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In vivo, les conditions physico-chimiques du milieu extracellulaire jouent

donc certainement un rôle clé dans les processus d’incorporation des porphyrines dans les cellules. Son acidification relative dans les tumeurs (autour de pH 6,9) est dans la « zone d’efficacité » d’association. De plus, le pH du milieu intracellulaire, légèrement plus basique que le pH externe (7,4), rend la sortie de la molécule plus aisée du côté cytoplasmique que vers le liquide extracellulaire. L’acidification du pH interstitiel dans les tumeurs contribue donc positivement à la rétention des molécules porphyriques dans ces tissus.

D’autre part, la distribution cellulaire des porphyrines, même si l’entrée a eu lieu par endocytose par exemple via les LDL, doit être également sous contrôle de ce type de phénomènes dus aux états d’ionisation de la molécule. Dans ce cas, en effet,

les molécules sont libérées dans les endosomes dont le pH est, au départ, identique à celui du milieu intracellulaire. L’évolution de ces organites consiste notamment en l’acidification progressive de leur phase aqueuse interne, conduisant à la formation de lysosomes. Lorsque le pH atteint la « zone d’efficacité » de l’association des porphyrines aux membranes, ces molécules quittent donc le milieu intralysosomial par simple diffusion. Il faut cependant noter que l’acidification des lysosomes se poursuit, leur pH final étant autour de 5. Si l’évolution de l’organite est suffisante pour qu’il reste encore des molécules lorsque ce pH est atteint, celles-ci se retrouveront retenues dans le lysosome. La probabilité d’un tel événement augment, évidemment, avec la concentration de la porphyrine dans l’organite.

CHAPITRE 4 : RESULTATS 2 – Interaction de la

porphyrine avec des LDL

Résumé

Les LDL jouent vraisemblablement un rôle clé dans l’entrée des porphyrines dans les cellules hyperprolifératives. L'interaction de la deutéroporphyrine, un archétype des porphyrines dicarboxyliques, avec les LDL a été examinée à l'équilibre et dans des conditions dynamiques. Les changements de la fluorescence da l'apoprotéine et de la porphyrine permettent l'identification de deux classes de fixation. La première classe, nommée classe P, est caractérisée par l'extinction de la fluorescence du tryptophane et implique 4 sites bien définis, vraisemblablement près de l'apoprotéine. La constante d’affinité par site est de 8,75×107 M-1 (affinité cumulée 3,5×108 M−1). La deuxième classe, classe L, correspond à l'incorporation d’environ 50 molécules de porphyrine dans la couche lipidique externe des LDL, avec une constante globale d'affinité de 2×108 M-1. Deux types d’expériences de stopped-flow ont permis de mieux caractériser les paramètres cinétiques de ces fixations : d’une part le mélange direct des LDL avec la porphyrine et, d’autre part, le transfert de la porphyrine à partir des LDL préchargés vers la HSA. Les constantes de vitesse de dissociation pour les fixations de classes P et L sont respectivement de 5,8 et 15 s-1 alors que les constantes de vitesse d'association sont de 5×108 M-1s-1 par site de classe P et de 3×109 M-1s-1 pour la fixation dans les lipides. La fluorescence de la porphyrine, caractéristique d’un environnement lipidique, et la comparaison de la valeur des constantes de vitesse d'association avec la limite par diffusion indiquent que la classe P implique des régions à la frontière entre l'apoprotéine et la phase de lipidique des LDL. La rapidité des interactions porphyrine-LDL est très clairement mise en évidence.

Chapitre 4

INTERACTION LDL-PORPHYRINE

Dans la première partie de notre étude, nous avons déterminé l’influence du pH sur l’association de la deutéroporphyrine aux vésicules lipidiques. Nous avons notamment montré de quelle façon l’existence de différents états d’ionisation de la molécule permet d’expliquer comment un gradient de pH entre milieu extra- et intra-vésiculaire favorise l’incorporation de la deutéroporphyrine dans les liposomes. Ce type de processus permet notamment aux cellules néoplastiques d’incorporer préférentiellement les porphyrines, qui pénètrent par diffusion passive. Cependant, nous avons souligné lors de l’introduction que les porphyrines sont transportées, dans l’organisme, par les LDL. Cette association influence sans doute leur entrée dans les cellules. De nombreux auteurs estiment même que les LDL jouent un rôle important dans le ciblage des photosensibilisateurs vers les cellules en hyperprolifération comme les cellules tumorales [73-75, 131]. La répartition dans l’organisme d’un certain nombre de porphyrines a même été mise en relation avec le nombre relatif de récepteurs aux LDL (récepteurs « B/E ») dans les différents tissus [132]. De plus, la lovastatine, qui améliore l’efficacité du catabolisme des LDL, augmente l’incorporation cellulaire et l’efficacité photodynamique de ces colorants [133] alors qu’au contraire les cellules tumorales résistantes aux traitements par PDT présentent un très petit nombre de récepteurs « B/E ». Il semble donc que l’incorporation par endocytose spécifique via les LDL soit un facteur essentiel à la sélectivité des agents photosensibilisants pour les tissus néoplastiques, que ce soit pour le traitement des tumeurs [70], de certaines lésions liées à l’artériosclérose [134] ou des néo-vaisseaux choroïdiens associés à la forme humide de la DMLA [76].

4.1 Généralités

Lors de leur association aux LDL, les porphyrines peuvent a priori se répartir entre les trois composants de ces particules : l’apoprotéine, les phospholipides de surface et le cœur hydrophobe de cette structure (figure 4.1). L’efficacité du transport est évidemment liée au nombre total de molécules exogènes que chaque LDL peut fixer. Néanmoins, l’intégrité de la lipoprotéine, et plus particulièrement de sa partie protéique, site de reconnaissance spécifique des récepteurs « B/E », doit être préservée lorsque les porphyrines se fixent.

Interaction LDL-porphyrine

Figure 4.1 : Fixation de la deutéroporphyrine (P) aux LDL. Différents types possibles d’association de cette molécule, correspondant chacun à sa fixation à l’un des différents compartiments du LDL.

D’autre part, l’appréhension des aspects dynamiques de cette interaction vont nous permettre d’évaluer les possibilités d’échanges de porphyrines entre les LDL et les autres transporteurs plasmatiques. En effet, la répartition du photosensibilisateur entre ces protéines pourrait vraisemblablement être modifiée par les changements de l’environnement physico-chimique. En outre, le pH exerçant un effet important sur l’affinité des porphyrines pour les lipides, il parait probable que l’acidification des tissus néoplastiques puisse influencer également l’affinité de ces molécules pour les lipoprotéines, au moins dans la mesure où une part non négligeable de celles-ci peut potentiellement s’associer à la phase lipidique des LDL. Le micro-environnement tumoral, par exemple, pourrait modifier la répartition de la porphyrine entre ses transporteurs potentiels.

Comme nous l’avons spécifié dans le premier chapitre, les propriétés de fluorescence des porphyrines sont sensibles à l’environnement. La figure 4.2 montre clairement la différence entre les spectres d’excitation de fluorescence de la deutéroporphyrine en solution aqueuse, associée aux LDL ou fixée à la HSA. Le spectre d’émission de fluorescence est également modifié par l’environnement de la porphyrine (figure 4.3). La bande principale, à 609 nm en milieu aqueux, se décale d’une douzaine de nanomètres vers le rouge lorsque la deutéroporphyrine est incorporée dans des vésicules lipidiques ou associée aux LDL. Il faut à ce propos noter que les spectres de la porphyrine associée aux LDL sont similaires à ceux

La seule différence, observable dans le spectre d’excitation, est la présence d’une bande à 280 nm lorsque la molécule est associée aux LDL, bande qui est absente du spectre quand la porphyrine est incorporée dans les vésicules. Enfin, lorsqu’elle est associée à l’albumine (HSA), la bande principale du spectre d’émission se situe à 623 nm.

Figure 4.2 : Spectre d’excitation de fluorescence de la deutéroporphyrine (5×10-8

M) dans du tampon phosphate, PBS (- - ), associée aux LDL (10-7 M) (___) et à la HSA, albumine de sérum humain, (5×10-6 M) (…). La longueur d’onde d’émission était fixée à 625 nm. Pour les concentrations faibles, comme ici, ce spectre est superposable au spectre d’absorption.

Figure 4.3 : Spectre d’émission de fluorescence de la deutéroporphyrine (5×10-8

M) dans du tampon phosphate, PBS ( - - - ), associée aux LDL (10-7 M) ( _____ ) et à la l’albumine de sérum humain, HSA (5×10-6 M) (……). La longueur d’onde d’excitation était fixée à 395 nm. Le spectre de la DP incorporée dans des vésicules lipidiques est identique à celui de la DP associée aux LDL.

Pour suivre l’association de la DP aux LDL, tout comme pour suivre son transfert des LDL vers la HSA, il suffit donc d’observer l’évolution du signal de fluorescence du photosensibilisateur. Nous exciterons alors la solution à 395 nm, ce qui correspond à la longueur d’onde pour laquelle la variation des signaux observés est généralement la plus forte.

Interaction LDL-porphyrine

La fixation de la porphyrine à proximité immédiate de l’apoprotéine, voire directement à celle-ci, sera détectée en suivant non pas les modifications de fluorescence du ligand, mais celles de la fluorescence intrinsèque de l’apoprotéine. En effet, comme le montre la figure 4.4, il existe un recouvrement significatif entre le spectre d’émission des LDL et le spectre d'absorption de la DP. La fluorescence des lipoprotéines est due aux résidus tryptophanes de l’apoB-100. Si les molécules de porphyrine fixées sont suffisamment proches de l’apoprotéine, un transfert d'énergie (FRET) des résidus tryptophanes, excités, vers la porphyrine est donc possible. Selon l'équation de Förster, l'efficacité du transfert dépend en 1/r6 de la distance entre les deux molécules. La distance de Förster, correspondant à un transfert de la moitié de l'énergie, est d’environ 1,7 nm pour le couple porphyrine-tryptophane [5]. Ainsi, l’association des molécules de porphyrine à proximité des résidus de tryptophane, c.-à-d. leur fixation à l'apoprotéine B-100 ou à la frontière entre la protéine et les lipides, peut être caractérisée par FRET.

Figure 4.4 : Spectre d’émission de fluorescence des LDL en absence de deutéroporphyrine (excitation à 280 nm, axe de gauche) et spectre d’absorption de la deutéroporphyrine associée aux LDL, corrigé pour l’absorption des LDL (axe de droite). Le recouvrement spectral démontre la faisabilité d’un transfert d’énergie de fluorescence (FRET) entre les deux molécules.

4.2 Etude à l’équilibre : quantification de la fixation de