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4.2 La composition cellulaire de la cicatrice médullaire

4.2.2 La cicatrice gliale

4.2.2.1 L’astrogliose

La zone gliale, commence à se mettre en place dès les deux premiers jours après la lésion, et est constituée principalement par des astrocytes hyper-réactifs. Ceux-ci voient leur prolifération

augmenter entre le 7èmeet le 10èmejour et s’arrêter 14 jours après la lésion [130].

Leur degré de réactivité est dépendant des signaux présents au niveau du microenvironnement lésionnel, tels que les cytokines et chimiokines pro-inflammatoires et des récepteurs présents au niveau des cellules tels que les DAMP (Damage Associated Molecular Pattern) [131].

Ces astrocytes subissent une prolifération massive, des changements morphologiques (hypertrophie) et commencent à surexprimer des marqueurs comme la GFAP, la vimentine et Nestine [132, 133], suivi d’un réarrangement spatial aboutissant à la formation d’une bordure étroite qui entoure le cœur de la lésion [134]. Cette bordure d’astrogliose forme la cicatrice astrocytaire, assez différente des astrocytes réactifs présents dans les tissus neuraux adjacents [135]. La maturation de cette cicatrice astrocytaire est médiée par la signalisation de STAT-3 (Signal transducer and activator of transcription 3) et l’expression des protéines kinase MAP3K13 (Mitogen-activated protein 3 kinase 13) [136].

Concernant l’origine des astrocytes formant cette cicatrice ou zone gliale, plusieurs études ont montré leur provenance de deux origines différentes. Une première partie des astrocytes dérivent des cellules épendymaires du canal central. Suite à la lésion, les cellules épendymaires, normalement quiescentes, se voient activées, elles prolifèrent, quittent le canal central, migrent au niveau du site de la lésion où elles se différencient en astrocytes, formant, ainsi, la partie la plus profonde de la cicatrice gliale, en contact avec la cicatrice fibrotique. La deuxième composante gliale provient des astrocytes résidents qui composent la couche périphérique de cette même cicatrice [fig. 4.5] [70,137].

FIGURE4.5 Origine et distribution cellulaire de la cicatrice gliale de la moelle spinale. La cicatrice gliale est formée par des astrocytes provenant de deux origines ; A) des astrocytes résidents qui composent la couche périphérique de cette cicatrice (rouge) et B) des astrocytes dérivant des cellules épendymaires du canal central suite à leur réactivité après la lésion qui forment la partie la plus profonde de la cicatrice gliale (vert) entourant la

Cependant, récemment, ces résultats ont été remis en cause par une étude de Ren et al. dans laquelle, ils affirment que ces nouveaux astrocytes proviennent uniquement des astrocytes résidents et que les cellules épendymaires ne contribuent pas à la mise en place de la cicatrice gliale. Ils décrivent également que la réactivité des cellules épendymaires est locale et dépendante du modèle de la lésion. Cette étude est basée sur l’utilisation d’un modèle de souris transgénique Knock-in FoxJ1-CreERT2, permettant le traçage du devenir des cellules épendymaires [118]. Toutefois, ces résultats peuvent s’expliquer par le modèle de souris utilisé. En effet, ce modèle Knock-in FoxJ1-CreERT2 induit une mutation au niveau du promoteur du gène FoxJ1, de ce fait les souris homozygotes pour cette construction sont FoxJ1-/-; ces souris n’arrivent pas à terme et meurent durant le développement embryonnaire. De la même façon, dans le laboratoire, nous avons montré aussi bien in vitro, qu’in vivo que les souris hétérozygotes FoxJ1+/- présentes une altération du potentiel souche médullaire. Notamment, in vitro, le nombre de neurosphères obtenues à partir de moelles de souris Knock-in FoxJ1-CreERT2est significativement inférieur au nombre de neurosphères obtenues à partir de moelles de souris WT [60,61].

Ces astrocytes dérivés des cellules épendymaires sont des éléments essentiels afin de limiter les dégâts tissulaires et freiner leur propagation ainsi que prévenir la mort cellulaire. Ceci a été étudié par Sabelström et al. où, ils ont montré que le fait d’inhiber la contribution à la cicatrice gliale par les cellules épendymaires provoque une exacerbation de la lésion aboutissant à des atteintes axonales plus importantes que chez les animaux contrôles. Ceci a pu être démontré via un modèle expérimental FoxJ1-CreERT2

::YFP-Rasless qui induit, suite à l’injection du tamoxifène, l’inhibition du cycle cellulaire dans les seules cellules épendymaires [138]. Il a pu également être démontré que le lien étroit entre le deux zones ; astrocytaire et fibrotique, est médiée par des éphrines B2, ce qui permet de confiner les cellules immunitaires et les fibroblastes au niveau de l’épicentre de la lésion et d’éviter leur infiltration au niveau de la zone neurale saine avoisinante [139].

4.2.2.2 Les précurseurs oligodendrocytaires : OPC -NG2

Les précurseurs oligodendrocytaires exprimant le NG2 (neuron-glial antigène 2) constituent l’une des composantes principales de la cicatrice médullaire. Suite à la lésion, ces OPC-NG2 deviennent réactifs et subissent une hypertrophie cellulaire et une expression accrue de NG2. En effet, leur prolifération devient plus massive en s’entremêlant avec les cellules de la cicatrice gliale qui entourent le cœur de la lésion [140, 141]. Plusieurs études ont montré la contribution de ces OPC-NG2 au niveau du microenvironnement lésionnel notamment via la remyélinisation, soit par oligodendrogenèse, soit du fait de leur différenciation en cellules de

Schwann-like myélinisante [fig. 4.6].

FIGURE4.6 La réponse oligodendrocytaie et sa contribution dans la cicatrice médullaire suite à la lésion médullaire traumatique. D’après [142]

L’oligodendrogenèse, a été montrée par l’étude de Sellers et al. qui ont observé que, dans les 24h suivant la lésion, les progéniteurs NG2+contribuent à la formation de la cicatrice gliale, tandis que ceux produits 7 jours après la lésion semblent contribuer principalement à la production d’oligodendrocytes myélinisants [143]. Plus récemment, des études basées sur la méthode de « fate mapping » en utilisant une souris transgénique PDGFRα-CreERT2, ont cartographié le devenir des cellules PDGFRα+. Cette étude a confirmé que la plupart des oligodendrocytes myélinisants, nouvellement formés et coexprimants CC1, MBP, PDGFRα et EDU+après LMT, sont dérivés des OPC.

La remyélinisation par le biais de la différenciation en cellules de Schwann-like myélinisantes, a été démontrée également dans cette même étude. En effet, en utilisant la lignée de souris PDGFRα-CreERT2, les auteurs ont pu démontrer que des cellules de Schwann coexprimant P0 (marqueur de myéline périphérique), PDGFRα et MBP se trouvaient au niveau du cordon dorsal suite à une contusion dorsale de la moelle [144]. Cependant, il est à noter que, dans cette étude menée par l’équipe de Tetzlaff, la myélinisation par le biais des cellules de Schwann-like a été observée durant les deux premières semaines après LMT, au moment où la majorité de la récupération locomotrice spontanée se produit chez la souris. A l’inverse, la remyélinisation par le biais de nouveaux oligodendrocytes se met en place plus tardivement six semaines après la lésion et est presque absente durant les deux premières semaines post LMT [fig. 4.7] [28]. Le rôle majeur joué par les cellules de Schwann-like dans la récupération spontanée post LMT a été confirmée dans une autre étude récente. En effet, dans cette étude, les chercheurs ont pu démontrer que dans un modèle knock-out inductible de la neuréguline-1, empêchant ainsi la myélinisation des cellules de Schwann-like dans un modèle de la lésion thoracique modérée,

une diminution de la récupération fonctionnelle était observée [145].

FIGURE4.7 Le rôle des cellules de Schwann-like dans la récupération fonctionnelle deux semaines après la lésion médullaire. D’après [28]

Il s’agit ici d’une piste thérapeutique intéressante, en effet on peut imaginer que le fait de cibler l’augmentation de la remyélinisation par les nouveaux oligodendrocytes ou par la différenciation de ces OPCs en cellules de Schwann-like pendant les premières semaines suivant la LMT, pourrait accélérer ou augmenter le degré de récupération locomoteur.