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L’ethnic business revisité

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 144-154)

L’entreprise ethnique à la lumière des nouvelles mobilités

II. L’ENTREPRISE MIGRANTE À L’ÉPREUVE DES NOUVELLES FORMES MIGRATOIRES

3. L’ethnic business revisité

Cette nouvelle perspective sur les territoires de l’entreprise migrante doit s’accompagner d’une relecture des modèles classiques d’interprétation de l’entrepreneuriat ethnique.

Entreprise transnationale et mobilité sociale

Avec la transnationalisation des entreprises et l’importance des circulations, le lien entre installation définitive et mise en route d’une entreprise est devenu plus complexe. Les nouveaux entrepreneurs ne semblent pas toujours rechercher l’installation, ou du moins ne la trouvent pas nécessairement (Péraldi, 2002 a). De ce point de vue, les activités transnationales semblent consacrer une plus grande autonomie des migrants par rapport aux conditions d’intégration offertes dans le pays d’accueil.

Parallèlement, les activités transnationales permettent souvent de maintenir une relation forte avec le pays d’origine, elles ont une fonction de passerelle (Portes, Haller, Guarnizo, 2002, 69). Dans certains cas, la circulation commerciale constitue même une alternative à la migration définitive, en permettant de s’enrichir tout en étant toujoursbasé dans le pays d’origine (Morokvasic, 1999). Il faudra donc, dans l’étude des entreprises transnationales, reconsidérer la relation du migrant à sa société d’origine et à celle d’ accueil.

La question de la mobilité sociale doit également être réinterprétée à la lumière de ces nouvelles pratiques entrepreneuriales : à l’échelle des circulations, les réseaux transnationaux peuvent apparaître comme de puissants vecteurs de transformations socio-économiques au pays d’origine (Missaoui, 1995 ; Tarrius, 1996 ; Césari, 2002 ; Portes, 1999). La dépendance ici, peut être transformée en réussite, là-bas.

Cependant, si la mobilité peut être mise au service de stratégies de promotion sociale au pays d’origine ou dans d’autres pays, il n’est pas évident que ces stratégies aboutissent toujours. En outre, certains auteurs remarquent combien les phénomènes de transnationalisme induisent certes des formes de mobilité sociale au pays d’origine, mais au prix d’une forte mobilité descendante au pays d’accueil (Oso Casas, 2001). C’est, du reste, ce paradoxe que l’on retrouve dans l’expression, petit ici et notable là-bas (Missaoui, 1995). Aussi, postuler une autonomisation des groupes de migrants par rapport aux conditions d’intégration offertes par le pays d’accueil ne simplifie pas nécessairement la question de la mobilité socio-économique des migrants. Elle exige en revanche de modifier notre échelle d’appréhension, qui doit s’élargir à l’ensemble des espaces de vie des migrants transnationaux.

Une relecture horizontale des structures d’opportunités et de contrainte, à l’échelle des réseaux des transmigrants

Ces nouvelles formes entrepreneuriales exigent par ailleurs d’introduire quelques modifications dans le modèle interactif. Il convient de considérer les structures

d’opportunités dans le cadre spatial au sein duquel s’insèrent les activités économiques des migrants. Ces activités se caractérisent par leur inscription dans des espaces dispersés et transnationaux. Par conséquent, les structures d’opportunités dont bénéficient les entrepreneurs migrants se situent dans ces différents espaces économiques, politiques, institutionnels…Ce sont alors, plus que les avantages d’un seul lieu, les différentiels entre plusieurs lieux qui permettent au migrant d’appuyer ses stratégies économiques et ses choix de localisation, qu’il s’agisse d’écarts législatifs ou de richesse entre États, ou encore de différentiels entre offre et demande de produits de consommation :le transnationalisme n’est pas un effacement de la fracture, mais son exploitation (Lacroix, 2003, 366). Cela a pour conséquence que l’approche habituelle des structures d’opportunités, même sous la forme perfectionnée de l’encastrement multiple, ne suffit plus. En effet, les structures d’opportunités doivent être abordées selon un double niveau d’analyse :

- D’une part, sur un plan « vertical ». Il convient de tenir compte de l’articulation sur plusieurs échelles de ces structures. C’est l’approche de l’encastrement multiple, qui propose de tenir compte à la fois des dimensions locales, régionales et nationales d’un choix de localisation.

- D’autre part, sur un plan « horizontal ». Il convient de prendre en considération la dimension multilocale des activités des migrants. L’appréhension des différents lieux, mis en relation par les échanges et les circulations des entrepreneurs migrants, permet d’éclairer les différentiels et les complémentarités qui motivent la mobilité entrepreneuriale. Il faudra par exemple, consacrer davantage d’attention aux structures d’opportunités et de contraintes dans le pays d’origine du migrant, dans le cas où le migrant continuerait à maintenir une relation économique avec celui-ci, ou encore dans d’autres pays, quand il entretient des relations avec d’autres États.

Parallèlement, la question des ressources sociales a évolué vers une complexité majeure : comment les migrants parviennent-ils à tirer profit d’espaces distants ? On a pu situer, dans le premier chapitre, les conséquences des mobilités du point de vue des appartenances des migrants dans une double dimension, celle de l’appartenance à des réseaux sociaux transnationaux, et celle de l’inscription dans des situations cosmopolites.

Les ressources sociales déployées dans les stratégies économiques des entrepreneurs peuvent être lues suivant cette double dimension.

La dispersion des ressources ethniques et l’usage de cette dispersion

La dispersion d’un corps social peut, dans certains cas, constituer une ressource spatiale (Ma Mung, 1999 a). Dans le cas des diasporas, l’usage de ressources de groupe dispersées a une importance particulière. En ce qui concerne les populations chinoises, les interactions économiques et les échanges entre les différents pôles d’installation de la communauté permettent le fonctionnement économique tout particulier du groupe. D’un point de vue morphologique, on peut parler d’interpolarité (Ma Mung, 1999 a). L’existence de ces échanges au sein du groupe éclaté renouvelle l’intérêt de la question de la confiance.

En effet, quand un groupe est dispersé, la confiance ne peut se baser sur le face-à-face. La réputation devient alors un élément central et nécessaire pour comprendre la persistance de ces échanges, en particulier s’ils sont de nature informelle (Ma Mung, 1999 a).

Si, dans le cas des économies de diaspora, les solidarités ethniques déployées à l’échelle transnationale sont à la base du fonctionnement économique du groupe, on peut s’interroger sur l’aptitude de la part d’autres groupes à mobiliser le même type de ressources. Est-il possible d’appliquer un modèle diasporique à tous les groupes de migrants ? Selon Emmanuel Ma Mung, il est possible d’utiliser ces analyses pour comprendre l’organisation des Africains sub-sahariens ou encore celle des Maghrébins, dans la mesure ou quelque chose de l’ordre d’une dynamique de diasporisation se met en place actuellement dans ces groupes (1997, 2002). C’est également le point de vue d’autres auteurs comme Gildas Simon (1990) au sujet de la structuration de la diaspora marocaine, ou d’Ottavia Schmidt di Friedberg au sujet des réseaux mourides en Italie (1994).

L’usage d’autres types de réseaux sociaux dans les pratiques entrepreneuriales et dans les pratiques d’échange, qui renvoie à des formes plus circonstancielles et cosmopolites de solidarité

Par ailleurs, certains auteurs ont ré-interrogé le poids des identités de groupe et des solidarités communautaires dans les pratiques actuelles d’entrepreneuriat. Il ne s’agit pas nécessairement de minorer ce poids de ces solidarités, mais plutôt de souligner leur dimension parfois fonctionnelle et, par là, leur variabilité. Surtout, ces travaux insistent sur le fait qu’il existe d’autres formes de solidarité que les formes communautaires et que celles-ci peuvent être complémentaires. En insistant, en effet, sur les solidarités ethniques des migrants, la littérature sur l’entrepreneuriat ethnique a parfois occulté d’autres formes de solidarité et de liens sociaux et, pourquoi pas, de relations plus froides qui peuvent exister entre les entrepreneurs et leurs interlocuteurs économiques.

En d’autres termes, il s’agit de reconnaître la capacité des acteurs économiques à puiser dans différents répertoires de ressources, pour reprendre l’expression de Jocelyne Césari, qui écrit : l’ethnicité et l’appartenance religieuse mais aussi l’intérêt économique jouent un rôle déterminant dans la structuration de formes communautaires déterritorialisées. À cet égard, comme nous l’avions déjà souligné, l’opposition classique entre réseaux organiques qui définissent le tissu des relations au sein d’une communauté et recouvrent diverses fonctions et réseaux fonctionnels ou stratégiques créés à des fins précises et délimitées tend à devenir inopérante (Césari, 2002, 17).

On peut remarquer que si cet aspect avait souvent été minoré, c’est probablement parce que la littérature anglo-saxonne, qui est pionnière concernant les réflexions sur l’entrepreneuriat migrant, ne s’intéressait que de façon accessoire au commerce.

L’entrepreneuriat commercial n’était considéré que comme un type comme un autre d’entreprise ethnique et était souvent réduit au commerce communautaire. En revanche, l’étude des places marchandes, telle qu’elle se développe en Europe, place au coeur de la

réflexion la question de la superposition entre différents mondes sociaux et de l’articulation entre différents réseaux (Péraldi, 2001 a).

Marie-Antoinette Hily et Christian Rinaudo soulignent ainsi que la réussite, au sein de la place commerciale de Vintimille, s’appuie sur des réseaux relationnels ouverts et différentiés (2003 b, 50) :ce qui se joue sur le marché de Vintimille comme d’ailleurs dans d’autres lieux de rencontre des petits artisans de l’économie informelle mondialisée, c’est la construction de formes originales de socialité faite d’un mélange de liens communautaires, entre compatriotes d’ici et de là-bas, et de liens entre particuliers, d’alliances ponctuelles, de rencontres opportunes, qui permettent de franchir des distances sociales plus importantes que ne le permettent les relations entretenues à l’intérieur d’un réseau communautaire.

Le point de vue de Mirjana Morokvasic, qui observe les pratiques de circulation commerciale des migrants d’Europe de l’Est, est plus radical. Elle remarque, en effet, à quel point les liens déployés en circulation commerciale n’ont pas la force des liens sur lesquels s’appuient les projets sédentaires d’entrepreneuriat ethnique. Insistant sur le caractère transcommunautaire de ces liens, elle reprend l’opposition de Mark Granovetter (1973) entre liens forts et liens faibles pour montrer que, tandis que dans l’entreprise ethniqueclassique, c’est plutôt du lien fort qui est mobilisé, dans le cas des circulations de travail ou de commerce actuelles, les liens sociaux sur lesquels s’appuient les migrants sont plutôt faibles et élargis, et se caractérisent par leur fonctionnalité, plutôt que leur ancrage identitaire. M. Morokvasic évoque ainsi des solidarités précaires et changeantes et observe l’émergence de toute une série d’intermédiaires permettant cette mobilité :la force des liens ainsi établis ne provient pas de leur ancrage dans des groupes communautaires mais au contraire de leur efficacité quant aux objectifs poursuivis. Ces liens mettent en relation les membres de groupes différents (contrairement aux « strong ties » qui assurent une cohésion intra-groupe et que l’on trouve justement dans l’ethnic business).(…)Les réseaux se forment dans un territoire où les solidarités précaires fonctionnent le temps d’un voyage, pour se dissoudre aussitôt après et se reconstituer de nouveau avec d’autres personnes ou lors d’un nouveau trajet (Morokvasic, 1999).

On touche ici à ce qui semble devenir un élément essentiel de ces nouvelles solidarités : la dispersion des réseaux sociaux le long des itinéraires de la circulation commerciale. Le savoir circulatoire s’appuie sur la connaissance des itinéraires et sur l’expérience des lieux, qui est également expérience et connaissance des hommes-clefs, au-delà des appartenances ethniques. Mirjana Morokvasic poursuit en effet : des liens ne se forment pas tant sur les bases ethniques que sur les bases de l’expérience commune à ceux qui partagent la même route, investissent les mêmes espaces et ont à faire aux mêmes intermédiaires.

Michel Péraldi et Véronique Manry effectuent le même type d’observation dans leur analyse des situations marseillaise et stambouliote. Pour V.Manry, le potentiel relationnel des commerçants est fait tout à la fois de liens faibles et de liens forts (familiaux, amicaux…), mais les liens faibles présentent une majeure efficacité, permettant d’élargir les opportunités et d’établir des liens entre des groupes sociaux différents, dans le cadre

d’uneéconomie d’opportunité dans laquelle la circulation des informations est essentielle.

Les liens forts, en revanche, sont plus contraignants.

Selon V. Manry, c’est davantage la situation dans laquelle se trouve le commerçant, le fait d’être au marché, d’être en affaires, plutôt qu’une appartenance stricte, qui fait réseau (Manry, 2001). À ce sujet, Michel Péraldi parle d’espace-temps du commerce et de l’entraide pour souligner le caractère momentané, situé, des logiques de solidarité observées : les dispositifs commerciaux entre lesquels circulent les Algériens ne sont pas des niches ethniques mais des sociétés cosmopolites articulées sur des « collégialités » (Lazega, 1999) fondées sur le partage de situations très variables d’altérité et des sphères communes et circonstanciées d’intérêts (Péraldi, 2002 b, 7). Pour M. Péraldi, ce sont des solidarités latérales et circonstancielles, plutôt que des liens forts, qui régissent ces échanges.

La dimension des stratégies identitaires déployées dans l’interaction commerciale

Un dernier type d’interprétation, proche de celui que nous venons d’évoquer, se déplace des réseaux sociaux vers les ressources déployées en situation commerciale, ressources qui appuient des stratégies identitaires et participent à la construction d’une image de soi. Cette approche a pour but de se distancier de l’orthodoxie d’une certaine sociologie économique qui focalisait sa réflexion sur la question des réseaux et des formes de socialisation primaire, en occultant les formes de socialisation secondaire du marché (Chantelat, 2002). Le regard se déplace alors de l’organisation interne de l’entreprise vers l’observation des interactions économiques et des compétences dont doivent faire preuve les acteurs dans l’échange marchand. Ce regard, s’il peut être appliqué à toutes les situations d’échange (Joseph, 1998), est particulièrement adapté à l’étude des formes d’échange marchand entre individus de différentes origines.

Il a été vu que, s’inspirant des travaux de Pierre Bourdieu et James Coleman, les travaux classiques sur l’entrepreneuriat migrant montraient que l’encastrement générait du capital social en termes de confiance et de solidarité construites (Portes, Sessenbrenner, 1993).

Les critiques de la nouvelle sociologie économique remettent en cause cette conception de la confiance en montrant combien elle n’est pas nécessairement liée à la connaissance qu’on a de son interlocuteur économique mais aussi aux croyances qu’on y associe. Pascal Chantelat écrit ainsi : à trop insister sur les formes de socialisation primaire du marché (les valeurs, les normes, la morale, le don…), on risque de réduire la sociologie économique des marchés à la seule analyse des échanges personnalisés et d’oublier le rôle structurant des formes de socialisation « secondaire », c’est-à-dire les interactions minimales, discontinues et impersonnelles de l’échange marchand. En ce sens, la relation marchande est d’emblée une relation sociale, non pas parce qu’elle fait intervenir des valeurs, des normes, des émotions ou des réseaux de relation personnelles, mais parce qu’elle présente un minimum de réciprocité sociale (2002, 531).

Cette approche de nature interactionniste, inspirée par les travaux d’Erwing Goffman, mais également par ceux de Georg Simmel sur la modernité et l’impersonnalité du mode de vie

urbain, permet de mettre en valeur la dimension de la rencontre inter-individuelle et de la mise en relation entre différents collectifs qui, comme nous l’avons souligné dans le précédent chapitre, est le corollaire des pratiques de mobilité (Bordreuil, 2000 ). Elle insiste sur le fait que la confiance n’est pas nécessairement liée à la connaissance réelle ni à la durabilité des relations d’échange avec les interlocuteurs. À partir d’exemples très différents, les commerçants asiatiques et maghrébins pour l’un, un marché provençal pour l’autre, Emmanuel Ma Mung et Michelle de la Pradelle insistent sur le rôle des représentations, des stéréotypes associés aux vendeurs, et de la façon dont les vendeurs utilisent cette image en puisant dans différents registres identitaires, dans la sensation de confiance du client. Le réseau ne peut donc tout expliquer.

L’espace, avant d’être support à la territorialisation de groupes communautaires devient, dans cette optique, sujet à une intense activité de différentiation et de production d’altérité, qui témoigne de la construction d’un ordre social (Hily, Rinaudo, 2003). Marie-Antoinette Hily et Christian Rinaudo ont ainsi montré, à l’échelle de l’espace marchand de Vintimille, le travail de catégorisation qui s’opère, par la construction de frontières, contribuant au marquage spatial ethnicisé des différents commerces, et l’établissement de hiérarchies d’un nouvel ordre social. On assiste à des processus de recomposition identitaire de l’espace public urbain sur le mode d’une mise en saillance des identités ethniques à des fins commerciales, écrivent-ils (2003, 55). Il faudra donc dans ce travail, s’intéresser à la façon dont ce jeu des identités marque et structure l’espace, par l’intermédiaire de scénographies commerciales (Raulin, 2000) par exemple. Cette approche permet de mettre en évidence le fait que ce qui peut sembler a priori la manifestation d’une appartenance ne l’est pas forcément. Les travaux d’Emmanuel Ma Mung montrent par exemple comment le regroupement dans Chinatown de la part des Chinois de France est autant une manière de négocier une présence sur le territoire, sous la forme d’un exotisme, que le reflet d’une identité ethnique (Ma Mung, 2000). Ce qui pourrait donc sembler a priori paradoxal (la manifestation d’une identité dans une relation commerciale avec un individu différent) pourrait alors devenir le propre des situations cosmopolites actuelles, qui selon Marie-Antoinette Hily et Christian Rinaudo (2003, 57), peuvent être définies comme des expériences sociales qui rejettent la clôture mais qui ne contribuent pas moins pour autant au marquage contextualisé de frontières symboliques. En termes simméliens, cela revient à dire qu’elles s’apparentent à une forme sociale dont la caractéristique réside précisément dans le fait d’être à la fois résistantes aux identités fermées et productrices d’un jeu permanent sur les catégories d’appartenance.

Dans le deuxième chapitre de cette partie, nous avons voulu montrer qu’une analyse des circulations devait se positionner dans les tensions, entre ancrage et mobilité d’une part, entre appartenance communautaire et inscription dans des situations cosmopolites, d’autre part, qui caractérisent l’individu contemporain et tout particulièrement le migrant. Tenir compte de cette double dimension influence fortement le regard porté sur les théories de l’entrepreneuriat ethnique.

Certes, les questionnements généraux présentés dans ces études conservent un intérêt. Elles permettent d’interroger le lien entre entrepreneuriat et dynamiques d’autonomisation, de rechercher les causes structurelles de la mise en route et des choix de localisation d’une entreprise, mais aussi de comprendre quelles sont les formes d’organisation sociale des migrants et quel est leur positionnement dans la société d’accueil, de s’intéresser aux déterminants de leur mobilité socio-économique. Ce sont autant de questionnements qu’il convient de garder en mémoire. En outre, le modèle interactif prend tout son intérêt dans le cadre d’une lecture territoriale des phénomènes d’entrepreneuriat migrant, dans la mesure où il permet de rendre compte de la dialectique à laquelle se livrent les sujets ou les groupes avec les structures socio-spatiales dans lesquelles ils s’inscrivent.

Toutefois, si ces questionnements généraux méritent d’être pris en compte, certains aspects de ces travaux, en particulier une perspective communautariste des groupes migrants et une approche localiste des espaces de l’entrepreneuriat, peuvent être remis en cause par l’importance des pratiques de mobilité. L’usage de la mobilité dans les stratégies entrepreneuriales, caractéristique des nouvelles formes d’entreprise migrante, nécessite, en effet, d’aborder différemment les territoires des entrepreneurs. Plus que des enclaves spatiales au sens propre du terme, les territoires des entrepreneurs sont, en effet, devenus des places et des pôles (Battegay, 2003). La problématique doit articuler, d’une part, l’analyse des espaces des circulations commerciales et des réseaux socio-économiques et, de l’autre, la territorialisation de places marchandes, de lieux précis, qui sont des carrefours de réseaux. Ce sont, en effet, les articulations entre ces deux dimensions spatiales, qui permettent de saisir les logiques qui organisent les mouvements des entrepreneurs et d’appréhender la façon dont se structurent les espaces qu’ils traversent.

Le regard porté sur la question de la mobilité sociale en est transformé, puisqu’il convient

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