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4.2 L’espèce Baylisascaris procyonis (chez le raton laveur)

4.2.5 Charge parasitaire

Dans notre étude, le nombre de vers trouvés lors des nécropsies des ratons de tout âge variait de un à 139 par individu infecté et aucun des ratons infectés ne semblait avoir de problème de santé en présence d’une grande quantité de parasites intestinaux. La moyenne du nombre de vers de tout stade (mature et immature) était de 20,5 quelque soit l’âge du raton, alors qu’elle était de 8,5 chez les adultes et 27,1 chez les juvéniles. Cette charge

parasitaire semble varier considérablement selon les études. Ching et al (2000) ont récolté de 1 à 226 vers par raton infecté avec une charge parasitaire moyenne de 27 chez les ratons de tous âges, tandis que dans l’étude de Snyder et Fitzgerald (1987), la charge parasitaire moyenne a été établie à 13,3 vers chez les ratons adultes et à 62,4 chez les juvéniles. Nos résultats inférieurs sont probablement reliés à la saison d’échantillonnage d’été où les animaux commencent à s’infecter et période durant laquelle la prévalence est habituellement plus basse qu’à l’automne (Kidder et al, 1989). Eberhard et al (2003) ont observé une moyenne de 6,3 vers adultes chez les ratons adultes (n = 50) piégés de novembre à janvier, ce qui était inférieur à la moyenne observée (8,5) au printemps chez nos ratons adultes mais nous y avions inclus les vers immatures. De plus un grand nombre de vers ont été trouvés dans certains cas, soit 1 321 chez un raton souffrant de distemper (Carlson et Nielsen, 1984) et une obstruction intestinale a probablement été causée par un grand nombre de vers (636 et 141) chez deux autres ratons (Stone, 1983).

Dans notre étude, le nombre de vers « femelles » trouvés lors des nécropsies des ratons infectés de tout âge (n = 35) variait de un à 97 pour une moyenne de 13 par animal infecté et de plus, la moyenne était de 4,8 vers « femelles » chez les ratons adultes (n = 15) et de 19,4 chez les ratons juvéniles (n = 20). Snyder et Fitzgerald (1987) ont également sexé les vers adultes et obtenu chez les ratons de tout âge (n = 100) une variation de un à 160 vers « femelles » pour une moyenne de 27,8 vers par animal infecté, dont 7,2 chez les ratons adultes (n = 28) et 33,3 chez les ratons juvéniles (n = 72). Nos résultats inférieurs à ceux de Snyder et Fitzgerald (1987) sont probablement reliés à notre période estivale d’échantillonnage alors que leurs ratons avaient été capturés à la fin de l’automne, période où on s’attend à trouver plus de parasites.

4.2.5.1 L’identification du ver adulte lors de la nécropsie

Tous les vers qui semblaient matures macroscopiquement ont été examinés avec la loupe binoculaire. Nous avons remarqué que certains vers préalablement considérés comme des mâles par leur taille et la présence d’une courbure au niveau de la queue étaient en

réalité des femelles qui n’avaient pas atteint leur taille maximale et la courbure observée correspondait plutôt à la tête de la femelle. Comme la plupart des auteurs (MacKay et al, 1995; Ching et al, 2000; Eberhard et al, 2003; Sexsmith et al, 2009; Yeitz et al, 2009) ont utilisé seulement l’observation phénotypique macroscopique des vers pour identifier le sexe et le stade de développement des vers matures et que seule l’observation des spicules copulatrices au binoculaire permet de confirmer le sexe du mâle (Averbeck et al, 1995), on peut supposer que la charge parasitaire des vers matures selon le sexe et l’estimé de prévalence obtenu dans ces études pourraient en réalité être différents.

4.2.5.2 La charge parasitaire selon le stade de développement du ver et

certaines caractéristiques de l’hôte

Notre étude a montré que l’âge avait un effet significatif (p < 0,0001) sur le nombre de vers présents dans le petit intestin du raton laveur. En effet, le nombre de vers totaux (matures et immatures) augmentait par un facteur de 11,4 (p < 0,0001), le nombre de vers matures (mâles et femelles) par un facteur de 9,1 (p = 0.001) et le nombre de vers immatures par un facteur de 23,7 (p < 0,0001) chez les ratons juvéniles par rapport aux adultes. Aucune étude à ce jour n’a relaté ces différences selon le stade de développement des vers B. procyonis. Par contre, plusieurs chercheurs américains ont également observé un pourcentage significatif d’infection plus élevé chez les ratons juvéniles sans égard au stade de développement (Snyder et Fitzgerald, 1985; Kazacos et Boyce, 1989; Kidder et al, 1989). Au Canada, Ching et al (2000) ont estimé la prévalence des vers à 82 % chez les ratons juvéniles (n = 11) et à 49 % chez les adultes (n = 71), une différence statistiquement non significative. Dans l’étude manitobaine (Sexsmith et al, 2009), la prévalence était significativement 3,9 fois plus élevée (p < 0,05) chez les ratons adultes comparé aux juvéniles, ce qui est opposé à notre étude ainsi qu’aux résultats de plusieurs études américaines. Comme seuls les vers matures ont été recherchés dans le contenu intestinal, et puisque l’échantillonnage a eu lieu de mai à août 2007, moment où les juvéniles s’infectent et sont trop jeunes pour héberger des parasites matures, les ratons juvéniles étaient

possiblement infectés avec des larves en début de croissance souvent peu visibles à l’œil nu. Dans l’étude québécoise de MacKay et al (1995), la prévalence plus élevée chez les juvéniles (69 %) n’était pas statistiquement différente de celle des adultes (37 %), un résultat probablement attribuable à une faible taille d’échantillons (n = 21) et à la seule recherche des vers matures lors de l’examen du petit intestin.

Le sexe du raton n’avait pas d’effet statistiquement significatif sur la présence de vers et/ou d’œufs de B. procyonis, ni sur le nombre d’œufs observés à la coproscopie. Nos résultats sont similaires à ceux d’études canadiennes (Ching et al, 2000; Sexsmith et al, 2009), alors que dans certaines études américaines, la prévalence était plus élevée chez le mâle juvénile, mais seulement à l’automne (Kidder et al, 1989) et chez les mâles de tout âge (Cole et Shoop, 1987). Toutefois, dans cette dernière étude, il n’y avait qu’une seule femelle parmi les 21 ratons infectés. Dans une autre étude américaine (Snyder et Fitzgerald, 1985), la prévalence basée sur la présence de vers matures et immatures était significativement (p < 0,05) plus élevée chez les ratons mâles adultes lorsque comparé aux femelles adultes, en novembre et décembre.

Dans notre étude, le nombre de vers immatures était près de quatre fois moins élevé chez le mâle que chez la femelle. Jones et McGinnes (1983) ont estimé qu’un mâle était infecté pour deux femelles. Le raton mâle adulte est plus solitaire que la femelle et n’a pas beaucoup de contact avec les membres de son espèce (Rosatte, 2007), ce qui pourrait expliquer une prévalence inférieure à celle qu’on observe chez la femelle qui passe près d’un an avec sa nichée (Prescott et Richard, 2004), ce qui peut favoriser la contamination intrafamiliale. Dans la plupart des études, qui ont comparé la prévalence de l’infection selon le sexe, ce sont les vers matures ou les œufs qui étaient comparés et non les vers immatures comme nous l’avons fait. Comme nous n’avons pas observé de variation significative avec les vers matures, il est possible que les vers immatures ne deviennent pas tous fertiles. Cependant ce fait n’a pu être vérifié, puisque les ratons n’ont pas été suivis dans le temps.

Le nombre de vers de tout stade ne variait pas significativement avec le milieu d’origine du raton tandis que le nombre de vers immatures était près de sept fois moins élevé en milieu rural comparé au milieu urbain et cette variation était significative (p = 0,03). En milieu urbain, la densité est souvent augmentée (Jolicoeur et al, 2009) et il s’ensuit une augmentation du nombre de contacts entre les hôtes qui, par conséquent, favorise la transmission parasitaire (Gompper et Wright, 2005).

Le nombre de vers immatures était près de 10 fois moins élevé chez les femelles allaitantes. Même si ce résultat n’était pas statistiquement significatif, il était plutôt étonnant, puisqu’on se serait attendu du contraire. En effet, la transmission trans-placentaire des Ascaridés, dont Toxocara canis (Richardson et Krause, 2003), favorise l’infection précoce des foetus et la réinfection de la mère lorsqu’elle ingère les matières fécales du chiot au nid. Chez le raton, on croit que la réduction de poids consécutive à l’hivernation aurait un impact négatif sur la survie des vers (Kazacos, 2001) mais, chez la plupart des espèces, la gestation et l’allaitement entraînent une baisse de l’immunité favorisant le réveil des larves enkystées. La transmission de B. procyonis par voie placentaire ou par lactation n’a pu être prouvé à ce jour chez le raton laveur (Kazacos, 1986) et on pense que le jeune raton s’infecte plutôt suite à l’ingestion d’œufs présents dans la fourrure de la mère (Kazacos, 2001; Murray, 2002) ou dans leur environnement immédiat plutôt que par voie trans-placentaire ou par lactation, et la migration des larves se limiterait à la paroi intestinale (Kazacos, 1986) du raton. À ce jour, aucune étude n’a comparé le nombre de vers immatures chez les femelles adultes en fonction de la lactation.