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3.3 Prévisions du modèle CNRM-CM5.1

3.3.2 Le cas des autres régions d’Afrique

L’étude précédente est étendue dans cette sous-partie aux cas des autres régions d’Afrique étudiées dans l’article de Tellus A.

3.3.2.1 Prévision des précipitations sud-africaines

Si les scores du multi-modèle du projet Ensembles étaient assez bons sur l’Afrique du sud pour les précipitations de l’été austral (DJF), ceux du modèle MF ENS étaient les moins bons des cinq modèles individuels. MF ENS ne montrait en moyenne aucune corrélation des anomalies de précipitations, et on retrouve ces résultats dans le tableau3.11 pour la période 1979–2005. Dans ce cas, l’apport du modèle CNRM-CM5.1 et de l’introduction de la dy- namique stochastique est évident. Les fourchettes de scores obtenues avec CNRM-CM5.1 se détachent du score de MF ENS, et la dynamique stochastique séquentielle permet de considé- rablement améliorer les scores d’ACC par rapport aux perturbations initiales.

En termes de RPSS, le modèle CNRM-CM5.1 avec dynamique stochastique améliore à la fois les composantes de fiabilité et de résolution, ce qui se traduit par une nette amélioration du score de RPSS moyen sur le domaine (tableau 3.12). Outre le score moyen, c’est aussi le nombre de points de grille du domaine où le RPSS est positif qui augmente avec les nouvelles expériences. Pour MF ENS, seuls 32% des points de grille ont un RPSS positif, tandis que

Ensemble Rel/Unc Res/Unc RPS RPSS

MF ENS 0.468 0.430 0.231 -0.038

CM5 INI 0.453 0.438 0.226 -0.015

DS RAND 0.448 0.450 0.222 0.002

DS SEQ5 0.425 0.437 0.220 0.012

Tableau 3.12 – Idem tableau3.10, pour l’Afrique du sud en DJF.

GHA MAM GHA SON

Ensemble Rel/U Res/U RPS RPSS Rel/U Res/U RPS RPSS MF ENS 0.433 0.416 0.226 -0.017 0.387 0.397 0.220 0.010 CM5 INI 0.448 0.428 0.227 -0.020 0.433 0.436 0.222 0.003 DS SEQ5 0.456 0.443 0.225 -0.013 0.446 0.464 0.218 0.018

Tableau 3.13 – Idem tableau3.10, pour la Corne de l’Afrique en MAM (à gauche) et SON (à droite).

pour les trois ensembles de prévisions avec CNRM-CM5.1, cette proportion passe à 37%, 50% et 66% respectivement pour INI, DS RAND et DS SEQ5.

3.3.2.2 « Short rains » et « long rains » de la Corne de l’Afrique

Sur la région de la Corne de l’Afrique, les résultats sont plus mitigés. La saison des « long rains » (MAM), pour laquelle les modèles du projet Ensembles ne montraient aucun résultat probant, pose toujours problème dans la nouvelle version du modèle. Le tableau 3.11 illustre ce point : les scores de zACC restent insignifiants et même si ceux obtenus avec l’ensemble DS SEQ5 paraissent meilleurs, la fourchette de zACC n’est pas disjointe de celle de CM5 INI.3 En

termes de RPSS, l’apport est également nul, comme le montrent les scores du tableau 3.13. Cette saison des pluies reste pour l’heure très problématique en prévision saisonnière avec des modèles dynamiques couplés. Une étude récente de Camberlin et al. (2009) met en lumière certaines sources potentielles d’erreurs des modèles : les « long rains » ont moins de cohérence spatiale et temporelle que les « short rains » dans la date d’arrivée des pluies, l’intensité des précipitations, le nombre de jours de pluie et la fin de la saison des pluies. Un accroissement de la dispersion d’ensemble ne suffit pas dans ce cas à améliorer les prévisions.

Pour la saison des « short rains » (SON), les scores d’ACC sont moins bons avec les ensembles CNRM-CM5.1 que pour l’ensemble MF ENS, dont l’ACC sur la région dépasse le 95ièmecentile de DS SEQ5, qui est lui-même meilleur que CM5 INI. L’apport de la dynamique stochastique est visible pour les scores de RPSS, la résolution augmente plus que le terme de fiabilité par rapport à MF ENS, ce qui donne un RPSS plus élevé.

3. Seul l’ensemble avec dynamique stochastique DS SEQ5 a été implémenté pour les saisons intermédiaires MAM et SON.

3.4 Synthèse

3.4

Synthèse

L’objectif de ce chapitre était d’évaluer l’état de l’art des modèles dynamiques couplés en prévision saisonnière sur plusieurs régions d’Afrique, où les attentes en termes d’apport de la prévision saisonnière de précipitations sont multiples. La prévision saisonnière sur ces régions sert d’aide à la prise de décision pour des questions de santé publique, d’énergie et d’agriculture. Dès lors, il est intéressant et important de caractériser et quantifier les réussites et faillites des modèles de climat sur ces régions.

L’article publié dans Tellus A a permis de mettre en évidence les avantages d’une approche multi-modèle. Les scores du multi-modèle du projet européen Ensembles montrent qu’il est possible d’avoir des prévisions saisonnières de précipitations apportant une information plus utile sur les différentes régions que l’utilisation de la climatologie. L’utilisation de prévisions d’ensemble probabilistes permet de donner une information plus complète sur les caractéris- tiques d’une saison humide. L’approche multi-modèle permet surtout de réduire les erreurs de modèles individuels, sachant qu’aucun modèle du projet n’est systématiquement meilleur que les autres sur les régions d’Afrique choisies dans l’étude. Une autre conclusion majeure de l’article est l’importance de la bonne représentation des liens entre TSO et anomalies de précipitations, condition nécessaire, mais non suffisante, pour avoir de bons scores de prévi- sion. Les résultats obtenus sur les différentes régions confirment par ailleurs que les conditions océaniques tropicales sont une source déterminante de prévisibilité pour les modèles couplés, puisque les meilleurs résultats sont obtenus au-dessus des régions où ces téléconnexions sont les plus marquées.

L’étude plus détaillée sur l’Afrique de l’ouest confirme ces derniers points, puisqu’elle illustre les écarts de performances des prévisions saisonnières sur la région du Golfe de Guinée avec le Sahel. Malgré l’existence de forts biais aux bords est-océaniques dans la plupart des modèles, le multi-modèle reproduit bien les covariances d’anomalies entre TSO et précipita- tions sur le Sahel. Les scores sur cette région n’en demeurent pas moins faibles, et on montre que ceux-ci sont nettement meilleurs les années de TSO plus élevées sur la boîte Niño 3.4 que pour les années de TSO normales ou fraîches. Ceci souligne également la non-linéarité de la réponse des précipitations sahéliennes aux TSO tropicales.

Dans ce chapitre, nous nous sommes également attachés à évaluer les impacts des évolu- tions du modèle couplé du CNRM sur la qualité des prévisions saisonnières de précipitations sur l’Afrique. Le modèle couplé CNRM-CM5.1 ne présente plus les mêmes biais que son pré- décesseur utilisé dans le projet Ensembles, et l’évolution à l’échelle intra-saisonnière des précipitations de la mousson ouest-africaine est plus réaliste et mieux localisée. De plus, les covariances d’anomalies de TSO et précipitations sur le Sahel, qui étaient inversées par rapport aux données des réanalyses dans la version du projet Ensembles, sont en partie corrigées. Ces changements ne se traduisent pas par des progrès en termes de scores, si ce n’est pour les scores probabilistes. Toutefois, ces conclusions ne sont pas valables sur toutes les régions d’Afrique étudiées. Sur l’Afrique du sud, la version 5 du modèle couplé est significativement meilleure que celle utilisée dans Ensembles. Dans ce cas, l’introduction d’une dynamique sto- chastique améliore encore les résultats, comme c’est le cas sur d’autres régions tempérées. Les résultats sur la Corne de l’Afrique sont plus décevants, dans la mesure où aucune amélioration notable des scores n’est observée avec CNRM-CM5.1 pour la saison des « long rains », tandis que les scores sont équivalents ou légèrement moins bons que dans le projet Ensembles pour la saison des « short rains ».

Il pourrait être tentant de voir dans ses résultats la preuve que la prévision des saisons des pluies sur ces régions d’Afrique à l’échelle saisonnière est illusoire. Cependant, les évolutions des modèles couplés, et les améliorations des scores des modèles individuels en utilisant une ap- proche de type multi-modèle, montrent au contraire qu’il faut persévérer dans cette direction. L’avantage des modèles dynamiques par rapport à des approches de type statistique est leur indépendance vis-à-vis des évolutions du climat. A titre d’exemple, les modifications des liens entre TSO et précipitations sahéliennes observées au cours de la deuxième moitié du vingtième siècle seraient difficiles voire impossibles à prendre en compte dans un modèle statistique, et réduiraient sa robustesse. Le défi consiste à améliorer la représentation des composantes du cli- mat dans les modèles couplés afin de tirer parti des sources de prévisibilité là où elles existent. Des approches de type « model output statistics » (MOS) permettent de tirer parti des points forts des prévisions des modèles couplés. Ainsi, Philippon et al. (2010) et Ndiaye et al. (2011) ont montré que les modèles dynamiques pouvaient donner lieu à des prévisions saisonnières de la mousson africaine améliorées, en exploitant les TSO et la circulation près de la surface ou à 200 hPa de différents modèles couplés dans le cadre de prévisions statistico-dynamiques.

3.4 Synthèse

Chapter Summary

The main aim of this chapter is to assess the state of the art in dynamical coupled model seasonal predictions of precipitation over several regions of Africa. Seasonal forecasts over these regions are useful for decision-making in areas such as public health, energy or agriculture. It is therefore important and relevant to quantify the successes and flaws of climate models over these regions.

The article published in Tellus A, presented in the first part of this chapter, shows how useful a multi-model approach can be. The Ensembles project multi-model scores prove that seasonal precipitation forecasts can give more useful information than climatology over the regions of interest. Using probabilistic ensemble forecasts helps give a more thorough outlook on rainy season characteristics. The multi-model method is efficient in reducing individual model errors, and no single model is systematically better than the others over each region studied. Another main conclusion in the article is that representing links between SST and precipitation anomalies is a necessary step towards improving forecast skill. Strong anomalies in tropical ocean conditions are a possible source of predictability in coupled models, since better results are found over regions where precipitation teleconnections with SST anomalies are the strongest.

A more detailed study over West Africa is consistent with these conclusions, and exhibits gaps in seasonal forecast skill between the Gulf of Guinea region and the Sahel. Despite strong biases over the eastern coasts of the oceans in most models, the multi-model represents anomaly covariances between SST and sahelian precipitation quite well. Scores over the region remain low, and are clearly better when SSTs are higher over the Niño 3.4 region than when SSTs are normal or below-normal. This illustrates the fact that the Sahel precipitation response to tropical SST anomalies is non-linear.

In this chapter, we also focused on the evaluation of improvements and setbacks between the former version of the CNRM climate model used in the Ensembles project and the new coupled model CNRM-CM5.1. The latter exhibits a more realistic intra-seasonal evolution of zonal precipitation maxima during the West African monsoon season. Anomaly covariance between SST and precipitation over the Sahel is also somewhat corrected. Yet, these changes do not lead to improvements in terms of scores, save for some probabilistic skill scores. These conclusions do not hold over other regions of Africa. Over South Africa in DJF, CNRM-CM5.1 is significantly better than the version used in Ensembles. In this case, the introduction of stochastic dynamics further improves the results, as over other mid-latitude regions. Results over the Horn of Africa are disappointing, in so far as no improvement in scores is found with CNRM-CM5.1 for the “long rains” season whereas scores are equal to or slightly lower than the Ensembles version ensemble for the “short rains” season.

It could be tempting to see in these results undeniable proof that seasonal predictions of precipitation over these regions of Africa is impossible, yet further work could lead to impro- vements. Combinations of dynamical modeling and statistical methods, such as model output statistics (MOS), can help extract useful information from dynamical seasonal predictions over these regions, as shown by Philippon et al. (2010) and Ndiaye et al. (2011).

Troisième partie

4

Perturbations Stochastiques

de la Dynamique du modèle

Arpege-Climat

Le chapitre précédent a permis d’illustrer l’état de l’art actuel des modèles de circulation générale couplés en prévision saisonnière à l’aide d’un exemple précis (et particulièrement délicat à prévoir), celui des précipitations sur l’Afrique. Un aspect fondamental en prévision saisonnière est l’amélioration des prévisions des modèles par la prise en compte des incertitudes liées à la modélisation. L’approche multi-modèle est en cela une référence, et l’exemple le plus probant de ces améliorations.

Dans ce chapitre, nous allons explorer une autre approche pour prendre en compte les incertitudes liées à la formulation d’un seul modèle couplé. La méthode présentée ici appartient à une catégorie de méthodes ensemblistes couramment appelée « physique stochastique », mais dans le cadre de cette thèse, elle est baptisée « dynamique stochastique » au vu des choix d’implémentation qui sont faits. Si de nombreux centres de recherche ont d’ores et déjà exploré plusieurs techniques de perturbations stochastiques des modèles d’atmosphère pour différentes échelles temporelles et spatiales de prévision, la méthode développée ici est (à notre connaissance) unique, dans la mesure où elle intègre à la fois une technique s’apparentant à la correction de flux, et un aspect aléatoire dans les perturbations. L’objet de ce chapitre est de présenter en détail cette méthode, de montrer les principaux résultats obtenus en prévision saisonnière, et d’affiner la définition de cette dynamique stochastique en étudiant les impacts de certains choix de perturbations (fréquence, échelle de temps).

La première partie de ce chapitre présente les détails de la méthodologie définissant la dynamique stochastique, et l’implémentation avec CNRM-CM5.1. Dans un premier temps, les perturbations ajoutées à la dynamique du modèle Arpege-Climat ont été définies à l’aide d’une technique appelée nudging (ou guidage) d’anomalie. Le développement de cette première méthode, et les résultats sur la période de réanalyse 1989–2010 pour les saisons DJF et JJA font l’objet de la deuxième partie. Ensuite, une alternative au nudging d’anomalie, consistant à dériver les perturbations du modèle avec un nudging itéré deux fois, a permis d’obtenir des résultats plus probants pour la saison DJF. Cette deuxième méthode est présentée en

détail dans la troisième partie de ce chapitre, où les rétro-prévisions sont évaluées sur une période plus longue (DJF et JJA 1979–2010). Dans cette dernière partie, les deux méthodes sont comparées sur la période commune. Plusieurs variantes à une méthode de perturbations aléatoires à haute fréquence sont ensuite étudiées, afin de mieux comprendre les différentes sources des impacts de la dynamique stochastique sur les rétro-prévisions.

4.1

Théorie et méthodologie retenue

Cette partie aborde les différentes étapes du raisonnement scientifique à l’origine du déve- loppement de la méthode de dynamique stochastique mise en place dans le cadre de cette thèse. La technique s’appuie sur plusieurs travaux décrits au chapitre 1, portant sur les méthodes stochastiques et la correction des erreurs des modèles de climat.