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Chapitre II : Étude du frittage de composites simples alumine / acier

II.2. f Taux de carbone et vitesse de frittage

Dans l'optique de déterminer la nature exacte de l'influence du carbone sur le frittage de matériaux composites dispersés, des mesures dilatométriques ont été menées sur des échantillons déliantés sous air et sous argon hydrogéné (voir Tableau 18 et Annexe 14 p192).

Tableau 18 : Courbes dilatométriques du frittage de composites dispersés (Noir : déliantage sous air - Gris : déliantage sous argon hydrogéné 10% - Rose : cycle thermique) – suite page suivante

Tableau 18 (suite) : Courbes dilatométriques du frittage de composites dispersés (Noir : déliantage sous air - Gris : déliantage sous argon hydrogéné 10% - Rose : cycle thermique)

- pour tous les échantillons, la densification s'effectue principalement avant ou au tout début du palier de température à 1410°C.

- les échantillons d'alumine pure montrent que l'effet inhibant du carbone est en fait lié à un retard important (300°C) du début du frittage (passage de 950°C à 1250°C) de l'alumine. Ceci est confirmé par des mesures de surface spécifique par méthode BET sur des échantillons d'alumine ayant subi les deux types d'atmosphères de déliantage, qui montrent qu'après une montée en température à 950°C, le frittage est plus avancé (formation des cous entre grains) dans le cas d'un déliantage sous air que sous argon hydrogéné (passage d'une surface spécifique de 8 m2.g-1 à 9,6 m2.g-1). Le pic de frittage est plus intense en

densification observée dans les échantillons déliantés sous argon hydrogéné suggère une sorte de verrou empêchant le frittage jusqu'à une certaine température, et qui cède lorsque celle-ci est atteinte, permettant alors un frittage dans des conditions normales. Deux origines semblent plausibles pour cet effet en considérant que le carbone ne peut être présent qu'à la surface des grains d'alumine : d'une part, la présence de carbone pourrait interférer avec la diffusion de surface de l'alumine, augmentant ainsi l'énergie d'activation de la diffusion (et donc la température de frittage); une autre hypothèse pourrait postuler que le carbone (ou du moins une certaine concentration de celui-ci) constitue une barrière totale à la diffusion des espèces, donc au frittage, ce dernier ne pouvant se produire que lorsque cette barrière est éliminée par un phénomène physique ou chimique actuellement indéterminé (passage en phase gazeuse par exemple), se produisant à haute température (ce qui expliquerait la diminution de la quantité de carbone mesurée au cours du frittage – voir Tableau 17).

- l'écart de température de début de densification se réduit quand la fraction d'acier dans le composite augmente, jusqu'à devenir inexistant pour des concentrations d'acier inoxydable supérieures à 50% (voir Figure 35). Ce phénomène semble lié aux taux de carbone résiduels suite au déliantage, car la fraction massique globale de carbone des échantillons diminue lorsque la quantité d'acier augmente (les résidus organiques étant 10 fois plus importants dans la céramique que dans le métal lors d'un déliantage sous argon hydrogéné).

- dans le cas des échantillons déliantés sous argon hydrogéné, il n'y a apparemment aucune différence qualitative concernant la vitesse de frittage (apparition de nouveaux pics par exemple) entre les échantillons présentant un pic de densification (entre 5 et 20% de 316L) et les autres.

- certains échantillons obtenus en dilatométrie présentent un aspect rugueux, lié à la formation de billes métalliques en surface, voire un écoulement métallique important. Les conditions d'apparition de ces phénomènes sont présentées dans le Tableau 19. Il est ainsi possible de constater un lien entre déliantage sous argon hydrogéné et formation de métal liquide (cette dernière n'étant visible que dans un seul cas lors d'un déliantage sous air). La quantité de liquide expulsée de l'échantillon est donc dépendante à la fois de la quantité (fraction) d'acier inoxydable 316L et de la quantité de carbone résiduelle après déliantage. Il convient de noter qu'un tel effet n'est pas observé dans le cas d'échantillons frittés en-dehors d'un dilatomètre. Trois éléments pourraient expliquer cet effet : une température plus élevée dans le dilatomètre utilisé par rapport au four, dans ce cas, même une faible variation de température est suffisante pour provoquer la fusion (ou au moins une forte augmentation de la ductilité) étant donnée la proximité du solidus; la pression appliquée par l'intermédiaire d'une masse de 5g lors de la dilatométrie pourrait conduire à l'expulsion d'une phase liquide déjà présente par un effet d'éponge (cette hypothèse sera discutée plus loin, quand sera abordé l'effet de la pression sur le frittage), les échantillons présentant une capacité à se déformer sous contraintes plus importante à haute température (cet effet a été constaté en pressage à chaud pour des composites alumine / nickel (Lu et al. 2000)); les cycles thermiques différents en frittage et en dilatométrie pourraient conduire à une réactivité légèrement différente (par exemple, le cycle plus rapide appliqué dans le dilatomètre permet une diffusion et une élimination moindres du carbone, dont la concentration abaisse le point de fusion du métal). L'écoulement métallique est visible sur les courbes dilatométriques sous la forme d'un pic de dilatation suivant celui de densification (voir Annexe 14 p192,

pour les fractions d'acier de 20, 30 et 40%), ce qui tendrait à valider, sans pour autant certifier, l'hypothèse d'un effet d'éponge dû au retrait des échantillons sous contraintes.

- les échantillons à matrice céramique déliantés sous air présentent un pic de densification moins intense que leurs analogues déliantés sous argon hydrogéné. Étant donné l'effet inhibant de l'oxyde de chrome sur la densification de l'alumine mentionné dans la littérature, et ce, même pour de faibles concentrations, ce phénomène est probablement dû à une oxydation plus importante de l'acier lors du déliantage sous air, formant ainsi une couche d'oxyde de chrome plus épaisse en contact avec l'alumine. Cette explication n'est cependant pas totalement satisfaisante, dans le sens où elle n'apporte aucune justification à la différence d'intensité du pic de frittage de l'alumine pure observée lors des deux types de déliantages. Ce phénomène pourrait donc être couplé avec l'effet du carbone identifié précédemment dans le cas de l'alumine pure.

Figure 35 : Température de début de frittage en fonction de l'atmosphère de déliantage et de la composition de composites dispersés 316L / alumine

Atmosphère de déliantage

Fraction volumique de 316L dans le composite

0 1 5 10 20 30 40 50 75 100 Ar/H2 10% - - Billes fines Billes fines Écoule ment métal Écoule ment métal Écoule ment métal - - - Air - - - Billes fines - -