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Conclusion de la première partie

Au troisième millénaire, les sociétés humaines semblent s'être irréversiblement engagées dans la voie d'une interdépendance accrue. On en voit un exemple tout à fait spectaculaire dans le secteur financier, qui a connu des changements structurels considérables, en particulier dans les domaines suivants :

· Le progrès technologique, notamment dans le domaine des ordinateurs et de la télécommunication, qui a permis, grâce à une multiplication extraordinaire des capacités de mémoire, de traitement de l'information et de l'instantanéïté des opérations, de réaliser des réductions de coûts spectaculaires ;

· La croissance de l'épargne mobilisée par des institutions non bancaires (fonds de pension, compagnies d'assurance, trésoriers des sociétés, gérants de fortune, etc) qui ont tous un intérêt dans le marché des valeurs ;

· La poussée de l'innovation, avec une diversification et une complexité accrue des produits financiers et des méthodes de transaction qu'offre aujourd'hui le système financier international ;

· La libéralisation ou la déréglementation par les gouvernements du secteur des services financiers, qui s'est traduite par une forte mobilité du capital et un attisement de la concurrence entre banques et non banques tant au niveau national que transnational (66). Pour certains protagonistes, les innovations financières ont répondu de façon idéale aux besoins existants en offrant une couverture contre le risque et en permettant d'élargir la compétition sur les produits au niveau mondial. Pour d'autres, ces innovations se sont essentiellement traduites par une incertitude accrue, une complexité plus marquée des relations financières et une augmentation injustifiée des coûts pour certains utilisateurs de services financiers. Dans une interprétation toute nouvelle de la situation, un responsable d’une banque universelle a pu soutenir en toute logique que l’innovation financière est aussi importante à l’activité bancaire que la recherche et le développement pour d'autres industries. Si les nouveaux instruments financiers représentent une source de dangers et de pertes potentielles, la faute en revient à l'inexpérience des utilisateurs, toujours d'après ce même responsable.

Parmi les idées forces des responsables des politiques monétaires et des dirigeants d'entreprises financières, on remarquera tout particulièrement les suivantes :

· Le paradigme traditionnel qui veut que la réussite bancaire soit due essentiellement à des attitudes conservatrices s'est vu opposer le paradigme concurrent de l'esprit d'entreprise en matière bancaire. Il faut bien sûr arriver à trouver un équilibre judicieux entre ces deux extrêmes, en évitant ainsi les excès d'une attitude passive dans la première approche et aventuriste dans la deuxième. C'est ici qu'interviennent les qualités supérieures de jugement et de leardership, qui savent associer les innovations de valeur avec une attitude de prudence adéquate.

· Des erreurs collectives de jugement dans le domaine de la finance internationale, et notamment dans le cadre de la crise de la dette extérieure, révélent aujourd'hui la nécessité de la coopération internationale pour éviter qu'elles ne se reproduisent. Les gouvernements créanciers et débiteurs, les institutions officielles nationales ou multilatérales et les institutions financières commerciales ont tous leur rôle à jouer dans la solution du problème. On reconnaît d'une façon générale que le financement à court terme des banques commerciales devrait se soucier avant tout du financement des échanges. · Il est à prévoir qu'une élite des sociétés de services financiers se développera encore à

l'échelle globale au cours des années à venir, avec la possibilité de fonctionner pratiquement 24 heures sur 24 partout dans le monde où existent des réseaux de communication fiables, de fournir la plupart, sinon la totalité, des services financiers nécessaires aux institutions et aux particuliers et de maintenir une large couverture de capital pour permettre ces opérations et cette expansion.

· Les autorités monétaires des pays à économie de marché ne peuvent pas atteindre leurs objectifs en agissant seules. Il est indispensable qu'elles coopèrent, surtout dans un contexte économique mondial de plus en plus caractérisé par l'interdépendance. Cette coopération devra également prendre en compte les grandes institutions financières non bancaires, au vu de leur dimension et de leur impact.

« La banque est une chose trop sérieuse pour qu'on la laisse aux banquiers ou aux non banquiers ». C'est la raison pour laquelle les pouvoirs publics (les banques centrales et les organismes de surveillance) ont l'important devoir de coopérer pour protéger le système financier global afin de réduire les causes et l'étendue des incertitudes et des risques qui pèsent sur l'économie mondiale.

Un développement des échanges de points de vue et de connaissances, et la concertation entre les pouvoirs publics et le secteur privé s'imposent.

Cette coopération devrait être compatible avec un environnement libéral des affaires dans lequel les forces du marché et l'imagination permettent de mieux répondre à l'évolution des besoins.

La tendance courante à la globalisation, à la libéralisation, au traitement et à la diffusion rapides des informations constitue, un encouragement à l'accroissement de la créativité et de l'efficacité. Une concurrence loyale et prudente dans le secteur financier et dans les autres secteurs de l'économie mondiale pourrait, à long terme, constituer un puissant moteur de changement et de progrès.

Les restructurations renforceront l’industrie bancaire, ainsi que ses nouveaux métiers (67). Les consolidations en Europe sont en train de conforter l’intermédiation bancaire. Le recentrage sur les métiers de base et le renforcement de la BFI par des rachats de filiales et des regroupements montrent que l'intermédiation financière est loin de régresser en Europe. Elle prend en fait d'autres voies mais s'appuie toujours sur les banques. L'idée d'une forte désintermédiation financière, qui serait le résultat du recul des intermédiaires financiers vis-à-vis des marchés, est aujourd'hui dépassée. Grâce aux nouveaux métiers qu'elles développent, les banques demeurent l'élément central des systèmes financiers modernes. Elles offrent des crédits et souscrivent aussi des titres. C'est aussi par le canal bancaire que sont distribués les OPCVM et autres produits d'assurance-vie. Cette évolution signifie que les marchés d'actifs en Europe sont de plus en plus des marchés d'intermédiaires financiers. Les banques adaptent donc leurs métiers et leurs compétences en renforçant leur présence sur les compartiments obligataires et actions. Cette présence accrue apparaît de chaque côté du marché : du côté de l'offre, à travers les émissions des banques et du côté de la demande, à travers le comportement des investisseurs institutionnels.

L’opposition entre les systèmes financiers fondés sur la banque et les systèmes financiers fondés sur le marché financier peut être considérée comme une présentation didactique intéressante. Cependant elle ne suffit pas à rendre compte des véritables différences entre les systèmes des grands pays développés. Malgré les nombreuses pressions à la convergence au sein des pays européens entre eux, notamment en matière comptable, les systèmes bancaires nationaux restent encore largement spécifiques. Cela signifie que le modèle de la banque européenne n'évoluera pas nécessairement vers un modèle anglo-saxon.

Les banques en Europe suivront leurs propres trajectoires tracées par la présence d'une culture séculaire et d'une histoire qui a marqué les grands groupes bancaires. Il importe donc de reconnaitre l'hétérogénéité des systèmes bancaires en fonction de leurs spécificités et de leur histoire. Cependant, l'internationalisation des métiers et des marchés - notamment dans la BFI et dans la banque de détail à l'étranger – impose l'adoption de méthodes de travail, de normes comptables et prudentielles ainsi qu'un savoir-faire qui s'insèrent dans une culture internationale désormais commune de la banque et de la finance et qui contribuent au développement de la nouvelle banque.