la rencontre (deux entretiens auront lieu en août 85, rue Guy de Brosse à Paris, au domicile du philosophe). Le mode de lecture de Greslou a tout du comportement du disciple. Si chez lui, lire répond à une exigence intellectuelle, il la satisfait incomplètement, sans l’assouvir véritablement : la lecture du livre déclenche un autre appétit, non plus cérébral mais relationnel. L’attrait pour un système de pensées se double d’une curiosité éprouvée à l’endroit de son auteur… Or, le besoin de savoir et le désir (corrélé) de rencontrer

quelqu’un caractérisent à merveille les attentes du disciple. Ces derniers en effet se trouvent à l’intersection de deux lignes convergentes. L’une oriente une soif d’abstrait : c’est la ligne de cérébralité. L’autre gouverne une soif de concret, (et dans le roman de Bourget, de contact) : c’est la ligne de l’humanité. Robert Greslou consacre son temps de lycéen à la lecture de son auteur favori… Qu’est-ce à dire sinon qu’il mobilise toutes ses forces pour s’approprier l’univers intellectuel et moral de quelqu’un qui n’est pas lui ? Lecture passionnée, dévoreuse, exclusive, que le roman d’ailleurs rapporte par le menu en des pages éloquentes et critiques qui donnent à lire un jeune homme transporté par la pensée d’autrui, persuadé d’avoir trouvé sa Bible et convaincu d’avoir élu son désormais mentor. La mise en scène du protagoniste-lisant désigne à l’intention du lecteur un lecteur fictif égaré, intoxiqué. Ne stigmatise-t-elle pas les dangers de la lecture quand celle-ci est la seule approche du mode pour celui qui s’y adonne, qui s’y complaît ? Ne dénonce-t-elle pas, enfin, plus polémiquement, les dangers de certains livres contemporains à la distance desquels il serait bon que la jeunesse se tînt ?...

Que veut dire Robert Greslou lorsqu’il déclare à son maître : « J’avais trouvé ma voie. J’étais votre élève » ? Que signifie, dans sa radicalité, ce cri du cœur formulé comme une évidence ? Que dit-il aussi des identités coprésentes du maître et disciple,

comme partenaires associés et dans une sorte d’osmose ? Le terme de « voie » (chemin, destin) se relie facilement au mot « vocation ». « Trouver sa voie », c’est répondre à une vocation, se sentir appelé, intérieurement et totalement sollicité, reconnaître ce que l’on reçoit comme une pensée qu’on veut à tout prix faire sienne, non en raison de sa valeur épistémologique ou de sa pertinence intrinsèque, mais au motif qu’elle serait faite pour

lui (« ma voie »). Le disciple imite le maître parce qu’il se persuade avoir face à lui un

autre lui-même. Sous couvert de vocation trouvée, c’est donc une forme de captation de pensée qui se dissimule et se légitime par l’argument de l’identité confondue ou celui du

miroir. Le problème de l’imitation (A imite B) se double de la confusion des identités (A se voit dans B). Le Maître n’est pas seulement aimable, imitable (digne d’admiration, objet de zèle et d’émulation) : il est celui qui le disciple se projette et s’identifie. En ce sens, Robert Greslou commet un lourd contresens : il confond la philosophie d’Adrien Sixte avec son propre désir de devenir philosophe. Aussi attribue-t-il à la pensée de l’auteur de la Psychologie de Dieu un pouvoir exorbitant : celui d’exprimer, avant lui et mieux que lui, sa propre pensée ! Un tel aveuglément – envers soi et envers autrui – est typique de la conduite discipulaire. Il pose le problème de l’identification, délirante à partir du moment où la substitution de la personnalité secondaire en vient à nier l’existence de la personnalité première…

« J’avais trouvé ma voie. J’étais votre élève ». Un pacte autrefois scellé est ici rappelé. Il a métamorphosé l’écrivain en maître à penser. Cette identité seconde qui, malgré qu’il en ait, échoit au philosophe, comporte ses prérogatives. Le maître n’a pas cherché à les obtenir, mais il les a obtenues de son lecteur. Elles peuvent se décliner de bien des façons. Nous nous proposons d’en retenir une : le maître est celui qui,en vertu d’une procuration magistrale, parle à la place du disciple.

Sur la pente des confusions identitaires, une telle substitution est compréhensible. En effet, si le disciple délègue au maître sa propre voix ; s’il trouve sa vocation personnelle dans la personne et la pensée de ce dernier, n’est-ce pas parce qu’il se figure avoir décelé chez l’autre une part de lui-même ? Le pacte voulu par Greslou et réitéré à l’adresse de Sixte affine donc une forme de complémentarité symbiotique. Les deux possessifs « ma » / « votre » y font système et formulent un partenariat fusionnel. Au pôle du disciple revient le groupe nominal « votre élève »64 ; au pôle magistral correspond 64 Un mot à propos de ce terme. Généralement parlant, « élève » n’est pas « disciple ». Chaque dénomination renvoie à un contexte précis qui les individualise et interdit d’en faire deux synonymes. En langue française et le plus souvent, le critère scolaire/non scolaire permet de tracer à lui seul une limite acceptable entre les deux mots. Pourtant, dès qu’on y songe un peu, la clarté distinctive des emplois

le symétrique « ma voie », significativement exprimé à la première personne, comme si la figure du maître était, littéralement, assimilée, absorbée dans celle du disciple…

La formule confessionnelle, dès lors, peut s’analyser à la manière d’une pétition de principe que Greslou impose à son destinataire comme l’élément d’un credo personnel, qui l’institue à ses propres yeux et à eux seuls, disciple du philosophe. Autrement dit, l’affirmation rétrospective du jeune homme équivaut à la réitération d’une profession de foi, par laquelle il s’autodésigne, pour le passé et pour le présent, disciple d’Adrien Sixte et telle que, conséquemment, le rôle du maître, s’impose ipso facto au philosophe de la rue Guy de Brosse, qui n’en demandait pas tant… et dont l’ignorance et l’inexpérience en matière de magistralité se révèleront dramatique.

La déclaration du jeune homme relève de l’intime conviction et d’une croyance cryptique. L’imaginaire y joue un rôle bien sûr essentiel, et l’illusion consiste à se tromper sur soi-même et sur l’autre. Dès lors « disciple » et « maître » ne sont que des

s’opacifie… Voici deux exemples qui le prouvent. Un enfant qui reçoit à domicile une leçon particulière – contexte propre du rapport maître / disciple – sera lui aussi désigné « élève », bien qu’il ne soit pas (au moment de la leçon) à proprement scolarisé au sens institutionnel de ce mot. La langue allemande, quant à elle, semble plus encline encore que le français à confondre les deux termes. Dans la version originale sous-titrée du documentaire de Philippe GRONNING consacré à La grande Chartreuse et intitulé Le grand silence (2006), nous avons constaté que le terme « Disciple » est rendu par l’allemand « Schüler », « écolier » dans la traduction de la parole christique : « Celui qui ne renonce pas à tous ses biens et ne marche pas à ma suite, n’est pas digne d’être appelé mon Disciple ». Comment donc analyser le terme « élève » qui apparaît sous la plume de Robert Greslou dans le passage qui nous intéresse ? Les deux mots en question et que nous mettons en perspective sont relativement rares dans le livre de Bourget. Préface et roman rassemblés n’en comptent pas plus de six : quatre occurrences pour « Disciple » et deux pour « Eleve ». En voici un relevé. Concernant le mot « Disciple », et exception faite de la mention titulaire, l’inventaire est le suivant : la première occurrence appartient à la préface, porte une majuscule et désigne le personnage éponyme (p.22) ; la deuxième évoque les successeurs de Taine et de Ribot, à un moment où Paul Bourget esquisse un parallèle entre ces figures intellectuelles et son propre personnage, Adrien Sixte, dont il est la transposition partielle (p.19) ; la troisième nomme Robert Greslou, dont le narrateur omniscient rappelle alors les cinq ou six lettres adressées à Sixte (p.28) ; la dernière occurrence appartient au chapitre II « l’affaire Greslou » (p.54) : elle est empruntée aux paroles du juge Valette à son greffier et désigne Robert Greslou disciple d’Adrien Sixte. Ce dernier recevra du magistrat deux autres appellations, intéressantes pour nous : « directeur spirituel du prévenu » (p.39) faisant écho à « vous, monsieur qu’il appelait son Maître, vous qu’il aimait tant » (p.70). de cet inventaire, on retiendra surtout la distribution des emplois : deux occurrences émanent de l’auteur lui-même, une est prise en charge par le narrateur, une autre est assurée par un personnage, lequel incarne la loi et le point de vue de la société sur le tandem maître-disciple, perçu comme une exception, une anomalie au regard des codes sociaux dominants. Ainsi, en quatre occurrences seulement, la ventilation des emplois et la diversité des voix qu’elle permet élargissentt le mot-titre du roman, et assurent au propos un large éventail de perceptions. Au sujet du mot « élève » et en excluant la citation qui nous occupe, une occurrence et une seule demeure (p.81). Elle se trouve à l’incipit du journal de Robert, en position seconde d’un parallélisme qui le confond avec le mot « disciple ». « Il existe de vous, le Maître illustre, à moi votre élève […] un lien que les hommes ne sauraient comprendre […] ». La présence du corollaire « Maître » suffit en effet à colorer son symétrique des connotations propres au terme de « disciple ». Ainsi donc, les deux occurrences du mot « élève » sont à prendre comme des équivalents sémantiques, reprises et reformulations du vocable « disciple ». Les deux termes, synonymes et interchangeables, composent un champ lexical de la relation de maîtrise. Tous les cas recensés réaffirment l’existence d’un rapport de maître à disciple, modèle du paradigme de la relation Greslou -Sixte.

attributions identitaires plaquées, fixées au dos de protagonistes autoproclamés (Robert s’impatronise disciple dans la solitude d’un enthousiasme intellectuel) ou bien désignés (Adrien Sixte est maître malgré lui »). Sur la forme, le laconisme et la simplicité du langage (vocabulaire très usuel, absence d’effet de style, syntaxe élémentaire du complément d’objet et de l’attribut du sujet) corroborent notre hypothèse. Peu de mots suffisent à l’extériorisation d’une croyance, et la formule lapidaire de Robert relève d’un acte de foi. La sincérité du personnage est la signature de son aliénation.

Il faudra revenir sur ce point de départ possible de la dialectique de maîtrise : son substrat imaginaire (sa cohorte de déconvenues, de désillusions) sur lequel elle repose – et vacille. Comment une base aussi peu tangible peut-elle être à l’origine d’une relation de maître à disciple ? Et dans quelle mesure ce qu’on appelle couramment affinités de l’esprit, connivences intellectuelles – ces finalités idéales de la maîtrise – sont-elles réévaluées dans notre corpus jusqu’à suggérer que, l’imaginaire conjugué des personnages et des romanciers aidant, elles ne sont peut-être rien de plus que miroirs aux alouettes et jeux de dupes…

Ainsi donc, consumé de lectures exclusives et mal dominées, sous le joug de la pensée d’autrui, un très intelligent et très jeune homme (une telle caractérisation constitue à soi seule un atout et un handicap : conjointement, une étonnante compréhension cognitive et une désolante immaturité affective) en vient à se persuader que l’auteur des livres dont il se nourrit avec passion ne peut être que son pareil, alter ego. Ce lecteur est Robert Greslou en mai 85. Novembre 85, six mois plus tard, le même personnage obtient la place de précepteur au château de Jussat-Randon, néglige l’enfant à ses soins confié, et jette son dévolu sur la sœur aînée de ce dernier, Charlotte, « une enfant de vingt ans ». Le journal de Greslou rapportera comment le jeune Lucien est alors instrumentalisé en intermédiaire dont Robert sait habilement tirer parti : « Mon élève était un garçon paresseux et lourd, qui n’avait qu’une qualité, celle d’être très simple, très confiant et de me raconter tout ce que je voulais bien entendre sur lui-même et les siens »65. C’est alors que commence un autre préceptorat – le seul que Robert ait réellement exercé, avec dans le rôle du maître Robert, et Charlotte dans celui du disciple. D’un côté, le pôle actif de l’action de maîtrise dans son instigation, sa conduite et sa résolution ; de l’autre, son symétrique passif, victime d’une aliénation faite d’une subordination et d’une subornation.

Cette manière de préceptorat sert de cadre romanesque et d’alibi démonstratif à une relation magistrale induite, conséquence et avatar du commerce livresque, domiciliaire et épistolaire naguère entretenu par Greslou et Sixte. Ce nouveau temps de l’emprise magistrale suppose donc révolue sa phrase précédente et préparatoire, à laquelle il succède et se substitue comme une variation magistrale. Avec la successivité de la narration coïncide la consécutivité du magistère. Le temps, agent de passage d’une relation de maîtrise à l’autre, réalise également une permutation identitaire :

[ma] résolution de séduire cette enfant sans l’aimer, par pure curiosité de psychologue, et […] moi aussi, d’y contempler à même et directement ce mécanisme des passions jusque-là étudié dans les livres […]66.

Cet extrait met en lumière un désir d’identification et la volonté d’un passage à l’acte. Le projet de Robert est caractéristique d’une forme d’émancipation du disciple. L’histoire de maîtrise ménage en effet le récit de la crise au cours duquel le pupille, longtemps maintenu sous l’empire et la férule du maître, veut enfin s’affranchir de cette tutelle, voler de ses propres ailes… même si cette libération est une autonomisation illusoire, puisqu’elle se résume ici à reproduire les pensées, faits et gestes de celui-là même dont on affirme vouloir se déprendre. Les questions que le « moi aussi » de Greslou (un tantinet revendicatif) déclenche sont multiples : la qualité de maître est-elle temporaire, révocable ? La requalification du disciple en maître passe-t-elle nécessairement par l’imitation du mentor ? Le disciple est-il successeur à venir ou doublure présente de son mentor ? Son supplanteur ou son supplétif ?... C’est parce qu’il a cru agir et penser en fonction de son mentor que Greslou s’est pris pour lui. L’admiration du lecteur s’est mise à nourrir l’imitation du disciple, et cette dernière s’est exacerbée en un désir fou d’identification magistrale. La collusion des deux identités (axiomatiquement distinctes) consomme donc la radicale rupture du pacte magistral ; elle démultiplie par ailleurs sur un autrui non lecteur (charlotte en « tiers instruit » en somme) l’impact de la théorie sixtienne. Le psychologue tainien avait-il prévu la gravité d’un tel enchaînement ?

Volonté d’un passage à l’acte, disions nous…

« Le mécanisme des passions » est la pierre angulaire des ouvrages d’Adrien Sixte, il est au cœur de son projet d’exploration et d’explicitation de l’âme humaine. Son lecteur et émule en a suivi tous les détours, toutes les finesses et les moindres subtilités, au point de s’être converti doublement au système et au théoricien, à la pensée et au

penseur ! L’étude livresque, Robert Greslou l’a entreprise et prolongée pour sa plus grande satisfaction intellectuelle, et peut-être même jusqu’aux limites d’une forme de satiété et d’ivresse. Le temps est donc venu d’un passage à l’action, d’une mise en application des connaissances accumulées par les lectures, acquises par le truchement d’un magistère dont le livre est l’unique médiateur. Ce qu’il a reçu du livre, Robert Greslou veut « l’injecter » dans le réel et l’expérimenter sur du vivant.

De la lecture à la réalité, la différence (abyssale) tient en un mot : l’absence du livre. Si entre Robert et Sixte les figures abstraites et induites du « disciple » et du « maître » se sont peu à peu construites au point de fonctionner comme des identités projetées et imaginaires, c’était en raison d’une expérience d’écriture et de lecture, pure activité du langage. C’est le livre et les perceptions fantasmatiques qu’il libère qui ont transformé un lycéen en disciple, et un philosophe en maître à penser. Aussi, l’activité de la lecture s’est-elle muée en une action de lecture. Avec elle, ce n’est pas tant l’appropriation du savoir que l’auteur dénonce : cet angle intellectuel ne retient guère l’attention de Bourget ; aux yeux d’un romancier-pédagogue, la performance d’intelligence d’un jeune homme doué compte peu, comparée aux abîmes d’égarement moral où cet exploit cognitif le plonge ! La monstruosité de la lecture se situe dans la dénaturation qu’elle installe chez celui qui s’y livre : l’invention du lecteur et de l’écrivain en figures magistro-discipulaires consacre la force d’une abstraction, l’attrait du désir d’être un autre et le triomphe d’une imposture.

Une lecture capable de mobiliser dans l’esprit de celui qui s’y livre un imaginaire relationnel redéfinit-elle le partenariat de lecture en un pacte de maîtrise67 ? Avec Robert Greslou et Charlotte, rien de tel : le contact magistral sera direct, immédiat ; à la fois inspiré du livre (il est la réminiscence, l’actualisation et la concrétisation du premier magistère), mais dépourvu du livre (Robert Greslou n’est pas écrivain, et Charlotte n’a rien d’une lectrice). L’expérience dont Robert Greslou prend l’initiative au château des Jussat-Randon est la conséquence, le retentissement d’une lecture aux enjeux démesurés et imprévus. Impunément (et la responsabilité du philosophe, alors ? Nous y reviendrons

67 Elément capital pour notre réflexion, si l’on songe qu’une semblable redistribution des rôles opère également entre Paul Bourget et son lecteur, le disciple lisant. La dialectique de maîtrise romanesque incluse dans la fiction est inséparable d’une autre maîtrise, référentielle celle-là et relevant du contexte littéraire des années 1890. C’est sur cette hypothèse du reste que se fondent les grands moments de notre travail. Et l’essentiel pour nous sera d’examiner comment les dialectiques du maître et du disciple repérées chez Bourget, Barrès et Gide toujours se dédoublent et engagent une réflexion (qu’est-ce que lire ? Qu’est-ce qu’un lecteur ? Qu’est-Qu’est-ce qu’un romancier ?), au cœur de Qu’est-ce que nous aimerions nommer le ROMAN-MAGISTERE.

avec Bourget, lui-même, accusateur d’Adrien Sixte), ce moment a mis en contact un jeune homme – plus impressionnable que perspicace, plus cérébral qu’intelligent – avec un système philosophique, une vision du monde et une conception de l’homme. L’expérimentation subséquente dont il est l’acteur est celle d’une substitution identitaire

qui a valeur de test : Robert s’applique le masque du maître et instrumentalise Charlotte pour vérifier la pertinence du système dont lui disciple s’est fait sa vérité, également pour se persuader de la consistance du nouveau personnage – « Adrien Sixte bis » - qu’il a décidé de revêtir. Sous la plume de Paul Bourget cette identification est rien moins qu’un larcin imputable à l’extrême jeunesse d’un personnage immature. L’exercice d’imitation magistrale auquel Robert Greslou se prête avec autant de méthode que d’inconscience est