• Aucun résultat trouvé

2.3 Résolution de la redondance

2.3.4 Cas multitâches

L’espace nul de la jacobienne lié à la tâche principale peut être exploité pour accomplir plus d’une tâche supplémentaire. Dans ce genre de cas, pour lesquels la redondance est utilisée pour accomplir multiples tâches, globalement il existe deux manières de gérer l’espace nul pour intégrer ces tâches dans la commande du robot, selon la manière de définir les projecteurs dans l’espace nul de chaque tâche. La première consiste à définir une priorité stricte entre les tâches supplémentaires. Cela veut dire qu’une tâche supplémentaire ne génère aucune vitesse (cas cinématique) ou accélération (cas dynamique) dans l’espace opérationnel d’une autre tâche supplémentaire avec un ordre de priorité supérieur. La deuxième manière est d’utiliser une approche de priorité non stricte entre les tâches exécutées dans l’espace nul. Ainsi, les tâches exploitent simultanément l’espace de travail non utilisé par la tâche principale.

La rigueur des priorités entre les tâches a été étudiée au niveau cinématique [Antonelli, 2009] et par la commande en couple [Dietrich et al., 2015]. Nous nous intéressons à ce dernier cas puisque des commandes en couple avec trois tâches sont proposées dans les chapitres 3 et 4. Ci-dessous, nous présentons une formulation.

2.3.4.1 Priorité stricte

Si l’on reprend l’équation (2.42) définissant le couple de commande τC, le couple τ peut être défini pour k nombre de tâches exécutées (k−1 dans l’espace nul), avec mi,i = 1, . . . ,k la

2.4. Conclusions

dimension de chaque tâche, comme suit : τ=

Où le projecteur Ni(q) ∈ <n×n est calculé en utilisant la matrice jacobienne augmentée JiA(q)∈ <mt×n, celle-ci calculée ainsi :

Avecmt=Pki=1mila somme de toutes les dimensions des tâches. Dans ce cas, la jacobienne de la tâche principale est équivalente à J =J1. La définition de cette matrice jacobienne augmentée permet de projeter les différentes tâches de manière orthogonale, c’est-à-dire que l’ordre de priorité est garanti. Cependant, il est bien connu dans la littérature que la définition d’une jacobienne augmentée de ce type peut générer des singularités algorithmiques difficiles à prévoir et identifier.

2.3.4.2 Priorité non stricte

Dans le cas d’une définition de priorité non stricte, le couple de commande nul est défini ainsi : τ= Cette fois ci, le calcul du projecteur est fait de manière successive, ce qui permet d’éviter les singularités algorithmiques de la formulation stricte. Cependant il n’existe pas une orthogonalité entre les tâches.

2.4 Conclusions

Dans ce chapitre nous avons introduit les concepts fondamentaux nécessaires pour décrire les cinématique et dynamique d’un robot redondant. D’abord, nous avons fait une introduction générale aux robots redondants, illustrée par quelques exemples de robots en développement dans le cadre de projets de recherche et d’autres commercialisés pour l’industrie ou pour la recherche.

De plus, nous avons exposé les principales méthodes de commande d’un robot manipulateur redondant, soit au niveau cinématique, soit au niveau dynamique. Nous avons également évoqué la propriété de consistance et le cas particulier d’application de multiples tâches dans l’espace nul pour le cas de la commande en couple. Ces bases théoriques seront utilisées dans les chapitres suivants pour proposer des commandes dynamiques dans le cadre du besoin de passage par un point (RCM) ainsi que dans des applications d’interaction physique humain-robot.

CHAPITRE 3

La contrainte du RCM

Synthèse :

Lorsqu’une contrainte cinématique, telle que l’obligation de passage par un point, doit être intégrée dans la commande dynamique d’un robot redondant, différentes approches peuvent être proposées pour garantir au mieux cette contrainte. L’utilisation de l’espace nul en est une, qui permet notamment d’optimiser les capacités du robot. Les performances obtenues, quant au respect de la contrainte imposée, dépendent toutefois fortement de la façon dont on exploite cet espace nul.

Sommaire

3.1 La contrainte du RCM . . . . 55 3.1.1 La contrainte du RCM dans le contexte médical . . . . 55 3.1.1.1 RCM mécaniques . . . . 58 3.1.1.2 RCM programmables . . . . 58 3.2 Commande de la contrainte du RCM . . . . 59 3.2.1 Formulation par commande en orientation . . . . 60 3.2.2 Formulation avecfeedback dans l’espace nul . . . . 61 3.2.2.1 Couple de commande et résolution de la redondance . . . . 63 3.2.2.2 Commande en admittance dans l’espace opérationnel . . . . . 64 3.2.2.3 Intégration de la contrainte du RCM dans l’espace nul . . . . . 65 3.2.3 Résultats de simulation . . . . 65 3.3 Conclusions . . . . 69

Introduction

Les mouvements du robot sont souvent l’objet de contraintes cinématiques qui provoquent une réduction de son espace effectif de travail et diminuent sa dextérité. Ces contraintes peuvent être liées à des limitations propres des mouvements du robot ou générées par l’environnement.

Dans le premier cas, les limites articulaires sont imposées pour éviter des auto-collisions entre les différents segments du robot, pour restreindre l’espace de travail à une région sûre ou pour respecter les limites de mouvement des actionneurs. Dans le second cas, la trajectoire de l’ef-fecteur peut être bordée par des murs, virtuels ou réels, ou par des objets situés dans le même espace de travail que celui du robot, qui contraignent ses mouvements dans la réalisation de sa tâche. Souvent ces objets ou murs sont considérés comme des obstacles pour la tâche à réaliser.

Il faut alors recourir à une planification de trajectoire pour les éviter [Siciliano et al., 2010].

Des exemples d’applications de murs virtuels existent dans le domaine industriel comme dans ce-lui du médical. Le robotMako(figure 3.1), commercialisé par la sociétéStryker, est notamment dédié à la réalisation des chirurgies orthopédiques, pour le remplacement du genou. Le système, co-manipulé par le chirurgien, utilise un système de caméras pour identifier les parties du fémur et du tibia à reséquer afin d’installer une prothèse. Ensuite, le robot, portant un outil d’usinage, est déplacé manuellement par le chirurgien et ses mouvements sont contraints de manière que cet outil reste dans la région d’usinage identifiée par le système de vision, ce qui améliore la précision de la tâche en comparaison à la procédure réalisée sans l’assistance du robot.

En complément des contraintes pour lesquelles le robot est forcé à rester dans une région, il existe

Figure 3.1: RobotMakoutilisé pour la chirurgie orthopédique

aussi des contraintes cinématiques qui obligent les segments du robot à toujours passer par un ou plusieurs points. D’ailleurs, la définition de multiples points de passage est utilisée comme stratégie de planification de trajectoire pour l’évitement d’obstacles [Chiacchio et al., 1991]. La contrainte générée par un point de passage est courante dans le contexte médical,

particulière-ment dans le cadre de la chirurgie mini-invasive où les mouveparticulière-ments de l’outil chirurgical sont restreints par le point d’insertion dans le corps du patient. Cette contrainte de passage par un point est communément connue comme la contrainte du centre de rotation déporté, ou par son nom en anglais « Remote Center of Motion » (RCM).

Dans le cas des manipulateurs redondants, la dextérité apportée par la redondance est exploitée pour faciliter l’exécution de la tâche opérationnelle en incluant des contraintes cinématiques. La figure 3.2 illustre cela par quelques exemples.

Dans ce chapitre, nous étudions en détail la contrainte du point de passage, ou du RCM. Puis,

Figure 3.2: Exemples de contraintes cinématiques imposées à un robot redondant : (a) parcours contraint, (b) limites articulaires, (c) évitement d’obstacles, (d) murs virtuels, (e) unique point de passage, (f) multiples points de passage

3.1. La contrainte du RCM

nous décrivons cette contrainte dans le contexte médical et nous proposons une méthode de prise en compte de cette contrainte via la commande en couple, lorsque l’on utilise l’espace nul d’un robot redondant. Une partie des travaux présentés dans ce chapitre ont été publiés dans [Sandoval et al., 2016].

3.1 La contrainte du RCM

La contrainte du RCM oblige généralement le dernier segment du robot (son organe terminal) à passer par un point de passage défini dans l’application. Par conséquent, la mobilité de l’organe terminal (OT) est réduite, à cause de cette contrainte cinématique, à un nombre qui dépend de la nature spatiale du robot. Nous montrons ce phénomène sur l’exemple d’un robot plan (figure 3.3). Si l’on analyse un robot planaire, sans la présence de la contrainte du RCM, l’OT possède trois mobilités, deux pour la translation dans le plan de travail et une pour la rotation autour de l’axe normal à ce plan. Une fois la contrainte imposée, une mobilité de l’OT devient incontrôlable. Ainsi, deux possibilités de commande deviennent possibles. En premier lieu, si l’on souhaite commander la position de l’OT dans le plan, la rotation est alors contrainte par le RCM. En seconde approche, si l’on souhaite commander l’orientation de l’OT, on ne pourra commander que l’une des deux coordonnées de position dans le plan. La coordonnée à retenir peut être définie de manière intuitive comme la longueur de la section de l’OT qui a déjà traversé le RCM. On peut dire que cette seconde approche pour commander l’OT est équivalente à utiliser des coordonnées polaires.

Dans le cas des robots de nature spatiale 3D, possédant originalement 6 mobilités (trois de position et trois de rotation), deux mobilités sont enlevées par la contrainte du RCM. Ainsi, il est possible de commander, par exemple, la position de l’OT du robot ainsi que sa rotation propre.

Une autre manière est de commander les trois coordonnées articulaires ainsi que la profondeur de l’OT par rapport au RCM, autrement dit, de commander les coordonnées polaires généralisées ou sphériques. En considérant le RCM comme la seule contrainte cinématique et avec un espace de travail du robot suffisant, nous pouvons identifier cet espace de travail comme étant une sphère centrée sur le RCM et dont le rayon est égal à la longueur du dernier segment.

Même si des applications dans le domaine industriel peuvent inclure une contrainte du RCM, par exemple l’insertion d’un outil par une section étroite, c’est dans le domaine médical que l’on rencontre le plus souvent des applications incluant des contraintes du RCM.