II. SLA et biomarqueurs 20
1. Biomarqueurs cliniques 20
1.1. Approches neurophysiologiques
Les approches neurophysiologiques sont un outil important permettant de mettre en évidence une atteinte des motoneurones. Parmi les différents outils neurophysiologiques, on trouve l’étude de conduction nerveuse, l’électromyographie (EMG), l’estimation du nombre d’unités motrices (MUNE), la stimulation magnétique transcranienne (TMS) ou encore la myographie d’impédance électrique (EIM) (Inghilleri and Iacovelli, 2011; Joyce and Carter, 2013; Turner et al., 2013).
L’étude de la conduction nerveuse est une part essentielle du diagnostic électrophysiologique chez les patients suspectés de SLA. Elle est utilisée pour évaluer la dégénérescence axonale (Joyce and Carter, 2013). L’EMG, quant à elle, est plutôt utilisée pour confirmer l’atteinte des motoneurones. Certaines caractéristiques sont requises afin de poser le diagnostic de la SLA. On doit y retrouver des altérations du tracé dites aigues, caractérisées par des fibrillations et des potentiels de fasciculations, mais aussi des
altérations dites chroniques comme une diminution du recrutement des unités motrices et une décharge électrique à vitesse élevée, de large amplitude et de longue durée (Joyce and Carter, 2013). Toutefois, l’EMG présente certaines limites. En effet, elle ne permet pas d’évaluer la progression de la maladie ni l’effet de traitements dans le cas d’essais cliniques. La technique d’estimation du nombre d’unités motrices est plus adaptée pour cela (Turner et al., 2013). C’est un critère de mesure intéressant, puisqu’il évalue directement la perte des motoneurones. C’est donc une technique sensible à la progression de la maladie (Inghilleri and Iacovelli, 2011). Cependant, il existe de nombreuses techniques de comptage et aucun consensus sur la méthode à utiliser n’a été réalisé aujourd’hui à ce jour (Wang et al., 2004).
La TMS est une technique visant à délivrer une impulsion magnétique brève, intense et indolore au niveau de la boite crânienne, générant un courant électrique dans le cortex et se propageant via des voies neuronales impliquant à la fois les neurones moteurs et les motoneurones. La réponse à cette stimulation peut ensuite être mesurée dans les muscles des extrémités supérieures et inférieures (Inghilleri and Iacovelli, 2011). Grâce à la TMS, on est capable de mesurer l’intégrité fonctionnelle de ces neurones, et de détecter des anomalies. C’est une technique utilisée à la fois pour le diagnostic de la maladie et pour le suivi de son évolution (Turner et al., 2013).
L’EIM, basée sur l’application d’un courant électrique de haute fréquence et de basse intensité sur une zone localisée d’un muscle, permet d’évaluer l’intégrité fonctionnelle et la structure de ce muscle. En 2012, Rutkove et collaborateurs ont réalisé une étude multicentrique, dans le but de comparer le potentiel pronostique de cette technique avec celui d’autres méthodes. Des mesures d’impédance ont été réalisées sur 60 patients, sur une période d’un an, et comparées avec des mesures de scores ALSFRS-‐R et de dynamométrie. Les résultats ont montré que l’EIM était plus performante que les deux autres techniques dans la détection du déclin des patients (Rutkove et al., 2013). Malgré des résultats prometteurs, à ce jour, la TMS et l’EIM restent encore essentiellement utilisées dans un contexte de recherche (Vucic et al., 2013).
1.2. Techniques de neuro-‐imagerie
Les techniques de neuroimagerie ont connu un développement important ces dernières années dans la course aux biomarqueurs de la SLA. Cela inclut la tomographie par émission monophotonique (SPECT), la tomographie par émission de positons (PET), l’imagerie par résonnance magnétique fonctionnelle (IRMf) ou l’imagerie en tenseur de diffusion (DTI). La SPECT a été l’une des premières techniques à être utilisée. En 1989, l’équipe de Ludolph et collaborateurs a montré que l’intensité de fixation du traçeur était corrélé avec le degré de sévérité de la maladie (Ludolph et al., 1989). C’est aussi grâce à cette technique que des anomalies frontotemporales ont été mises en évidence dans des cas de SLA (Talbot et al., 1995).
La PET a été une technique très utilisée afin de décrire la SLA comme étant un phénomène de dégénérescence multi-‐système. En 1993, l’équipe de Takahashi et collaborateurs qui, en utilisant un analogue de la dopamine, a pu mettre en avant, chez les patients atteints de SLA, une réduction de la fonction dopaminergique (Takahashi et al., 1993). En 2000, l’équipe de Lloyd et collaborateurs, à l’aide d’un analogue de GABA cette fois-‐ci, a mis en évidence la présence de dysfonctionnements dans les aires motrices, prémotrices et extramotrices chez les patients atteints de SLA et plus précisément une perte de l’inhibition interneuronale GABAergique dans ces aires (Lloyd et al., 2000). En 2005, Turner et collaborateurs ont pu mettre en avant l’implication du système dopaminergique dans la réduction du volume des aires frontotemporales chez les patients atteints SLA et ce, de façon accrue, chez ceux ayant une forme bulbaire (Turner et al., 2005).
Cependant, la SPECT et la PET présentent certaines limites. La sensibilité et la résolution spatiale ne sont pas toujours suffisamment adaptées. De plus, ces techniques nécessitent l’exposition des patients à des radiations ionisantes, ce qui, à long terme, peut être néfaste. Enfin, les analogues utilisés comme traçeurs ont des demi-‐vies relativement courtes, ce qui peut restreindre parfois l’observation de certaines phénomènes ou régions.
L’IRMf est une technique qui présente l’avantage de pouvoir étudier l’activité cérébrale de façon non-‐invasive mais également d’évaluer l’effet de certaines tâches motrices sur cette activité cérébrale. L’IRM a été utilisée dans l’aide au diagnostic de la SLA ainsi que dans
l’évaluation de sa progression. Elle est l’un des outils de neuro-‐imagerie les plus prometteurs (Turner et al., 2009).
La DTI est une technique d’imagerie plus avancée permettant d’évaluer l’intégrité des faisceaux de matière blanche du cerveau (Chenevert et al., 1990). Cette technique est particulièrement utile pour mettre en évidence une atteinte des neurones moteurs (Turner et al., 2011). Toutefois, très peu d’études se sont intéressées au réel potentiel diagnostic de cette technique. Par ailleurs, la DTI ne permet pas non plus d’évaluer le pronostic de la maladie (Turner et al., 2013).