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Conclusion de la partie théorique

Dans cette première partie de notre étude, nous avons emprunté un chemin d’écriture fait de détours théoriques, d’explorations au cœur de la grammaire, tout près du sujet, avec le langage, et fait de rencontres avec les adolescents.

De l’histoire des Hommes à celle de l’individu, l’écriture s’inscrit dans l’histoire du Sujet et permet d’inscrire le Sujet dans l’histoire. L’écriture lui permet de laisser une trace de lui, fait acte de mémoire. Elle structure aussi son rapport au monde . Mais surtout, le pouvoir symbolique de l’écriture permet la représentation du réel et de l’imaginaire en facilitant le passage d’un registre à l’autre.

L’écriture lie les Hommes par la communication tout en permettant au sujet de se séparer, s’individualiser, affirmer son originalité. En permettant de mettre à distance les éprouvés immédiats, l’écrit permet d’apprivoiser le réel. Pour jouir de ces différents pouvoirs permis par l’écrit, il faut aussi accepter l’idée de la perte. Perdre « la foule de possibilités d’expression au profit du code admis et considéré par l’adulte comme seul possible »55, concilier ce que l’ont veut dire et comment on peut bien le dire pour être entendu.

Il faudra alors accepter la règle commune pour que le message puisse être compris !

« Je n’ai jamais appris à écrire » disait Aragon56. L’entrée dans l’écrit, si entrée

il y a, serait l’introduction du sujet dans et par le langage.

L’acquisition du système orthographique se fait bien avant l’entrée à l’école. Les enfants n’arrivent pas vierges de tout savoir. Passant du stade logographique à l’étape idéographique, l’enfant découvre un système arbitraire et la permanence de la trace. Il saisit progressivement les correspondances entre trace écrite et système phonémique et affine la qualité de son graphisme au fur et à mesure que son intention de communication par l’écrit s’affirme. Le processus de symbolisation qui est à la fois

55 C. CHASSAGNY, op. cit. 56 L ARAGON op. cit.

92 « permis par » et « nécessaire à » l’acte d’écriture, rend possible la structuration de la personnalité du petit enfant, se constituant en tant que sujet.

Cette affirmation progressive du statut de sujet et vue différemment selon les auteurs ; stades de développement chez Piaget, approche psycho-dynamique chez Freud… De Lacan à Piaget, de Freud à Wallon, c’est bien le lien, la relation à l’autre, la séparation, l’affectivité qui permettent cette subjectivité.

La situation d’énonciation permet une altérité vraie, des échanges

authentiques ; c’est en son sein que se construit le sujet. E. Benveniste a souligné dans Problème de linguistique générale que la conscience de soi n’est possible que si elle s’éprouve par contraste. Le contraste s’actualisant par l’alternance des pronoms dans l’instance du discours.

F. Rostand explore davantage l’axe de l’affectivité, décrivant le langage comme une conduite affective.

Ainsi, cette conduite pourrait aussi se lire comme un symptôme. « Manifestation pathologique », signe émergeant dans/par le langage, nous entendons le symptôme comme étant une signature de ce qu’est le sujet hic et nunc. Le symptôme a alors une double signification ; il porte sur la communication et a valeur de communication.

En PRL (pédagogie relationnelle du langage), le travail se fait AVEC le

sympôme (et ne porte pas sur le symptôme comme en psychothérapie). Le symptôme sera entendu comme structure spécifique de la personnalité se révélant dans le langage. La personnalité du sujet est le moteur de la rééducation PRL.

La notion de sujet a été étudiée depuis l’Antiquité. Kant a proposé plusieurs axe de définitions du Sujet, selon l’axe de la logique formelle et selon la logique

transcendantale.Le sujet, dans la définition de Kant, existe par tous ses sens, ses pensées, son imaginaire partagé avec l’autre. De cette rencontre avec le sujet naîtra une relation transférentielle sur laquelle le thérapeute du langage s’appuiera.

Enfin, nous avons fini notre étude sur le sujet dans l’écriture par une

présentation des troubles du langage selon les axes instrumentaliste, relationnel et neurocognitivistes. Ces points de vue différents se rejoignent dans els définitions de la

93 théorie de l’esprit et de l’empathie.

Dans une seconde partie, nous avons brossé le portrait de la grammaire au travers de plusieurs théories linguistiques, pédagogiques et orthophoniques.

Après avoir défini les compétences métasyntaxiques, nous avons présenté la grammaire normative telle que l’on peut la rencontrer dans « Le bon usage ».

L’étude de la grammaire universelle de la conception générativiste nous a montré une grammaire intrinsèquement humaine, comme prédéfinie, et dont les universaux du langage seraient le ciment.

Patrick Charaudeau, lui, propose une grammaire du sens qui

correspondrait davantage à la pluralité sémantique que permet la grammaire d’une langue. Soulignant les mots de G. Mounin, P.Charaudeau définit lui aussi la langue comme un « prisme » posé sur la réalité, infléchissant notre vision du monde. P. Charaudeau propose aussi d’autres catégories grammaticales qui seraient davantage en adéquation avec la sémantique.

Dans notre cheminement entre les rayonnages des ouvrages de grammaire, nous nous somme aussi intéressés à la grammaire en quatre leçons de C. Freinet.

Révolutionnaire, en seulement quelques pages, la grammaire selon Freinet propose de travailler dans la plaisir du texte libre, contexte propice à l’intégration du code, les leçons s’articulant autour des concepts fondamentaux comme le sujet et le verbe.

La grammaire selon l’axe de l’affectivité exposée par F. Rostand nous a paru comme incontournable. Original et riche d’enseignements pour servir notre propos, l’ouvrage « grammaire et affectivité » fût précieux pour orienter nos recherches. Il nous a éclairé sur les liens qu’il est possible de faire entre état psychique du sujet et langage.

Ainsi la grammaire du sujet serait l’agencement individuels des données linguistiques, la conciliation entre les faits linguistiques appartenant à l’histoire du sujet et le code commun. Elle serait une grammaire originale et révélatrice du sujet dans ses

94 écrits.

Enfin, nous avons voulu illustrer comment la grammaire était traitée en PRL grâce notamment à la technique des associations (TA) et grâce à la conceptualisation nécessaire des verbes être, faire et avoir.

La notion de transfert est essentielle à toute rééducation, l’orthophoniste devra travailler AVEC le transfert, l’utilisant comme impulsion et comme trajectoire au travail sur et par le langage.

Notre étude pratique portant sur le langage écrit des adolescents, nous leur avons consacré le troisième chapitre de nos recherches théoriques.

De ce corps modifié, transformé, perçu différemment par soi et par les autres, émergent d’importantes pulsions avec lesquelles l’adolescent devra trouver un

équilibre.

La problématique de l’identité est le nœud gordien de cette période

charnière dans la vie du sujet. Entre injonction de réussite par les parents, obligation à une autonomie rapide par la société, conflits, rivalité, émois et identification à ses pairs, l’adolescent peut être tiraillé. Cette problématique se révèle aussi dans leurs écrits. Voilà pourquoi nous avons choisi cette population.

Nous vous laissons à présent découvrir l’illustration de ce que peut être la grammaire du sujet entrevue dans les écrits de nos trente adolescents.

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