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Couches minces de MoCr

5.2.3. Composition des films déposés

La composition des films a été caractérisée par spectroscopie EDX (voir chapitre 3, § 3.1.5.) pour différentes conditions de dépôt, afin d’évaluer d’éventuels écarts de composition par rapport à la cible, et de permettre ainsi une meilleure compréhension des propriétés des couches. La composition obtenue correspond à une moyenne de la composition sur l’épaisseur de la couche. Pour les figures 5.9. à 5.11., seuls les pourcentages relatifs de Mo et Cr dans les films ont été conservés, et les figures exposent seulement la composition en Mo, la composition en Cr étant complémentaire sur la base de 100%. Les éventuels éléments autres que ceux-ci, constituant des impuretés, ne sont pas présentés sur ces figures afin de permettre une comparaison directe avec la composition de la cible. La cible utilisée pour cette étude était composée de 80% massiques de Mo et 20% massiques de Cr, correspondant à environ 68,4% atomiques de Mo et 31,6% de Cr.

La fig. 5.9. montre les variations de la composition en Mo en fonction de la pression de dépôt, dans des films élaborés en l’absence de puissance RF dans la spire, les substrats étant au potentiel flottant. La composition obtenue varie très peu (entre 68,5% pour P = 0,67 Pa et 71% pour P = 6,7 Pa) et présente sensiblement la même stœchiométrie que la cible utilisée. Dans la mesure où la précision de la spectroscopie EDX est d’environ 1%, les légères variations observées ne sont pas considérées comme significatives.

Fig. 5.9. Evolution de la composition en Mo en fonction de la pression de dépôt, dans des couches déposées en l’absence de puissance RF dans la spire, pour des substrats au potentiel flottant.

La fig. 5.10. représente l’évolution de la composition en Mo, en fonction de la puissance RF dans la spire, pour des films déposés à une pression d’argon de 6,7 Pa, sur des substrats au potentiel flottant. De même que pour l’évolution en fonction de la pression, les variations de composition ne sont pas significatives (± 2% environ par rapport à la composition de la cible).

Enfin, la fig. 5.11. présente les variations de la composition en Mo en fonction de la polarisation du substrat, pour des films élaborés à des pressions de dépôt de 0,67 et 6,7 Pa. Pour ces deux pressions, le taux de Cr dans les couches diminue avec l’augmentation de la polarisation négative du substrat, et cet effet est davantage marqué pour une pression de 0,67 Pa. Ce comportement est directement lié à la réduction de la vitesse de dépôt, observée

Fig. 5.10. Evolution de la composition en Mo en fonction de la puissance RF d’alimentation de la spire, dans des couches déposées à P = 6,7 Pa, pour des substrats au potentiel flottant.

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 0 1 2 3 4 5 6 7

Pression d'argon (Pa)

Pourcentage de Mo (%) 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 0 50 100 150 200 250 300 Pspire (W) Pourcentage de Mo (%)

Fig. 5.11. Evolution de la composition en Mo en fonction de la polarisation du substrat, dans des couches déposées en l’absence de puissance RF dans la spire, pour des pressions de 0,67 et 6,7 Pa.

précédemment dans les mêmes conditions expérimentales, causée par la repulvérisation du film en cours de croissance. En effet, cette repulvérisation, par les ions et neutres énergétiques, s’effectue de manière sélective sur le Cr car son rendement de pulvérisation est plus élevé que celui du Mo (voir chapitre 2., tableau 2.1.), en partie car il est plus léger (leurs masses molaires respectives étant 96 g.mol-1 et 52 g.mol-1). Cet effet, lié à la polarisation du substrat lors du dépôt de couches minces, a fait l’objet de plusieurs études, dans des solutions solides métalliques diatomiques, comme le soulignent les travaux de Ramarotafika [Ram 1995] sur des films de WTi ou ceux de Rudeck et al. [Rud 1989] sur des couches d’AlCu.

Cette modification de la stœchiométrie par rapport à celle de la cible peut ainsi résulter en une quasi absence de Cr dans les conditions de bombardement les plus intenses. Ainsi, pour une polarisation de –300 V et une pression de 0,67 Pa, le taux de Cr dans les couches descend en-dessous des 2%, alors qu’il représente plus de 31,5% du matériau de la cible.

En outre, en présence du plasma secondaire lié à la spire RF, l’accentuation de l’effet sur la vitesse de dépôt précédemment observé s’accompagne d’une sélectivité de repulvérisation elle aussi intensifiée, en particulier à haute pression. Ainsi, pour une puissance RF d’alimentation de la spire de 300 W, une pression d’argon de 6,7 Pa et une polarisation du substrat de –170 V par rapport au plasma, les films déposés ne contiennent que du Mo.

Les résultats présentés jusqu’alors ont établi le lien existant entre les paramètres procédé et la composition des couches déposées, cependant les valeurs exposées représentent une moyenne de la composition sur des zones larges, et ne permettent pas de repérer

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 -300 -250 -200 -150 -100 -50 0 Polarisation du substrat (V) Pourcentage de Mo (%) 5 mTorr 50 mTorr 0,67 Pa 6,7 Pa

caractérisations complémentaires ont été réalisées sur des zones beaucoup plus réduites, par spectroscopie EDX en microscopie électronique à transmission. Cette technique permet d’analyser des zones à l’aide d’une sonde d’un diamètre d’environ 1 nm, et les profondeurs de couches analysées correspondent à l’épaisseur après amincissement ionique, qui varie de quelques couches atomiques en surface à quelques dizaines de nanomètres.

Ces analyses ont été effectuées sur des échantillons à morphologie colonnaire, élaborés dans diverses conditions expérimentales, et dont la composition globale (mesurée par EDX) était semblable à celle de la cible. Elles ont permis de caractériser la composition à différents endroits de la couche, repérés par des croix sur la figure 5.11., entre les colonnes et au sein de celles-ci. Chaque type d’endroit (par exemple « entre les colonnes au niveau de la surface ») a été caractérisé de manière systématique au minimum une dizaine de fois le long de la couche.

Aucune différence significative de composition n’a été relevée dans aucun des cas entre les différentes zones sondées, les compositions restant conformes à celles de la cible, et laissant apparaître une homogénéité de la solution solide MoCr à l’échelle de la sonde considérée (≈ nm3), sans ségrégation ni phénomène de diffusion de surface.

Fig. 5.12. Localisation, représentée par des croix, des zones caractérisées en spectroscopie EDX par microscopie à transmission électronique.

x x x x x x x x

Enfin, les analyses présentées jusqu’ici faisaient abstraction des éventuelles impuretés observées lors de la caractérisation des couches par spectroscopie EDX. Cependant les analyses effectuées ont mis en valeur un certain nombre d’entre elles, les principaux éléments étant Al et Fe, outre le Si du substrat et l’O dû à l’oxydation de la surface. Les taux d’impuretés contenues dans les couches sont généralement compris entre 0 et 10%, même s’ils peuvent parfois atteindre 20%. Le taux de Fe est la plupart du temps inférieur à 1%, et est attribué à la pulvérisation de l’acier de la spire, dans la mesure où sa présence n’apparaît que dans les couches pour lesquelles le plasma secondaire a été utilisé. La présence de taux parfois élevés d’Al dans les couches est imputée à deux phénomènes : la pulvérisation du « nez » de la source magnétron, en duraluminium, ainsi que la présence d’Al dans le réacteur en raison de campagnes expérimentales d’AlN effectuées pour d’autres études, dont l’adhérence et la dureté importantes en font un matériau très difficile à éliminer des parois et de la spire. De même que pour le Fe, les taux d’Al observés sont plus élevés en présence du plasma secondaire, qui favorise la pulvérisation des parois ainsi que des matériaux présents sur la spire.

Il est à noter que l’incorporation d’argon n’a jamais été observée, et que sa présence éventuelle dans les films est donc largement inférieure à 1%.

L’homogénéité de composition des films, à l’échelle évaluée en MET – quelques centaines d’atomes étant donnée l’épaisseur en bord de couche et la sonde utilisée - a posé la problématique d’une éventuelle sur-structure des éléments Mo et Cr dans l’alliage, à savoir d’une organisation périodique éventuelle des deux éléments au sein de la solution solide. Afin d’évaluer la validité d’une telle possibilité, des analyses par DRX, ainsi que par diffraction d’électrons en sélection d’aire (SAED – Selection Area Electron Diffraction) par MET, ont été réalisées.