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Cadre méthodologique

Dans le document L’essence de l’échec entrepreneurial (Page 63-69)

Chapitre 2 L'échec comme objet d'étude dans la littérature scientifique sur l'entrepreneuriat : vers une

2.1. Relecture de la littérature

2.1.1. Cadre méthodologique

Quel est l'état de la recherche académique actuelle sur l'échec entrepreneurial ? Pour répondre à ce questionnement, il faut d'abord recenser les travaux de recherche sur l'entrepreneuriat à l'intérieur desquels le concept de l'échec occupe une place importance. Notre relecture de la littérature intègre également un entretien que nous avons conduit le 8 décembre 2016 avec Dean Andrew Shepherd sur les axes de recherche passés, actuels et futurs. Ses nombreuses contributions sur ce sujet, qui ont débuté en 2000 (Shepherd et al., 2000) et qui se poursuivent aujourd'hui, seront par ailleurs analysées (Shepherd et Patzelt, 2017).

2.1.1. Cadre méthodologique

En nous appuyant sur les préconisations méthodologiques de McDonald et al. (2014) ainsi que Short (2009), notre revue de la littérature a été conduite en cinq étapes (tableau 2.1). La première étape consiste à sélectionner les descripteurs de recherche : les termes à partir desquels le travail de repérage des articles doit être effectué. La deuxième étape consiste à construire la base de données d'articles suffisamment exhaustive qui sera explorée à partir d'un ensemble de descripteurs de recherche. La troisième étape consiste à choisir un horizon

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temporel suffisamment long pour pouvoir étudier les tendances des recherches au fil du temps. La quatrième étape consiste à définir un ensemble de paramètres d'analyses à partir desquels les articles répertoriés seront catégorisés et analysés. La cinquième et dernière étape consiste à recenser, rassembler, évaluer et synthétiser les études pertinentes qui portent en totalité (ou en partie) sur l'échec entrepreneurial.

Tableau 2.1. Revue de la littérature : les deux perspectives méthodologiques

Méthodes McDonald et al. (2014) Short (2009)

Descripteur de recherche Large Précis

Base de données Restreinte Etendue

Horizon temporelle Fixé à priori Fixé à postériori

Paramètre d'analyse Fixé à priori Fixé à postériori

Recensement Quantitatif Qualitatif

Exemple d'études Cossette (2000) Cossette (2010)

2.1.1.1. Les descripteurs de recherche

Les descripteurs de recherche comportent les termes à partir desquels le travail de repérage des articles doit être effectué. Pour définir la notion de l'échec entrepreneurial, Jenkins et McKelvie (2016) ont retenu les descripteurs de recherche suivants : {“failure” AND “firm” or “business” or “entrepreneur” or “self-employment” or “self-employed”}. Ce descripteur de recherche exclut toutefois les autres termes représentatifs du mot "échec" comme : "insolvency", "mortality", "death", "bankruptcy", "liquidation", "closure", etc. Pour étudier l'échec au sens le plus large du terme, Amankwah-Amoah (2016) propose des descripteurs plus inclusifs, mais ne faisant pas référence à l'entrepreneuriat : {"discontinuance" or "insolvency" or "mortality" or "death" or "exit" or "failure" or "bankruptcy" or "liquidation", "closure" or "setbacks"}. Ucbasaran et al. (2013) considèrent le descripteur suivant comme représentatif de l'échec entrepreneurial : {“entrepreneur,” “enterprise,” “self-employed,” or “new venture” AND “failure,” “closure,” “loss,” “bankruptcy,” “grief,” “insolvency,” “liquidation,” “death,” “declining" or "poor performance”}.

Le descripteur de recherche composé à partir de tous ces termes est composé de deux ensembles. Le premier ensemble {discontinuance or insolvency or mortality or death or exit or failure or bankruptcy or liquidation or closure or setbacks or grief or loss or declining or poor performance or underperform*} désigne les différents termes associés à la notion de

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l'échec. Il sera utilisé pour répertorier les travaux publiés dans les revues les plus prestigieuses en entrepreneuriat (méthode proposée par McDonald et al.. 2014). Bien que cette méthode présente l'avantage de mener une récession ciblée, elle présente toutefois le risque d'exclure des travaux fondateurs publiés dans d'autres revues ne relevant pas du domaine de l'entrepreneuriat. On peut citer, à titre d'exemple, l'article de McGrath (1999) publié dans l'Academy of Management Review et qui a été cité près de 1265 fois ou encore l'article de Shepherd (2003) publié dans la même revue et qui a été cité près de 625 fois. Pour cette raison, nous avons ajouté au premier ensemble, les termes représentatifs du champ de l'entrepreneuriat : {"new venture" or "new firm" or "new business" or "new organization" or "newly created firm" or "emerging business" or "emerging firm" or "emerging organization" or "emerging venture" or "business enterprises" or "start-up" or “self-employed” or self-employment"}. Nous avons également utilisé l'étymologie du mot "entrepreneur*" pour repérer les mots ayant la même racine comme "entrepreneur", ‘entrepreneurial’, ‘entrepreneurship’, etc. (voir Cossette, 2010).

Le descripteur de recherche composé à partir de ces deux ensembles a donc pris la forme suivante : {discontinuance or insolvency or mortality or death or exit or failure or bankruptcy or liquidation or closure or setbacks or grief or loss or declining or poor performance or underperform* AND entrepreneur* or self-employ* or new venture or new firm or new business or new organization or newly created firm or emerging business or emerging firm or emerging organization or emerging venture or business enterprises or start-up}. Il sera utilisé pour repérer tous les articles dont le titre contient au moins un des termes de chacun de deux ensembles (méthode proposée par Short, 2009).

2.1.1.2. Base de données d'articles

La deuxième étape consiste à identifier la base de données d'articles. La première option consiste à effectuer une recherche sur la base des revues les plus prestigieuses exclusivement consacrées à l'entrepreneuriat (voir McDonald et al., 2014). On pense notamment à Journal of Business Venturing (JBV), Entrepreneurship Theory and Practice (ETP) et Journal of Small Business Management (JSBM) (pour les revues américaines) et International Small Business Journal (ISBJ) et Entrepreneurship and Regional Developpement (ERD) (pour les revues européennes). Le choix de ces revues est lié à la fois à leur reconnaissance par la communauté scientifique (classement CNRS, FNEGE et

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HCERES) (Hlady-Rispal et Jouison-Laffitte, 2015) et la valeur élevée de leur Impact Factor (McDonald et al., 2014) (voir tableau 2.2).

Tableau 2.2. Les revues sélectionnées et leur classement en 2016

Les revues Impact

factor CNRS FNEGE HCERES Les revues américaines

Journal of Business Venturing 5.774 1 1* A

Entrepreneurship Theory and Practice 4.916 1 1 A

Journal of Small Business Management 2.876 2 2 A

Les revues européennes

International Small Business Journal 3.667 2 2 A

Entrepreneurship and Regional Developpement 1.776 2 3 B

A la lumière de ce qui a été souligné plus haut, cette méthode présente l'inconvénient d'exclure des textes fondateurs qui occupent une place relativement importante dans la littérature sur l'échec entrepreneurial, mais publiés dans d'autres revues ne relevant pas du champ de l'entrepreneuriat. Pour contourner cette limite, une deuxième recherche documentaire complémentaire a été menée sur une base de données ‘Business Source Complete’ (BSC) (diffusée par EBSCO) et Google Scholar. Pour être informé en temps réel de la parution des nouveaux articles sur l'échec entrepreneurial, nous avons également utilisé la fonctionnalité Google Alertes.

En plus de la littérature anglo-saxonne, tous les articles sur l'échec entrepreneurial parus dans les deux revues francophones consacrées exclusivement à l'entrepreneuriat (Revue International PME et Revue de l'Entrepreneuriat) ont été également examinés.

2.1.1.3. Horizon temporel

Afin d'étudier les tendances des recherches actuelles au fil de temps, notre revue de la littérature a été effectuée sur la base des articles publiés durant la période Janvier 2000-Juillet 2017. Celle-ci complète une précédente étude menée sur la période Janvier 1980-Juillet 2011. Comme cela a été souligné dans l'introduction, c'est à partir de l'année 2000 que les travaux académiques sur l'échec commencent à occuper une place grandissante dans le champ de l'entrepreneuriat (voir figure 2.1).

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Dans le cadre de l'entretien que avec avons conduit avec Dean Shepherd, cet auteur précise que "there is not much history [...] we more often study success and high growth gazelles [...], we do not really study failure much [or precisely] how we manage failure [...]". Il mentionne toutefois l'article de Rita Gunter McGrath intitulé "Falling forward: Real options reasoning and entrepreneurial failure" publié en 1999 dans l'Academy of Management Review. Cet article qui demeure à l'heure actuelle l'un des articles sur l'échec entrepreneurial le plus cité (prés de 1265 citations) pourrait être à l'origine du foisonnement des recherches académiques sur le sujet depuis une quinzaine d'années. C'est dans ce cadre temporel que s'inscrit la présente revue de la littérature.

Le choix de ce cadre temporel se justifie également par une tendance de plus en plus marquée vers l’approche interprétative. C'est depuis l'année 2000 que les approches interprétatives de l'échec entrepreneurial commencent à occuper une place grandissante (voir Chapitre 1; figure 1.1). L’objectif du chercheur n’est plus de prédire le succès ou l'échec des nouvelles entreprises, sujet de recherche qui a dominé la littérature entrepreneuriale durant les années 1990 (Cooper et al., 1994; Dahlqvist et al., 2000; Duchesneau et Gartner, 1990 ; Littunen et al., 1998; Lussier, 1996; Reid, 1999), mais d’appréhender sa complexité.

2.1.1.4. Paramètres d'analyse

L'étape préalable à l'analyse du contenu des articles sélectionnés consiste à les classer à l'aide d'un certain nombre de paramètres ou critères de classement (Cossette, 2000; McDonald et al., 2014). Cinq paramètres d'analyse ont été retenus (Tableau 2.3). Il s'agit de la thématique étudiée, du niveau d'analyse choisi, du corpus théorique mobilisé, de l'approche méthodologique utilisée et du contexte empirique.

La revue de la littérature menée antérieurement à cette recherche et corroborée par les revues de littérature conduites par De Hoe et Janssen (2014); Shepherd et al. (2016); Ucbasaran et al. (2013) ainsi que Walsh et Cunningham (2016) met en évidence sept thématiques principales : la notion de l'échec, la peur de l'échec, les causes de l'échec, les attributions de l'échec, les conséquences de l'échec, l'échec et la dynamique entrepreneuriale et les formes singulières d'échec. Concernant le deuxième critère, nous nous référons au cadre d'analyse de Gartner (1985) qui distingue quatre niveaux d'analyse : environnement, entrepreneur, entreprise et processus.

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Tableau 2.3. Les paramètres de l’analyses Paramètres d'analyse Modalités

Thématiques étudiées

- La notion d'échec - La peur de l'échec - Les causes de l'échec - Les attributions de l'échec - Les conséquences de l'échec - La sortie entrepreneuriale

- L'échec et le développement de l'entrepreneuriat - L'échec dans d'autres contextes entrepreneuriaux

Niveaux d'analyse - Entrepreneur - Entreprise - Environnement - Processus - Multi-niveaux - Autres

Cadres théoriques - Courant déterministe

- Courant volontariste

Méthodes d'analyses

- Analyse de bases de données - Analyse de données d'enquêtes - Analyse de données d'entretiens - Analyse documentaire - Expérimentation - Analyse conceptuelle Contextes de l'étude - Européen - Américain - Asiatique - Autres

Selon le niveau d'analyse choisi par le chercheur, l’accent sera mis alternativement sur telle ou telle dimension. Pour le troisième critère, nous nous référons aux travaux de Mellahi et Wilkinson (2004) qui distinguent deux perspectives théoriques de l'échec organisationnel : déterministe versus volontariste. Quant à l'approche méthodologique, nous distinguons entre deux types de recherches: recherche qualitative versus quantitative. Nous avons adopté également une segmentation plus fine en distinguant six méthodes d'analyses : analyse de bases de données, analyse de données d'enquête, analyse de données d'entretien, analyse documentaire et/ou observation, expérimentation (McDonald et al., 2014). Les articles ne comportant pas de matériel empirique seront classés comme étant des articles d'ordre conceptuel ou théorique. L'objectif de l'utilisation du cinquième et dernier critère (contexte empirique) est de comparer les travaux de conduite dans différents pays. L'objectif étant de déceler s'il y a une différence dont la manière d'étudier l'échec entrepreneurial.

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2.1.1.5. Recensement des articles

Le travail de recensement s'est déroulé en deux temps. Nous avons recensé dans un premier temps les articles répertoriés dans la base de données BSC entre janvier 2000 et Juillet 2017 pour ensuite nous centrer sur les revues les plus prestigieuses relavent du champ de l'entrepreneuriat (JBV, ETP, JSBM, ISBM, ERD). Dans un deuxième temps, les articles qui ne portent pas en totalité (ou en partie) sur l'échec entrepreneurial ont été rejetés. A titre d'exemple, les articles portant sur l'échec des produits, des innovations, des projets, des sociétés de capital risque, etc; n'ont pas été sélectionnés, sauf s'ils faisaient référence à l'entrepreneuriat. La décision de retenir ou non l'article est également fondée sur l'analyse de son contenu. Le titre, la liste des mots clés, le résumé et l'introduction des articles constituent une excellente source d'information sur leur continu. A partir des articles recensés, nous avons construit un tableau à sept colonnes : nom des auteurs, le titre de l'article, la thématique étudiée, le niveau d'analyse choisi, le corpus théorique mobilisé, l'approche méthodologique utilisée et le contexte empirique. Les articles publiés entre janvier 2000 et juillet 2017 dans les cinq revues d'entrepreneuriat reconnues comme particulièrement prestigieuses ont fait l'objet d'une analyse particulière.

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