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Cinq patients ont bénéficié d’un curage ganglionnaire cervical bilatéral, tous étaient des carcinomes épidermoïdes. Pour quatre d’entre eux le curage des secteurs I à IV a été réalisé de manière systématique du fait de la localisation tumorale (vestibule, valve ou partie septale antérieure) et s’est révélé négatif (classés initialement N0 puis pN0 après analyse histologique). Pour un patient, le curage s’imposait devant la présente d’adénopathies suspectes initialement, classé N2c. Il correspondait à un T3 développé au dépend de la queue du cornet inférieur. Il a été réalisé un curage parotido-cervical homolatéral emportant les secteurs I à IV et I à IV en controlatéral.

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DISCUSSION

L’utilisation de la voie d’abord endoscopique dans la chirurgie des cancers nasosinusiens est devenue majoritaire dans notre service depuis début 2010, cette étude nous permet donc l’analyse d’un premier recul de 7 ans sur nos pratiques dans ce domaine.

Rares, les cancers primitifs nasosinusiens ne représentent que 3% des cancers des voies aérodigestives supérieures. Ils regroupent les 6 histologies suivantes : carcinome épidermoïde, adénocarcinomes, carcinomes adénoïdes kystiques, mélanomes muqueux et neuroblastomes olfactifs.

Concernant les données épidémiologiques, les chiffres de notre série sont comparables à ceux décrits dans la littérature (7-9). (Tableau 31)

Auteurs Nombre de patients Sex-Ratio Age moyen (années) Suivi moyen

(mois)

Rawal 952 2,6 61,4 33,9

Lund 140 0,9 63 60

Suh 36 1,1 56,6 29,3

Notre série 44 1,3 62,3 29,9

Tableau 31 : Données épidémiologiques comparées à la littérature.

Carcinomes épidermoïdes

Contrairement aux autres localisations des VADS, les carcinomes épidermoïdes ne représentent que la moitié des types histologiques rencontrés dans les fosses nasales et les sinus. Plus fréquents chez les hommes, l’âge moyen de survenue se situe autour de 60 ans, comme dans notre série avec un âge moyen de 62,3 ans et un sex-ratio égal à 2,4. Il peut être associé au papillome inversé, dont la forme dégénérée est retrouvée dans 10% des cas. Nous retrouvions une tumeur associée à un papillome inversé pour 8 patients (47%), ce qui est une proportion importante par rapport à ce qui est décrit dans la littérature(10). Néanmoins, comme dans notre étude, il n’est pas retrouvé comme facteur pronostique de survie. Avec un seul décès (groupe « chirurgie de rattrapage ») et aucune récidive dans le groupe « chirurgie première », nous obtenons de très bons taux de survie (Pour notre série à 3 ans survie globale = 100%, survie sans récidive = 88,9%). En comparaison avec la littérature, une série de 68 cas

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a été publié récemment (Paré(11)) et retrouve des taux de survie globale de 67,8 et 58,1% et de survie sans récidive de 55,8 et 52,6% à 2 et 5 ans, respectivement.

Adénocarcinomes

De siège nasal et non ethmoïdal (12, 13), il représente 20% des cas de cancer nasosinusien. L’âge moyen au diagnostic est également de 60 ans. L’exposition aux poussières de bois est un facteur de risque avéré comme l’exposition au cuir et au nickel. Tout comme dans la littérature, ce facteur n’a pas été retrouvé comme pronostique de survie (14, 15). Il existe, en France, une recommandation pour le dépistage organisé des personnes à risque. Il y est précisé que les travailleurs du bois du cuir ou du nickel doivent consulter un ORL une fois par an, que l’examen devra comporter une endoscopie avec exploration de la fente olfactive et enfin qu’une imagerie devra être effectuée au moindre doute à l’endoscopie. L’existence de facteurs de risques reconnus, toutes histologies confondues, permet aux travailleurs exposés aux poussières de bois, aux tannins du cuir et au mattage des grilles de nickel de bénéficier d’une reconnaissance en maladie professionnelle auprès des caisses d’assurance maladie selon les tableaux : 37, 47 et 10 du régime général et 36 du régime agricole(16). Avec un seul décès dans le groupe « chirurgie de rattrapage » et une seule récidive dans le groupe « chirurgie première », nous obtenons de très bons taux de survie (Pour notre série, survie globale = 100 et 75%, survie sans récidive = 100 et 60%, à 1 et 5 ans, respectivement). En comparaison avec la littérature, une série de 169 cas de patients, traités par chirurgie première, a été publié récemment (Nicolaï(17)) et retrouve des taux de survie globale de 68,9% et de survie sans récidive de 63,6% à 5 ans. Pour notre étude les taux de survie pour le groupe « chirurgie première » était de 100% pour la survie globale et de 75% pour la survie sans récidive, à 5 ans.

Carcinomes adénoïdes kystiques

Anciennement appelé cylindrome, l’âge au moment du diagnostic se situe, en moyenne, entre 40 à 60 ans. Il n’y a pas de différence d’atteinte entre les deux sexes. Dans notre série de 5 patients, tous étaient des femmes avec un âge moyen de 62,4 ans. Aucun facteur de risque n’est retrouvé dans la littérature, il était discuté une association au papillomavirus humain. L’étude de Miller(18), parue en 2016, retrouve finalement une faible association des carcinomes adénoïdes kystiques avec ce virus. Par ailleurs, cette étude faite sur 23 patients,

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tous opérés en première ligne, retrouve des taux de survie globale de 62% et de survie sans récidive de 52% à 5 ans. Avec aucun décès ni récidive après chirurgie de rattrapage et une seule récidive après chirurgie première (seule sans RT adjuvante), nous obtenons de bons taux de survie. (Survie globale = 100%, survie sans récidive 66,7%, à 5 ans pour la série complète ; 100% et 50% respectivement pour le groupe « chirurgie première »).

Mélanomes muqueux

Notre série comptait 10 mélanomes muqueux (23%), contrairement aux données de la littérature où ils sont décrits comme une pathologie très rare (1 à 2 % des mélanomes malins)(19). Il se caractérise par des récidives fréquentes et parfois multifocales, avec un pronostique très péjoratif(8). Cela se retrouve dans notre série avec des taux de survie globale de 52,5% et de survie sans récidive de 18% à 5 ans. Aucun facteur de risque n’est identifié, il survient le plus souvent chez l’homme entre 60 et 80 ans. Dans notre étude, pour la survie globale, il est retrouvé comme facteurs pronostiques : le sexe féminin (p=0,0131), l’âge supérieur à 50 ans (p=0,00125) et le statut R0 (p=0,0027) ; pour la survie sans événement : l’âge supérieur à 50 ans (p=0,0009) et le statut R0 (p=0,0027). On retrouve également le facteur âge supérieur à 50 ans comme améliorant la survie sans récidive. Il est à noter qu’aucune analyse multivariée n’a pu être réalisée statistiquement. L’âge au diagnostic supérieur à 50 ans n’est pas retrouvé comme facteur pronostique dans la littérature(19, 20) , ou plutôt à l’inverse(21). Cela peut être expliqué par le fait que notre sous-groupe de mélanomes avait un âge moyen élevé (65,1 ans) avec un petit effectif et qu’aucune analyse multivariée n’ait pu être faite.

Neuroblastomes olfactifs

Représentant 3 à 6 % des tumeurs nasosinusiennes, l’âge moyen de survenue se situe entre 50 et 70 ans avec un sex-ratio égal à 1. Aucun facteur de risque n’est retenu dans la littérature (22, 23) . Notre série comportait seulement 3 patients, toutes des femmes avec un âge moyen de 43 ans. Hwang(22), sur un recueil de 31 ans, ne retrouve que 35 patients et décrit des taux de survie globale de 66,8% et de survie sans récidive de 50,8% à 5 ans. Pour notre part, nous retrouvons, avec aucun décès ni récidive, des taux de survie globale et de survie sans récidive de 100% à 3 ans.

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SNUC (Sino Nasal Undifferenciated Carcinoma)

C’est une histologie extrêmement rare et de diagnostic récent. Il présente un caractère agressif expliquant une atteinte fréquente et rapide des structures à risque telles que l’orbite, la fosse infra-temporale, le parenchyme cérébral…. Avec un âge moyen de survenue autour de 55 ans, il est un peu plus fréquent chez l’homme. Aucun patient n’a pu être inclus dans notre étude.

Population générale

Le Tableau 32 reprend les taux de survie globale et sans récidive de notre série en comparaison avec la littérature.

Il est retrouvé globalement de meilleurs taux dans notre série, mais il faut garder à l’esprit notre petit effectif, la série de Suh (9) en est alors la plus proche et est superposable à nos résultats. Il est très intéressant de comparer également nos résultats à ceux des différentes séries publiées antérieurement par notre service (avant 2010) et pour lesquelles les voies externes étaient prédominantes (15, 23-26). Il apparait une amélioration de nos pratiques avec de meilleurs taux de survie actuels, à pondérer par le fait que ces séries regroupent une partie de patients non opérés qui ont donc un taux de survie moindre de base. Seuls quelques facteurs pronostiques de survie habituellement retrouvés dans la littérature ressortent significatifs dans notre étude. Cela peut être dû à notre petit effectif et à nos bons taux de survie.

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Taux de survie % à 1 et 5 ans

Série entière CE ADK CAK Mélanomes Esthésio

SG SSR SG SSR SG SSR SG SSR SG SSR SG SSR Rawal 87,5/74,7 Lund -/84 -/77 -/56 -/39 -/79 -/68 -/97 -/68 Suh 100/93,2 96,9/81 Paré* -/58,1 -/52,6 Nicolaï* -/68,9 -/63,6 Miller* -/62 -/52 Hwang -/66,8 -/50,8 Michel 70,3/40 58,5/46,1 86,1/72,2 87,9/44,8 100/64,1 83,3/35,2 85,7/34,1 42,8/17,2 100/90 81,8/54,5 Notre série « Série complète » 97,4/74,8 91,5/60,7 100/- 100/- 100/75 100/60 100/100 100/66,7 90/52,5 67,5/18 100/- 100/- « Chirurgie première » * 100/- 100/- 100/100 100/75 100/100 100/50 90/52,5 67,5/18 100/- 100/-

Tableau 32 : Taux de survie globale (SG) et sans récidive (SSR) par histologies : Carcinomes épidermoïdes (CE), Adénocarcinomes (ADK), Carcinomes adénoïdes kystiques (CAK), Mélanomes et Neuroblastome olfactifs (Esthésio) comparés à la littérature (* série de

chirurgie première seulement).

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