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Dans ce chapitre, nous avons développé une méthode efficace de footprinting basée sur la détection et la quantification de radicaux sur les protéines, qui a permis d’identifier les acides aminés d’un peptide impliqué dans une interaction avec une protéine. En effet, les trois principaux acides aminés (L126, R129, I130) de l’hélice α3 de l’histone H3, impliqués dans une interaction hydrophobe avec hAsf11-156, ont été caractérisés grâce à une diminution de l’incorporation en radioactivité de ces résidus lors de la formation du complexe. Notre approche permet également d’identifier les résidus moins accessibles suite à la formation d’une structure secondaire. En effet, l’activité spécifique du résidu R128, situé en dehors de la zone d’interaction, a diminuée lors du repliement de H3122-135 en hélice α au contact de la

protéine hAsf11-156. Toutefois, les résidus K122 et R134 restant partiellement accessibles au solvant lors de la formation du complexe n’ont pas été détectés par notre méthode.

Les premiers essais sur la caractérisation des résidus de la protéine hAsf1-156 ont été très encourageants et positifs. En effet, l’activité spécifique de R145 un résidu secondaire de l’interaction entre hAsf11-156 et H3122-135, a diminué de moitié lors de l’interaction. L’étude a surtout permis de montrer que des résidus qui ne sont pas en interaction ne présentent pas de différence significative d’incorporation de tritium. Toutefois, tous ces résultats très positifs sur les résidus de hAsf1-156 sont à confirmer.

Parmi les trois peptides de hAsf11-156 et du peptide H3122-135, un total de 44 acides aminés a été analysé pour la méthode RMN et notre méthode d’échange 1H/3H, et de 40 pour l’étude cristallographique. Le nombre d’acides aminés détectés en interaction ou non dans le complexe est représenté dans le tableau III-1 pour chacune des méthodes.

Nombre d’acides aminés détectés Données cristallographiques Données RMN Données Echange 1 H/3H Commentaires Asf1 + H3 35 34 35 Hors interaction H3 NC 4 4 Etiquette GAMG Interaction principale H3 3 3 3 L126, R129, I130 H3 1 K122 2 K122 R134 0 Interaction secondaire Asf1 1 R145 1 R145 (1)* R145 * à confirmer Repliement de H3 NC NC 1 R128 Hélice α3

Tableau III-1 Récapitulatif du nombre de résidus de H3122-135 et de hAsf11-156 identifiés comme étant en

Ce tableau indique que notre méthode permet tout comme les deux études structurales l’identification des trois résidus principaux de H3 en interaction avec hAsf11-156. Tous les résidus qui ne sont pas en interaction (34 ou 35 + 4) sont identifiés comme tels avec notre méthode, à l’exception du résidu R128 impliqué dans une structure secondaire.

Lors des prochaines expériences, deux points essentiels seront à démontrer. Tout d’abord, les résidus de la protéine hAsf11-156 qui sont en interaction avec H3122-135 devront être caractérisés. Puis, l’intégrité de la structure de la protéine devra être contrôlée en réalisant du dichroïsme circulaire. Une première expérience de dichroïsme circulaire sur l’apomyoglobine a montré que la protéine restait à l’état natif après irradiation (Figure V-21 en annexe). Toutefois, en toute rigueur, un spectre de dichroïsme circulaire devra aussi être fait sur la protéine hAsf11-156.

Conclusion générale

Au cours de ce travail, nous avons développé une nouvelle méthode pour la caractérisation des interactions protéine–ligand. Cette stratégie s’appuie sur la différence d’accessibilité des acides aminés à l’eau pour le partenaire seul en comparaison avec le partenaire dans l’interaction.

Le principe de cette méthode est basé sur deux étapes clés :

- la génération de radicaux carbo-centrés sur les chaînes latérales des acides aminés de la protéine.

- la réparation de ces radicaux par un atome de tritium.

Dans un premier chapitre, la mise au point de cette méthode est décrite d’abord sur les acides aminés isolés, puis sur de petits peptides. Ce travail nous a permis dans un premier temps de déterminer la réactivité de chaque acide aminé isolé vis-à-vis des radicaux hydroxyle et de l’agent de réparation tritié (3H-BPASS) en milieu anaérobie. L’ordre de réactivité obtenu est le suivant :

Lys>Leu>Arg>Ile>Trp>Phe>Val>Cys>Met>His>Tyr>Glu>Thr>Asp>Gln>Pro>Ala>Asn>Ser>Gly

Cette échelle est tout à fait en accord avec les résultats obtenus par la méthode similaire utilisant le DTT dans l’eau lourde de l’équipe d’Anderson.

Nous avons ensuite étendu cette étude à de petits peptides non structurés. Nous avons mis en évidence qu’un même acide aminé ne présentait pas la même réactivité en fonction de sa position dans la séquence peptidique. Ces résultats renforcent des observations récentes montrant des effets liés aux résidus ou groupements voisins [240, 253].

Nous avons choisi d’appliquer ensuite cette stratégie à la caractérisation des interactions protéine–protéine et de l’appliquer au complexe formé entre la protéine hAsf11-156 et le fragment 122-135 de l’histone H3. Cette première étude a permis de caractériser sans

ambiguïté les trois résidus principaux (L126, R129 et I130) impliqués dans l’interaction hydrophobe et ionique.

Cependant, les résidus qui restent partiellement accessibles lors de l’interaction ou qui sont situés dans des zones flexibles de l’interaction (K122 et R134) ne sont pas clairement identifiés. Par contre, notre méthode permet également de mettre en évidence la différence d’accessibilité au solvant d’un résidu liée à des effets de repliement du peptide en hélice α. Notre méthode de caractérisation des interactions protéiques est donc à la fois sensible aux phénomènes d’interaction et de repliement.

En ce qui concerne la protéine Asf1 les premiers résultats sont encourageants. En effet, sur trois peptides non impliqués dans l’interaction, nous n’avons pas observé de différence significative d’incorporation de tritium.

Plusieurs perspectives se dégagent de ces travaux.

Tout d’abord, il serait intéressant de développer de nouveaux donneurs de tritium afin d’augmenter le panel de radicaux facilement détectables par notre méthode. La chimie a le pouvoir de permettre de synthétiser toute une gamme de composés de fonctions variées. Ainsi, des agents réparateur de différentes tailles, chargés négativement ou positivement pourraient être obtenus, et faciliter le marquage de tel ou tel acide aminé, notamment des acides aminés aromatiques.

Ensuite, afin d’être complet pour cette étude, il est nécessaire de caractériser les acides aminés de la protéine hAsf11-156 en interaction avec le peptide H3122-135. Il serait également intéressant de réaliser la même étude sur le complexe entier de hAsf1–H3/H4. De plus, la protéine Asf1 possédant de nombreuses fonctions et de nombreuses protéines partenaires, l’étude d’autres complexes l’impliquant est à envisager. Tout d’abord sur des complexes dont la structure est connue (HirA par exemple) puis sur d’autres complexes peu ou pas caractérisés. Finalement la transposition de notre méthode à la caractérisation des interactions de type protéine–lipide ou protéine–ADN est également envisageable.

Enfin, notre méthode étant directement basée sur la caractérisation de l’accessibilité au solvant des acides aminés d’une protéine, il devrait être possible de l’utiliser pour réaliser des cartographies de surface de protéines une fois les effets de voisins mieux caractérisés.

En conclusion, notre approche devrait s’inscrire comme une méthode alternative aux autres techniques de « footprinting ». En effet, notre méthode permet en théorie d’étudier de larges complexes à une résolution de l’acide aminé. Notre technique permet d’obtenir sans modification de structure, une couverture de surface des protéines au moins égale à celle du « footprinting par oxydation » par les radicaux hydroxyle.

Les informations de surface apportées par notre méthode peuvent refléter à la fois des phénomènes d’interaction, des phénomènes de repliement mais aussi des changements de conformation. L’utilisation en combinaison de méthodes de modélisation moléculaire devrait permettre de différencier ces phénomènes et d’obtenir des structures de complexes de basses résolutions. Notre méthode pourra être utilisé de manière complémentaire à des techniques plus résolutives comme la RMN, en apportant des informations au niveau de l’acide aminé en interaction. Des études de mutagenèse pourront être entreprises pour valider l’importance des résidus acides aminés détectés dans l’interaction. Notre méthode développée sur la caractérisation de l’interface entre hAsf11-156 et H3122-135 est donc une méthode alternative aux méthodes de basse résolution et complémentaire des méthodes telles la RMN et la cristallographie pour la détection des acides aminés en interaction.