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D. REPONSE DES CELLULES IMMUNITAIRES AU PARASITE LEISHMANIA

4. CELLULES DENDRITIQUES

Les cellules dendritiques (DCs) sont des cellules caractérisées par leur morphologie, présentant des dendrites à leurs extrémités, et leur capacité à faire de la présentation antigénique pour orienter la réponse des lymphocytes T. Chez la souris, tous les DCs sont

marqués par CD11c+ mais le niveau d’expression varie.

On distingue classiquement : les DCs conventionnelles (cDCs), marqués fortement

CD11c+CMHII+ et soit CD11b+ soit CD8+/CD103+, et les DCs plasmacytoïdes (pDCs),

marqués faiblement CD11c+, qui sont aussi B220+Ly6C+ et qui répondent par une production

d’IFN de type 1 en cas d’activation.

Différents types de cellules dendritiques peuvent se retrouver être au contact du parasite

Leishmania au niveau de la peau : les DCs de l’épiderme et les DCs du derme. Parmi les DCs

DCs Langerin- (Langerin-CD11b+ ou Langerin-CD11b+) (Henri et al, 2010). Les DCs

Langerin+ ne constituent que 3% des DCs alors que les DCs Langerin- CD11b- sont à 16% et

les DCs Langerin- CD11b+ à 66%. A fortiori, les DCs exprimant la Langerin (CD207), une

lectine de type C, sont appelées les cellules de Langerhans. Il existe d’autres DCs, les CD8+

DC, qui sont définies par leur expression de CD8a et qui sont aussi impliquées dans l’infection par le parasite (Henri et al, 2002). Ces DCs sont impliquées dans la présentation

antigénique aux lymphocytes T CD8+ cytotoxiques. Les DCs dermales (dDC) circulent dans

l’espace intersticiel de la peau telles des sentinelles. Ainsi, alors que les cellules de Langerhans sont peu mobiles (<2µm/min), les DCs dermales sont très actives (3.7µm/min), menées par des structures lamellipodes et soumises à des signaux chimio-attractants (Ng et al, 2008).

Ces deux types de DCs cutanées, DC dermales et cellules de Langerhans, ont été décrites comme pouvant être infectés par le parasite promastigote ou amastigote, avant de migrer vers les ganglions lymphatiques (Moll et al, 1993, 1995 ; Blank et al, 1993 ; von Stebut et al, JEM, 1998). Par la suite cependant, l’implication des cellules de Langerhans dans l’infection par le

Leishmania a été été remise en cause. En effet, aucune des DCs infectées retrouvées dans les

ganglions lymphatiques n’expriment la Langerin mais expriment essentiellement des marqueurs de DCs (Ritter et al, 2004) et les cellules de Langerhans ne participent pas à la présentation antigénique (Lemos et al, 2004). Ces dernières pourraient même avoir un rôle négatif. Les souris déficientes en cellules de Langerhans augmentent leur réponse Th1 et diminuent la production d’IL-10 et le recrutement de lymphocytes T régulateurs (Kautz-Neu et al, 2011). Par ailleurs, d’autres types de DCs, dérivées de monocytes (moDC) présents à la base sur le lieu de l’infection, peuvent aussi intervenir (Leon et al, 2007). Ainsi, 20 min après injection intra-dermale de promastigotes L. major marqués par du DsRed, les DC dermales présentent déjà des vacuoles parasitophores. A 2-3h post-infection, 70% des dDC contiennent des parasites marqués (Ng et al, 2008).

ii. Devenir des DCs après stimulation par un pathogène

Le récepteur FcγR pourrait être impliqué dans l’internalisation par les cellules dendritiques du parasite Leishmania, qui doit alors préalablement être lié par des anticorps. En effet, chez les souris déficientes pour ce récepteur, les DCs sont moins infectées par le L. major et la réponse

T n’est pas activée (Woelbing et al, 2006). Cependant, en absence d’anticorps aussi, les parasites L. amazonensis peuvent aussi être internalisés par les cellules dendritiques, avec une internalisation plus importante des promastigotes que des amastigotes, montrant que le rôle de ces récepteurs n’est pas exclusif dans les cellules dendritiques (Prina et al, 2004).

Après rencontre avec un pathogène ou sous l’action de cytokines pro-inflammatoires, les DCs immatures se différencient en DCs mâtures. Leur capacité de phagocytose est alors réduite, mais elles augmentent leur capacité de présentation antigénique et expriment des molécules de co-stimulation (Banchereau & Steinman, 1998). En effet, l’infection de souris C57BL/6 et BALB/c par les parasites L. donovani, L. braziliensis et L. major induisent la maturation des DCs, en augmentant leur expression de CD40, CD80, CD86 et de CMH de classe II, ainsi que la migration des DCs (De Trez, 2004). De même, les dDCs infectées par le parasite

Leishmania peuvent migrer du lieu d’infection cutanée vers les ganglions lymphatiques

(Ritter et al, 2004 ; Leon et al, 2007 ; Ng et al, 2008). Cette migration est possible par l’expression de récepteurs de chimiokines (notamment CCR7), essentielles pour diriger leur migration.

Dans les ganglions lymphatiques aussi, des DCs peuvent être infectées par le parasite. Au niveau des ganglions, les DCs ont un rôle majeur dans la présentation antigénique auprès des lymphocytes T, déterminant l’orientation de la réponse immunitaire vers un type Th1 via la production d’IL-12 ou Th2 via la production d’IL-4. Alors que le macrophage est la cellule-hôte du parasite Leishmania, phagocytant de nombreux promastigotes qui peuvent s’y transformer en formes amastigotes, les cellules dendritiques internalisent peu de promastigotes. Dans les ganglions, au contraire des macrophages, les parasites sont pour la plupart dégradés dans les cellules dendritiques et permettent une meilleure présentation antigénique (Konecny et al, Eur J Imm, 1999).

iii. Importance de la production d’IL-12 par les cellules dendritiques

Pour que les souris C57BL/6 soient résistantes à l’infection par le L. major, l’élaboration d’une réponse Th1 est nécessaire et requiert la sécrétion d’IL-12 (von Stebut et al, 1998 ; Konecny et al, 1999). Des souris BALB/c, habituellement sensibles à l’infection par le L.

major, deviennent résistantes au parasite lorsqu’elles sont traitées avec de l’IL-12

en cas de déficience pour l’IL-12 (Sypek et al, 1993 ; Mattner et al, 1997). La production d’IL-12 par les macrophages infectés est très faible, en raison d’un rôle inhibiteur du parasite promastigote (Reiner et al, 1994 ; Belkaid et al, 1998), alors que la production d’IL-12 par les cellules dendritiques infectées, bien qu’inhibée aussi par le parasite, augmente significativement (Konecny et al, 1999). Par ailleurs, l’utilisation de souris C57BL/6 déficientes pour l’IL-12, infectées par L. major au niveau des pattes et traitées transitoirement les 2 premières semaines avec de l’IL-12 recombinante, permet le contrôle du parasite les 8

premières semaines. Mais lors d’une réinfection immédiate de ces souris IL-12-/-, elles

perdent leur résistance au parasite, suggérant ainsi le rôle d’une production continue de l’IL-12 tout au long de l’infection pour le maintien des lymphocytes Th1 (Park et al, 2002). De manière intéressante, il existe une relation inverse entre l’infection de DCs et leur production

d’IL-12. Ainsi, les DCs CD8a-, qui contiennent moins de parasites que les DCs CD8a+,

produisent plus d’IL-12 que ces dernières (Henri et al, 2002). Comme chez les macrophages, dans les DCs aussi, le parasite Leishmania peut moduler la production d’IL-12. En effet, après infection par le L. major, les cellules de Langerhans de BALB/c surexpriment la production d’IL-4 alors qu’elles réduisent l’expression d’IL-12 (Moll et al, 2002).

iv. Réponse du parasite Leishmania aux cellules dendritiques

Le parasite Leishmania a élaboré plusieurs stratégies pour contrer la réponse des cellules dendritiques, en inhibant aussi bien sa maturation, sa migration et sa réponse contre le parasite. En effet, suite à l’infection par le L. major, les DCs réduisent leur expression de récepteurs de chimiokines, tels que CCR2, CCR5 et CCR7, qui ont alors une mobilité réduite vers leur ligand respectif (Ato et al, 2002 ; Steigerwald & Moll, 2005). Cet effet est dépendant de la production de TNFα et d’IL-10, provoquée par le parasite Leishmania. Le parasite influence donc l’expression des récepteurs de chimiokines et de chimiokines, et altère la mobilité des DCs du site de l’infection vers les ganglions lymphatiques, où elles participent à l’initiation de la réponse T. Ainsi le parasite Leishmania peut survivre durant quelques jours après l’infection dans les cellules dendritiques, suggérant que ces dernières peuvent aussi servir de cellules-réservoirs où les parasites peuvent s’amplifier avant d’induire la réponse immunitaire (Prina et al, 2004). Par ailleurs, les parasites Leishmania amazonensis amastigotes peuvent inhiber la voie JAK/STAT dans les cellules dendritiques, qui est essentielle pour la maturation des DCs (Jackson et al, 2004 ; Xin et al, 2008). Les DCs

infectées expriment alors moins les marqueurs CD40 et CD86 et sont de moins bonnes cellules présentatrices d’antigènes. Alors que les DCs infectées produisent de l’IL-12 au début de l’infection, elle est par la suite inhibée et la production d’IL-10 à la place est augmentée par les parasites Leishmania amastigotes (Xin et al, 2008).