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4.6 Validation de l’optimisation sur la période 2006-2011

4.6.3 Comparaison avec les mesures de terrain

Lors de la campagne de terrain de mars 2011, la hauteur de neige ainsi que l’équivalent

en eau ont été mesurés (Chapitre 1). Le tableau 4.3 présente une comparaison entre les

valeurs mesurées et simulées, avec ou sans optimisation des données NARR, au mois de

mars 2011 ainsi que l’équivalent en eau et la hauteur de neige sur toute la durée de la

période de validation. L’EEN mesuré lors de la campagne était de 357±21 kg m−3, et

l’EEN modélisé à la date du 15 mars 2011 avec les données NARR brutes était de 197 kg

m−3. Après optimisation, l’EEN modélisé est de 302 kg m−3, ce qui présente une meilleure

correspondance avec les mesures. En revanche, la hauteur de neige mesurée sur la calotte

était de 0,99±0,17 m, alors que la hauteur modélisée correspondante est de 1,42 m (1,27 m

sans optimisation) (Figure 4.20). Cela suggère que SURFEX-CROCUS sous-estime la

den-sification du manteau neigeux sous les conditions atmosphériques auxquelles est soumise

la calotte Barnes. En effet, les mesures de terrain donnent une masse volumique moyenne

sur tout le manteau neigeux de 358 kg m−3, alors que le simulation optimale

SURFEX-CROCUS donne une masse volumique moyenne de 203 kg m−3 sur la même période. Cela

peut être du à une prise en compte insuffisante de la densification par le vent, soufflant

plus souvent et plus fort que dans un environnement alpin pour lequel ce modèle a été

initialement conçu (voir section 1.3.5). Ces résultats sont à mettre en perspective avec

4.6 - Validation de l’optimisation sur la période 2006-2011

Tableau4.3 – Comparaison entre l’équivalent en eau de la neige et l’épaisseur du manteau

neigeux mesuré et simulé avec ou sans optimisation, au mois de mars 2011.

Mesure in-situ SURFEX avec opt. SURFEX sans opt.

EEN (mm) 357±21 302 197

Épaisseur (m) 0,99±0,17 1,42 1,27

l’évolution inter-annuelle de l’équivalent en eau et de la hauteur de neige au sommet de la

calotte, présentées figures 4.19 et 4.20.

Figure 4.19 – Évolution temporelle du bilan de masse de surface (quantifié en terme

d’équivalent en eau, EEN) au sommet de la calotte Barnes. Simulations réalisées sur la

période 2006-2011 avec les données NARR optimisées (courbe pleine bleue) et non

opti-misées (courbe pointillée verte). L’initialisation est effectuée au 1er juillet 2006 basé sur

l’état optimal déterminé lors du processus d’optimisation.

Le principale conclusion que l’on peut tirer des figures 4.19 et 4.20 est que, comme

pour les résultats de l’optimisation sur 2002-2006, certaines années présentent un bilan de

masse positif alors que le BM S est négatif sur d’autres. Le bilan de masse cumulé sur

toute la période de validation est par ailleurs proche de zéro (BM S annuel moyen de +2,6

cm an−1 sur la période de validation après optimisation, contre un BM S annuel moyen

de -25 cm an−1 sans optimisation). Cela suggère donc que les couches de glace bulleuses

observées lors des forages in-situ sont bien issues d’une formation de type glace

surim-posée, mais que cette formation n’est pas régulière année après année comme supposé

initialement. En effet, certaines années il n’y a pas de formation de glace surimposé et il

peut même arriver que la glace sous-jacente déposée les années précédentes soit en partie

perdue lors de la période de fonte estivale. Cette observation est en accord avec les images

Chapitre 4 : Modélisation et analyse des processus d’évolution de la calotte

Barnes : accumulation, fonte et bilan de masse de surface

Figure4.20 – Évolution temporelle de la hauteur de neige au sommet de la calotte Barnes.

Simulations réalisées sur la période 2006-2011 avec les données NARR optimisées (courbe

pleine bleue) et non optimisées (courbe pointillée verte). L’initialisation est effectuée au

1er juillet 2006 basé sur l’état optimal déterminé lors du processus d’optimisation. Les

hauteurs de neige sont normalisées à chaque début de saison hivernale.

satellites montrant le développement d’un important réseau de bédières en été, témoignage

d’un importante écoulement d’eau liquide, et ce même jusqu’au sommet de la calotte. Le

bilan de masse de surface moyen sur 2002-2011, comprenant les périodes d’optimisation et

de validation est de +6,8 cm an−1, ce qui est très proche de l’équilibre.

Ces résultats peuvent être comparés avec les travaux de Mahaffy (1976), qui donnaient

un BM S au sommet de la calotte de l’ordre de +45 cm a−1 dans les années 1970, alors

que les durées de fonte estivales étaient plus courtes de l’ordre de 50% (Chapitre 2), ainsi

qu’une ligne d’équilibre à une altitude de 900 m environ. Il semble donc que sur les

der-nières décennies le bilan de masse de surface au sommet de la calotte ait fortement diminué,

et que la ligne d’équilibre atteigne actuellement une altitude proche du sommet, soit 1100

m environ.

Discussion par rapport aux variations d’élévation de la surface

Il est par ailleurs intéressant de mettre en perspective les variations d’élévation de

l’altitude du sommet de la calotte Barnes avec les variations duBM S. En effet, la variation

d’élévation (dh/dt) à un point donné peut s’écrire suivant la relation :

dh/dt=BM S+Vdyn, (4.7)

Vdyn représente la vitesse verticale issue de la dynamique glaciaire.

Les résultats des travaux de Gardner et al. (2013) montrent que l’altitude sommitale

de la calotte présente une variation moyenne de -0,26 m an−1 sur la période 1960-2010

4.6 - Validation de l’optimisation sur la période 2006-2011

Tableau 4.4 – Comparaison des variations d’élévation moyennes annuelles (dh/dt) au

sommet de la calotte Barnes pour différentes périodes de temps.

Période 1960-2010 1995-2000 2000-2011

dh/dt(m an−1) -0,26±0,08 -0,32±0,07 -0,62±0,05

Source Gardner et al. (2013) ATM ATM

(Figure 4.21). Ces données sont obtenues à partir de la comparaison des MNT de la

base de données DNEC (Données Numériques d’Élévation du Canada) de 1960 et des

données IceSat de 2010. Cependant, une analyse plus fine à l’aide de données altimétriques

issues du programme ATM (Airborne Topographic Mapper) de la NASA et disponibles

pour les années 1995, 2000 et 2011, a été réalisée par Charles Papasodoro (CARTEL,

communication personnelle). Cette analyse met en évidence une accélération de la perte

d’altitude dans la période récente du sommet de la calotte Barnes (Tableau 4.4). Ainsi,

avec une tendance moyenne calculée sur la période 1995-2011 de -0,53±0,04 m an−1, on

obtient une tendance moyenne sur 1960-1995 de -0,14 m an−1, et si l’on suppose que la

perte d’altitude avait commencé à s’accélérer avant 1995, on peut estimer que la variation

d’altitude dans les années 1970 était proche de zéro. Étant donné que leBM S de la calotte

déterminé par Mahaffy (1976) était de +45 cm a−1 dans les années 1970, cela permet

d’estimer que la vitesse verticale due à la dynamique glaciaire au sommet de la calotte est

du même ordre de grandeur, à savoir de l’ordre de -50 cm an−1en première approximation.

L’évolution de ce type de dynamique glaciaire est à considérer sur une échelle de temps de

plusieurs décennies et l’on peut considérer, malgré une probable tendance à l’accélération

de cette vitesse verticale due au contexte de perte de masse important sur les flancs de

la calotte, que cet ordre de grandeur reste valable aujourd’hui (Pagli et al., 2007). Ainsi,

un bilan de masse proche de l’équilibre sur la dernière décennie tel qu’il a été calculé

suite au processus d’optimisation semble cohérent avec l’ordre de grandeur des variations

d’élévation de l’altitude sommitale sur la même période. Au contraire, le bilan de masse

issu des simulations non optimisées aurait toutes les chances de conduire à une perte

d’altitude supérieure à ce qui est observé.

Chapitre 4 : Modélisation et analyse des processus d’évolution de la calotte

Barnes : accumulation, fonte et bilan de masse de surface

Figure 4.21 – Carte des variations d’altitude (en m a−1) de la calotte Barnes entre 1960

et 2010 déterminées à partir de modèles numériques de terrain issues de mesures

aéro-portées et des données d’imagerie stéréoscopique du satellite SPOT-5. Les zones noires ne

comportent pas de données. Source : (Gardner et al., 2013)

4.7 Discussion sur la validation du processus d’optimisation