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Le comportement du module de biodégradation de LBioS a été exploré indépendamment des conditions physiques et pour une large variété de valeurs de paramètres mimant la diversité des pro- priétés physiologiques des bactéries. L’étude a notamment porté sur l’influence de deux processus : l’humification et le calcul de l’état physiologique des bactéries.

L’humification, processus de formation de la matière organique du sol, a montré un effet modeste sur la distribution des sorties. La prise en compte de hydrolyse du carbone insoluble synthétisé, processus négligé dans ce travail mais qui permettrait de rendre remobiliser le carbone, pour- rait cependant altérer les tendances observées ici et peut-être donner plus de poids au processus d’humification dans la cinétique.

L’état physiologique a au contraire montré un rôle majeur dans la cinétique de dégradation et dans le niveau d’incertitudes sur les sorties du modèle. Ce processus de régulation a été implémenté pour représenter la dormance, comme moyen pour les bactéries de s’accommoder de la privation temporaire de substrat. Notre manière d’appréhender la dormance permet en effet d’éviter la disparition de la biomasse dans la majorité des cas. Cependant, on assiste très souvent à un blocage presque complet de la cinétique aboutissant à une partition du carbone peu réaliste (biomasse surdéveloppée et respiration cumulée négligeable). Ce phénomène est par ailleurs accentué en cas de concentrations initiales limitantes, ce qui rend alors les sorties du modèle moins pertinentes que lorsque la régulation par l’état physiologique est ignorée.

En dépit des réserves qui peuvent être émises sur la pertinence de notre représentation du fonctionnement bactérien, les incertitudes attribuées au module de biodégradation seul ne peuvent pas masquer la variabilité résultant de l’hétérogénéité des conditions environnementales. La for- malisation de l’état physiologique tendrait même plutôt à amplifier la variabilité provenant de l’hétérogénéité spatiale, en renforçant la limitation de la biodégradation en cas d’apport restreint de substrat plutôt qu’en la compensant. Les conclusions sur le fonctionnement du module de bio- dégradation ne remettent donc pas en cause la pertinence des résultats décrits dans le chapitre 2 sur l’impact de la structure du sol sur la cinétique de biodégradation d’un composé soluble. Elles confirment par ailleurs le choix du pool de DOC comme variable de prédilection pour évaluer la variabilité résultant de conditions abiotiques hétérogènes.

Chapitre 4

Étude expérimentale de la

biodégradation en milieux

homogènes et structurés

Les modèles peuvent être vus comme des outils pour aider à comprendre et interroger le fonc- tionnement des systèmes représentés. Toutefois, la pertinence des interprétations des sorties du modèle dépend de celle des informations données en entrée (validité des équations, précision des valeurs de paramètres, etc.). Il semblait nécessaire de compléter notre démarche de modélisation par une partie expérimentale. Les expérimentations qui vont être présentées ci-dessous ont pour objectifs de vérifier les hypothèses à la base de notre modèle et de le calibrer. Comme les études traitant des processus mis en jeu à l’échelle d’intérêt dans notre modèle sont relativement rares, une part importante du travail a consisté à mettre au point des protocoles spécialement adaptées à nos questions et contraintes. Les résultats présentés dans ce chapitre peuvent donc être considérés comme provisoires. Ils serviront à discuter de la pertinence des modes opératoires. Nous nous y appuierons pour proposer des améliorations qui permettront plus tard, avec les moyens adéquats, de répondre concrètement aux objectifs de chaque manipulation : paramétrisation ou confrontation entre mesures et simulations.

La définition des paramètres du module de biodégradation demandait tout d’abord d’apporter des éléments de réponse concernant la dépendance des paramètres biologiques à certaines conditions abiotiques. Nous devions plus particulièrement savoir si l’adhésion des bactéries sur un support modifie ou non leur physiologie, nous imposant alors de choisir des paramètres adaptés à un mode de vie sessile ou planctonique. Pour répondre à cette question, nous avons mis en place des incubations en milieu liquide ou en suspension (milieu homogène offrant des surfaces d’attachement pour les bactéries).

Concernant l’objectif de validation, nous avons mis au point une série de manipulations nous inspirant des scénarios simulés dans le chapitre 2. Ces expériences ont été conçues pour pou- voir contrôler les facteurs abiotiques (caractéristiques morphologiques de l’espace poral, régime hydrique, spatialisation du substrat et des décomposeurs) de manière suffisamment précise pour inférer le rôle des différents processus à l’œuvre (diffusion du substrat, consommation par les bac- téries) et à une échelle relativement fine (millimétrique). Les facteurs structuraux précédemment énoncés (morphologie des pores, teneur en eau, distribution du substrat et des décomposeurs) ne sont malheureusement pas aussi faciles à contrôler matériellement que virtuellement. Nous avons donc décidé de ne faire varier qu’un seul des facteurs (la saturation en eau) et de maintenir les autres constants. Nous avons réalisé nos incubations en appliquant différentes valeurs de potentiel

hydrique, à l’aide de microcosmes particuliers permettant d’ajuster une dépression tout en formant une enceinte protectrice limitant les échanges avec l’extérieur. Pour limiter la variabilité des carac- téristiques morphologiques des milieux poreux, nous avons confectionné des structures constituées d’agrégats de taille calibrée, compactés à une masse volumique donnée. Enfin, pour jouer sur la localisation d’un substrat soluble et de décomposeurs et en maximiser l’effet, nous avons imposé des distributions initiales de déconnexion spatiale. Nous avons pour cela procédé à des apports localisés dans des échantillons où la biomasse microbienne et le carbone organique dissous natifs avaient au préalable été éliminés par stérilisation et rinçage. Pour apprécier l’évolution temporelle et spatiale des différents pools impliqués, nous avons réalisé un suivi spatialisé en procédant aux mesures après découpe des échantillons en couches successives. Pour faciliter le traçage, nous avons choisi de travailler avec du glucose marqué au carbone 14.