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CHAPITRE 2. Approches théoriques de la durabilité et de l'agriculture

3) Conceptions de la durabilité et modèles de développement

L’inscription dans un modèle de développement de l’AB se traduit concrètement, pour un agriculteur, par des choix stratégiques concernant le développement de son exploitation et par ses pratiques agronomiques et économiques dans la conduite de cette exploitation. Pour saisir la diversité des modèles nous choisissons la notion de logique de fonctionnement comme cadre d’analyse. Ce choix méthodologique s’inscrit globalement dans l’analyse systémique de l’exploitation agricole et plus particulièrement dans l’approche de la gestion centrée sur les pratiques des acteurs et leurs projets (Brossier et al., 2007). Le concept de « fonctionnement de l’exploitation agricole » est central dans cette approche. Capillon (1988) le définit comme suit : « enchaînement de prises de décisions de la part de l'agricul-teur en vue d'atteindre un ou plusieurs objectifs qui régissent des processus de production dans un ensemble de contraintes ». Ce concept a fondé la méthode de typologie de fonctionnement élaborée par des économistes (Brossier et Petit, 1977) et des agronomes (Capillon, 1993). Elle nous semble cependant trop limitée à la dimension décisionnelle de

l'action de l'agriculteur. Elle gagne à être complétée par la dimension des pratiques, en reprenant la définition que Landais et Deffontaines donnent du système de pratiques : « assemblage de pratiques résultant de l’ensemble structuré des choix retenus par l’agricul-teur pour répondre à ses finalités, en tenant compte des multiples contraintes liées à la fois à la structure du système et aux caractéristiques de son environnement » (Landais, Deffon-taines, 1988). La notion de logique, en association à celle de fonctionnement, met l’accent sur la cohérence de cette combinaison de prises de décisions et de pratiques ; cohérence que l’on peut faire apparaître en mettant en évidence les interactions entre les différents éléments du système au regard des objectifs de l’agriculteur. Dans le cas de notre recherche, l'enjeu est d'identifier des logiques globales dans des exploitations aux orienta-tions technico-économiques différentes, en faisant ainsi l'hypothèse que ces logiques, ou au moins certaines d'entre elles, sont communes aux différentes productions.

3.2) Durabilité processuelle et modes de pilotage de l'exploitation

Cette section se propose de prolonger l'approche par les logiques de fonctionnement par celle des modes de pilotage, afin d'avoir une lecture plus fine des dynamiques temporelles, des processus et des modalités de changement, et d'aborder ainsi la question de la durabi-lité processuelle. Si l'on voulait l'envisager dans une dimension temporelle, l'approche par la durabilité statique montrerait "ce qui change". La durabilité processuelle montre plutôt "comment cela change". Pour structurer notre réflexion et poser des hypothèses, nous adopterons une grille de lecture qui, par le biais d'idéaux types, met en avant la diversité de ce que nous appellerons les modes de pilotage de l'exploitation. Cela situe notre démarche dans une approche davantage centrée sur l'agriculteur en tant qu'acteur, auteur des décisions et pratiques faisant évoluer le fonctionnement et les performances de son exploi-tation, c'est à dire dans une approche de la gestion stratégique de l'exploitation. Pour carac-tériser les modes de pilotage sous l'angle de la durabilité processuelle, nous nous appuierons sur les notions de résilience, adaptabilité et flexibilité, développées en sciences de gestion et dans le courant de l'evolutionary theory. Nous compléterons ensuite ce premier niveau d'analyse en adoptant une vue plus large du changement à partir des notions de changements transformateur et reproducteur, changement systémique, et d'une approche inspirée des réflexions de Bruno Latour.

Hansen (1996) fait une analyse intéressante des différentes interprétations de la durabilité en agriculture, en distinguant la durabilité vue comme une idéologie, comme une combinaison de stratégies, comme la capacité à remplir une combinaison d'objectifs et enfin comme une capacité à continuer. L'interprétation de la durabilité en tant que combi-naison de stratégies ouvre une voie de réflexion féconde en abordant la durabilité sous l'angle de la gestion. On peut comprendre, à travers l'expression « combinaison de straté-gies », que les agriculteurs effectuent des arbitrages pour articuler un ensemble de choix et

de pratiques visant à maintenir ou améliorer la durabilité de leur exploitation. Francis, quant à lui, parle de « stratégie de gestion » (Francis, 1987, in Hansen 1996). Cette inter-prétation présente d'ailleurs l'avantage de pouvoir faire le lien avec les autres : une (combi-naison de) stratégie de gestion repose en partie sur une idéologie, sur la capacité à remplir une combinaison d'objectifs, et consiste en premier lieu à maintenir l'exploitation dans la durée. Mais plutôt que de nous en tenir à la notion de stratégie, il nous semble aussi intéressant de l'intégrer dans une conception plus englobante, celle des modes de pilotage. On a vu plus haut que le mode de pilotage d'un système de production se définit comme étant « les processus par lesquels un ensemble d'acteurs se représente ce système et tente d'orienter et de conduire sa vie. » (Chia et Marchesnay, in Dedieu et al., 2008). Nous serons d'ailleurs amenés à compléter cette définition en y intégrant la notion de stratégie. L'intérêt de la notion de mode de pilotage est d'être assez large pour prendre en compte aussi bien les représentations de l'agriculteur, les savoirs, les stratégies et processus, les relations avec d'autres acteurs. La question n'est donc pas seulement de juger de la durabi-lité d'une exploitation par les résultats et les pratiques, par exemple la consommation d'intrants ou l'ancrage territorial ; elle est aussi de savoir si l'évolution de la durabilité dépend des modes de pilotage des exploitations. De quels modes de pilotage des exploita-tions relèvent les trajectoires d'évolution de la durabilité ?

3.2.1) Typologies des modes de pilotage

Bien quelle ne couvre pas tous les regards théoriques et ne prenne pas en compte toutes les nuances, la synthèse des approches de l'exploitation agricole en agronomie et sciences de gestion, réalisée par Darnhofer et al. (2010 a), fournit une grille de lecture qui nous paraît pertinente pour éclairer les liens entre modes de gestion et durabilité. Les auteurs distinguent trois principales approches théoriques de la gestion des entreprises agricoles (Darnhofer et al., 2010 a), qui peuvent aussi être considérées comme des modes de pilotage pour les agriculteurs :

1) L'approche « ingénierie » promeut une grande maîtrise des processus de produc-tion et une réducproduc-tion des variaproduc-tions naturelles, dans un but de prédictibilité et de stabilité. Les critères principaux sont l'efficacité et la productivité. Les process sont standardisés, et les problèmes sont résolus dans une approche réductionniste de court terme, sans liens les uns avec les autres, et sans liens avec d'autres échelles spatiales. Les théories scientifiques sur lesquelles reposent l'approche ingénierie relèvent du positivisme et du réductionnisme, et du modèle économique de l'acteur rationnel.

2) L'approche farming systems reconnaît l'exploitation agricole comme étant un système, et prend ainsi en compte les interactions entre ses éléments et entre l'exploitation et son environnement. Elle s'effectue dans une perspective interdisciplinaire et mobilise l'analyse systémique. Les actions des agriculteurs sont expliquées par la rationalité de leurs décisions, mais aussi par les normes sociales, valeurs, et finalités. On reconnaît que les

agriculteurs ont aussi d'autres objectifs que ceux relatifs au revenu, comme par exemple la sécurité, la qualité de vie...

3) L'approche des systèmes adaptatifs met l'accent sur les capacités d'adaptation des exploitations dans un contexte changeant et incertain, et sur la co-évolution entre les exploitations et leur environnement. On y retrouve les courants théoriques de

l'evolutio-nary theory et des complex adaptive systems, et donc les concepts de résilience,

adaptabi-lité, flexibilité. Dans l'optique du management, l'exploitation doit maintenir de fortes capacités d'adaptation pour répondre aux changements imprévisibles de son environne-ment.

Dans le travail d'analyse théorique comme dans celui du management, ces trois approches ne sont pas incompatibles les unes avec les autres ; l'approche ingénierie peut avoir sa place au sein des deux autres et l'approche farming systems au sein de l'approche

complex adaptive systems.

Hubert apporte également des éléments de réflexion sur ces questions en reprenant la grille de lecture élaborée en 1997 par l'agronome Robert Bawden sur la gestion des ressources naturelles renouvelables (Hubert, 2002). Dans notre démarche, nous l'utiliserons pour caractériser différents modes de pilotage au regard de la durabilité globale – et non seulement des ressources naturelles. Bawden fait le lien entre la posture des chercheurs, le type de relations entre chercheurs et acteurs de terrain, le mode d'organisation des acteurs de terrain, le type de connaissance en jeu. En adoptant une lecture à partir de deux axes, l'un opposant constructivisme et positivisme, l'autre réductionnisme et holisme, Bawden construit une grille composée de quatre cadrans, dont trois sont pris en compte par Hubert (voir figure 2.3).

Le premier cadran est le cadre technocentrique. Il se caractérise par le réduction-nisme et le positivisme dans l'approche du fonctionnement de l'exploitation agricole (découpage de l'exploitation en composantes indépendantes les unes des autres) et dans les savoirs (objectivité, normalisation des savoirs, transmission par la prescription). Dans ce paradigme, l'objectif principal est celui de la productivité, et les moyens sont essentielle-ment techniques (par exemple : apports d'intrants, mécanisation). Le deuxième cadran, appelé écocentrique, conserve une approche positiviste par la mobilisation de savoirs scientifiques, mais l'exploitation agricole est envisagée par le biais de l'approche systé-mique et l'on met en valeur les interactions et la cohérence du système. L'objectif de la productivité perd de son importance, par rapport au premier cadran, au profit d'objectifs de préservation et de valorisation des processus biologiques des systèmes agricoles. Le troisième cadran, holocentrique, conserve l'approche holiste du cadran précédent mais abandonne le positivisme au profit du constructivisme. On y reconnaît la diversité des points de vue et y relativise l'objectivité et la vérité. La construction et la diffusion des savoirs reposent sur la médiation entre points de vue et sur les apprentissages collectifs.

Figure 2.3 : Les quatre points de vue sur la gestion des ressources naturelles renouvelables. Selon R. Bawden (1997). in Hubert, 2002.

A partir de cette première grille de lecture, Bawden décrit les procédures d'action propres à chaque cadran (voir figure 2.4). Hubert propose d'en faire également une grille d'analyse des différents modes d'action et d'engagement dans le développement durable, ce qui peut se traduire aussi au niveau de l'exploitation agricole. Ces modes d'actions ne sont pas exclusifs les uns des autres, mais ils ont chacun leurs caractéristiques. D'une manière générale, en circulant dans cette grille du bas à droite vers le haut à gauche, on gagne en réflexivité et en appréciation de la durée des processus temporels en cause. La réflexivité s'accompagne ainsi d'une plus grande prise en compte du long terme. Dans le cadran technocentrique, l'action – pour nous le pilotage – repose sur des connaissances et des procédures normalisées, et une organisation des rôles hiérarchisée. Les changements se limitent à une révision des procédures et des normes prescrites, par secteur, sans vision globale. Le pilotage dans le cadre écocentrique se fait davantage sous l'impulsion d'échanges non hiérarchisés, ouverts au débat. Agriculteurs, techniciens, chercheurs et éventuellement personnes extérieures discutent de leurs points de vue. Le changement dépasse la simple modification des procédures et peut aller jusqu'à une reconception globale du système, en posant les problèmes différemment. Au sein du cadran holocen-trique, les échanges entre acteurs sont organisés et deviennent un enjeu central ; on se situe dans l'action collective. Les cadres de raisonnement et de compréhension du monde sont discutés. Le changement passe par des processus d'apprentissage collectifs identifiés, des connaissances émergentes, et une évolution des valeurs.

On peut faire l'hypothèse, chose qui n'est pas dite dans l'article de Hubert, que des modes de raisonnement et des savoirs élaborés dans le cadre holocentrique se stabilisent et

se normalisent, et sont utilisés ensuite dans une relation prescriptive – dans le cadre technocentrique.

Figure 2.4 : Formes et modalités d’action selon trois des quatre points de vue identifiés par R. Bawden, in Hubert, 2002.

Cette grille de lecture peut s'appliquer à la démarche des chercheurs comme à celles des agriculteurs dans leur prise en compte de la durabilité.

Pour les chercheurs, la grille de Bawden explicite leur implication dans un travail de recherche ou recherche-action quant aux savoirs mobilisés et aux relations avec les agriculteurs et autres acteurs – d'une relation basée sur la prescription et les savoirs norma-lisés à une relation basée sur l'action collective et l'élaboration de savoirs émergents. Un chercheur pouvant éventuellement se situer dans l'un ou l'autre des cadrans, des postures, en fonction des étapes de son travail.

Pour ce qui concerne les agriculteurs, on peut considérer que cette grille de lecture représente les différentes façons de concevoir et gérer leurs systèmes de production au regard de la durabilité, ou autrement dit les différents modes de pilotage : d'un mode de gestion réductioniste et à court terme, puis systémique, et enfin incrémental, intégré dans des collectifs et prenant davantage en compte le long terme ; d'une compréhension de la durabilité en tant que normes prescrites à atteindre, puis processus systémique, et enfin implication réflexive dans des collectifs faisant évoluer à la fois leurs pratiques, leurs modes de raisonnement, et la compréhension qu'ils ont de la durabilité.

On peut rapprocher ces modes de pilotage des approches de l'exploitation de Darnhofer et al. présentées dans la section précédente. Le mode de pilotage du cadre techno-ingéniérique correspond à l'approche ingénierique ; nous l'appellerons mode de

pilotage ingénierique. Celui du cadre écocentrique correspond aux deux autres (farming

systems et systèmes adaptatifs) ; nous lui donnerons le nom de systémique. Le mode de

pilotage du cadre écocentrique n'a pas d'équivalent dans l'analyse de Darnhofer et al., néanmoins nous le prendrons en compte, sous le qualificatif d'incrémental. Rappelons que ces trois modes de pilotage sont des idéaux-types ; on peut alors faire l'hypothèse qu'un agriculteur peut les combiner. Nous les utiliserons dans notre démarche pour prendre en compte les dimensions temporelle et processuelle du fonctionnement des exploitations et de la durabilité. Il convient toutefois de préciser le contenu de la notion de mode de pilotage.

3.2.2) La gestion stratégique

Aborder la durabilité par le biais des modes de pilotage de l'exploitation nous conduit, davantage que par les logiques de fonctionnement, à considérer les choses du point de vue de l'agriculteur en tant qu'acteur, auteur des décisions et des pratiques qui orientent le fonctionnement de son exploitation. Notre réflexion se situe ici davantage dans le courant de recherche consacré à la gestion stratégique.

La notion de stratégie a été définie de multiples façons, selon les différentes approches théoriques de l'entreprise en sciences de gestion. Certaines définitions sont diffi-cilement utilisables dans le cadre de ce travail, parce qu'elles sont assez restrictives et mettent surtout en avant la dimension concurrentielle de l'action de l'entreprise dans son environnement.

Les approches qui nous semblent les plus intéressantes pour éclairer les différentes modalités de pilotage de l'exploitation sont celles qui reconnaissent à la fois la dimension délibérée et la dimension émergente de la stratégie. C'est le cas de celle de Marie José Avenier, avec la notion de stratégie tâtonnante ou "chemin faisant" (Avenier, 2005). En effet, d'une part elle prend en compte la complexité auxquelles les entreprises doivent faire face, que ce soit dans leur fonctionnement interne ou dans leurs relations avec leur environnement. Et par là-même, elle reconnaît l'importance, dans le fonctionnement de l'entreprise, des processus récursifs, de l'adaptation et des tâtonnements. D'autre part elle prend en compte les interactions entre les niveaux d'organisation et entre l'action et la vision stratégique. La vision stratégique désigne les objectifs à moyen ou long terme (la vision de l'avenir), réfléchis et explicités, alors que les actions stratégiques, conçues en fonction de la vision stratégique, relèvent du domaine de l'opérationnel et se caractérisent par les ruptures qu'elles apportent dans la trajectoire de l'entreprise. M-J. Avenier parle de « mise en œuvre tâtonnante d'actions délibérées au sein de situations émergentes » (Avenier, 1997), pour exprimer le fait que les actions s'inscrivant dans les stratégies sont réfléchies, intentionnelles, mais qu'elles sont aussi le produit d'aller-retours, d'interactions, de relations récursives, qu'elles apparaissent au fur et à mesure que les situations évoluent,

dans une interaction entre action et réflexion. Ces stratégies tâtonnantes engendrent et reposent sur de multiples apprentissages.

Cette approche s'applique aussi aux exploitations agricoles, mais avec peut-être une spécificité concernant celles en AB, pour lesquelles la complexité est en principe très présente dans le mode de production lui-même.

La théorie de M-J. Avenier rejoint pour partie celles de H. Mintzberg, dans la recon-naissance d'une relation étroite entre les dimensions délibérée et émergente des stratégies. Les réflexions de Mintzberg servent d'ailleurs de références théoriques pour des proposi-tions de démarches méthodologiques dans l'analyse des trajectoires et stratégies des agriculteurs (Mintzberg, 1987, in Girard, 2006 ; Moulin et al., 2008), par la notion de stratégie réalisée : « cohérence qui émerge de façon planifiée, au fur et à mesure, d’un ensemble de choix et d’actions réalisées » (Girard, 2006).

3.2.3) Stratégies de maintien, d'adaptation et d'exploration

Certains travaux en sciences de gestion sur la résilience apportent des nuances à la défini-tion de la stratégie comme devant nécessairement apporter des changements conséquents ou des ruptures dans la trajectoire de l'entreprise. Ils proposent de classer les stratégies des agriculteurs en deux grandes catégories, celles qui ont pour but le maintien, la permanence, qui permettent aux exploitations de se maintenir dans une certaine stabilité malgré les changements internes ou externes, et celles qui ont pour but l'adaptation et le changement, qui permettent de s'adapter et de se transformer quand cela paraît nécessaire ou opportun (Darnhofer et al., 2010 b). « La capacité adaptative d'une exploitation semble donc avoir deux composantes principales (cf Gallopin, 2006). D'un côté, il lui faut pouvoir surmonter les éventualités contextuelles, donc être capable de maintenir ou même d'améliorer sa situation, tout en faisant face aux aléas économique, social et écologique. Il lui faut donc pouvoir amortir les chocs, savoir « encaisser les coups durs » de telle façon que ceux-ci n'affaiblissent pas les aptitudes, ressources et compétences de l'exploitation. D'un autre côté, il lui faut pouvoir garder sa capacité d'améliorer sa condition par rapport à son contexte ou d'étendre son registre, donc élargir l'éventail des contextes auxquels elle peut faire face afin d'agrandir sa marge de manœuvre. Elle le fera en explorant de nouvelles activités ou en expérimentant de nouvelles combinaisons des ressources dont elle dispose. » (Darnhofer, 2010 c). Dans ce cadre, maintenir une entreprise dans un état de relative stabilité relève donc d'une stratégie.

Chacune de ces deux grandes stratégies se déclinent en différentes modalités. Darnhofer et al. (2010 b) distinguent quatre types de stratégies possibles pour les agriculteurs, dans les situations où ils doivent faire face à des changements dans l'environnement de leur exploi-tation :

– "exploiter" : dans des phases de relative stabilité, il s'agit de tirer parti des activités qui réussissent et des facteurs disponibles dans l'optique d'améliorer l'efficacité, notamment par les économies d'échelles et la spécialisation.

– "absorber" : dans un environnement changeant de façon soudaine et imprévisible, cette stratégie consiste à absorber les changements sans que cela modifie grande-ment l'exploitation.

– "ajuster" : quand il est nécessaire de reconfigurer les ressources et activités ou d'en mettre en œuvre de nouvelles.

– "transformer" : quand l'existence même de l'exploitation est remise en cause, il s'agit de la transformer en un système fondamentalement nouveau, de mettre en place des activités nouvelles très différentes de celles déjà en place.