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Chapitre V : Revêtements monocouches et multicouches Cr-C-N par DLI-MOCVD

1.2.2. Cas des revêtements Cr(C)

Les revêtements obtenus à partir d’une solution de BBC et C6Cl6 en mélange dans le

toluène à 500°C sous pression atmosphérique sont du chrome, quelque soit le rapport molaire C6Cl6/BBC (χR/χP) compris entre 0,1 et 1. Les diagrammes DRX correspondant aux essais 30

à 33 montrent une structure cristallisée cubique centrée correspondant au chrome, de type nanocristalline avec des tailles de cristallites entre 5 et 11 nm (Figure V.8).

Plus χR/χP augmente, plus le pic d’indexation (110) du chrome s’élargit à sa base. Cela

peut s’expliquer par la présence d’une ou plusieurs composantes amorphes de type carbures de chrome. Les compositions EPMA correspondant aux essais 30 à 33 révèlent une forte incorporation de carbone de l’ordre de la dizaine de pourcents atomiques, alors que le réseau cubique centré du chrome ne peut accueillir théoriquement que 0,4 % atomiques de carbone. L’augmentation de χR/χP ne semble pas influencer le taux de carbone incorporé dans les

2θ 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Cr χRP= 0,1 χRP= 0,25 χRP= 0,5 χRP= 1 Cr7C3 Cr3C2 Cr23C6 * * * * substrat Si

Figure V.8 : Diagrammes DRX des revêtements Cr(C) (essais 30 à 33) avec différents

rapports molaires C6Cl6/BBC (χR/χP) obtenus à 500°C et sous 1 atm à partir d’un mélange

BBC-C6Cl6 dans le toluène.

Ces revêtements à base de solution solide de chrome avaient déjà été obtenus par MOCVD classique sous pression réduite (0,8 kPa) à 350° à partir du BBC [164, 187], mais avec au maximum 5% at en carbone. Des expériences de dépôt similaires mais à pression plus élevée (2 kPa) montraient une augmentation du taux de carbone incorporé (12 % at), tout en gardant la structure cristallisée du chrome. Des taux similaires sont obtenus pour nos dépôts sous pression atmosphérique. Ce qui pourrait indiquer qu’à des pressions élevées, des réactions en phase gazeuse resteraient en compétition avec les réactions de surface, diminuant l’efficacité de C6Cl6. Une autre explication, plus probable, peut être avancée. La présence des

molécules de solvant en grande quantité peut aussi diminuer l’efficacité du C6Cl6 selon deux

processus :

(i) en s’adsorbant sur la surface au détriment des ligands benzène du BBC (Chapitre IV, section 5).

(ii) en subissant une décomposition thermique qui contribue à une incorporation additionnelle de carbone. En appui de cette dernière hypothèse, notons que les expériences DLI-MOCVD à partir de Cr(CO)6 dans le toluène (Chapitre III, section

3.3) avaient montré que le solvant n’était pas forcément inerte dans la zone de dépôt

Les dépôts obtenus sont gris métallique miroir (Ra=30-40 nm sur acier SS304L poli

nanomètres de largeur, avec quelques excroissances en surface (Figure V.9) et l’aspect en coupe est très compact (Figure V.10).

Figure V.9 : Morphologies de surface du revêtement Cr(C) (essai 30) sur substrat acier : aspect général (gauche) et détail (droite)

Figure V.10 : Morphologie en coupe sur substrat silicium du revêtement Cr(C) (essai 33)

Au cours de la croissance, des taches noires à la surface peuvent apparaître. On pourrait penser à la corrosion localisée de l’acier inox par C6Cl6 mais ces tâches noires

apparaissent également sur les substrats silicium. Après observations au MEB (Figure V.11), ces défauts se rencontrent à la fois sur substrat SiN/Si et acier. Des pointés EDS montrent que du chlore est détecté sur les bords des défauts, mais pas au centre. Il est difficile de quantifier cette teneur en chlore car le pic associé est compris dans le bruit de fond, comparé aux pics associés au Cr, O, C. De plus, du chlore est détecté sur la surface.

Figure V.11 : Clichés MEB d’une « tâche noire » à la surface des revêtements Cr(C) sur acier inox SS304L

(échantillons réalisés pour des tests de tribologie suivant les conditions de l’essai 33)

Les profils SIMS des revêtements Cr(C) montrent une distribution continue des éléments Cr, C et O dans le revêtement. Une interface légèrement oxydée peut être mise en évidence dans certains cas, mais pas de sous-couche enrichie en carbone à l’interface, comme cela avait été remarqué par Gueroudji et coll [176].

Même pour des rapports χR/χP élevés, la contamination en surface par le chlore révélée

par EDS reste très proche de la limite de détection (0,1% massique) (Figure V.12). Une analyse globale par EPMA ne détecte que quelques pourcents atomiques de chlore. Bien que les analyses EPMA ne révèlent aucune trace d’oxygène, les spectres EDS mettent en évidence une contamination en surface.

Figure V.12 : Spectre EDS général de la surface du revêtement Cr(C) sur substrat SiN/Si

avec χR/χP=1(essai 30) et zoom de la région du chlore en encadré

Des revêtements à partir d’une solution de BBC et C6Cl6 dans le cyclohexane avec

Les diagrammes DRX montrent une structure cristallisée de type cubique centrée correspondant au chrome. Les compositions EPMA sont similaires à celles des revêtements obtenus avec le toluène comme solvant. L’incorporation de carbone est similaire, à hauteur de la dizaine de pourcents atomiques. En revanche, les revêtements Cr(C) obtenus avec le cyclohexane comme solvant ont un aspect gris terne, du à une forte rugosité de surface (Ra=

80-100 nm).Les observations MEB révèlent en coupe une sous-couche dense de quelques centaines de nanomètres, puis une surcouche constituée de gros grains nodulaires. La surface comprend beaucoup d’excroissances de forme nodulaire de quelques microns de diamètre (Figure V.13).

Figure V.13 : Morphologie de surface sur acier SS304L (à gauche) et vue en coupe sur substrat Si d’un revêtement Cr(C) obtenu à partir de la décomposition thermique à 500°C

d’une solution de BBC/C6Cl6R/χP =0,1) dans le cyclohexane.

L’ajout de C6Cl6 permet de moduler à la fois l’incorporation de carbone et la structure

cristallographique, pour obtenir du chrome métallique cristallisé au lieu de carbures de chrome amorphes, que ce soit en présence de toluène ou de cyclohexane. L’hypothèse selon laquelle C6Cl6 s’adsorbe sur la surface en cours de croissance au détriment des ligands

benzènes – voire des molécules de solvant - et bloque les sites d’adsorption est toujours valable en DLI-MOCVD sous pression atmosphérique [164, 185]. Le rapport molaire entre C6Cl6 et BBC (χR/χP) n’influence pas les caractéristiques des revêtements en terme de

morphologie, structure cristallographique et composition chimique. Les vitesses de croissance obtenues sont relativement faibles (0,3 -0,4 µm/h), comparées à celles obtenues pour les revêtements Cr-C (0,8 µm/h). Une faible quantité de C6Cl6 est nécessaire pour obtenir du

chrome (χR/χP <10 %). Des revêtements de chrome cristallisé ont même été obtenus sans

ajout intentionnel de C6Cl6 dans les expériences qui ont suivi, si le procédé DLI-MOCVD