• Aucun résultat trouvé

Les données thermiques analysées aux sites présentés ont permis de tirer des conclusions quant à l’effet de l’albédo de la surface sur les températures superficielles des revêtements routiers. L’albédo a une influence notable sur la température en surface et donc sur les températures du sol sous-jacent. Les surfaces à albédo élevé permettent de diminuer l’absorption de la chaleur par la radiation solaire et leur effet est plus marqué à de basses latitudes, là où la radiation solaire est plus importante. Les observations ont permis d’établir que l’albédo de la surface influence considérablement les températures du sol en période de dégel, alors que la radiation solaire incidente moyenne annuelle atteint des valeurs élevées. Les facteurs-nt 5 cm calculés des surfaces revêtues non protégées varient

entre 1,6 et 1,8 pour des albédos de surface situés entre 0,09 et 0,13. Les résultats calculés provenant des surfaces à albédo élevé présentent des facteurs-nt 5 cm variant entre 1,3 à 1,6 pour des albédos

situés entre 0,28 et 0,60, sans tenir compte de la surface AP SG installée au site de Burwash Landing. La différence entre le facteur-nt 5cm* et l’albédo de la surface est plus importante au SÉRUL

comparativement aux sites de Burwash Landing et de Salluit localisés à de hautes latitudes. D’une part, puisque l’angle d’incidence est plus faible, ensuite puisque la période analysée est incomplète et comprend la période la plus chaude de l’été, où la radiation solaire est la plus élevée. En augmentant l’albédo de la surface, le facteur-nt 5 cm calculé aux différents sites diminue selon une relation linéaire,

par conséquent, la température superficielle du revêtement routier diminue également. Ainsi, lorsque la température de l’air est au-dessus de 0 °C, la température superficielle à la surface des revêtements

à albédo élevé est plus basse que la température superficielle des sections exemptes de technique de protection.

En période de gel, l’effet de l’albédo de la surface sur la température superficielle du revêtement est diminué. D’abord, car une mince couche de neige et de glace couvre les revêtements routiers, ce qui a pour effet d’uniformiser l’albédo de la surface, mais aussi, car la radiation solaire incidente est plus faible qu’en période de dégel. Les facteurs-nf 5 cm calculés à partir des données de la planche

expérimentale de Burwash Landing se situaient entre 1,00 et 1,13 la première année et entre 1,09 et 1,14 la deuxième année. Le facteur-nf 5 cm le plus faible a été obtenu par la section témoin. Comme

expliqué précédemment, une température du sol plus froide que la température de l’air observée pendant la période hivernale peut être attribuée à la distance notable de la station météorologique par rapport au site d’essais (située à plus de 80 km au sud-est du site). Également, les résultats provenant de la planche expérimentale de Salluit démontrent des valeurs similaires entres-elles et les facteurs- nf 5 cm obtenus varient entre 0,88 et 0,90. Pour les deux sites énumérés, les facteurs-nf 5 cm calculés des

surfaces à albédo élevé sont tous plus élevés que ceux calculés des sections témoins. Ainsi, lorsque la température de l’air est moins de 0 °C, la température superficielle à la surface des revêtements à albédo élevé est en moyenne plus basse que la température superficielle des sections témoins, démontrant que cette technique apporte une certaine efficacité en période hivernale.

Finalement, à Burwash Landing, en zone de pergélisol discontinu, un gain thermique de plus de 1 °C a été observé sur une période annuelle entre les températures du sol sous la section témoin et la section ayant l’albédo le plus élevé. À Salluit, en zone de pergélisol continu, la différence était moindre, soit de -0,7 °C près de la surface et de -0,4 °C à une profondeur de 76 cm sous le revêtement routier. Cette observation peut être expliquée par le temps généralement nuageux à Salluit. Il n’a pas été possible de confirmer cette observation puisque les données de radiation solaire provenant de la station SALSIL2 présentent des erreurs dû à la calibration inexacte du capteur et n’ont pu être présentées. Pour conclure, les surfaces à albédo élevé permettent de diminuer efficacement la température superficielle et jusqu’à 1 m de profondeur sous un revêtement routier.

MODÈLE THERMIQUE

La conception de remblais routiers en région nordique doit être adaptée aux considérations thermiques caractéristiques du site afin de préserver le pergélisol. Il est désormais nécessaire d’incorporer une approche développée sur le risque afin d’intégrer les changements climatiques à la conception d’infrastructures (McGregor et al., 2010). En utilisant le scénario 2 du modèle CGCM2 (CCCma, 2006), Ciro et Alfaro (2005) ont modélisé l’effet du réchauffement climatique sur le régime thermique du pergélisol situé sous un remblai routier. Les conclusions de cette étude démontrent qu’un réchauffement important de la température de l’air entraine une dégradation du pergélisol sous le remblai ainsi qu’un dégel important du sol sous-jacent après une période de 20 ans. Une simplification du modèle de Ciro et Alfaro (2005) a permis d’évaluer l’effet de l’utilisation d’un remblai à convection d’air sur le régime thermique du pergélisol (Arenson et al., 2006). La durée de vie de la conception du remblai est prolongée puisque l’utilisation d’un remblai à convection d’air prévient le dégel du pergélisol. Le modèle thermique développé par Arenson et al. (2006) supporte une approche de conception optimisée d’un remblai convectif. Également, l’effet de la construction d’un remblai routier sur le régime thermique a été étudié par Darrow (2011) au moyen d’une analyse de sensibilité des variables d’entrée. Le modèle de Darrow (2011) surestime la profondeur de dégel sous le remblai routier, ce qui en fait un modèle conservateur en prenant en compte le réchauffement climatique. Selon Darrow (2011), la condition limite à la surface est celle ayant le plus d’influence sur le régime thermique modélisé. Ciro et Alfaro (2005), Arenson et al. (2006) et Darrow (2011) ont tous utilisé un facteur-n appliqué à la distribution sinusoïdale de la température de l’air comme condition limite à la surface. L’approche de modélisation proposée dans le cadre du projet de recherche ouvre la voie sur l’utilisation du bilan d’énergie simplifié par la méthode d’analyse développée par Dumais (2014) comme condition à la limite supérieure.

De plus, Ma et al. (2017) ont proposé un modèle thermique basé sur la méthode des éléments finis dans le but d’analyser la stabilité du remblai selon différentes géométries. Une des conclusions de

l’étude affirme que le rehaussement du remblai permet d’améliorer le régime thermique du sol sous- jacent, par contre, il ne permet pas de limiter la dégradation du pergélisol. Les résultats modélisés démontrent une diminution de la profondeur de dégel sous l’axe central de la chaussée lors de l’augmentation de la hauteur du remblai, mais l’amplitude des tassements dû au dégel reste inchangée (Ma et al., 2017). Conséquemment, la profondeur de dégel n’est pas utilisée comme critère de conception dans le cadre du projet de recherche puisqu’elle n’est pas représentative de l’atteinte d’une stabilité thermique. L’approche du modèle thermique développé se base sur un décalage thermique en profondeur requis pour obtenir un gradient de température nul entre la température à l’interface remblai/sol naturel et la température du pergélisol. Cette approche est expliquée plus en détail dans cette section.

Les modélisations numériques décrites dans cette section ont été effectuées par la méthode des éléments finis à l’aide de la suite GéoStudio 2016. Le module TEMP/W permet de modéliser les transferts de chaleur par conduction dans un sol en régime transitoire et la version utilisée est celle lancée en août 2016 (8.16.1.13452). Le site choisi pour valider le modèle est celui de Beaver Creek, puisqu’il est instrumenté à des profondeurs considérables et que les températures du sol ont été enregistrées depuis plusieurs années. De plus, une des sections installées utilise des granulats clairs et est considérée comme un revêtement à albédo élevé. Une description du site de Beaver Creek, les paramètres utilisés pour le développement du modèle thermique et la validation du modèle sont présentés dans cette section.