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Bruno Mortaigne, Direction générale de l’armement, ministère de la défense

Dans le document ASSEMBLÉE NATIONALE SÉNAT (Page 37-43)

durée. Entre la conception, le développement et l’utilisation, on se trouve vite sur une cinquantaine d’années et nous faisons donc des prévisions d’utilisation. Assurer la totalité des besoins en terres rares ou en matériaux de manière générale, c’est difficile. Le programme Rafale, par exemple, qui débouche actuellement commercialement, est un programme qui a été conçu en 1975-1980. Il va être utilisé jusqu’en 2050 au moins. Dans le domaine naval, les navires et les sous-marins, on est un peu sur les mêmes problématiques.

On est sur des durées très longues au niveau des matériaux.

Autre difficulté importante, on est souvent sur des quantités de matières qui sont marginales par rapport à ce qu’il y a dans le civil. On positionne donc nos programmes, nos choix de matériaux, par rapport à ce qui peut se faire dans le civil, dans les développements qui sont faits pour les alliages, par exemple. On est plutôt suiveurs par rapport à ce qui se fait dans le civil, pour nos choix de matériaux qui peuvent se développer.

On a quand même souvent des spécificités, des besoins de propriétés un peu particulières. On va devoir développer des matériaux, ou tout du moins utiliser des alliages un peu spécifiques. Pour obtenir ces performances on est obligé également de regarder tout ce qui va être lié à la disponibilité des procédés. On est obligé de faire le lien en permanence entre le matériau, le procédé d’élaboration et de regarder quelles sont toutes les évolutions, en rebouclant avec le civil, en regardant les problèmes de recyclage, de disponibilité et les évolutions économiques au niveau mondial.

On va chercher à se positionner au niveau de solutions de matériaux en faisant des requalifications et des évolutions, bien que ce soit souvent coûteux. Ce sont des choses qu’on cherchera à reculer le plus possible, mais auxquelles on sera confronté dans le cas de pénurie, au moment où des difficultés apparaîtront. Il faut également faire des efforts sur les solutions de réparation, parce que ce sont souvent ces solutions qui vont permettre de ne pas remplacer un nouveau matériau, de trouver un palliatif sans avoir à requalifier un système de manière complète.

Enfin on va suivre les nouvelles technologies et leurs potentialités d’évolution.

Mme Delphine Bataille. Monsieur Philippe Schulz, vous souhaitez revenir sur le cas de l’industrie automobile.

M. Philippe Schulz, expert leader Environnement, énergie et matières premières stratégiques, Renault. Je voudrais simplement compléter mon intervention précédente en évoquant les leviers de sécurisation qui sont développés par un groupe comme Renault aujourd’hui. Tout à l’heure j’ai évoqué brièvement des actions comme la réduction d’usage, ou la substitution mais ça va largement au-delà. J’aimerais insister sur un point très important qui est le recyclage comme levier de sécurisation. Ça a été abordé tout à l’heure, mais rapidement, et je sais que cela sera abordé cet après-midi, malheureusement je ne pourrai pas être présent.

Prenons un des exemples concrets d’aujourd’hui : dans un véhicule conventionnel produit par Renault, essence ou diesel, nous avons de l’ordre de 11 à 12 kg de cuivre ; dans un véhicule électrique, nous en aurons 35 kg. Globalement, l’industrie automobile consomme environ 4 % du cuivre produit au niveau mondial. Elle pourrait en consommer jusqu’à 9 % à l’horizon 2020, et 2020 c’est demain. Nous avons entrepris assez rapidement des travaux de manière à pouvoir recycler le cuivre, obtenu non seulement comme rebut

dans nos usines de fabrication, mais aussi auprès des véhicules hors d’usage. C’est une singularité du groupe Renault que d’avoir pris une participation dans une société qui a accès à des véhicules en fin de vie. Cela nous permet d’ores et déjà d’être autonomes en cuivre sur l’ensemble des fonderies du groupe Renault en France.

M. Didier Julienne a évoqué tout à l’heure le sujet du recyclage des pots catalytiques et je pense qu’il n’y a aucun constructeur au monde qui pourrait dire que le platine, le palladium et le rhodium ne sont pas des matières critiques pour eux. C’est un sujet absolument essentiel. Nous recyclerons cette année 70 000 pots catalytiques en France, dont plus de la moitié vient des véhicules en fin de vie.

Un des aspects absolument fondamentaux de ce sujet est de sécuriser l’accès à des véhicules en fin de vie. Il faut qu’ils disposent encore de pots catalytiques quand ils arrivent dans les centres de démolition. Or aujourd’hui, un véhicules sur deux arrivant chez un démolisseur ne dispose plus de pot catalytique.

Ce sujet est absolument clé et plus globalement pour nous. Nous pensons que l’économie circulaire compétitive, non pas le recyclage pour le recyclage, mais dans un cadre compétitif, est un des leviers essentiels pour nous aider à mieux sécuriser l’ensemble de nos approvisionnements. Cela prévaut aussi pour des métaux stratégiques puisque nous avons établi une étude avec le groupe Solvay il y a quelque temps, sur le recyclage des terres rares, qui nous permettrait le cas échéant, de disposer d’un procédé de recyclage à partir d’aimants disposés dans les véhicules en fin de vie. Pour l’instant, l’équation économique n’est pas au rendez-vous, contrairement à la technologie.

Mme Delphine Bataille. Monsieur Alain Rollat, est-il, selon vous, possible de se passer du dysprosium ?

M. Alain Rollat, Rare Earth upstream projects Manager, Solvay. Précédemment, j’ai évoqué le cas d’une rupture technologique qui modifiait profondément la vision que l’on pouvait avoir des terres rares critiques. Je vais évoquer maintenant le cas, non pas d’une rupture technologique, mais celui d’une évolution technologique importante.

Comme l’a dit M. Frédéric Petit, la composition classique d’un aimant permanent est de 30 % de terres rares (praséodyme-néodyme). Puis, selon la température à laquelle on utilise cet aimant, il faut rajouter du dysprosium ou du terbium, ces deux terres rares ayant à peu près les mêmes effets. Il se trouve que plus on travaille à haute température, plus la teneur en dysprosium que l’on doit ajouter est importante.

Lors de la crise de 2011, le coût des aimants était essentiellement lié au prix du dysprosium. De nombreuses recherches ont alors été menées pour essayer de diminuer la quantité de dysprosium nécessaire en fonction de la température d’utilisation.

Deux cas, l’un sur les petits aimants, l’autre sur les gros aimants, conduisent aujourd’hui à des solutions industrielles.

Les fabricants d’aimants se sont aperçus que le dysprosium n’était pas efficace partout. Si on mettait le dysprosium à des endroits bien particuliers, qu’on appelle les joints de grain, on était capable de diminuer considérablement la quantité de dysprosium nécessaire tout en ayant la même efficacité. Pour donner un ordre de grandeur, on divise par cinq, à peu près.

C’est un cas réel qui fonctionne, mais qui fonctionne essentiellement pour les petits aimants. Aujourd’hui, les fabricants d’aimants n’ont pas encore trouvé la solution pour le faire sur de très gros aimants. Sur les très gros aimants, la solution est celle qu’a développée Siemens et qui consiste à refroidir l’aimant lui-même. Cette solution paraît assez évidente,

mais n’est sans doute pas facile à mettre en œuvre. On se passe de dysprosium parce qu’au lieu de le faire fonctionner à plus de 100 °C, on va le faire fonctionner à des températures plus basses, en mettant en œuvre un système de réfrigération.

Ces deux systèmes, l’un industriel, l’autre en développement par Siemens, devraient permettre de diminuer de façon considérable les besoins mondiaux en dysprosium, même si la criticité du dyprosium continue de demeurer.

Mais lorsque l’on regarde les projections de consommation de dysprosium faites par différents analystes, on s’aperçoit que la plupart ne prennent pas en compte cette évolution technologique importante. M. Adamas, par exemple, prévoit une quantité de dysprosium de 9 % dans les éoliennes. Or, comme M. Frédéric Petit l’a dit, Siemens, qui souhaite être le premier producteur d’éoliennes offshore au monde, pense s’en passer.

Mme Delphine Bataille. Monsieur Laurent Corbier, Eramet est le leader mondial dans les métaux d’alliage. Pouvez-vous évoquer les synergies européennes ?

M. Laurent Corbier, directeur des affaires publiques, Eramet. En faisant l’analyse de ces synergies, on découvre des choses très intéressantes (même si elles sont évidentes à tout le monde) et très rassurantes. Mais leur mise en œuvre est parfois un peu plus longue.

On observe, quand on regarde la littérature européenne, une grande convergence de vision et d’objectifs. C’est plutôt rassurant. Si on prend un certain nombre de points listés dans la littérature introductive de ces travaux sur la liste des CRM, les Critical Raw Materials, ou sur celle des matières premières critiques de l’Union européenne, on trouve des éléments qui raisonnent tout à fait chez nous :

- l’importance du lien avec l’industrie. En France, des initiatives de type COMES ou la création du CSF IEPT (Comité stratégique de filière Industrie extractive et de première transformation) montrent qu’il y a ce lien très fort avec l’industrie ;

- l’importance des technologies de pointe des industries de l’information et de la communication ;

- l’importance des matières qui peuvent contribuer à une économie bas carbone ; - le renforcement de la compétitivité industrielle de l’Europe.

Stimuler la relance de l’activité minière, les initiatives de type code minier, la réforme du code minier et la réflexion sur la mine responsable montrent que l’on est sur la même longueur d’onde. Promouvoir la recherche et l’innovation et promouvoir des accords commerciaux équitables, ce qu’on appelle en jargon le level playing field, paraît effectivement être une dynamique très importante qui semble être très fortement partagée en France.

Autre conviction partagée et très intéressante et que l’on trouve dans la littérature européenne : il convient, je cite, de souligner que toutes les matières premières, même celles qui sont non classées en tant que critiques, sont importantes pour l’économie européenne.

Venant d’une entreprise dans laquelle on est sur des matériaux qui sont labellisés non critiques et non stratégiques, au sens de cette liste, je ne peux qu’approuver.

Nous avons aussi une ambition partagée de coopération internationale. On parle au niveau de l’Europe de diplomatie des matières premières, c’est une terminologie qu’on entend très régulièrement en France. Une des conséquences est d’améliorer l’accès aux marchés du monde entier en facilitant l’intégration, je cite, « des entreprises européennes dans les chaînes de valeurs mondiales ». Il me semble que l’entreprise que je représente, est

en plein dans cette dynamique. On n’a pas besoin de tout faire en France, même s’il faut effectivement relancer des activités sur le sol français. L’accès aux matières premières via des entreprises européennes et donc françaises, me paraît aussi évident.

Tout cela se traduit par une floraison, on l’a observé, d’initiatives européennes, de programmes phares et par le partenariat européen d’innovation. Cet esprit collaboratif est lancé. Il y a vraiment des actions de coopération qui se sont mises en place et qui s’intensifient très significativement en Europe.

Mme Delphine Bataille. Nous venons d’évoquer les produits spécifiques qui présentent un risque d’approvisionnement et notamment la possibilité de substitution par d’autres métaux. A-t-on fait le tour des applications que cela peut concerner ?

DÉBAT

M. Gilles Bordier, directeur adjoint du centre de Marcoule du CEA, en charge des activités scientifiques. Je voulais intervenir sur le recyclage, notamment le recyclage des terres rares dans les aimants. Il me semble que par rapport à ce qui a été dit tout à l’heure sur l’indium, le cas des aimants est très intéressant puisque les quantités sont plus massives.

Je voudrais souligner aussi que les technologies, à mon avis, sont largement disponibles pour recycler certains éléments. C’est le cas de l’hydrométallurgie que le CEA maîtrise grâce à ses recherches sur le cycle du combustible et son travail d’extraction des lanthanides (qui ne sont rien d’autre que des terres rares des produits de fission). Cette technologie permet de séparer les terres rares entre elles. L’accessibilité des technologies existe donc.

La question que j’aimerais poser aux intervenants qui ont parlé de ces éléments porte sur les facteurs qui déclencheront le fait de faire du recyclage. Sont-ils de nature économique ou technique, ou un mélange des deux ?

M. Alain Rollat, Rare Earth upstream projects Manager, Solvay. Nous nous sommes penchés sur la possibilité de recycler les terres rares des différents produits finis dans les aimants. C’est effectivement une cible intéressante mais qui pose deux problèmes : est-on capable d’avoir un gisement concentré ? Quelle est la rentabilité de l’opération ? Lors de l’opération de récupération et de recyclage, a-t-on le moyen de concentrer suffisamment la partie aimant, pour obtenir un concentré de terres rares suffisant pour être économique ?

Quel va être, par ailleurs, le prix global de l’aimant ? Selon la teneur en dysprosium, son prix peut varier de façon très importante. Le recyclage est d’autant plus intéressant que la teneur en dysprosium est élevée. La rentabilité du recyclage d’un aimant sans dysprosium (cas des aimants contenus dans les disques durs des ordinateurs) est, par contre, insuffisante.

M. Frédéric Petit, directeur Business Development Siemens Power Generations. Pour Siemens, la concentration est essentielle pour le recyclage.

Techniquement, la concentration de 30 % pour nous et, économiquement, les attentes de démantèlement auquel nos clients sont soumis vont faire que la filière de recyclage se mettra en place, sur un taux de 90 % pour l’éolien.

M. Christian Thomas, Terra Nova. Je voulais revenir sur la vitesse de mutation technologique. J’ai déjà cité le cas du germanium, qui avait plusieurs vies en tant que semi-conducteur, puis dans l’infrarouge militaire et, aujourd’hui, dans la fibre optique. C’est la même chose pour les luminophores. Comment est-ce que l’on peut, au fond, prévoir, suivre ou prévenir ces évolutions technologiques ?

Aujourd’hui, les LED au nitrure de gallium deviennent dominantes et c’est une invention qui remonte à vingt-cinq ans. L’invention des écrans plats et des cristaux liquides, qui nous ont fait abandonner les tubes cathodiques pour passer aux écrans plats, remonte aussi à cinquante ans, presque soixante ans.

Si je reprends l’exemple du germanium, pourquoi le germanium optique militaire a disparu ? Il n’a pas disparu complètement, il s’est réduit considérablement. C’est parce qu’on a inventé des capteurs qui étaient capables de voir de façon beaucoup plus efficace l’infrarouge.

On voit naître ces technologies. On peut les suivre et voir leur efficacité, quinze ans ou vingt ans avant que le mouvement industriel ne se fasse. Mais si l’on veut parler de métaux stratégiques, il faut être capable de voir un peu le futur. Ça ne veut pas dire qu’on le verra toujours bien, mais cet effort est indispensable. L’Observatoire des matières premières, si on veut en faire un, un jour, doit avoir un volet important qui est celui de la prévision des évolutions technologiques. Si on ne le fait pas, on commencera à recycler ou à produire des matières qui dans quinze ans ne seront pas utiles. C’est un point important sur lequel je voulais insister.

M. Patrick Hetzel, député, rapporteur. Vous évoquiez, Monsieur Leroy, sous forme d’une interrogation, la constitution éventuelle d’une OPEP des métaux. Est-ce que vous pourriez préciser votre pensée ? Les participants pourraient-ils réagir, car c’est une idée qui mérite une discussion un peu plus approfondie ?

M. Maurice Leroy, professeur émérite à l'École européenne de chimie, polymères et matériaux de Strasbourg, membre associé de l'Académie nationale de pharmacie. M. Schulz me faisait observer que les Russes avaient proposé, en termes de platinoïdes, de faire une OPEP. Je pose la question tout simplement parce que si on regarde les chiffres sur l’évolution de la démographie en Afrique et si l’on considère que celle-ci va véritablement se développer et avoir une industrie, alors, il va y avoir une demande extraordinaire au niveau des métaux. Il en est de même de l’Inde. L’Inde qui passe à 1,7 milliard ou 1,8 milliard d’habitants, représente une demande extraordinaire. On risque donc d’avoir des positions extrêmement figées, à partir de là, puisqu’il va y avoir, comme je le rappelais tout à l’heure, deux producteurs pour certains métaux. Cela fait inévitablement penser à ce qui s’est passé avec le pétrole. Nécessairement, à un moment, cette idée va se répandre.

Il y a certes une différence avec le pétrole, car les technologies peuvent permettre de changer de métal et on peut recycler. Mais si l’on recycle le zinc, on extraira moins de zinc. L’indium deviendra beaucoup plus cher. C’est, en termes de gestion, considérablement plus difficile que la gestion du pétrole. Une OPEP des métaux demanderait vraiment une concertation extrêmement importante des différentes parties. C’est ce que je ressens profondément.

M. Didier Julienne, stratège industriel et éditorialiste en ressources naturelles.

Je vais revenir rapidement sur plusieurs points. En ce qui concerne le recyclage, je vais prendre l’exemple du ruthénium-iridium-osmium, dont M. Bordier considère qu’on sait le faire depuis très longtemps, mais que ce n’est pas économique. Lorsqu’il y a des déchets de métaux dans des concentrés, l’industriel les apporte à un affineur et les abandonne, car le coût d’affinage est supérieur à ce qu’on peut en retirer. L’affineur les affine et, in fine, cela lui fait un bonus métal qu’il peut ensuite recycler. Mais lorsqu’on regarde d’autres métaux, on retrouve ce genre de comportement.

Lorsqu’on prend l’exemple du cadmium, voilà un métal qui a été très largement utilisé, qui l’est beaucoup moins, qui est encore en circulation et qu’il faut donc recycler.

Mais ce recyclage représente un coût puisqu’il n’y a plus de prix. Il faut donc imaginer quel va être l’avenir des technologies et de ces métaux. Lorsqu’on utilise un métal pendant cinquante ans et que, soudain, on n’en veut plus, que le recycler à un coût, qui va payer ? C’est une question essentielle. J’ai rencontré des recycleurs qui sont positionnés sur ces produits et qui disent : « Nous, on sait faire, mais personne ne veut nous payer. Donc on abandonne ».

S’agissant de la politique européenne, je ne crois pas beaucoup qu’il y ait une politique européenne des métaux réellement pérenne, car les industries sont différentes dans les différents pays européens, qui ont par ailleurs des objectifs différents. Regardez les listes de métaux stratégiques ou critiques. L’uranium est-il critique ou stratégique en France ? L’est-il en Allemagne ? Je pense que ce simple exemple nous prouve qu’avoir une liste de métaux critiques ou stratégiques en Europe est une chimère. De plus, que signifie stratégique ? Que signifie critique ? Je les ai définis, depuis de nombreuses années, dans ce que j’écris dans Les Échos : le stratégique répond à une politique de l’État, c’est pour cette raison que le minerai était stratégique en Chine, le cuivre également, parce qu’il y avait une vraie politique de l’État dans le domaine de l’urbanisation. Mais maintenant que cette politique se délite, ou est moins importante ou moins prégnante, le minerai de fer devient moins stratégique en Chine.

En revanche, un métal critique, c’est un métal qui est essentiel pour une industrie.

Je ne connais pas d’industrie, à part l’industrie de défense qui répond à des stratégies d’État, qui puisse dire : « J’ai un métal stratégique ». L’industrie a des métaux critiques. Le problème que nous rencontrons ici, c’est que le critique et le stratégique se mélangent, notamment pour les métaux rares et les terres rares. Les politiques des États se mélangent avec les politiques des entreprises, et là, nous avons des gluons, si je puis dire, ou des marchés qui se coincent, ou des prix qui s’enflamment, parce que nous ne savons pas gérer ce genre de situations. C’est ce que j’ai voulu rappeler tout à l’heure dans les platinoïdes, lorsque l’Europe a décidé après les États-Unis d’avoir une politique de dépollution automobile. Ces métaux, devenus stratégiques, étaient déjà critiques dans les industries et, donc, les prix se sont enflammés tout comme les taux d’intérêt.

Monsieur Leroy, vous avez parlé tout à l’heure de l’Afrique, je vous remercie parce que j’ai insisté dans mon propos liminaire sur l’Afrique et sur l’Inde. J’ai écrit un jour un article qui disait que lorsque l’Afrique se réveillera, la Chine tremblera. C’est exactement ce que vous avez dit, c’est exactement ça et je suis tout à fait d’accord avec le concept que j’ai inventé, la « consommation compétitive ». Ce n’est plus le consommateur qui décide, armé de son prix, ce qu’il va acheter, c’est le producteur qui décide où il va mettre ses métaux, ou plutôt, ses métaux une fois transformés. L’exemple des terres rares est ici flagrant. La Chine en produit, mais peu importe, ce n’est pas le problème. La Chine, aujourd’hui, a diminué ses quotas et diminué ses taxes.

L’important est de savoir qui va produire les aimants, qui va produire tous les appareils qui sont, non pas équipés d’aimants, mais tous les appareils qui permettent de fabriquer, par exemple, les aimants permanents. Le problème est là. Nous en avons la capacité pare que c’est uniquement de l’intelligence. En nous la volonté, en avons-nous encore les compétences ?

Dernier point, nous n’avons pas de doctrine métallurgique et minière en France.

C’est à venir, on y travaille. Je ne crois pas que nous ayons de vrais mineurs en France.

Quand je regarde le monde de la mine et que je regarde la France, j’aboutis à cette

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