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1.2 Régulation circadienne de l’expression génétique chez la cyanobactérie

1.2.6 Cœur de l’horloge : rôle de KaiC

1.2.6

1.2.6

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1.2.6 Cœur de l’horlogeCœur de l’horlogeCœur de l’horlogeCœur de l’horloge : rôle de KaiC: rôle de KaiC: rôle de KaiC: rôle de KaiC

La protéine KaiC est capable, en présence d’ATP, de se phosphoryler et de se déphosphoryler aussi bien in vivo, que in vitro [50-52]. Cependant, la forme phosphorylée est assez instable, et c’est la déphosphorylation qui l’emporte à terme. Des expériences in vitro

montrent que la protéine KaiA augmente l’autophosphorylation de KaiC (ou inhibe sa déphosphorylation), tandis que KaiB s’oppose à l’action de KaiA.

In vivo, en lumière constante, la quantité de protéine KaiC totale, et la quantité de

KaiC phosphorylées oscillent de manière circadienne. Comme les cyanobactéries sont des organismes photosynthétiques, alors l’essentiel de leur activité métabolique (dont la synthèse d’ARN et de protéines) est stoppée lorsqu’elles sont placées dans l’obscurité complète. Ainsi, in vivo, en DD, il n’y plus d’oscillation de la quantité de protéine. Par contre, le taux de KaiC phosphorylées (que l’on notera « KaiC-P ») et non phosphorylées (noté « KaiC-NP ») continue d’osciller avec une période circadienne, et les oscillations sont de plus compensées en température (FIG. 1-7a) [52].

Ceci implique donc que l’oscillateur circadien peut fonctionner indépendamment d’un processus de transcription-traduction, et que c’est ce cycle de phosphorylation/déphosphorylation de KaiC qui est le cœur de l’oscillateur circadien chez la cyanobactérie. La phosphorylation de KaiC apparaît comme un critère indispensable à l’existence de l’horloge circadienne [50]. Deux sites de d’autophosphorylation ont été repérés sur la protéine KaiC. La suppression de l’un de ces sites (ou des deux) entraîne une arythmie des souches mutantes. Par ailleurs, le complexe protéique entre les 3 protéines ne se forme pas chez ces mutants. Le complexe protéique apparaît donc comme un élément clé indispensable à la régulation circadienne de l’expression génétique.

D’ailleurs, une étude récente a montré qu’il était possible de reconstituer ces oscillations circadiennes in vitro, simplement en présence de KaiA, KaiB, KaiC, et d’ATP [53]. Les oscillations obtenues ont bien une période proche de 24 h, et sont compensées en température (FIG. 1-7b-c). De plus, en utilisant des protéines KaiC provenant de mutants ayant des périodes égales à 17, 21, et 27 h, les quantités de KaiC phosphorylées et non phosphorylées oscillent bien avec les périodes correspondantes. Et les oscillations in vitro obtenues sont effectivement en accord avec celles observées in vivo avec les mêmes mutants. La construction de cet oscillateur in vitro a permis récemment de mieux comprendre les interactions qui ont lieu entre les 3 protéines clés de l’oscillateur circadien de la cyanobactérie. Grâce à une étude combinant notamment la microscopie électronique et la réalisation de gel d’électrophorèse, un modèle d’interaction circadienne entre ces 3 protéines a été proposé [54]. La protéine KaiC (présente sous forme d’hexamère), et les protéines KaiA et KaiB (qui sont des dimères) interagiraient in vitro selon le modèle présenté FIG. 1-8. La protéine KaiC non phosphorylée (état α ), grâce à l’association et la dissociation rapide de KaiA se phosphoryle, et atteint ainsi

1.2 RÉGULATION CIRCADIENNE DE L’EXPRESSION GÉNÉTIQUE CHEZ LA CYANOBACTÉRIE

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un état d’ « hyper phosphorylation » (état β ). KaiB se lie ensuite à cette protéine phosphorylée, ce qui induit un changement de conformation de KaiC (qui devient KaiC*, état

χ). Cet hexamère se déphosphoryle (état δ ), puis relaxe jusqu’à l’état initial

α

. En réalité, les différents complexes coexistent; simplement, les proportions varient en fonction de la phase de l’oscillation circadienne.

De nombreux modèles théoriques d’interaction entre les 3 protéines ont été proposés, en s’appuyant sur les observations expérimentales faites sur l’oscillateur in vitro et in vivo [55, 56]. Ces approches décrivent la dynamique des boucles de rétroaction potentielles dictant la formation des différents complexes. Elles permettent d’optimiser les constantes de réaction afin de générer des oscillations circadiennes stables et robustes à une multiplication par 5 (par rapport aux concentrations naturelles in vivo) des quantités des différentes protéines Kai, comme c’est le cas pour l’oscillateur KaiABC in vitro. Les approches théoriques montrent de plus la sensibilité de la stabilité au nombre de protéines en interaction : une diminution par un facteur 10 des concentrations en protéines rendent le système incapable de générer des oscillations circadiennes stables [56].

Ainsi, il semble que l’obtention d’oscillations de hautes amplitudes soit notamment liée au fait que les hexamères de KaiC doivent avoir un taux de phosphorylation synchrone. Cette synchronisation peut être assurée par l’échange de monomères entre les différents complexes [54], ou être liée au fait que KaiA présente une grande affinité pour les complexes KaiBC non phosphorylés [56]. De plus, un modèle récent permet d’étudier la mise à zéro de la phase de l’oscillateur induite par une impulsion de température observée in vitro. En réalisant une analyse aux petites perturbations de la dynamique théorique du système, il est possible de mieux cerner les facteurs contrôlant la remise à zéro de l’oscillateur [54].

L’oscillateur in vitro KaiABC constitue donc un excellent modèle de l’horloge des cyanobactéries en DD. Cependant, lorsque les cellules sont en lumière constante, ou en cycle lumière/obscurité, il y a des rythmes de transcription et de traduction gouvernés par l’oscillateur KaiABC. De plus, en LL ou LD, les quantités de KaiB et KaiC varient in vivo et ces changements sont susceptibles de modifier fondamentalement l’horloge. En effet, pour de faibles concentrations de KaiB et KaiC in vitro, l’oscillateur KaiABC n’est plus le siège d’oscillations circadiennes. Il s’agit de savoir comment l’oscillateur in vivo, s’organise pour gérer les variations moléculaires (transcription, traduction, dégradation de protéines), et si une boucle de rétroaction de transcription/traduction est nécessaire dans ces conditions.

CHAPITRE 1. INTRODUCTION 18

a)

b)

a)

b)

FIG. FIG. FIG.

FIG. 1111----7777 Oscillations circadiennes de phosphoryOscillations circadiennes de phosphoryOscillations circadiennes de phosphoryOscillations circadiennes de phosphorylation de KaiClation de KaiClation de KaiClation de KaiC

a)

a)a)

a) Oscillations in vivo de la concentration relative de kaiC-P : les oscillations sont compensées

en température.

(D’après Tomita J et al., «No Transcription-Translation Feedback in Circadian Rhythm of

KaiC Phosphorylation », ScienceScienceScienceScience 307:251-254).

b)

b)b)

b) Reconstitution de l’oscillation circadienne de phosphorylation de KaiC in vitro. (gauche)

Oscillations de KaiC-P, et KaiC non phosphorylé, obtenues par l’incubation de KaiA, KaiB, KaiC, et d’ATP. (droite) Période des oscillations mesurées à différentes températures : les

oscillations in vitro sont compensées en température.

(D’après Nakajima M et al., « Reconstitution of circadian oscillation in cyanobacterial KaiC

1.2 RÉGULATION CIRCADIENNE DE L’EXPRESSION GÉNÉTIQUE CHEZ LA CYANOBACTÉRIE 19 FIG. FIG. FIG.

FIG. 1111----8888 Modèle d’interaction entre les protéines de l’oscillateur central KaiABC. Modèle d’interaction entre les protéines de l’oscillateur central KaiABC. Modèle d’interaction entre les protéines de l’oscillateur central KaiABC. Modèle d’interaction entre les protéines de l’oscillateur central KaiABC. La protéine KaiC, sous forme

d’hexamère (état α ), se phosphoryle en présence de KaiA, jusqu’à ce que la phosphorylation soit suffisante pour

que le complexe interagisse avec KaiB (état β). L’interaction est supposée engendrer un changement

conformationnel de KaiC (état χ), qui se déphosphoryle ensuite (état δ ) avant de revenir à son état initial. Il est

possible que des monomères soient échangés entre les différents complexes. Les probabilités d’échange sont symbolisées par les flèches (épaisses : forte probabilité, fines : moyenne probabilité, pointillés : faible probabilité).

CHAPITRE 1. INTRODUCTION

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