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CHAPITRE I. La Passivation des Composants de Puissance

I.2. Le carbure de silicium (SiC) : propriétés et problèmes liés au packaging des

I.2.1. Propriétés physiques, intérêt du SiC pour l’électronique de

puissance, et limitations actuelles

Pour répondre à de tels besoins, les composants en carbure de silicium (SiC), développés depuis une quinzaine d’années, apparaissent comme l’une des solutions parmi les plus intéressantes étudiées actuellement (cf. FigureI.3).

Figure I.3 - Structure tétraédrique du carbure de silicium (SiC). [Nallet02]

Les caractéristiques électriques, thermiques et mécaniques font de ce matériau dit à « grand gap » l’un des principaux candidats pour le développement de l’électronique de puissance haute tension et haute température. Le Tableau I.2 présente les principales propriétés physiques et électroniques de différentes structures cristallographiques (polytypes 3C, 4H et 6H) du SiC et les compare à celles d’autres matériaux semi-conducteurs connus.

La large bande d’énergie interdite du carbure de silicium (presque 3× plus large que celle du Si), sa vitesse de saturation des porteurs élevée sous forts champs (2× plus grande que pour le Si) et son champ de claquage élevé (8× plus élevée que dans le Si) confèrent au SiC des atouts incontestables pour l’obtention de composants haute tension rapides et entraînant peu de pertes en conduction. [Raynaud95, Nallet02] Ceci provient du fait que la couche épaisse et peu dopée servant à assurer la tenue en tension peut être beaucoup plus mince et plus dopée, donc moins résistive à l’état passant, que dans le cas du silicium pour la même tenue en tension. Ainsi, on peut attendre des composants unipolaires là où le silicium n’offre

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que des composants bipolaires (donc plus lents à la commutation). Effectivement, des diodes Schottky en 4H-SiC de tenue en tension 1200 V sont commercialisées depuis quelques années (alors que des diodes Schottky en silicium de tenue en tension supérieure à 200 V n’existent pas). Les transistors MOSFETs en SiC font l’objet de nombreuses recherches, visant des tenues en tension jusqu’à 3.3 kV (voire plus) pour les applications dans lesquelles l’IGBT silicium limite la montée en puissance et en fréquence (alors que les transistors MOSFETs en silicium du marché sont principalement calibrés pour des tensions de blocage au plus égales à 600 V). Des interrupteurs JFETs en SiC représentent une alternative au MOSFET en SiC. Cette voie est technologiquement plus mature (des JFET 1200 V étant actuellement échantillonnés), mais elle demande au circuiteur de s’adapter à l’emploi de tels interrupteurs « normally on ».

Par ailleurs, sa conductivité thermique élevée (plus de trois fois celle de Si) et sa très faible densité de porteurs de charge intrinsèques, entraînant des courants restant très faibles jusqu’à des températures de jonction élevées (Tj>500°C), font également du SiC un très bon

candidat pour les applications à haute température, ou à forte tenue en énergie. Ainsi les démonstrateurs suivants reportés dans la littérature peuvent être cités à titre d’exemples : un tthyristor 1770 V/100A fonctionnant à 200°C, [Agarwal05] un thyristor de 2600 V/12 A testé à 300°C, [Agarwal00]un transistor IGBT caractérisé jusqu’à 400°C. Des résultats de caractérisation à 300°C des JFETs évoqués précédemment ont également été publiés. [Mousa07]

Tableau I.2 - Propriétés physiques et électroniques principales des matériaux semi-conducteurs à 300 K.

Eg (eV) ni (cm-3) εr μn (cm2.V-1.s-1) EBR (MV.cm-1) vsat (107 cm.s-1) λth (W.cm-1.K-1) Gap

Si 1.1 1.5×1010 11.8 1350 0.2 1.0 1.5 I Ge 0.66 2.4×1013 16 3900 0.1 0.5 0.6 I GaAs 1.4 1.8×106 12.8 8500 0.4 2.0 0.5 D GaN 2.3 7.7×10-1 11.1 350 1.3 1.4 0.8 I 3C-GaN 3.27 8×10-9 9.9 1000 1 2.5 1.3 D 2H-GaN 3.39 1.9×10-10 9.0 900 3.3 2.5 1.3 D 3C-SiC 2.2 6.9 9.6 900 1.2 2.0 4.5 I 4H-SiC 3.26 8.2×10-9 10 600-750 2.0 2.0 4.5 I 6H-SiC 3.0 2.3×10-6 9.7 50-370 2.4 2.0 4.5 I Diamant 5.45 1.6×10-27 5.5 1900 5.6 2.7 20 I BN 6.0 1.5×10-31 7.1 5 10 1.0 13 I AlN 6.1 1.0×10-31 8.7 1100 11.7 1.8 2.5 D

Dopage : 1015 à 1016 cm-3 ; D : direct ; I : indirect. [Raynaud95, Camassel98, Nallet01, Nallet02] La FigureI.4 présente les valeurs de la température de jonction maximale d’utilisation théorique, pour différents matériaux semi-conducteurs, en fonction de la tension de claquage lorsque le courant de génération thermique est pris comme limite à la montée en température.

Le SiC, plus particulièrement le polytype 4H, apparaît donc a priori comme un matériau capable de supporter des niveaux de tension très élevés même pour des températures de jonction importantes (>400°C). De tous les semi-conducteurs à grand gap, il reste aujourd’hui le plus avancé sur le plan de sa technologie. Il faut noter que le GaN et le diamant

n’existent pas encore sur la forme de plaquettes de dimensions et de qualité cristalline compatibles avec les contraintes de fabrication industrielle.

Figure I.4 - Température de jonction maximale en fonction de la tension de rupture pour différents matériaux

semi-conducteurs. [Wondrak99]

On observe toutefois que l’offre et les performances des dispositifs en carbure de silicium disponibles [Cree07] ou même en cours de développement demeure encore aujourd’hui en dessous des potentialités théoriques.

Du point de vue de l’offre, le coût élevé du matériau de base est certainement un facteur influent. Du point de vue des performances proprement dites, elles résultent tout d’abord des problèmes liés à la qualité structurale des substrats épitaxiés, qui limitent la surface des puces produites avec un rendement de fabrication raisonnable. Les calibres en courant des composants s’en ressentent (quelques dizaines d’Ampère sur le marché, quelques 100 A en laboratoire). Les composants bipolaires hautes tensions sont encore plus sensibles à la présence de défauts cristallins, car ils sont constitués de couches plus épaisses d’une part, et ils mettent en jeu des porteurs minoritaires dont la durée de vie doit être élevée d’autre part. Par ailleurs, l’optimisation de certaines étapes technologiques reste stratégique, comme l’obtention d’un bon contrôle de l’interface entre l’isolant et le canal semi-conducteur des composants à grille isolée, qui demeure un frein à l’émergence des interrupteurs unipolaires en SiC. Mais aussi, au-delà du semi-conducteur lui-même, des limitations des performances, en particulier pour la montée en tension et la montée en température, et la fiabilité, proviennent des matériaux de son environnement.

I.2.2. Problématique du packaging des composants en SiC

Si on s’intéresse à la constitution d’un composant, on peut observer que la puce semi- conductrice est entourée par différents matériaux constituant son environnement (packaging) (cf. FigureI.5).

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Figure I.5 - Matériaux de l’environnement du semi-conducteur.

Les matériaux du packaging des composants semi-conducteurs vont ainsi des alliages métalliques avec lesquels la puce est brasée sur le substrat, à ceux des fils de connexion électrique (bonding), en passant par les matériaux d’isolation tels que ceux de passivation et d’encapsulation.

Figure I.6 - Température maximale de fonctionnement des matériaux de l’environnement des puces semi-

conductrices en SiC. [Dupont06]

Parmi l’ensemble des contraintes subies par un composant de puissance (ou même à l’échelle du module), la température et les cycles thermiques sont généralement considérés comme les éléments fondamentaux de la fiabilité et de la durée de vie des dispositifs à semi-

Si 200°C 300°C 400°C 500°C 600°C SiC Substr ats cér am iques Brasures Fils de bonding Passivation Encapsulation Matériaux Fils de bonding

Substrat Inorganique ou Organique

Diode PiN vue en Coupe

Brasure

Cathode Substrat dopé N+

Couche épitaxiée dopée N

Emetteur dopé P+ Anode Anode Gel encapsulant Passivation secondaire Passivation primaire

conducteurs de puissance. La FigureI.6 présente la température maximale de fonctionnement actuelle des matériaux environnants les puces semi-conductrices en SiC.

Il est ainsi possible de remarquer que parmi les éléments critiques limitant le développement des composants en SiC pour la haute température, on trouve les couches de passivation et les matériaux d’encapsulation. Afin que le SiC puisse être exploité au maximum de ses potentialités, il est donc indispensable de travailler au niveau de ces deux étapes en trouvant des matériaux qui soient adaptés et stables à plus haute température.

I.3. Couche de passivation : définition, rôle et cahier des