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2.1 Introduction aux objets communicants

2.1.3 Le concept de Smart Object

Dans l’ouvrage « When things start to think » de M. Neil Gershenfeld (MIT Media Lab)24

[Gershenfeld, 1999] introduit la notion des « droits des choses », en indiquant trois caractéristiques qu'ils doivent posséder, à savoir : avoir une identité, accéder à d’autres objets et détecter la nature de son environnement. Cette notion est développée dans un rapport stratégique élaboré par quatre entreprises européennes de télécommunications, dont France Télécom [EURESCOM, 2000], en considérant un smart device comme un objet physique qui possède un processeur intégré, une certaine mémoire, des capteurs et/ou actionneurs et une connexion réseau. Plus précisément, le rapport mentionne qu’un dispositif doté de telles caractéristiques doit être capable d’agir avec l’environnement et/ou un utilisateur, doit être observable ou contrôlable sur un réseau et être capable de changer son état et ses réponses (sorties) pour fournir un service. L’utilisation d’une interface utilisateur sur l’objet n’est pas obligatoire, elle peut être exportée dans une application distante qui communique avec l’objet au travers d’une connexion réseau [Privat, 2000]. Selon ce dernier auteur, la connectivité réseau entres les objets est l’élément caractéristique.

France Télécom R&D, au travers de l’ouvrage de [Kintzig et al., 2002], définit un objet communicant comme un objet capable d’acquérir, de recevoir et de distribuer de l'information dans un environnement proche ou distant, et de réaliser et/ou de faire réaliser par d’autres objets des actions diverses. Il faut préciser que dans [Kintzig et al., 2003], la version anglaise de l’ouvrage « Objets communicants » parue en 2002, le terme smart object est utilisé comme terme équivalent à objet communicant.

Des travaux sur le concept smart objet ont été développés dans l’ETH (Swiss Federal Institute of Technology) à Zurich depuis quelques années. Le groupe de recherche (Distributed Systems Group)25

conduit par le professeur Friedemann Mattern, créé en 1999, poursuit des recherches dans les domaines de l’informatique répartie et de l’informatique omniprésente (Ubiquitous Computing). Pour [Mattern et Sturm, 2003] un smart object est un objet capable de s'adapter à l'environnement et de fournir des services utiles en plus de son but original. Il peut être équipé de moyens de connexion aux réseaux spontanés et d’avoir ainsi accès à n'importe quelle information ou permettre d'accéder à n'importe quel service sur Internet.

24http://www.media.mit.edu/ - MIT Media Lab

Comme exemple de smart objet nous présentons le prototype Mediacup développé à l’Université de Karlsruhe en Allemagne [Beigl et al., 2001]. La mediacup est une tasse à café dotée de capacités de perception, de communication et de traitement de l’information afin de gérer l’information contextuelle obtenue a partir de la tasse (Voir Figure 6a). Un scénario d’interaction considère plusieurs mediacups en interaction avec d’autres objets tels qu’un écran d’information sur une porte, une montre électronique, une machine à café et un serveur Internet. La Figure 6b montre l’interaction entre une montre et la mediacup. Un autre exemple de smart object est un smart-its. Un smart-its est une plate-forme (hardware) composée de plusieurs types de capteurs, un processeur et une mémoire locale, capable de se communiquer avec d’autres objets par radio fréquence [Beigl et Gellersen, 2003]. La Figure 6c illustre la structure d’un smart-its. Un système d’exploitation embarqué sur l’objet permet d’adapter son fonctionnement selon le type d’usage. Le but général est d’attacher un smart-its à des objets de la vie quotidienne afin d’augmenter leurs fonctionnalités et transmettre l’information contextuelle dérivée des capteurs.

(a) Mediacup (b) Interaction entre une montre et la

mediacup

(c) Smart-its

Figure 6 : Exemples de Smarts Objects : l’objet Mediacup et le composant intégré Smart-its. Il faut noter que les concepts de Smart Device et de Smart Object sont le résultat de l’évolution naturelle du domaine de l’électronique embarquée qui a conduit à la décentralisation et à l’enfouissement des capacités de traitement de l’information. Cependant, ces concepts sont essentiellement différents de par la complexité mise en jeu. Un smart device est un dispositif communicant complexe de haut niveau, comme par exemple un PDA (Personal Data Assistant) ou un téléphone portable. Par contre, la notion de smart objet dans nombreux travaux de recherche [Römer et Domnitcheva, 2002] [Mattern, 2003] [Lampe et Flörkemeier, 2004] [Siegemund, 2004] est associée à des objets physiques communicants de la vie quotidienne équipés, au moins, d’un moyen d’indentification automatique pour faire ainsi le lien entre l’objet physique et son image informationnelle disponible dans une infrastructure informatique.

Pour [Mattern, 2003] un objet physique équipé d’une étiquette électronique contenant une adresse Internet comme information numérique peut devenir un smart object. Comment ? En utilisant, par exemple, un dispositif mobile (comme un PDA ou un téléphone portable) pour lire cette adresse qui est stockée sur l’étiquette juste en le dirigeant sur l’objet. Ainsi, le dispositif peut afficher l’information associée à l’objet, stocké quelque part, accessible par Internet. Les détails de ce qui est montré dépendront du contexte de l’objet. L’objet communicant avec des capacités de communication et/ou de traitement de l'information peut éventuellement détecter leur environnement par l'intermédiaire de capteurs intégrés [Mattern, 2005]. En ce sens, un objet devient plus autonome et actif dans son cycle de vie. Ils pourraient également communiquer et coopérer avec d'autres objets et, théoriquement, accéder à toute sorte de ressources via Internet. Ceci ajoute une dimension

complètement nouvelle à de tels objets. Par exemple, l'objet pourrait non seulement communiquer avec des personnes et d'autres objets, mais également il pourrait découvrir où ils sont, quels autres objets sont dans leur proximité, et ce qui s’est passé avec eux auparavant (l’histoire des objets).

Selon [Römer et al., 2004], des applications innovantes sont possibles quand les objets réels deviennent smart object en ayant de l'information attachée à eux, et puis, étant directement associés à un système informatique ou liés à des services sur l'Internet. Sur la base de quelques expériences pratiques initiales, des prototypes de laboratoire ont été conçus pour tester le concept de smart object et son implémentation technologique. La Figure 7 présente le démonstrateur « smart box » adapté pour la gestion d’une boite à pharmacie [Floerkemeier et al., 2003].

En particulier, l’encadré de gauche détaille les capacités nouvelles conférées à l’objet « boite à pharmacie » afin d’obtenir des informations additionnelles au sujet des objets (par exemple dates d’expiration des objets) ; de connaître l’histoire de l'objet à l'intérieur de la boîte (par exemple depuis combien de temps l’objet a été stocké dans la boîte), d’accéder à distance au contenu actuel de la boîte et d’identifier qui a interagi avec la boîte. De plus, il est possible de surveiller discrètement le contenu de la boîte et de comparer le contenu actuel et le contenu désiré (indication des anomalies). Ce prototype utilise la technologie RFID pour identifier les médicaments.

Figure 7 : Le concept de « smart box » et l’application Smart Medicine Cabinet.

Comme exemple de smart object appliqué au domaine des vêtements, nous citons le concept smart clothing, dont le but est d’adapter un vêtement aux changements de l’environnement physique et aux besoins de son utilisateur afin de l’aider dans des scénarios d’interaction prédéfinis [Rantanen et al., 2002]. Ainsi, le vêtement peut agir comme un médium de communication afin d’alerter l’utilisateur dans cas d’une situation particulière (situation d’urgence, …), il peut agir aussi comme une plate-forme offrant de l’information en fonction du contexte (aide professionnelle, aide pour des personnes ciblées, …) en utilisant une interface intégrée naturellement au vêtement. Comme une application étendue du concept de smart object, nous citons le concept d’habitat intelligent pour la santé, qui vise à intégrer des capteurs et des actionneurs pour « suivre » les occupants, communiquer avec eux, et assister intelligemment les occupants dans l’accomplissement des tâches journalières et répétitives [Noury et al., 2003].

En résumé, nous pouvons conclure que le nouveau paradigme d’objets communicants ou smart objects s’appuie sur la possibilité d'inclure de nouvelles capacités dans un objet lui permettant de répondre à des demandes d’information faites par des entités intéressées ou de demander de l’information à d’autres entités. Egalement, l’objet peut invoquer des actions complexes, dépendant de sa nature et du contexte, pratiquement n'importe où et à tout moment, grâce à l’utilisation de technologies de

communication Internet, en pouvant ainsi transformer progressivement notre manière de vivre et travailler dans une « société d’objets » nouvellement constituée.