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Caractérisation des données à travers les composants de la situation de communication

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 159-174)

La constitution du corpus : du recueil à la diffusion des données

3.3 Description des données

3.3.2 Caractérisation des données à travers les composants de la situation de communication

Comme nous l’avons vu (cf. 2.1.3.1), D. Hymes (1967) s’intéresse à la parole en tant que processus de communication dans son contexte social qu’il décrit à travers les éléments constitutifs de la situation de communication. D’autres chercheurs, comme P. Brown et C. Fraser (1979 : 35-53), C. Kerbrat-Orecchioni (1990 : 76-82) ou V. Traverso (1999 : 17-19), ont également dressé des listes de ces composants, servant de point de départ à l’analyse des interactions. On y retrouve principalement : le cadre (temps, lieu) ; les participants (nombre, caractéristiques) ; le(s) objectif(s) et la/les raison(s) pour lesquels les individus sont réunis.

Ainsi, comme le signale D. Maingueneau (1996 : 22), « il existe un noyau de constituants qui font l’unanimité : les participants du discours, son cadre spatio-temporel, son but ».

La définition de ces critères spécifiques comprenant les données situationnelles et les propriétés internes de l’interaction a permis d’établir une typologie des interactions prototypiques, telles qu’évoquées précédemment (cf. 1.2.2).99 Nous avons vu que la DVP appartient à la catégorie de la discussion même si elle partage aussi des caractéristiques du débat bien que ces catégories soient abstraites. La description des constituants essentiels des DVP de notre corpus va nous permettre de préciser leurs caractéristiques et de dresser la typologie de ces DVP.

3.3.2.1 Le cadre spatio-temporel

Le cadre spatio-temporel renvoie au contexte situationnel, soit à l’environnement immédiat. Le genre discussion à visée philosophique ne correspond pas à un cadre spatio-temporel prédéfini. D’un point de vue spatio-temporel, comme nous l’avons observé au Chapitre 1, cette pratique a vu le jour aux États-Unis à la fin des années 1960 et se répand en France depuis une vingtaine d’années. De même, la DVP ne s’inscrit pas dans un cadre spatial immuable. Ainsi, comme le montre l’ensemble des chantiers (groupes de travail) mis en place

99 Concernant la typologie des interactions, nous renvoyons aux travaux de R. Vion (1992 : 119-142) et de C. Kerbrat-Orecchioni (1990 : 111-133).

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par l’association Philolab100, cette pratique peut se dérouler dans des contextes spatiaux très variés : à l’école, au travail, dans les familles, dans les milieux du soin, de la culture, etc.

Dans le cadre de notre corpus, les données ont été recueillies au cours de trois années scolaires successives dans deux régions françaises (Loire-Atlantique, en 2009-2010, pour le primaire ; Puy-de-Dôme en 2010-2011 et 2011-2012 pour le collège) en lien avec les projets instigateurs des travaux.

Classes Établissement Région Département Zone CP École primaire Pays de la Loire Loire-Atlantique Frégeac (zone rurale) CE École primaire Pays de la Loire Maine-et-Loire Angers

CM2 École primaire Pays de la Loire Loire-Atlantique Centre-ville de Nantes 5e et 4e Collège Auvergne Puy-de-Dôme Gerzat (banlieue nord de

Clermont-Ferrand) Tableau 6 : contexte spatial des données du corpus Philosophèmes.

Les DVP de ce corpus se déroulent dans un macro-contexte particulier qui est un contexte scolaire. Comme nous l’avons vu, les différents niveaux de contexte sont inextricablement liés. Au niveau micro, cela implique donc un environnement situationnel singulier. D’abord, toutes les DVP du corpus se déroulent dans un établissement scolaire (école ou collège) ; puis, la DVP se déroule dans une salle définie avec une disposition particulière de l’espace. Ainsi, la discussion peut aussi bien avoir lieu dans la salle de cours habituelle (comme pour les classes de primaire et la classe de 4e3) que dans une salle choisie pour cette activité comme la salle de musique (comme pour les classes de 5e2 et la classe de 4e1) ou le Centre de Documentation et d’Information (classes de 5e8 et de 5e5). Quelle que soit la salle, l’espace est aménagé spécifiquement pour le débat-philo, généralement de façon à ce que les discutants se voient les uns les autres. En effet, comme le souligne M. Lipman bien que cette disposition sur un mode de relations frontales ne soit pas essentielle, elle est fortement avantageuse car « c’est sur les visages que se concentrent des textures complexes de significations qu’on cherche à lire et à interpréter » (Lipman, 2003/2011 : 100). Ainsi, la disposition de l’espace rompt avec une situation de cours habituelle dans laquelle tous les élèves font face à l’enseignant. Cette disposition est variable d’un groupe de DVP à l’autre, les participants sont souvent placés en cercle. Lorsque la salle est sélectionnée et réservée en

100 L’association Philolab [http://philolabasso.ning.com/], qui s’attache à la promotion des ateliers-philo, a construit un réseau qui se découpe en huit chantiers : Philoécole ; Philoformation ; Philocité ; Philotravail ; Philosoin ; Philoart ; Philocursus et Philoinclusion. Dans le cadre de notre recherche, nous nous inscrivons dans le chantier Philoécole.

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vue de l’activité, le groupe peut utiliser tout l’espace en formant un grand cercle de chaises au centre de la pièce (salle de musique, CDI). Lorsque la DVP a lieu dans la salle de classe, soit elle se déroule dans un coin de la salle où les élèves forment un cercle en s’asseyant par terre, soit la salle est réorganisée et les tables déplacées de façon à ce que les participants soient en cercle101.Grâce à l’espace circulaire, chacun fait partie d’un périmètre commun, « on discute face à face, comme les guerriers dans l’Iliade qui se mettent en cercle, et déposent leurs armes » (Tozzi, 2010 : 17).

L’environnement (micro et macro) de l’interaction influe sur l’interaction elle-même.

D’où la nécessité de procéder à la contextualisation systémique qui consiste à replacer la communication dans son système, dans son contexte (Mucchielli, 1995/2006 : 148). Le fait que ces discussions se déroulent dans le contexte de l’institution scolaire contribue à engendrer un cadre préalablement fixé. Ainsi, le cadre spatio-temporel a nécessairement un impact sur le déroulement de l’interaction. Dans les DVP de notre corpus, le moment et la durée de la discussion sont définis en fonction de l’emploi du temps des élèves. De plus, la discussion est souvent interrompue par la sonnerie marquant la fin des cours ou le moment de la récréation (même si une discussion peut parfois se poursuivre sur plusieurs séances). Par exemple, au collège, les DVP se déroulent au cours de l’heure de vie de classe et durent généralement une quarantaine de minutes. Ainsi, la DVP se déroule dans un cadre captif puisque l’atelier de philosophie est imposé aux élèves. Lorsqu’il est mis en place pendant l’heure de vie de classe, l’atelier prend sur un temps personnel considéré comme une liberté (Agostini, 2012 : 198-203). En effet, après avoir rédigé une pétition pour ne plus participer aux ateliers de philosophie, les élèves de la classe de 5e2 ont évoqué parmi les raisons de ce souhait le fait que cela leur « fait perdre du temps » (« On a une heure de plus chaque semaine, on finit tard » ; « Ça nous enlève une heure de permanence et on ne peut pas réviser »).

L’institution scolaire n’est pas le seul élément du macro-contexte de l’interaction ayant une influence sur son déroulement, l’ensemble des contextes dans lesquels elle s’inscrit peut avoir un impact102, sur les normes d’interaction ou d’interprétation ou sur les thèmes abordés, par exemple. En effet, chaque discussion se déroule autour d’un thème choisi au préalable, ce qui oriente a priori le contenu de l’interaction. Le thème est soit directement choisi par les

101 Parfois, il y a un second cercle à l’intérieur du premier ; c’est le cas en 4e3 (tel que représenté dans la Figure 16, plus loin) et lors d’une discussion en CE.

102 Même si nous n’étudierons pas en détail l’impact des différents contextes sur le déroulement d’une DVP, il est important de garder cette influence à l’esprit.

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discutants, soit amené par l’animateur, par l’intermédiaire d’un support qu’il a sélectionné en lien avec les centres d’intérêts des élèves afin de susciter leur participation. Le thème est donc souvent en lien direct avec le macro-contexte. Il peut être lié au contexte scolaire ou familial à travers un thème touchant à la vie quotidienne. Par exemple, en CP, à partir de deux images représentant un mouton dans deux situations, l’une où il a de la peine à monter des marches et l’autre où il s’amuse en descendant un toboggan, les enfants choisissent de réfléchir autour de la question Pourquoi fait-on des efforts ?. Plus largement, le thème peut-être en rapport avec le contexte sociétal, culturel en lien avec l’actualité. Par exemple, en 5e2, les animatrices proposent un article du Nouvel Observateur traitant du naufrage du Costa Concordia (voir Annexe 3.B), évènement survenu le mois précédant la discussion. À partir de la lecture de l’article, les discutants sélectionnent la question Pourquoi un capitaine abandonne son navire ? qui sera suivie par une autre DVP autour de la question Qu’est-ce que le courage ?.

Nous remarquons au sein du corpus (cf. Tableau 3, Tableau 4, Tableau 5) plusieurs questions de société telles que Peut-on vivre en sécurité sans police et sans chien ? ou Pourquoi y a-t-il besoin de règles ? ; au cours de ces deux DVP, les discutants associent la sécurité et les règles à l’État, ils font notamment référence au président de la République française en fonction au moment des discussions, Nicolas Sarkozy, (Nicolas Sarkozy […] il peut mettre des caméras dans les villes pour les surveiller ; mais y a pas de lois qui les interdisent de faire la guerre # y a personne qui s’oppose […] c’est pas bien mais bon euh ils se font la guerre donc on peut rien dire nous […] non mais pas nous mais Sarkozy la France enfin).

Les différents contextes sont étroitement liés les uns aux autres et même imbriqués les uns dans les autres. Ainsi, un thème choisi en lien avec le contexte sociétal va pouvoir être ramené pendant la discussion au contexte scolaire et inversement. Par exemple, lors de la DVP en 5e2, autour de la question Qu’est-ce que le courage ?, démarrée à partir d’un fait d’actualité, les participants vont évoquer alternativement le contexte sociétal plus général (Karlos : ben des pompiers, sauver des vies c’est du courage ; Animatrice : dans des pays où le droit de parole est pas, où les gens peuvent pas dire ce qu’ils pensent, c’est courageux ça), le contexte situationnel immédiat (Animatrice : donc toi pour toi venir en philo c’est du courage) et le contexte plus global de l’établissement scolaire (Isaak : aller en cours de musique c’est du courage ; Hamilton : aller au collège ; Olinda : parler devant tout le monde au tableau, c’est du courage). Enfin, les discutants mentionnent aussi le contexte social quotidien (Octavienne : si il y a quelqu’un qui fait une bêtise et qui dit que c’est pas lui et que c’est quelqu’un d’autre, c’est de la lâcheté ; Renata : l’exemple du courage c’est de dire ce qu’on pense aux adultes quand ils abusent).

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Nous pouvons représenter les contextes principaux des DVP de notre corpus de la manière suivante :

Figure 15 : les principaux contextes des DVP de notre corpus

Selon P. Brown et C. Fraser (1979 : 40, cf. 2.1.3.1), l’environnement social de l’interaction est souvent associé au type d’activités et d’interactions et, comme nous allons le voir, influe également sur les finalités de celles-ci, sur les relations entre les participants, sur leur rôle et leur comportement.

3.3.2.2 Les finalités

Dans la représentation des composantes de l’interaction de P. Brown et C. Fraser (1979), la scène regroupe le cadre spatio-temporel et les finalités de l’interaction ; ces éléments permettant de planter le décor. Les finalités constituent le moteur de l’interaction car elles renvoient au(x) but(s) poursuivi(s) par les acteurs. Comme nous l’avons vu (cf. 1.2.2.1), R. Vion (1992 : 127) distingue les finalités internes et externes de l’interaction. Concernant la discussion, il considère qu’elle résulte d’une finalité tout à fait spécifique :

« Elle est “interne” par certains aspects dans la mesure où il s’agit de confronter des contenus pour eux-mêmes. Elle est “externe” dans la mesure où elle a, le plus souvent, des prolongements en termes d’action ou d’enjeux symboliques. En fait “la discussion ne produit rien… si ce n’est l’essentiel : l’expression de la divergence. […] Dans la discussion on cherche moins à s’entendre qu’à justifier le bien-fondé de sa thèse par rapport à l’autre.” (Bellenger, 1984 : 30) » (Vion, 1992 : 137).

Selon nous, la DVP partage cette finalité spécifique de la discussion. En effet, la DVP a une finalité interne dans la mesure où elle a une visée sociale importante à travers le contact et la confrontation à autrui (physiquement, de par l’organisation de l’espace et réflexivement). De plus, elle est orientée vers l’intercompréhension plutôt que vers le succès (cf. 1.2.2.2). Ainsi, son objet est, en un sens, la discussion elle-même, c’est-à-dire l’échange :

« On parle pour s’interroger non pour aboutir. […] Tout se passe comme si discuter servait à discuter : or c’est bien le cas. Et c’est bien conforme à l’objectif méthodologique visé par Lipman lui-même » (Auriac, 2007 :48).

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Toutefois, selon nous, la finalité externe de la DVP est prépondérante car il y a une réelle prise en compte des contenus échangés puisque l’enjeu, même s’il ne s’agit pas d’aboutir, est de réfléchir afin de solutionner un problème.103

R. Vion (1992 : 127-128) spécifie plusieurs types de finalités externes :

− celles qui sont tournées vers l’accomplissement d’une action concrète ou la modification du réel (R. Vion donne l’exemple des interactions dans un groupe de travail qui visent généralement une prise de décision, la mise en place d’une action) ;

− celles tournées vers l’accomplissement d’une action ou l’obtention d’un gain symbolique (R. Vion cite le cas du débat où il s’agit de convaincre, d’être le meilleur pour remporter le débat) ;

− celles tournées vers la recherche de connaissances (R. Vion mentionne l’enquête qui consiste à chercher et réunir des informations).

À partir de ces éléments de définition, selon nous, la DVP a principalement une finalité externe tournée vers la recherche de connaissances, ou plus précisément vers la recherche de sens (cf. 1.3.3.1) car il s’agit de mener une réflexion autour d’un thème, d’explorer, de s’interroger collectivement de façon à faire avancer cette réflexion en confrontant et en envisageant les différents points de vue.104

Dans la DVP, la finalité est explicite puisqu’elle est mise en correspondance avec le thème de l’interaction, représenté par la question à solutionner qui est définie en amont de la discussion et est systématiquement rappelée à l’ouverture de cette dernière. Dans chaque DVP, les discutants poursuivent donc un objectif commun qui est de répondre à la question-thème au centre de la réflexion. Ainsi, la finalité constitue une caractéristique forte de la DVP, car elle a une place importante dans l’interaction du fait qu’elle soit clairement énoncée (parfois même affichée, par exemple au tableau dans certaines discussions de notre corpus), reconnue et partagée par tous les participants. Toutefois, dans la DVP, le résultat attendu et effectif n’est pas, comme on pourrait l’escompter, une réponse à la question posée. Il ne s’agit pas d’apporter une solution unique au problème posé mais de mener une réflexion. La réponse attendue est donc plutôt une synthèse de ce qui a été dit au cours de la discussion qu’une réponse précise. Ainsi, les discutants partagent l’objectif annoncé, reconnu, de répondre à la

103 Par ailleurs, à cela s’ajoutent de multiples objectifs indirects, tels qu’évoqués au Chapitre 1 (cf. 1.2.1.1) ; par exemple, la visée socialisatrice va au-delà du simple contact, il s’agit d’ouvrir l’individu à l’altérité et au monde.

104 Le fait que la DVP ne soit pas évaluée (cf. 1.2.3) permet de conserver cet objectif principal plutôt que de le biaiser en ajoutant un objectif supplémentaire tel que l’obtention d’une bonne note.

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question-thème mais la finalité effective de la DVP est davantage la réflexion autour de la question que la réponse à cette question. À travers ses finalités, nous percevons la spécificité de la DVP en tant que sous-catégorie de la discussion.

3.3.2.3 Les participants

La DVP est une situation d’interaction organisée avec un groupe de participants ; il s’agit donc d’une interaction complexe où chaque personne présente influe continuellement sur l’interaction. Les caractéristiques individuelles et l’état d’esprit des participants peuvent varier selon les ateliers-philo et selon le cadre dans lequel ils se déroulent.

Dans notre contexte scolaire, nous pouvons souligner que les discutants d’une DVP sont dans la même tranche d’âge puisque l’atelier se déroule avec les élèves d’une même classe.

Les groupes sont généralement constitués de 15 à 30 élèves et d’une ou deux animatrices. Les animatrices ont été brièvement formées à la méthode présentée en 1.1.3, par E. Tableau 7 : caractéristiques des classes du corpus Philosophèmes.

Classe CP CE CM2 5e2a 5e8 5e2 5e5 4e1 4e3

Nombre d’animateur(s) 1 1 1 2 1 2 2 2 1

Genre (F/M) F F F F F F F F F

Statut professionnel107 Instit. Instit. Instit. Inf.

CPE Tableau 8 : caractéristiques des animateurs du corpus Philosophèmes.

Nous précisons quelques caractéristiques générales des participants, sans entrer dans le détails des caractéristiques individuelles. Concernant les caractéristiques sociales, en lien avec

105 Pour des précisions concernant la formation, nous renvoyons aux travaux de E. Auriac-Slusarczyk, B. Slusarczyk & I. Charles-Beaucourt (2011 : § 8) et de G. Fiema (2014 : 117-118).

106 Nous considèrons l’âge moyen des élèves au moment des enregistrements.

107 Instit. : institutrice ; Inf. : infirmière ; Doc. : documentaliste ; CPE : conseillère principale d’éducation ; PP : professeur principal.

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les observations sur le contexte spatial (cf. Tableau 6), nous pouvons indiquer que la classe de CE se situe en zone d’éducation prioritaire108 et que le collège de Gerzat est classé en zone sensible (Auriac-Slusarczyk, Slusarczyk & Charles-Beaucourt, 2011 : § 5)109. Enfin, la classe de 5e8 est une classe Segpa (sections d’enseignement général et professionnel adapté)110.

Concernant la motivation des discutants, nous remarquons un état d’esprit différent entre les écoliers et les collégiens ; alors que les enfants sont naturellement curieux et spontanés, les adolescents ont plus de difficultés à s’exprimer sans retenue devant leurs camarades. Ces derniers sont ainsi moins enthousiastes face à la pratique de la DVP, voire réticents (Fiema, 2015a : § 6-7), comme en témoigne la pétition rédigée par les élèves de la classe de 5e2 dans le but de ne plus participer aux ateliers de philosophie. Parmi les raisons évoquées pour justifier cette demande, les élèves mentionnent « on a une heure de plus par semaine que les autres 5e », « ça n’apporte rien », « on n’aime pas parler », « ça m’ennuie »,

« les autres pourraient trouver ça nul », « j’ai été rendu ridicule », etc.111 G. Fiema (2014 : 268-272) analyse le cas de cette classe « réfractaire » et conclue que « l’adolescence est un âge pendant lequel les élèves sont psychologiquement fragiles, leur conformisme d’appartenir à un groupe ne doit sans doute pas, à cet âge, être négligé » (Fiema, 2014 : 271-272).

En ce qui concerne les relations personnelles entre les participants, sans entrer dans les détails des liens de sympathie entre chaque discutant, nous pouvons dire qu’ils se connaissent bien et que les élèves sont assez proches puisqu’ils font partie de la même classe ; de même, du fait de leur âge, ils partagent certains centres d’intérêt. Plus généralement, dans le cadre des relations liées aux rôles et aux statuts des participants, nous constatons qu’en lien avec l’institution scolaire, nous avons d’un côté les participants avec le statut d’élèves, et de l’autre côté le(s) participant(s) avec le statut de personnel de l’établissement (institutrice, enseignante, documentaliste, infirmière ou CPE).112 Ces participants sont aussi opposés par

108 Les zones d’éducation prioritaires (ZEP) ont été créées en 1981 afin de favoriser l’égalité des chances entre les élèves en aidant financièrement les établissements situés dans des milieux défavorisés d’un point de vue socio-économique et culturel.

109 Le dispositif « zone sensible » s’applique à des établissements dans l’optique d’apaiser un climat de violence.

110 Au collège, les sections d’enseignement général et professionnel adapté (Segpa) accueillent « des élèves présentant des difficultés scolaires graves et persistantes auxquelles n’ont pu remédier les actions de prévention, d’aide et de soutien » (Ministère de l’Éducation nationale, 2015b). Dans cette section, une démarche pédagogique adaptée aux élèves est mise en place afin qu’ils poursuivent leur apprentissage et les élèves bénéficient d’un enseignement complémentaire de découverte professionnelle afin de les aider à préparer leur projet professionnel (Ministère de l’Éducation nationale, 2015b).

111 Toutefois, certains élèves considèrent malgré tout que cette pratique offre des avantages : « on peut s’exprimer », « ça nous fait réfléchir », « cela peut répondre à nos interrogations de la vie », « cela nous fait mûrir ».

112 Le statut se rapporte à la place qu’ils occupent dans le système scolaire ; un rôle est lié à chaque statut.

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leur statut d’enfant/adolescent et d’adulte. Dès le début de leur scolarisation, les enfants sont

leur statut d’enfant/adolescent et d’adulte. Dès le début de leur scolarisation, les enfants sont

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