• Aucun résultat trouvé

Le jeu d’assemblage et d’articulation des es- paces et des sous-espaces, ouverts ou fer- més, ne se fait pas seulement sur un même plan mais également de manière verticale. La démarche des architectes a été menée via des concepts simples pour donner le senti- ment aux habitants de vivre dans un espace ample. Afin d’apporter une richesse spatiale aux lieux, des vues diagonales ont été amé- nagées entre les travées permettant d’agran- dir visuellement les espaces. Les habitants bénéficient donc d’une impression d’ampleur à l’intérieur de leurs habitations.

Le concept d’ampleur, en plus de permettre à la lumière de pénétrer très pro- fondément dans les pièces de vie, donne également la possibilité à l’air de circuler de manière naturelle entre les différentes zones. Suivant le même principe de zonage intérieur, à l’étage, un angle droit ouvert est créé dans le coin de l’habitation, orienté au sud. La « chambre de lumière » permet à l’air de cir- culer grâce à la chaleur emmagasinée dans la journée. Dans les pièces en surchauffe, avec l’air chaud qui monte et l’air plus froid qui des- cend, la circulation de l’air ventile le logement de manière naturelle. Le palier de jeu (ou de travail), également exposé plein sud, participe de la même manière à ce sentiment de spa- tialité. Un angle droit fermé au côté opposé est quant lui créé afin de protéger les habi- tations des vents froids du nord.

Grâce à l’organisation spatiale, un seul corps de chauffe est nécessaire pour fournir en chaleur toute l’habitation. Les loge- ments construits en première phase étaient munis d’un poêle central à mazout. Pour les phases ultérieures, la technique évoluant, un poêle à pellets est installé. Le système d’éva- cuation des fumées conduit la chaleur dans les chambres via les cloisons. Ce système mis en place permet aux habitants une gestion échelonnée de leurs dépenses énergétiques.

MISE EN ŒUVRE DU CONCEPT D’AMPLEUR

Et de conclure...

Mener une réflexion sur l’architecture en créant du « vide » permet aux espaces de se libérer et de s’ouvrir aux uns et aux autres. Cet agencement apporte une grande richesse spatiale à l’habitation en projetant sans cesse le regard des habitants vers les autres pièces, vers l’extérieur ou même de prolonger leur vue vers le paysage environnant. La variété des points de vue est accentuée par la lente gradation des espaces entre le domaine privé et le domaine public, entre l’espace intime et l’espace de sociabilité. Toute une palette de nuances entre privé, semi-privé, semi-public et public est offerte aux habitants. Cette pro- gression démontre la grande générosité des architectes envers les futurs habitants lors de la conception des logements. Leur but est atteint : concevoir un logement qui soit un véritable outil d’émancipation sociale.

Comme le soulignent très justement les auteurs de projet : « On n’habite pas seu-

lement son logement, mais aussi un ensemble complexe d’espaces qui vont du logement à la ville, en passant par la rue et le quartier. La qualité de l’habitat dépend aussi de la possibili- té qu’ont les habitants d’y retrouver des signes qui leur rappellent leur histoire personnelle ou collective. L’espace habité doit permettre enfin le développement des relations qui insèrent les individus dans la société et, suivant les circonstances, les soutiennent face à leurs difficultés. Il nous faut prendre en compte les deux dimensions complémentaires de la vie de l’individu : la vie intime et la vie sociale. Le groupement de logements est donc un projet particulier où nous pouvons manifester une égale attention à l’extériorité de l’individu qu’à son intériorité. »2

Terminons donc cet article par une citation de Philippe Rahm :

« Le changement climatique nous

oblige à repenser profondément lʼarchitecture et à déplacer notre intérêt d’une approche purement visuelle et fonctionnelle, à une ap- proche plus sensible qui sʼattarde d’avantage sur les paramètres invisibles et climatiques de lʼespace. Glissant du plein au vide, du visible à lʼinvisible, de la composition métrique à la composition thermique, lʼarchitecture comme météorologie ouvre d’autres dimensions, plus sensuelles et plus variables, dans lesquels les limites se dissipent et les pleins sʼévaporent. Il ne s’agit plus de construire des images et des fonctions, mais d’ouvrir des climats et des in- terprétations. À grande échelle, lʼarchitecture météorologique explore le potentiel atmos- phérique et poétique des nouvelles tech- niques du bâtiment que sont la ventilation, le

2 Texte issu de la documentation transmise par les archi- tectes lors de notre entrevue

chauffage, le renouvellement d’air double-flux ou l’isolation. À l’échelle microscopique, elle sonde de nouveaux champs de perception cu- tanée, olfactive, hormonale. Entre lʼinfiniment petit du physiologique et lʼinfiniment grand du météorologique, lʼarchitecture doit construire des échanges sensuels entre le corps et lʼespace et y inventer de nouvelles esthétiques capables de modifier durablement la forme et la manière dʼhabiter de demain. »3

«… modifier durablement la forme et

la manière d’habiter de demain. »…

La question soulevée par les au- teurs de projet est la suivante : « Quand la

construction devient-elle de l’architecture ? » La construction de logements publics a sou- vent donné lieu à des expérimentations avec, parfois, ses dérives. L’architecture est plus qu’un travail systématique qui consiste à placer des pièces côte à côte. La plus-value apportée par l’architecte ne se situe-t-elle pas dans la conception d’espaces de qua- lité ? Mais cette question dépasse celle de la simple différence entre « construction » et « architecture »… La conception des loge- ments publics est une véritable question de société : non seulement pour les personnes âgées comme nous l’avons vu dans un pré- cédent numéro mais, aussi (et surtout), pour les personnes précarisées qui représentent actuellement plus d’une personne sur trois à l’échelle mondiale.

La question de « l’habiter » semble simple… Nous y sommes tous confrontés au quotidien et cela devrait être aisé pour tout à chacun d’y répondre, non seulement

3 Pour une architecture météorologique, texte écrit par Philippe Rahm, architecte, http ://www.philipperahm.com/ data/about-f.html

en tant qu’habitant mais, également, en tant qu’architecte. Mais y répondre de manière prospective ne l’est pas… La complexité de l’ordinaire, nous ne pourrions mieux définir notre défi quotidien !

� Vue frontale d’un ensemble de logements © Fabrice Dor SPW/DGO4 � Vue frontale d’un logement unifamilial © Fabrice Dor SPW/DGO4 � Vue de l’ensemble des logements depuis la rue Félicien Rops © Fabrice Dor SPW/DGO4 > Vue de l’ensemble des logements construits en phase 3 © Fabrice Dor SPW/DGO4

51

51

LOGEMENT