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Caract´eristiques Logiques de la D´ecouverte

1.3 Interagir avec une Machine Apprenante

1.3.5 Caract´eristiques Logiques de la D´ecouverte

Les axiomes du calcul propositionnel sont ceux de la logique classique. Ils permettent en particulier de prouver les formules P ∨ ¬P (principe du tiers exclu) et ¬¬P → P (´elimination de la double n´egation). Le principe du tiers- exclu stipule que toute chose ne peut-ˆetre caract´eris´ee que par un attribut ou par son contraire. Par exemple, un animal est capable de voler ou ne l’est pas. Une contradiction logique apparaˆıt lorsqu’une proposition est `a la fois vraie

et fausse :

p∧ ¬p

Si la m´ethode de la preuve par l’absurde encourt parfois des reproches et si la question de sa suffisance se pose, c’est qu’elle met en ´evidence non pas la v´erit´e de sa conclusion mais la fausset´e de la n´egation de celle-ci. C’est en fondant le raisonnement sur le principe du tiers-exclu, et en ´eliminant la double n´egation que l’on peut conclure de ceci `a la v´erit´e de la proposition `a d´emontrer. Ainsi, si l’on souhaite prouver qu’un animal donn´e est un oiseau, et qu’une r`egle stipule que les oiseaux sont les seuls animaux capables de voler (∀x,Vole(x) → Oiseau(x)), on peut commencer par supposer que l’animal n’est pas un oiseau.

Hypothese :¬Oiseau(x)

En observant ce dernier s’´elever dans les airs et en constatant qu’il vole, on se trouve face `a une contradiction, puisque seuls les oiseaux volent.

Observation : Vole(x)

Vole(x) ∧ ¬Oiseau(x) ∧ (Vole(x) → Oiseau(x)) → ⊥

L’hypoth`ese de d´epart ¬Oiseau(x) peut ainsi ˆetre ni´ee et l’on a ¬¬Oiseau(x). Par ´elimination de la double n´egation, on vient de prouver que l’animal est bien un oiseau.

¬¬Oiseau(x) → Oiseau(x) .

Cette d´emarche peut paraˆıtre abstraite en comparaison avec, par exemple, un simple enchaˆınement de d´eductions, telles que chaque proposition enchaˆın´ee « contienne la raison de celle qui suit, et soit elle-mˆeme d´emontr´ee par celle qui pr´ec`ede » [Piaget, 1924].

La logique intuitionniste est n´ee de la remise en cause de l’´elimination de la double n´egation. Ainsi, pour les intuitionnistes, un animal qui n’est pas un « NON oiseau » n’est pas forc´ement un oiseau. De plus, le principe du tiers-exclu sous entend que les connaissances repr´esent´ees sont compl`etes et n’´evolueront pas. Dans le contexte qui nous int´eresse, les connaissances sont construites peu `a peu, et sont constamment r´evis´ees et remises en question. Mˆeme si le raisonnement par l’absurde peut s’av´erer utile, il sera donc n´eces- saire de le remettre en question si le raisonnement s’av`ere incoh´erent ou faux. Les logiques paraconsistantes remettent justement en question ce principe.

L’utilisation des contradictions en tant que moteur dialectique de la r´eso- lution de probl`eme a donc pour effet de caract´eriser ce processus de la fa¸con suivante :

– les modalit´es d´eontiques telles que l’obligation, l’interdiction, et la per- mission, permettent d’organiser des connaissances pass´ees sous forme de normes ;

– la paraconsistance caract´erise un raisonnement qui reste non trivial en pr´esence de contradictions afin de maintenir les obligations ;

– la d´efaisabilit´e du syst`eme de normes permet d’organiser ces derni`eres de fa¸con hi´erarchique afin d’en faciliter la r´evision lorsqu’un fait contra- dictoire apparaˆıt.

Tˆachons maintenant de pr´eciser les notions de paracompl´etude et de para- consistance. Un syst`eme d´eductif S est dit inconsistant s’il existe une formule α de S telle qu’`a la fois α et sa n´egation ¬α soient des th´eor`emes de S. Si toutes les formules de S sont des th´eor`emes, alors S est dit trivial, sinon S est dit non-trivial. Une logique paraconsistante est une logique dont le sys- t`eme d´eductif est inconsistant et non-trivial, i.e., dans lequel une proposition et sa n´egation peuvent ˆetre toutes les deux vraies sans entraˆıner la v´erit´e de toutes les autres propositions. Une logique paraconsistante peut donc ˆetre vue comme une logique dans laquelle le raisonnement par l’absurde ne s’applique pas, et qui reste non-triviale en pr´esence contradictions logiques. De mˆeme, une logique est dite paracompl`ete si une proposition et sa n´egation peuvent ˆetre fausses toutes les deux sans entraˆıner la trivialit´e du syst`eme de d´educ- tion [DaCosta & Beziau, 1997]. Une logique paracompl`ete peut donc ˆetre vue comme une logique dans laquelle le principe du tiers-exclu ne s’applique pas. La paraconsistance et la paracompl´etude semblent ainsi ˆetre des caract´eris- tiques logiques n´ecessaires pour g´erer logiquement les deux cas extrˆemes que sont le surplus d’informations contradictoires et le manque d’information (res- pectivement).

[Nakamatsu et al. , 2003], par exemple, propose un tel exemple de para- consistance fond´ee sur une logique d´eontique et d´efaisable. Les modalit´es de la logique d´eontique sont utilis´ees pour localiser les contradictions et provoquer une r´eorganisation de l’ensemble des normes d´efaisables. La paraconsistance permet au solveur d’adapter son ontologie aux nouvelles observations et de mettre en oeuvre un apprentissage incr´emental.

Toutefois, [B´eziau, 2007] montre que la logique classique est elle mˆeme pa- raconsistante. Si l’exploration de ces pistes de travail m’a permis de construire une vision logique de la notion de dialectique, j’ai d´elaiss´e ces formalismes in- complets pour les reformuler dans un cadre plus g´en´eral. Je proposerai ainsi au Chapitre 3 d’utiliser des modalit´es pour d´efinir de fa¸con logique l’ensemble des jugements ´echang´es par le chercheur et son assistant rationnel durant le processus de d´ecouverte. Ces jugements codifient l’interaction, permettant de typer des ´enonc´es logiques en tant que conjectures, faits, postulats, etc. En

nous inspirant du carr´e des oppositions et de certaines de ses extensions, nous avons imagin´e une structure cubique opposant chacun des jugements et garan- tissant que l’ensemble qu’elle d´efinit est clos par n´egation, i.e., que la n´egation de l’un d’entre eux ne n´ecessite jamais la d´efinition d’une nouvelle modalit´e. De plus, [Luzeaux et al, 2008] met en ´evidence le fait que la logique sous-jacente `a cette structure n’est autre que la logique S5.