• Aucun résultat trouvé

1.4 Classification des stratégies

1.4.3 Classification de RUBIN (1987)

On peut dire que c‟est à partir des travaux de RUBIN (1987) qu‟on constate une véritable ébauche de classification des stratégies d‟apprentissage. Les stratégies d‟apprentissage peuvent être définies comme un ensemble d‟opérations mises en œuvre par l‟élève afin de saisir ou de comprendre la langue cible, de l‟intégrer dans sa mémoire à long terme et de la réutiliser (CYR, 1998). RUBIN (1989) propose une classification des stratégies d‟apprentissage d‟une L2 qui reflète les trois étapes de la construction du savoir identifiées par WENDEN (1983). En plus, RUBIN caractérise, pour la première fois, les stratégies que

DANSEREAU nomme “stratégies primaire et secondaire”. Préférant plutôt les distinguer sous l‟appellation des stratégies directes – c‟est-à-dire celles contribuant directement à l‟apprentissage, elle y classifie des processus de compréhension ou de saisie des données dont les sous-divisions concernent les stratégies de clarification et de vérification, les stratégies de dévinement ou d‟inférence, les stratégies de raisonnement déductif, les stratégies de ressourcement, les stratégies de mémorisation, les stratégies de pratique et les stratégies d‟autorégulation. Quant à la catégorie des stratégies d‟appui que RUBIN désigne comme stratégies indirectes – du fait qu‟elles permettent l‟apprentissage sans y contribuer directement, elle y inclut des stratégies sociales. Ce sont des activités qui donnent l‟occasion aux apprenants de pratiquer socialement leur savoir de la langue (par exemple, en initiant des conversations avec ses pairs, en participant à des événements socioculturels, en demandant de l‟aide à ses collègues, son professeur ou aux locuteurs natifs). Dans ce groupe se trouvent les stratégies de communication, la paraphrase, le mime, les gestes, le recours aux synonymes ou aux termes apparentés dans sa L1 ou dans une autre langue.

Toutefois, il faut noter que RUBIN est la première chercheure, à notre connaissance, à identifier des stratégies qui permettent de comprendre la langue cible, une taxonomie qui n‟existe pas en soi dans les classifications de ses successeurs. Elle y décrit des stratégies qui, à notre avis, s‟appliqueraient aussi à la compréhension des informations sur des sites Internet en français. Certes, à l‟époque où elle menait sa recherche, l‟Internet n‟avait pas encore intégré la classe de langue. Autrement dit, elle n‟avait aucune utilité pédagogique par rapport à l‟enseignement/apprentissage des langues étrangères. Mais aujourd‟hui, ses résultats seraient tout aussi bien applicables à l‟activité de navigation sur l‟Internet.

Le tableau 1 ci-dessous présente les stratégies répertoriées dans la classification de RUBIN.

Tableau 1 : Classification des stratégies de compréhension par RUBIN (1989)

(Source : CYR, 1998 : 36)

Au niveau des stratégies de compréhension, RUBIN identifie des stratégies pour vérifier la compréhension de l‟information, comme dans le cas de l‟apprenant qui demande à l‟enseignant de reprendre l‟explication d‟une notion. Elle inclut aussi des stratégies pour obtenir la validation de son énoncé (l‟accord sur le sens grâce à la réaction de l‟interlocuteur). Aussi, dans cette catégorie, RUBIN intègre les procédés qui permettent à l‟apprenant de confirmer le sens des mots et expressions de la langue cible : les stratégies de devinement de sens (par connaissances antérieures, par traduction, par des indices contextuels et situationnels, etc.), les stratégies de raisonnement (par induction, déduction, analogie, etc.). Enfin, elle cite des stratégies qui permettent aux apprenants de trouver le sens des éléments linguistiques comme le recours à un dictionnaire, un manuel ou à un traducteur.

Nous pensons que la navigation sur des sites Internet en français servirait de tremplin à l‟exercice des différentes stratégies de compréhension de la langue chez les apprenants ghanéens du FLE. Puisque la tâche d‟apprentissage repose sur des sites authentiques, c‟est-à-dire non-didactisés, les étudiants trouveront des occasions pour mettre à l‟épreuve leurs propres stratégies pour comprendre les informations brutes du site. L‟objet de cette étude étant de vérifier les stratégies de compréhension déployées durant la navigation sur l‟Internet, il est judicieux de choisir des sites Internet qui incitent les apprenants à appliquer plusieurs gammes de stratégies dont évidemment celles identifiées par RUBIN. C‟est en cela que l‟étude en question est novatrice puisqu‟elle permettra de voir si les stratégies de compréhension adoptées sur l‟Internet sont différentes de celles adoptées pour la compréhension sur des supports textuels ou audio. Ce qui nous permettrait de dégager justement quels éléments de la navigation sur l‟Internet favorisent la compréhension et de quelle manière cela se passe. L‟étude nous permettra aussi de mettre en rapport les stratégies de compréhension identifiées avec les classifications existantes (RUBIN, 1989 ; OXFORD, 1990 ; O‟MALLEY et CHAMOT, 1990) dans leurs discussions.

Par ailleurs, les classifications de RUBIN permettent aussi de dégager des stratégies directes pour mettre en mémoire des objets linguistiques qui intéressent l‟apprenant de la langue étrangère. Elle cite, par exemple, des stratégies mnémoniques basées sur des relations phoniques, sémantiques, sensorielles qu‟établissent les apprenants avec les objets d‟apprentissage, l‟association des mots à des contextes spécifiques d‟emploi et à des images, et aussi la pratique mentale des éléments linguistiques. Puisque l‟Internet a pour vertu de présenter des informations à l‟aide de multiples canaux sensoriels, nous pensons que la navigation sur des sites commerciaux faciliterait des opérations de mémorisation de la langue chez les apprenants du FLE.

Enfin, RUBIN touche à un point important qui concerne l‟utilisation des éléments linguistiques mémorisés par l‟apprenant. Il s‟agit des procédés de rappel utilisés par l‟apprenant lors d‟un échange dans la langue étrangère. Dans cette catégorie, elle incorpore des stratégies de communication en ligne comme se parler d‟abord à soi-même, imiter des locuteurs compétents, s‟auto-corriger pendant la production, et quelques stratégies sociales comme demander des points d‟éclaircissement afin de mieux planifier sa réponse. Des communications synchrones sur l‟Internet comme, „le chat‟ sur “Facebook” ou “Yahoo Messenger”, peuvent préparer les apprenants du FLE à mieux gérer le stress associé à la

conversation directe dans la langue étrangère. Les forums en ligne, que ce soit en groupe ou individuel, peuvent aussi aider les apprenants ghanéens du FLE à découvrir les stratégies les plus adaptées à des situations d‟échanges langagiers.

Voir ci-dessous, le tableau récapitulatif des stratégies de mémorisation et d‟utilisation de la langue cible.

Tableau 2 : Classification des stratégies de mémorisation et de récupération par RUBIN

(Source : CYR, 1998 : 37)

La classification proposée par RUBIN, permet néanmoins de dégager clairement trois types distincts de stratégies : les stratégies d‟apprentissage, les stratégies de communication et les stratégies sociales. Pour la première fois, ces travaux offrent une opportunité de voir à

quoi correspondent concrètement les stratégies qui permettent d‟apprendre une langue étrangère mais aussi de l‟utiliser. Les distinctions observées influenceront beaucoup les recherches ultérieures, notamment celle d‟OXFORD (1990).