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3. Cadre théorique

3.2 Cheminements d’une action de développement

Le parcours aboutissant à la réussite d’un projet de développement est souvent parsemé d’embûches. Comme je l’ai expliqué plus haut, nombreuses sont les initiatives partant de bonnes intentions, bien organisées et correctement appliquées, qui débouchent pourtant sur des échecs. Concernant Haïti, certains auteurs (Sanon & Sérant, 2007) en arrivent à dire que : « Depuis plusieurs décennies, Haïti fait figure de cimetière par excellence des projets de développement successifs annoncés à grands renforts de publicité et financés a coup de millions par les “amis“ d’Haïti et les institutions (financières) internationales ». Une multitude de raisons, comme la corruption, l’instabilité politique ou encore une mauvaise évaluation situationnelle, peuvent être à l’origine de ce bilan désastreux. Mais comment procéder pour ne pas en arriver là, ou du moins maximiser les chances de succès des projets ? Bien que personne ne connaisse la marche à suivre miracle garantissant la réussite de ces derniers, Beaudoux, Crombrugghe, Douxchamps & Gueneau (1992), se sont évertués à baliser le chemin le plus propice pour y parvenir. C’est pourquoi leur ouvrage « Cheminements d’une action de développement » sera ma principale référence dans ce paragraphe. Je précise que les directives qui vont suivre visent particulièrement les actions de développement des ONG, à caractère productif.

Tout d’abord, avant de se lancer tête baissée dans l’exécution d’une action de développement, il est important que tous les acteurs connaissent leur rôle, place et responsabilité(s). Pour mener à bien un projet de développement, il est également primordial de garder à l’esprit qu’il doit se composer de quatre étapes, à savoir : l’identification, la programmation, le suivi et l’évaluation.

Les divers acteurs des actions de développement se caractérisent par le type de fonction qu’ils occupent. En effet, on distingue dans ce domaine trois fonctions distinctes : l’action de terrain, l’appui à la réalisation de l’action et l’aide financière. Au niveau de l’action de terrain, il est évident que les points de vue, suggestions et préoccupations des futurs bénéficiaires doivent être

nécessaires. Bien qu’il soit dangereux pour une ONG de les y forcer, il est également souhaitable que ces derniers s’organisent en comités ou autre structure de représentation afin de permettre une meilleure communication tant avec l’ONG d’aide, qu’avec l’ensemble de la population ou le gouvernement. Au niveau des ONG d’appui à la réalisation de l’action, l’on entend des ONG spécialisées dans le domaine d’activité concerné, pluridisciplinaires, locales ou indépendantes, idéalement situées dans la même zone géographique que le projet. Les organisations d’aide enfin, sont en général représentées par les ONG du nord, qui apportent leurs contributions techniques et financières. Il va s’en dire que le succès d’une action de développement dépend en partie d’une bonne articulation entre tous ces acteurs. L’appellation

“projet participatif“, très répandue actuellement dans le jargon des organisations internationales, correspond à une approche visant à les faire réfléchir et agir ensemble, afin que tous s’entendent sur les objectifs à atteindre, les moyens à mobiliser ainsi que la procédure adéquate. Pour ce qui est de mon étude, les acteurs de l’action de terrain sont les habitants de Café Lompré, le comité ODEC (Organisation pour le DEveloppement de Café lompré) et OGDEC (Organisation de Gestion De l’Eau pour Café Lompré). L’organisation d’appui est représentée par la congrégation des PFST et l’ONG d’aide extérieure (actuelle) est OTM.

Passons maintenant à la description des quatre étapes “classiques“ de l’action au développement.

1. L’identification des actions :

Cette phase consiste à préparer un projet en déterminant « quelles actions il est réaliste et judicieux de mettre en œuvre » (Beaudoux et al., 1992, p. 29) en fonction d’informations recueillies, de leur traitement, analyse et interprétation. C’est au cours de cette phase qu’il est impératif d’acquérir une bonne connaissance du milieu afin de pouvoir définir la colonne vertébrale du projet. Selon ces mêmes auteurs et pour faire bref, voici les différentes questions auxquelles cette étape devrait répondre, (qui correspondent d’ailleurs aux titres des sous-chapitres de leur livre) :

• Quelle est l’action envisagée ? (Où, quand, comment, pourquoi ?)

• Par quels acteurs ? (Salariés, bénévoles, villageois, professionnels etc.)

• Quelles sont les actions prioritaires et réalisables ?

• Qui seront les bénéficiaires directs et indirects ainsi que les exclus ?

• Comment assurer l’implication des bénéficiaires ?

• Quelle sera la viabilité du projet lorsque les aides extérieures (étrangères) prendront fin ? (Viabilité technique, organisationnelle, politique, économique et financière, environnementale, sociale et culturelle.)

• Déterminer quels sont les démarches et outils les plus adéquats pour mener à bien cette phase ?

2. programmation des actions :

« Il s’agit d’organiser les moyens disponibles, et ceux qu’il faudra rechercher, pour réaliser les actions identifiées et considérées viables et réalisables » (Beaudoux et al., 1992, p. 95). Là encore, divers points sont essentiels à cette étape :

• Préciser les actions à programmer.

• Organiser les trois niveaux des interventions. (Les actions retenues par les gens, le programme d’appuis par l’ONG locale de services et les programmes d’aide par les ONG de financement).

• Favoriser un climat de négociation (entre les responsables des programmes d’action, d’appui et d’aide).

• Programmer dans un cadre souple.

• Articuler la programmation au suivi et à l’évaluation.

• Envisager les conditions de retrait de l’aide.

• Déterminer quels sont les démarches et outils les plus adéquats pour mener à bien cette phase.

3. Le suivi des actions :

« Pendant toute la durée de réalisation d’une action, il est important de savoir à tout moment où en est l’exécution et de faire le point, pour pouvoir en conduire effectivement le bon déroulement » (Beaudoux et al., 1992, p. 127). Voici quelques points à prendre en compte dans cette étape :

• Le suivi est différent de l’évaluation. (Il a lieu en cours de réalisation de l’action et non après).

• Déterminer les acteurs du suivi.

• Déterminer les caractéristiques d’une procédure de suivi.

• Déterminer l’implication des acteurs de base dans le dispositif de suivi.

• Déterminer quels sont les démarches et outils les plus adéquats pour mener à bien cette phase.

4. L’évaluation des actions :

L’évaluation est un processus plus complet que le suivi. Elle consiste à analyser en profondeur l’action et ses résultats. « L’évaluation sert à apprécier si l’action est vraiment adaptée aux objectifs, si ces objectifs sont vraiment opportuns, réalistes et réalisables, s’ils ont été atteints, à quels prix, etc. » (Beaudoux et al., 1992, p. 157). Les questions auxquelles devrait répondre cette étape pour pouvoir apprécier l’ensemble des aspects d’une action de développement, sont de l’ordre des six critères suivants : « l’efficacité (comparaison des objectifs et des résultats), l’efficience (comparaison des résultats obtenus par rapport aux moyens utilisés), l’impact (appréciation générale des effets de l’action effectuée), la viabilité (appréciation de la capacité d’autonomie de l’action) / reproductibilité (possibilité ou non de reproduire l’action), la stratégie d’intervention (remise en question des approches et stratégies employées), la participation / satisfaction des bénéficiaires (revient à donner la parole à la population locale) » (Beaudoux et al., 1992, p. 168). Pour venir à bout de cette démarche délicate mais non moins importante, il est nécessaire d’accorder une attention particulière aux trois étapes qui la composent :

• Le recueil d’information,

• L’utilisation de l’information.

En définitive, l’évaluation ne marque pas vraiment la fin du processus mais le relance en lui offrant un nouveau regard sur la phase d’identification.