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J’ai tenté de présenter une synthèse de ce que la démarche portfo-lio m’a apporté autant professionnellement que du point de vue de la construction identitaire. Il apparaît plus clairement à présent que la première démarche portfolio au sein de mes études (en situation de rédactrice de mon portfolio en situation d’apprentissage) et la seconde démarche plus créative (en situation de créatrice de portfo-lios pour deux publics différents) se complètent l’une l’autre. Sans la première, je n’aurais pas été capable de mettre en place un portfolio cohérent. Sans la deuxième, je n’aurais pas pris conscience de tous les apports de la démarche en général et je n’aurais pas développé les mêmes compétences. La mobilité est le dénominateur commun de ces deux démarches, et si l’on interprète ce mot en termes pro-fessionnels uniquement, je vis encore une situation de mobilité qui ne fait que débuter. quand je prendrai mes fonctions de professeur d’anglais, je pourrai également mesurer l’apport de ces démarches dans mes classes. La prise de conscience des processus identitaires et interculturels découlant des démarches portfolio m’a donné confiance en mes compétences professionnelles.

Mon analyse plaide en faveur d’une telle démarche en formation (ini-tiale et/ou continue) des enseignants car il est impossible de leur demander d’en développer une pour leurs propres étudiants avant d’en avoir réalisé une pour eux-mêmes. En effet, je qualifie les deux démarches portfolio auxquelles j’ai participé de complémentaires l’une de l’autre. Il me semble que j’ai continué d’apprendre de la première démarche en développant moi-même des portfolios pour d’autres. En tentant de produire un portfolio pour des étudiants japo-nais, je me suis projetée, j’ai intégré ma propre démarche en me mettant à la place de cet « Autre » que je ne connaissais pas. Cette

mise en relation pour comprendre l’autre va bien dans le sens d’une interculturalité en actes.

Impliqués dans une démarche similaire, les enseignants-stagiaires pourraient prendre conscience de leur identité professionnelle en cours de construction, ainsi que des valeurs qui leur semblent défi-nir leur stratégie d’enseignement. De plus, ils pourraient se pencher sur leurs compétences interculturelles, sur les concepts de culture et d’identité afin de les prendre en compte dans les interactions au sein de leurs classes. J’ajouterai que la réalisation d’un portfolio apporte connaissance de soi et confiance en ses propres compétences. La réflexivité devient plus facile d’accès, plus naturelle, elle s’apprivoise. Pour des étudiants en mobilité internationale, le portfolio peut se pré-senter comme un outil pour maximiser leur implication personnelle et favoriser la prise de conscience de la dimension interculturelle de leur expérience. Le participant se situe par rapport à son histoire, son présent et sa projection en tant que professionnel.

Pour ma part, bien que la démarche portfolio se soit présentée au moment où mon choix était déjà fait, elle m’a permis de le clarifier, de me donner les bases de réflexion et l’attitude positive pour valo-riser toutes mes expériences. Mon chemin de formation m’apparaît plus cohérent puisque je l’ai retracé dans ma pensée et couché sur le papier. La trace écrite que le portfolio laisse, bien que le format électronique le rende plus modulable et effaçable, représente une empreinte de mes choix professionnels, une carte géographique de mon chemin de formation qui en ouvre d’autres. De plus, l’expérience japonaise m’a placée dans une position rare. Celle qui ne parle pas la langue, qui ne lit pas les signes, une situation que je n’avais pas encore connue car l’anglais me permet, en général, de communi-quer. Au Japon, j’ai ressenti, à un degré moindre, ce que ressent tout migrant, dont la langue-culture et l’écriture sont très éloignées de la langue-culture d’accueil. Je pense que cette expérience de faible intercompréhension culturelle et linguistique m’a donné une autre vision de l’apprentissage d’une langue-culture.

Et pour boucler la boucle réflexive, j’aimerais, avant de conclure ce témoignage, rappeler la définition donnée par le Petit Robert du mot ‘escale’:

« échelle » : Action de s’arrêter pour se ravitailler, pour embarquer ou débarquer des passagers, du fret.>halte, relâche.

Cette définition résume bien ce que la démarche portfolio a représenté sur mon chemin de formation : une échelle vers une autre étape, tout en offrant une halte, une pause pour me ressourcer, embarquer de nouvelles compétences, en abandonner certaines, trouver enfin :

Cohérence – Ouverture – Confiance.

Bibliographie

Abdallah-Pretceille, M. (1999). L’éducation interculturelle, coll. « que sais-je ? », Presses Universitaires de France, Paris.

Bishop M.-F. & Molinié, M. (éd.) (2006). Autobiographie et réflexivité, Centre de Recherche Textes et Francophonies & Encrage Université, Amiens.

Legendre, R. (éd.) (1988). Dictionnaire actuel de l’éducation, Larousse et les Éditions françaises, Montréal, Paris.

Marshall, C. & Molinié, M. (2008). Transferts culturels, transmission de savoirs et politique universitaire, Une relation franco-japonaise, Centre de Recherche Textes et Francophonies & Encrage Université, Amiens.

Molinié, M. (éd.) (2010). Le dessin réflexif. Elément pour une herméneu

-tique du sujet plurilingue. Université de Cergy-Pontoise, Centre de Recherche Textes et Francophonies & Encrage Université, Amiens.

Documents

Molinié, M. (2008). Portfolio de l’étudiant en didactique des langues et du plurilinguisme.

Molinié, M. & Lankhorst, M. (2009). Portfolio de compétences interculturelles et d’expériences en mobilité internationale France / Japon, UCP (CILFAC) & Conseil Général du Val d’Oise, Cergy-Pontoise.

Molinié, M., Lankhorst, M. & Pungier M.-F. (2010). Portfolio de compétences interculturelles et d’expériences en mobilité internationale Japon-France, UCP (CILFAC) & Conseil Général du Val d’Oise, Cergy-Pontoise.

Interroger les conditions théoriques