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Conclusions et Discussion

III. Schéma de contrôle biomimétique tiré de la littérature comportementale

5. Conclusions et Discussion

Nous avons vu dans ce chapitre l’établissement d’une architecture de contrôle inspirée du comportement de l’homme, tant du niveau comportemental que structurel et computationnel. Nous avons appliqué les consignes articulaires générées par cette architecture au site expérimental, constitué d’un robot porteur 6 ddl (Atteinte) et d’une main articulée à 16ddl contrôlables (Saisie), et soulevé avec succès 8 objets différents, placés à plusieurs endroits de la table et suivant plusieurs orientations.

Cette architecture entre dans la catégorie des « approches empiriques basées sur les objets »(El- Khoury, Sahbani et Bidaud 2011) qui diffère des solutions analytiques basées sur des techniques d’optimisation mais aussi des approches empiriques basées sur l’étude du comportement humain, bien que la frontière avec cette dernière catégorie soit assez fine du fait que la plupart des lois que nous avons utilisées pour l’apprentissage sont tirées de telles études. On citera d’ailleurs le travail de Rezzoug et Gorce (Rezzoug et Gorce 2008), qui utilisent des réseaux de neurones artificiels pour apprendre le modèle géométrique inverse de la main en s’appuyant sur des enregistrements réalisés à l’aide d’un gant instrumenté. Dans une démarche similaire à la nôtre ils ont utilisé une procédure d’appariement plutôt qu’une résolution explicite de la géométrie inverse et ont divisé cette mise en correspondance entre plusieurs réseaux, chacun apprenant un sous-espace des solutions. Cependant ils n’ont pas montré d’application de ce système s’appuyant sur les caractéristiques de l’objet à saisir.

Enfin, et même cela n’a pas encore été testé, de par la souplesse de l’algorithme LWPR et la hiérarchisation que nous avons mis en place nous attendons de notre système une bonne adaptabilité quant à son application à d’autres mains mécaniques, puisque seules les unités d’appariement du sous-système dédié à la Saisie auraient besoin d’une mise à jour du modèle cinématique qu’elles ont appris ; cela ne changerait rien pour les autres sous-systèmes, qui pourraient donc être utilisés directement.

a. Etude comparée avec d’autres approches similaires

D’autres systèmes de configuration de prise prenant appui sur une connaissance empirique des caractéristiques de l’objet à saisir ont été proposés par Baysal and Erkmen (Baysal 2010), Pelossof et al.(Pelossof, et al. 2004), Gazeau et al. (J. P. Gazeau, S. Zeghloul, et al. 2007), Li et al. (Li, Fu et Pollard 2007) et d’autres encore. Pour chacun de ses générateurs de prises nous pouvons trouver des points de convergence et d’autres de divergence avec notre système.

Premièrement, la méthode d’appariement diffère dans les cinq cas : analyse de base de données (Li, Fu et Pollard 2007), algorithmes génétiques (J. P. Gazeau, S. Zeghloul, et al. 2007), SVM (Pelossof, et al. 2004), réseau de neurone en entrée d’un système à logique floue (Baysal 2010), et enfin l’algorithme LWPR pour ce qui nous concerne (Touvet, et al. 2011).

Ensuite, si les cinq systèmes fournissent une configuration de saisie basée sut les caractéristiques de l’objet, et ce du point de vue des paramètres cinématiques seuls (Rezzoug et Gorce 2008, Touvet, et al. 2011) ou en liaison avec les paramètres dynamiques (Baysal 2010, Pelossof, et al. 2004, Li, Fu et Pollard 2007, J. P. Gazeau, S. Zeghloul, et al. 2007), seule notre approche ne passe pas par un étage d’optimisation de critère de saisie mais utilise directement les données propres à l’objet.

En troisième lieu, seules notre approche et celle de Li et al. (Li, Fu et Pollard 2007) prennent en considération l’orientation de la main par rapport à l’objet dans la phase d’approche, alors que les

Enfin, la plupart de ces études n’ont été évaluées qu’en simulation alors que la nôtre ainsi que celle de Gazeau et al. (J. P. Gazeau, S. Zeghloul, et al. 2007) ont été implémentées dans un système physique, ce qui garantit leur applicabilité sur le terrain.

b. Atteinte

La contribution principale de notre travail concernant la phase d’approche a été d’intégrer de manière active l’orientation de la main dans son positionnement. En effet, la saisie humaine est caractérisée par un décalage par rapport au centre de l’objet tant du point de vue de l’orientation que de la position, et ces deux composantes sont d’égale importance dans le succès de notre préhension. Si l’on place la main suivant une orientation nulle (c’est-à-dire avec les différents plans de la paume orientée parallèlement à ceux de l’objet) le placement des doigts sur l’objet donne une configuration à la fois non-naturelle et non efficace, tandis qu’une simple élévation de la main dégage le pouce et permet une saisie souple et de bonne qualité, plaçant les articulations des doigts loin de leurs butées. Ce type de configuration correspond à la stratégie utilisée par l’homme pour adapter la conformation de sa main aux dimensions de l’objet (Cesari et Newell 1999, Santello et Soechting 1998) et se doit d’être appliquée sur toute main artificielle dont la structure est bio- inspirée.

Figure III-28. Importance de l’orientation de la main sur la configuration du pouce.

a) La paume est placée horizontalement, ses trois plans sont parallèles à ceux de l’objet ; le pouce est recroquevillé et sa force de serrage s’applique en un point qui serait situé sur l’ongle chez l’homme b) L’orientation de la main permet de dégager le pouce et les doigts, et ainsi de répartir de manière plus efficace

les forces appliquées ; le tout résulte dans une prise de meilleure qualité

c. Saisie

Pour ce qui est de la phase de saisie, notre contribution a été de proposer une solution innovante à un problème impliquant une structure redondante de 16ddl (et ce même en considérant chaque doigt comme une unité indépendante), non pas en s’attachant à résoudre le problème géométrique inverse de la main mais en en construisant une approximation implicite à partir du modèle direct. A la différence d’une approche conventionnelle visant à optimiser le positionnement des doigts sur l’objet en vue de satisfaire un critère mathématique de qualité de prise (Bicchi 2002, Bicchi et Kumar, 2002, Okamura, Smaby et Cutkosky 2000), la performance de notre architecture va dépendre directement des lois utilisées lors de la phase d’apprentissage et des capacités de convergence et de généralisation des MUs qui la composent. Le fait d’utiliser de multiples unités d’appariement pour la construction de cette approximation sur l’espace de travail complet des doigts présente deux avantages. Premièrement nous évitons le problème posé par la redondance du système et la nécessaire résolution de ce problème pendant la phase d’exécution du mouvement, ce qui peut s’avérer coûteux en termes de ressources de calcul. Ensuite les données utilisées pour construire les nuages de points utilisés durant la phase d’apprentissage peuvent être aussi bien générées synthétiquement (comme ce fut le cas jusqu’à présent) que mesurées sur l’homme à l’aide d’un gant instrumenté (pour ce qui est de la configuration articulaire des doigts) couplé à un système de capture de mouvement (pour ce qui est de la position 3D de la main, voir CHAP V).

Comme cette phase d’apprentissage de nos MUs s’effectue entièrement hors-ligne, les différences dans leur nombre entre l’architecture développée précédemment (Eskiizmirliler, Maier, et al. 2006, Zollo, Eskiizmirliler, et al. 2008) et celle que nous venons de présenter ne peuvent pas être considérées comme un critère de performance en cela qu’elles n’influent en rien sur la phase d’exécution. En l’occurrence, l’utilisation d’un nombre important d’unités a permis de réduire de manière significative leurs nombre respectifs de champs récepteurs (voir les cinq dernières lignes du Tableau III-3) à travers l’apprentissage de données plus locales (et donc présentant une erreur relative plus faible) et par là-même de faciliter la convergence de ces unités et leur capacité de généralisation.

d. Vers une saisie « naturelle »

Lors des différentes campagnes d’essais nous avons aussi procédé à des saisies « naturelles », c’est-à- dire où nous laissions le système choisir l’orientation la plus adaptée selon lui à la saisie de l’objet entre une prise « du dessus » et « de côté » (voir la définition de la règle d’apprentissage de la MU8, section 3, d), ii)). Ces prises ont présenté des résultats variables en fonction des objets :

 prise efficace pour les sphères, similaire à celles obtenues dans les configurations forcées ;  prise de qualité passable pour les parallélépipèdes : seulement le majeur en contact avec

l’objet en plus du pouce ;

 prise non-efficace pour les cylindres.

La raison principale de ces résultats tient à la détermination de la position d’atteinte par les MUs 10 à 12 ; en effet celles-ci ne prennent pas en compte l’orientation de la paume par rapport à l’objet mais