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I. Recherche bibliographique

I.2. Le dioxyde d’uranium et son comportement sous irradiation

I.2.3. c. Formation et migration de bulles de gaz

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I.2.3.c. Formation et migration de bulles de gaz

Les gaz rares sont particulièrement insolubles dans l’UO2 et ils sont sujets à la précipitation pour former des bulles de gaz. Le principal problème lié à la formation de ces bulles est son effet néfaste sur les performances du combustible à savoir une accélération de la décohésion de joints de grains par le phénomène de gonflement, entraînant ainsi des fissures dans le combustible. Les gaz rares, piégés dans ces bulles, sont thermiquement peu

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conducteurs, ils peuvent induire une baisse de la conductivité thermique et par conséquent à un échauffement dangereux du combustible.

Au cours des six dernières décennies, inspirés par les éventuels problèmes de gonflement des bulles, en particulier pendant les températures transitoires, de nombreux mécanismes liés à l’évolution des bulles de ces gaz ont été étudiés. Il s'agit notamment : des sites de nucléation, des mécanismes de grossissement et de migration et ainsi que de la re-solution des bulles induite par irradiation. Un des éléments essentiels à la compréhension de ces mécanismes est la détermination des grandeurs physiques qui les régissent : la densité, la taille, la pression et leur évolution en fonction des conditions de l’expérimentation. Pour accéder à ces grandeurs physiques, deux techniques sont généralement utilisées au laboratoire : la microscopie électronique à transmission (MET) pour les mesures de densité de taille et de diffusion des bulles et la spectroscopie d'absorption X (SAX) pour la détermination de la pression interne de ces bulles.

Les deux mécanismes de nucléation des bulles de gaz proposés par différents auteurs sont : la nucléation homogène et hétérogène. Le premier dépend essentiellement de la concentration d’atomes de gaz et de la probabilité qu’un de ces atomes en rencontre un autre. Le second est régi par la présence de sites préférentiels de piégeage comme les pointes de fission, les cascades de déplacements, les joints de grains, les dislocations et les précipités métalliques. Après nucléation, la taille des bulles de gaz sous l’effet de la température peut évoluer grâce à deux processus de croissance :

Le premier est le processus dit de migration et coalescence, où la bulle va se déplacer dans son ensemble jusqu’à en rencontrer une seconde pour coalescer. Ce processus va conduire à la disparition des petites bulles au bénéfice des plus grosses.

Le deuxième mécanisme est la maturation d’Oswald, qui consiste en la remise en solution puis la réabsorption des atomes de gaz présents dans les bulles. Pour illustrer les mécanismes de nucléation et de croissance, Michel et al. [83] ont étudié la formation des bulles de krypton dans du dioxyde d’uranium fritté. Des lames minces ont été préparées à l’aide de la technique Tripode puis implantées aux ions krypton de 250 keV à une fluence de 7x1015 at.cm-2 (ce qui représente une concentration de 1 %). Ensuite, les échantillons ont été recuits sous Ar-5 % H2 à différentes températures 600°C/12 h, 1000°C/12 h et 1400°C/4 h et 1500°C/2 h et enfin caractérisés en microscopie électronique à transmission. Les résultats des observations MET sont représentés sur la Figure I.21. Les images montrent la formation des bulles de krypton après implantation. Ces résultats mettent en évidence un grossissement des bulles avec la température.

Figure I.21 : Images MET des lames minces UO2 implantées avec des ions Kr d’énergie 250 keV à la fluence 7x1015 at.cm-2 tel qu’implantée et recuites à 600°C, 1000°C et 1500°C [80].

Figure I.22 : Evolution des distributions en taille des bulles observées dans les lames

minces implantées avec des ions Kr d’énergie de 250 keV à la fluence 7x1015

at.cm-2 [80].

Sur la Figure I.22, les auteurs montrent une évolution des distributions en taille des bulles en fonction de la température de recuit. En effet, une distribution centrée sur un diamètre d’environ 1 nm dans l’échantillon tel qu’implanté, puis cette distribution devient légèrement plus étalée après recuit à 1000°C pendant 12 h. Après recuit à 1500°C pendant 2 h, non seulement la distribution s’étale mais ils observent également un déplacement du pic vers un diamètre d’environ 2 nm, illustrant un grossissement des bulles nanométriques initiales. Il faut noter que l’échantillon recuit à 1500°C pendant 2 h présente une population de bulles légèrement différente des autres.

Evans et al. [49] ont également étudié la formation et l’évolution des bulles de krypton et les mécanismes responsables du relâchement du gaz dans le dioxyde d’uranium. Des échantillons ont été implantés avec des ions krypton de 200 keV à une fluence de 5x1015 at.cm-2. Ensuite, ils ont été recuits et caractérisés avec deux techniques la microscopie électronique à transmission et la Spectroscopie de relâchement thermique (TDS). A une température de recuit inférieure à 400°C, les images MET ne confirment pas la formation des bulles. En revanche, après 600°C des bulles d’une taille moyenne de 1,5 nm et avec une densité de 1024 m-3 ont été observées. Dans cette étude, plusieurs zones ont été identifiées, définies par les symboles "x", "l" et "v" sur Figure I.23, pour un examen approfondi au cours

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des recuits successifs à 1370°C. De cette manière, les mécanismes de migration, de coalescence et de disparition des bulles ont été observés. Cependant, le phénomène de re-solution thermique des bulles et la formation des précipités solides de krypton n’ont pas pu être observés. A très hautes températures, les auteurs ont constaté la formation de bulles bimodale. Ils en ont conclu que le relâchement du gaz est dû principalement à la migration.

a) b) c) d)

Figure I.23 : Images MET illustrant l’effet d’un recuit thermique à 1370°C sur les bulles dans des lames minces d’UO2. Une seule zone de la surface est suivie, avec un cercle à gauche marquant le même point dans chaque micrographie. Des exemples de comportement des bulles sont marquées, avec "x", "l" et "v" signifiants respectivement : la disparition, la coalescence et la migration des bulles durant le recuit.

Si la formation de bulles des gaz rares a été maintes fois observée expérimentalement dans le combustible nucléaire, la mobilité de ces bulles reste encore mal comprise. Les nombreux modèles développés dans la littérature s’accordent toutefois sur un point essentiel : le rôle majeur que jouent les défauts de types lacunaires dans la migration des bulles. La mise en équilibre de bulles en surpression tout comme la mobilité des bulles une fois cet équilibre atteint, vont ainsi dépendre de l’apport de lacunes par le matériau environnant.

Une autre étude sur le comportement des bulles de l’iode et de krypton a été réalisée par Chkuaseli et Matzke [84]. L’implantation des deux gaz a été effectuée à température ambiante à une énergie des ions de 40 keV et à une fluence de 1016 at.cm-2. Ensuite, des images MET ont été prises sur les échantillons à différentes températures de recuit de 500°C à 1500°C. Les densités et les rayons moyens des bulles déduits de ces images ont été comparés aux résultats théoriques d’un modèle développé par les auteurs. Le modèle ne tient pas compte de la maturation d’Oswald. Il considère que les gaz sont insolubles dans l’UO2 et que le coefficient de diffusion des bulles dépend des deux mécanismes de diffusion en surface et en volume. La Figure I.24 montre que des bulles avec des rayons allant de 1 à 4 nm ont été observées à partir de 900°C; la taille (resp la densité) augmente (resp diminue) en fonction de l’augmentation de la température de recuit. L’évolution de ces deux paramètres est similaire pour les différents gaz. La migration et la coalescence sont supposées être les mécanismes responsables du grossissement des bulles à une température supérieure à 1100°C. Cette migration des bulles de produits de fission est causée principalement par le mécanisme de diffusion en volume.

Figure I.24 : La densité théorique (en lignes continues) et expérimentale (symboles

ouverts) des bulles de gaz volatils et leur rayon dans l’UO2 après recuit 1 h en fonction

de la température. Triangle : Krypton, carré : iode [84].