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Connaissances sur la maturation expérimentale de la matière organique

3. Maturation artificielle des bitumes insolubles par pyrolyse en milieu fermé

3.1. Introduction

3.1.1. Connaissances sur la maturation expérimentale de la matière organique

Le système expérimental doit être "approprié" à l'environnement géologique qu'il est censé représenter. D'une façon générale, une plus grande précision des résultats exige un programme d’expérimentation de durée assez longue et le déroulement de la pyrolyse en milieu aqueux afin de simuler au mieux les conditions de la maturation en milieu naturel. Mais les analyses en pyrolyse sont aussi souvent utilisées comme des opérations de criblage destinées à obtenir des données globales sur le type d'évolution de certains échantillons de roches brutes.

Les deux méthodes mentionnées ci-dessus (Rock Eval et pyrolyse en milieu aqueux) fournissent deux exemples qu'il est intéressant de comparer, vu les conditions bien différentes sous lesquelles la pyrolyse est effectuée. La pyrolyse Rock Eval mime une pyrolyse en système ouvert, dans laquelle les produits thermolytiques sont entraînés vers un détecteur en ligne par du gaz inerte (habituellement l'azote). A l'inverse, dans la pyrolyse en milieu fermé, ou confiné, les produits de craquage primaire restent au sein du système et sont donc sujets à des réactions secondaires se développant pendant des durées de temps beaucoup plus longues que celles des temps de résidence des fluides dans le four du pyrolyseur Rock Eval (Schenk & Horsfield, 1993; Michels et al 1995; Ritter et al 1995; Vandenbroucke et al 1999 Lewan & Ruble, 2002 ;). Le maintien des produits secondaires au contact des produits résiduels est la cause d'une forte possibilité d'interactions entre les réactifs et les produits. Cela signifie que la composition du produit final dans la pyrolyse en milieu fermé ne ressemble pas du tout au produit résiduel dans le système ouvert. Bien entendu, la cinétique des transformations des réactifs est sensiblement différente dans chacun des systèmes, c'est-à-dire que le degré de conversion à une température donné n'est pas le même à l'issue d'une pyrolyse en milieu ouvert ou en milieu fermé. L'avantage respectif de chacune des deux méthodes est le sujet de discussions sans fin. Lewan & Ruble, (2002) ont mis en évidence en comparant les deux méthodes que, tandis que les paramètres cinétiques de la pyrolyse en système ouvert sont valides pour simuler la maturation de kérogènes de type II, ils ne fournissent pas de résultats satisfaisants pour le type IIS et le type I. Les paramètres cinétiques compositionnels obtenus à partir de la pyrolyse Rock Eval (simulant une évolution en milieu ouvert) pour des kérogènes du type IIS (Monterey et Naokekelan) semblent sous-estimer l'ampleur et le déroulement de la genèse du pétrole. Dans le cas des kérogènes du type I (schistes de Green River) la génération de pétrole est sévèrement surestimée en ce qui concerne son déroulement dans le temps et sa genèse.

Qu'elle est l'influence du choix du système de pyrolyse pour la simulation du comportement des pyrobitumes?. La pyrolyse en milieu ouvert (pyrolyse Rock-Eval) fournit un bilan massique raisonnable pour la transformation du kérogène et la genèse et destruction du pétrole. Pourtant le pourcentage des produits formés depuis le craquage des NSO dans la roche mère est très élevé, à cause des températures élevées et des basses pressions impliquées dans cette maturation artificielle. La formation des produits de la pyrolyse est dépendante du taux de chauffage et les rendements de la pyrolyse en système ouvert (Rock Eval) diminuent avec l'augmentation du taux de chauffage (Behar et al. 1992, 1997), ce qui est un paramètre en défaveur de la pyrolyse en milieu ouvert Ce comportement est attribué à la formation plus rapide de coke (par des réactions de cross-linking, favorisées dans les mélanges contenant des teneurs élevées en NSO) que les réactions de craquage thermique, à l'inverse de ce qui se passe dans la pyrolyse en milieu aqueux fermé. Par conséquent dans la pyrolyse en milieu fermé la composition des huiles formées apparaît plus proche ce celle des huiles naturelles (Thompson, 2002). Telle est la raison pour laquelle nous avons choisi de réaliser nos expériences de maturation thermique en milieu fermé

Les expériences décrites dans ce chapître évoquent le rôle de l'eau dans la pyrolyse. La présence de l'eau est un des principaux facteurs à prendre en compte dans la compréhension de la transformation thermique de la matière organique (Landais et al 1994; Michels et al 1995; Burnham et al 1997; Lewan, 1997; Schlepp et al 2001; Seewald, 2001a). Dans son article concernant le rôle de l'eau dans la formation des hydrocarbures, Lewan (1997) prouve que des réactions carbone-carbone de cross-linking constituent les réactions dominantes en l'absence d'eau, menant à la formation de grandes quantités de pyrobitumes. La présence de l'eau favorise des réactions de craquage thermique conduisant à un mélange enrichi en hydrocarbures liquides saturés, à cause de la disponibilité de l'hydrogène que sa dissociation est capable de libérer. La preuve expérimentale de ce processus réactionnel, qui met en jeu un des radicaux libres, a été obtenue dans des expériences de pyrolyse en milieu aqueux contenant des molécules de D2O (Lewan, 1997).

L'eau a été également citée en tant que source d'oxygène dans la formation d'acides carboxyliques et d’autres espèces oxygénées dans le pétrole (Seewald, 1994, 2001b; Stalker et

al 1993). Bien que l'eau soit un composant significatif dans des expériences de génération

artificielle d'huile, Lewan démontre que l'interaction entre l'eau et les espèces organiques n'est pas liée à la solubilité de l'eau dans les hydrocarbures. Cette vue n'est pas communément adoptée. D'autres auteurs ont, en effet, indiqué que la solubilité de l'eau est un facteur

important régissant les interactions entre les phases aqueuse et organiques. Quoiqu'il en soit de la forme de l'eau dans le milieu, , il est clair que l’eau semble jouer un rôle important dans la composition des produits formés pendant la maturation thermique du kérogène.

Michels et al (1995) ont étudié l'influence de la pression des effluents et de l’eau sur la genèse artificielle d'huile. Leurs résultats confirment ceux de Lewan (1997), c'est-à-dire, qu'en présence d'eau, ne se forme pas de bitume et que la composition des effluents est affectée par la présence de l'eau. Ainsi, si, seule, la pression ne semble pas exercer une grande influence sur la cinétique de génération et sur la composition de bitumes, la présence, ou l'absence, d'eau dans le milieu réactionnel est importante (Landais et al. 1994).

Nous considérons que, bien qu'expérimentant avec des hydrocarbures liquides et non avec des kérogènes, les principes et les réactions sur lesquels les arguments ci-dessus sont basés, restent sont néanmoins valables.