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3.10 Financement

4.3.1 La cohorte ELFE

L’étude ELFE (Etude Longitudinale Française depuis l’Enfance) est une cohorte de nais-sances qui suit 18 329 enfants, représentatifs des enfants nés en France en 2011, et recrutés dans 320 maternités sélectionnées par échantillonnage aléatoire [2]. ELFEvise à suivre les enfants de la naissance à l’âge adulte. Pour être inclus, les enfants devaient être singletons ou jumeaux, nés après au moins 33 semaines de gestation, d’une mère âgée d’au moins 18 ans et ne prévoyant pas de déménager hors de France métropolitaine dans les trois ans suivant l’inclusion dans l’étude. Les mères devaient pouvoir donner leur consentement en français, en anglais, en arabe ou en turc. Les données furent collectées à la naissance de l’enfant via des entretiens en face-à-face menés par des sages-femmes et par des auto-questionnaires. Des informations sur la dépression maternelle furent collectées par un entretien téléphonique aux deux mois de l’enfant, à un an et deux ans. L’étude ELFEa reçu l’approbation des instances françaises réglementant la conduite éthique de la recherche (Comité Consultatif sur le Traitement des Informations pour la Recherche en Santé :CCTIRS; Commission National Informatique et Libertés :CNIL). L’échantillon de la présente étude comprenait 14 587 femmes qui ont donné naissance à des singletons et qui avaient des données complètes sur les scores de dépression postpartum, la position socioéconomique, le soutien social pendant la grossesse, le statut de migratoire et les autres covariables. (Figure4.2)

4.3.2 Mesures

4.3.2.1 Dépression postpartum (DPP)

Les symptômes dépressifs en postpartum furent évalués deux mois après la naissance de l’en-fant, à l’aide de l’Edinburgh Postnatal Depression Scale (EPDS) [30]. L’échelleEPDScomprend dix items concernant la semaine précédant l’administration du questionnaire. Chaque question a quatre réponses possibles, pour lesquelles sont attribués entre 0 et 3 points. Ainsi, le score total d’EPDSvarie de 0 à 30 points. Une version françaiseEPDS a été validée [70,69]. L’alpha de Cronbach pour notre échantillon d’étude était de 0.80. Dans les analyses, le score EPDSfut utilisé comme une variable continue.

Figure 4.2 – Flowchart décrivant la sélection de la population d’étude, cohorte ELFE 2011-2013 * Les participants ayant émis leur souhait de ne plus participer à l’étude et que leurs données soient effacées ont été exclus des analyses

4.3.2.2 Position socioéconomique (PSE)

La position socioéconomique fut mesurée à l’aide de cinq indicateurs : 1) le niveau de diplôme le plus élevé atteint par la mère (<lycée ; lycée ; bac+2 ; > bac+2), 2), la catégorie sociopro-fessionnelle (aucune ; basse (employées, ouvrières) ; intermédiaire (professions intermédiaires, agricultrices, artisans, commerçantes et cheffes d’entreprise) ; élevée (cadres et professions intel-lectuelles supérieures)), 3) l’emploi de la mère pendant grossesse (non ; oui), 4) les revenus du ménage par unité de consommation, c’est à dire pondérés par le nombre de personnes résidant au sein du ménage [229] et 5) les difficultés financières pendant la grossesse (oui ; non).

4.3.2.3 Soutien social pendant la grossesse (SSG)

Le soutien social pendant la grossesse fut évalué en distinguant le soutien social informel perçu du soutien social formel effectivement reçu pendant la grossesse. Le soutien informel était caractérisé par 1) de bonnes relations avec le conjoint (disputes fréquentes avec le conjoint : non ; oui), 2) un soutien perçu comme satisfaisant du partenaire (non ; oui) et 3) un congé de paternité (déjà pris ou l’intention de le prendre : non ; Oui). Le soutien formel fut évalué par 1) la présence à l’entretien prénatal précoce (non ; oui) et 2) le nombre de classes de préparation à la naissance et à la parentalité auxquelles la mère a assisté. La caractérisation du soutien social informel et formel dans cette étude est décrite dans un autre article [230]. En bref, l’entretien prénatal précoce, mené par une sage-femme, est en principe proposé à tous les futurs parents. Il s’agit d’un entretien de 45 minutes au cours duquel les futurs parents ont la possibilité d’aborder leur projet de naissance et leurs préoccupations concernant l’environnement social de la grossesse, leurs difficultés psychologiques ainsi que d’autres éléments qui pourraient affecter la grossesse [141].

4.3.2.4 Statut migratoire

La construction du statut migratoire maternel a été détaillée dans un précédent article [173]. Brièvement, le statut migratoire était catégorisé de la manière suivante : 1) les femmes non immigrées (françaises nées de parents français), 2) les femmes descendantes d’immigrés (françaises avec au moins un parent immigré) et 3) les femmes immigrées de première génération.

Figure 4.3 – Modèle de mesure pour la variable latente décrivant la position socioéconomique, cohorte ELFE 2011-2013, N = 16 513

4.3.2.5 Covariables

Les facteurs de confusion potentiels dans les associations entre la position socioéconomique et la dépression postpartum, la position socioéconomique et le soutien social pendant la grossesse ou le soutien social pendant la grossesse et la dépression incluaient : l’âge de la mère et du père à la naissance (en continu), la parité (0 ; ≥ 1 autre enfant en sus de l’enfant ELFE), le statut marital (mariée ; PACSée ; autre), le statut d’emploi du conjoint (oui ; non), le désir de grossesse (timing satisfaisant : oui ; non), les antécédents de dépression postpartum (oui ; non), les difficultés psychologiques pendant la grossesse (oui ; non), le sexe de l’enfant (fille ; garçon) et l’allaitement à la naissance (exclusif ; non exclusif ; non).

4.3.3 Analyses statistiques

Cette étude visait à quantifier l’effet médiateur du soutien social pendant la grossesse dans les inégalités sociales vis-à-vis de la dépression postpartum maternelle, selon le statut migratoire maternel. Dans un premier temps, la position socioéconomique fut construite comme une variable latente, à l’aide d’un modèle de mesure, expliquant le plus haut niveau d’éducation atteint, la catégorie socioprofessionnelle et l’emploi pendant la grossesse de la mère, ainsi que les revenus du ménage par unité de consommation et les difficultés financières pendant la grossesse. (Figure

4.3)

Les associations entre 1) la position socioéconomique et les différents aspects du soutien social pendant la grossesse, 2) la position socioéconomique et la dépression postpartum et 3) les aspects du soutien social pendant la grossesse et la dépression postpartum furent estimées par

des modèles de régression linéaire (pour la dépression postpartum) ou logistique (pour le soutien social pendant la grossesse) bivariées et multivariées, en fonction du type de l’outcome. Ensuite, ces analyses furent combinées dans une analyse de médiation multiple afin d’estimer i) l’effet direct naturel de la position socioéconomique sur la dépression postpartum ii) les effets indirects naturels et les proportions médiées de la position socioéconomique sur la dépression postpartum, passant par chacun des cinq aspects du soutien social pendant la grossesse identifiés [231]. L’effet total de la position socioéconomique sur la dépression postpartum est défini comme la somme des effets directs et indirects. Comme certains médiateurs potentiels étaient corrélés, nous avons utilisé une modélisation de médiation multiple basée sur les travaux de Nguyen et al. [197]. La qualité de l’ajustement des modèles de médiation a été évaluée en utilisant l’erreur quadratique moyenne d’approximation (RMSEA), une valeur de 0.06 ou moins indiquant un ajustement du modèle acceptable ainsi que l’indice d’ajustement comparatif (CFI) et l’indice de Tucker-Lewis (TLI) mesurant les écarts entre les données et le modèle hypothétique, avec une valeur de 0.90 ou plus indiquant un ajustement acceptable et une valeur supérieure ou égale à 0.95 indiquant un bon ajustement [232].

Malgré l’inclusion des covariables précédemment mentionnées, nous ne pouvions pas exclure l’absence de mesure ou de contrôle pour certains facteurs de confusion potentiels. Afin de tester la robustesse de nos analyses en présence de tels facteurs, nous avons effectué des analyses de sensibilité en calculant des e-values, définies comme les forces d’association entre au moins un facteur de confusion non mesuré et la position socioéconomique, les aspects du soutien social pendant la grossesse ou la dépression postpartum, qui rendrait les associations statistiquement non significatives [199, 200]. Les e-values sont présentées sous forme d’odds ratio (OR) ou de risque relatif (RR). Les analyses de médiation ont été conduites avec MPLUS 8.1 (Muthén et Muthén) et les e-values ont été calculées à l’aide du package R EValue [201].

4.4 Résultats