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Conclusion

Dans le document RAPPORT d expertise collective (Page 58-61)

1 Contexte, objet et modalités de réalisation de l’expertise

2.2.8 Conclusion

2.2.8.1 Une controverse sociotechnique pas comme les autres

La 5G n’est pas une technologie comme les autres. C’est un assemblage d’évolutions techniques (antennes, supports, modes de transmission des données, …, bandes de fréquence) et d’évolutions d’usages qui prêtent à la controverse. Ces différentes propriétés sont en effet présentées dans les discours des promoteurs comme autant d’avancées sur le plan technique, économique et sociétal, alors qu’elles se chargent de nouvelles significations lorsqu’elles investissent la scène publique. Ici, elles prennent place dans les débats comme autant de sources de préoccupation sur le plan sanitaire, environnemental, social et politique.

70 L’article de Sarah Loughran, du Centre australien pour la recherche sur les bio-effets électromagnétiques - Université de Wollongong, et l’article des français Delia Arnaud-Cormos et Philippe Lévêque, respectivement Maitre de conférences en bio-ingénierie à l’Université de Limoges et directeur de recherche en électronique au CNRS.

La 5G fait peur et suscite contre elle une mobilisation inédite. L’absence de littérature scientifique sur le sujet, du fait du peu de recul sur une situation récente et évolutive, a introduit la nécessité de s’appuyer sur l’étude de corpus médiatiques (presse, réseaux sociaux, vulgarisation scientifique) pour en rendre compte.

L’analyse de ces corpus montre tout d’abord le caractère pluridimensionnel de la contestation publique de ce nouveau complexe technologique que représente la 5G. Trois dimensions sont visées par la critique : (1) le système technique lui-même dont les propriétés intrinsèques (l’infrastructure, ses composants et ses externalités) font l’objet de controverse en tant que sources de risques éventuels – sanitaires, environnementaux et sécuritaires ; (2) le processus de prise de décision, avec la dénonciation d’un déploiement lancé en l’absence de consultation citoyenne et sans attendre les résultats de l’évaluation experte des risques ; (3) la dimension sociétale du programme de déploiement, vis-à-vis de laquelle les opposants manifestent leur scepticisme, aussi bien sur le plan des usages que de l’efficacité énergétique, notamment en relation avec l’évolution des usages eux-mêmes.

L’analyse fait aussi ressortir quelques spécificités majeures de cette controverse sociotechnique. Si la controverse sur la 5G s’inscrit dans la méta-controverse sur les ondes ou champs électromagnétiques, dont elle représente une ultérieure étape après celles des antennes-relais « pré-5G », du Wi-Fi et des compteurs Linky, elle s’en écarte néanmoins par l’irruption de la question écologique. Celle-ci est centrée sur deux problématiques, celle de la consommation d’énergie – qu’on associe à la fois à la transmission et au traitement des données – et celle du remplacement des terminaux et des infrastructures obsolescents, avec la conséquente exploitation de ressources naturelles et la production de déchets, préjudiciables pour l’environnement. Cette question, qui est portée à l’unanimité par l’ensemble des acteurs de la critique, est aussi discutée dans différentes arènes (médiatique, politique, scientifique).

Une deuxième spécificité de cette controverse est donnée par son caractère éminemment public. Celui-ci est soutenu à la fois par la couverture médiatique du sujet « 5G et risques » – qui prend de l’ampleur en peu de temps (de 837 articles de presse en 2019 à 2 400 en 2020) après une période de latence (l’année 2018) – mais aussi par des formes de mobilisation collective qui se développent particulièrement dans l’espace publique numérique, et par des prises de position politique importantes.

Enfin, l’analyse des médias donne aussi à voir la dimension politique de cette controverse. À la question des risques pour la santé et pour l’environnement, dont on en demande l’évaluation dans le cadre d’expertises indépendantes, la contestation y associe celle de la possibilité de choisir – ou de refuser – le déploiement de la technologie en question. Débat public, moratoires, décisions de conseils municipaux sont en effet très largement discutés, dans les médias, en lien avec les thèmes du risque et de l’impact sanitaire et écologique de la 5G.

Cette question du libre choix ne peut par ailleurs être réduite au seul déploiement de la 5G en tant que technologie spécifique ni aux seuls risques sanitaires et environnementaux, dans la mesure où cette technologie est souvent présentée – autant par ses défenseurs que par ses opposants – comme une étape vers un programme plus vaste de numérisation généralisée de la société. Avec la technologie 5G c’est un type de société qui est en cause, la société du tout numérique et du tout connecté, avec ses implications en matière de saturation des espaces de vie par un cumul d’expositions aux champs électromagnétiques, de consommations énergétiques accrues par la multiplication des usages, mais aussi de surveillance généralisée.

La source de la conflictualité en matière de 5G tient donc très probablement au fait que de

nombreux publics ont le sentiment de se voir imposer tous ces changements sans possibilité de choix ou de participation à leur construction.

2.2.8.2 Les nœuds de l’évaluation informelle de la problématique sanitaire de la 5G La 5G n’en est qu’à ses débuts, mais elle suscite de grandes craintes pour la santé. L’analyse de différents corpus médiatiques, interrogés spécifiquement sur le cadrage sanitaire de la question de la 5G, laisse apparaître une variété de préoccupations et d’interrogations formulées à son égard et, plus particulièrement, à l’égard des « ondes 5G ».

Ces préoccupations et interrogations s’imposent comme les nœuds d’une évaluation informelle, voire profane, de la technologie sur le plan de ses aspects sanitaires. Dès lors, elles sont présentées ici, pour conclure cette section sur la controverse, comme autant de questions adressées par la société civile à l’expertise scientifique. La liste ci-dessous réunit les plus fréquentes :

• Qu’impliquent les nouvelles antennes pour l’exposition des personnes ?

• La population sera-t-elle exposée à un rayonnement plus intense avec les téléphones mobiles 5G ?

• C’est quoi les ondes millimétriques ? Sont-elles risquées pour la santé ?

• Quid de la superposition/accumulation de radiofréquences ?

• Pourquoi les limites d’exposition sont-elles différentes entre pays ?

• Ne faudrait-il pas réviser les normes sur les valeurs limites ?

• Est-ce que l’exposition aux champs électromagnétiques diminue les défenses immunitaires ?

• Quels sont les effets de l’exposition des enfants et des femmes enceintes à la 5G ?

• Quid de l’exposition chronique ?

• Les études sur les risques : où sont les preuves ?

• Pourquoi n’y a-t-il pas d’études sur les nouvelles ondes ? Quelles devraient être les conditions de production de ces études ?

• Pourquoi n’y-a-t-il pas de consensus scientifique sur le danger des ondes électromagnétiques ?

3 Positions institutionnelles internationales

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