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CHAPITRE 5 DISCUSSION GÉNÉRALE

5.1 Modélisation d’un disque dégénéré

5.1.1 Choix de modélisation

Pour modéliser un disque dégénéré, il a été nécessaire de faire de nombreux choix sur la sélection des paramètres à modifier et la manière de les modifier. Comme énoncé précédemment, dans une première approche, les cas les plus sévères de dégénérescence n’ont pas été modélisés à cause des changements géométriques très importants comme les ostéophytes ou les fissures. D’autres études ont toutefois pris en compte ces changements géométriques (Galbusera et al., 2011; Schmidt et al., 2007). Cependant, contrairement à ce qui a été réalisé dans ce projet, ces études n’ont pas réalisé d’optimisation des propriétés des disques dégénérés à partir de données expérimentales. L’approche adoptée par Galbusera et al. (2011) est intéressante car elle consiste à créer plusieurs modèles pour un même degré de dégénérescence en combinant différentes valeurs des paramètres de dégénérescence. Une méthode similaire a été utilisée par Bashkuev et al. (2018) avec la modélisation de 1000

modèles du segment L4-L5, incluant une variabilité géométrique du segment ainsi que trois grades de dégénérescence et un grade sain. Si cette méthode présente l’avantage de représenter le segment L4-L5 d’une population diversifiée, la variabilité géométrique peut compliquer l’interprétation de l’effet de la dégénérescence (Bashkuev et al., 2018). Par ailleurs, au cours du projet actuel, les conséquences du vieillissement sur les facettes ainsi que sur les ligaments n’ont pas été prises en compte (Benoist, 2005). De plus, les muscles ne sont pas représentés dans le modèle par éléments finis, ce qui constituent des limites du modèle numérique.

La modélisation du noyau pulpeux par des éléments solides est une autre limite au modèle de disque intervertébral développé dans ce projet. En effet, le comportement du noyau pulpeux n’est ni complètement fluide ni complètement solide. Cependant, avec la dégénérescence, le comportement du noyau pulpeux s’éloigne de celui d’un fluide pour se rapprocher davantage de celui d’un solide (Iatridis et al., 1997). Par conséquent, l’emploi d’éléments solides dans le cas de disques dégénérés semblerait plus réaliste que l’utilisation d’éléments fluides. Kumaresan et al. (2001) ont, par exemple, modélisé le noyau pulpeux d’un disque dégénéré par des éléments solides alors que le noyau pulpeux était modélisé par des éléments fluides dans le cas du disque sain. Une autre limite du modèle utilisé dans ce projet proposé provient de la modélisation du comportement du noyau pulpeux et de la matrice de l’anneau fibreux à l’aide de lois hyper-élastiques. Des lois poroélastiques pourraient permettre d’améliorer la modélisation du comportement du disque intervertébral grâce à la modélisation de deux phases : une phase fluide et une phase solide. Cette modélisation pourrait permettre une représentation plus réaliste du comportement mécanique du disque intervertébral. Des lois viscoélastiques pourraient aussi être utilisées pour prendre en compte la dépendance du matériau au temps et l’influence de la vitesse de déformation (Altair Engineering Inc, 2015).

Ensuite, dans ce projet, la perte de hauteur des disques intervertébraux a été modélisée grâce à une simulation rapprochant les vertèbres aux extrémités de la vertèbre centrale. Or, lors de cette simulation, l’intégralité des vertèbres n’a pas pu être placée en corps rigide à cause des déformations trop importantes des ligaments, empêchant ainsi la convergence des résultats.

Par conséquent, seuls les plateaux vertébraux ont été placés en corps rigides, laissant la possibilité au reste des vertèbres de se déformer. Une part du déplacement imposé a été reprise par les vertèbres, diminuant ainsi la perte de hauteur réelle des disques. Toutefois la proportion du déplacement repris par les vertèbres était faible car 0,006 mm des 2,100 mm de compression imposés au plateau supérieur de la vertèbre T11 a été perdu dans la compression de la vertèbre T11 (c’est à dire une perte inférieure de 0,3%) et ce chiffre était de 0,037 mm sur les 1,530 mm imposés au plateau supérieur de la vertèbre L1 (soit une perte de 2,4%). De plus, aucun élément des vertèbres n’a atteint la limite d’élasticité. Par conséquent, la méthode de modélisation de la perte de hauteur utilisée semble valide. Deux autres méthodes ont été envisagées pour modéliser la perte de hauteur. La première consistait simplement à rapprocher les vertèbres dans le modèle numérique à l’aide d’une translation sans utiliser de simulation. Cette méthode n’a pas été retenue car les ligaments ne pouvaient pas s’adapter à la translation des vertèbres et par conséquent il était nécessaire de les re-modéliser. Le krigeage était la seconde méthode envisagée et cette technique permet notamment de modifier la géométrie d’un modèle de référence afin de le personnaliser. Cependant, les ligaments auraient également nécessité des corrections au niveau de leur modélisation. Ces deux méthodes posent donc d’une part un problème de répétabilité d’une perte de hauteur à l’autre car il est difficile de garantir une re-modélisation identique des ligaments entre deux modèles avec une géométrie différente. D’autre part l’ajustement parfait des dimensions des ligaments avec la perte de hauteur survenant lors du vieillissement ne semble pas réaliste. C’est pourquoi, ces deux méthodes n’ont pas été retenues. Une dernière option consistait à ne pas déformer les ligaments lors de la modélisation de la perte de hauteur mais à inclure un décalage au niveau des courbes de propriétés des ligaments (Rohlmann et al., 2006). L’inaction du ligament est ainsi modélisée tant que le ligament n’a pas retrouvé sa longueur initiale (celle qu’il avait avant la modélisation de la dégénérescence) (Rohlmann et al., 2006). D’autres études ont également appliqué cette méthode (Galbusera et al., 2011; Park et al., 2013; Schmidt et al., 2007; Tang & Rebholz, 2011). La méthode choisie dans ce projet présente l’avantage de déformer les ligaments afin qu’ils s’ajustent à la perte de hauteur imposée.

Suite à la réduction de la perte de hauteur des disques, la qualité du maillage des ligaments capsulaires T12-L1 était dégradée. En effet, à certains endroits, le maillage de ces ligaments comportait moins de deux éléments dans une des deux dimensions du maillage, ce qui générait de grandes distorsions du maillage lors des simulations. Ainsi, les ligaments capsulaires ont été supprimés pour le reste de l’étude. À cause de leur forme et leur localisation, les ligaments capsulaires semblent peu actifs en compression. La présence d’interfaces au niveau des facettes articulaires empêche le contact entre les facettes, même sans la présence des ligaments capsulaires. Il serait tout de même intéressant de re-modéliser ces ligaments dans le cas du disque dégénéré afin de vérifier leurs effets sur les résultats.

Concernant l’étude de convergence réalisée, une seule étude a été menée sur le modèle jugé le plus critique. Au total au cours de ce projet, 14 combinaisons de perte de hauteur et de taille du noyau pulpeux ont été testées pour chacun des deux disques intervertébraux, résultant en un ensemble de 28 modèles différents. Il apparait alors judicieux d’avoir choisi un critère évitant la réalisation d’une étude de convergence sur chacun des maillages. La validité de l’hypothèse posée supposant la convergence des autres modélisations de disques à partir du critère défini n’a toutefois pas été vérifiée.