• Aucun résultat trouvé

1.4 Modélisation épidémiologique et génétique des maladies infectieuses

1.4.1 Concepts généraux de modélisation mathématique

1.4.1.1 Introduction

Un modèle est défini comme la représentation d’un système visant à la compréhension de celui-ci et parfois même à la prédiction de résultats futurs. Cette conceptualisation reste synthé-

tique et nécessite des simplifications afin de garder uniquement les caractéristiques essentielles pour répondre à la problématique visée. La modélisation mathématique consiste à utiliser des équations pour décrire le système : l’état du système va être défini par des variables d’état reliées entre elles par des fonctions qui décrivent le fonctionnement du système (variables de flux). Cette formalisation mathématique permet d’avoir recours à un langage :

• Précis : nécessité de formuler des idées et des hypothèses claires et concrètes. • Concis : une équation peut être plus explicite qu’un paragraphe d’explications.

• Universel : les mêmes techniques mathématiques peuvent être appliquées dans des do- maines divers et variés.

• Vieux mais toujours tendance : les multiples recherches au cours des siècles précédents ont fourni un large bagage d’outils à notre disposition.

• Utile : on peut l’implémenter informatiquement.

Les études expérimentales permettent d’améliorer notre compréhension de certains aspects spécifiques du système. De ce fait, les modèles mathématiques permettent de synthétiser plu- sieurs expériences afin d’inférer sur la compréhension générale du système et des éventuelles interactions entre ses différentes composantes (par exemple, combiner les résultats d’expériences

in vitro et in vivo). Souvent le caractère que l’on observe expérimentalement n’est pas le plus

informatif : dans notre cas, le niveau d’infection mesuré par le nombre d’OPG n’explique pas les processus impliqués lors de la réaction immunitaire de l’hôte. Les modèles mathématiques aident à mieux comprendre les causes sous-jacentes d’un système complexe. On peut ainsi tester des hypothèses qui sont difficilement expérimentables avec des études empiriques.

Les modèles mathématiques n’ont pas de contraintes physiques, ce qui les rend puissants pour tester de multiples scénarios et aider à la décision. Ils permettent ainsi de faire des prédictions sur l’impact d’interventions et de générer de nouvelles hypothèses à tester experimentalement par la suite. C’est particulièrement utile dans notre cas de maladies infectieuses afin de minimiser l’effort expérimental, où les contraintes sont fortes avec le recours à des infestations coûteuses en animaux et à des traitements ayant un impact sur l’environnement.

Cependant, pour inférer des prédictions fiables, il faut faire attention à certains points. En effet, la modélisation mathématique englobe des mécanismes mais parfois nous manquons de connaissances quantifiables pour les calibrer. Nous avons soulevé précédemment le cas de la modélisation de la réaction immunitaire, sous-jacente du niveau d’infection. De même, il est possible de trouver des données qui permettent d’estimer le taux d’infectiosité à l’échelle du troupeau, mais qu’en est-il à l’échelle de l’individu ? Afin de palier ces problèmes de calibration, beaucoup d’améliorations dans les méthodes d’estimation des paramètres sont attendues, de par les récentes avancées en matière d’inférence statistique et de par l’explosion des données

disponibles. De plus, il faut prendre en compte la stochasticité inhérente à certains systèmes biologiques, comme par exemple l’infection : il sera impossible de faire des prédictions précises de la propagation de l’infection à l’échelle de l’individu.

1.4.1.2 Classification

Il existe un large nombre de modèles mathématiques aux propriétés différentes. Il est donc nécessaire de connaître leur but et leur étendue afin de choisir le type de modèle le plus adapté à la problématique visée.

Empirique vs mécaniste

Les modèles empiriques, aussi appelés modèles statistiques, s’appuient sur l’expérience, i.e. les observations, et non sur la théorie (ne nécessite pas de connaissances des mécanismes sous- jacents). Le but est donc de dégager des tendances et des relations entre des données : en général entre une variable du modèle que l’on souhaite prédire en fonction d’autres variables potentiellement capables de l’expliquer. Il existe deux sous-groupes de cette catégorie : les mo- dèles linéaires, où la réponse moyenne est une combinaison linéaire des variables explicatives et des paramètres (ex : régression linéaire simple, i.e. une seule variable explicative, ou mul- tiple, i.e. plusieurs variables explicatives, analyse de variance et de covariance) et les modèles non-linéaires où la relation est quelconque (ex : régression non linéaire).

Par opposition les modèles mécanistes, aussi appelés modèles basés sur les processus, né- cessitent des connaissances a priori plus ou moins précises du système à modéliser. L’approche de modélisation va être basé sur des hypothèses permettant d’aider à la compréhension des mécanismes sous-jacents de ce système. Les données pourront être utilisées pour valider et/ou calibrer le modèle.

Déterministe vs stochastique

Un processus déterministe est défini par le fait que l’état actuel du système est entière- ment déterminé par l’état précédent (aucune variation aléatoire). Les modèles déterministes supposent que les sorties seront entièrement déterminées par les paramètres d’entrée et les relations fixées. Ainsi, une entrée fixée mènera toujours au même résultat en sortie.

A l’inverse, avec les processus stochastiques l’état présent du système est aléatoire. Par conséquent, des entrées identiques vont mener à un ensemble de sorties différentes. Le caractère aléatoire est introduit en utilisant un jeu de valeurs pour les variables du modèle basé sur des distributions de probabilité.

insérer de la stochasticité sur une échelle dans un modèle totalement déterministe, comme par exemple en rajoutant de la variabilité sur certains paramètres pour passer à l’échelle de la population (la valeur nominale du paramètre devient la moyenne de la population à laquelle on définit un écart-type associé, et chaque individu est simulé suivant cette loi). Inversement, on peut supposer des processus sous-jacents déterministes.

Echelle de modélisation

Selon l’objectif auquel on souhaite répondre, il faut déterminer l’échelle appropriée pour la modélisation, allant par exemple de l’infiniment petit à l’infiniment grand : gènes, molécules, cellules, organes, individu, troupeau, national, mondial.

Un modèle systémique va combiner plusieurs niveaux de la hiérarchie. Un modèle mécaniste combine souvent deux, voire plus de niveaux adjacents dans la hiérarchie.

Statique vs dynamique

Selon l’objet d’étude, le modèle peut être statique, i.e. figé dans le temps, ou dynamique. Dans ce dernier cas, on peut envisager une portée à court terme (par exemple pour les maladies infectieuses, durée d’une seule infection/épidémie) ou à long terme (sur plusieurs générations) et il existe deux sous-types de modèles dynamiques : continu ou discret (le pas de temps peut être plus ou moins précis, allant de la seconde à l’année).