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Bilan et mise en perspective des apports sur le développement pragmatique

Dans cette section finale, nous présentons d’abord une synthèse des principaux apports de l’étude de référence sur le développement pragmatique, tant au plan de l’évaluation que de la contribution à la recherche, puis nous mettons les résultats en perspective par rapport à la littérature dans le domaine.

6.1. Principaux apports de l’étude de référence

Contribution à l’évaluation : les scores de référence du développement pragmatique

Pour répondre aux objectifs de l’évaluation dans le domaine du développement pragmatique, l’étude a établi trois ensembles de scores – qui sont des scores bruts - fournissant les indicateurs de référence qui permettront de situer les performances d’un enfant par rapport à son groupe d’âge : scores de participation aux échanges langagiers, scores d’utilisation du langage pour les actes de parole et scores d’organisation discursive des messages (voir Section 1). Dans chacun des trois registres de la pragmatique, le score global (moyenne et écart type) permet de situer le développement d’un enfant par rapport à ses pairs. Les scores partiels peuvent aider à caractériser plus précisément les compétences de l’enfant, ce qui est utile surtout si le score global de l’enfant est très différent de la moyenne obtenue par ses pairs, pour déterminer si certaines capacités sont plus spécifiquement responsables de la différence. Il convient toutefois de souligner que, dans ce domaine jusqu’à présent

pratiquement inexploré des questionnaires parentaux et en l’absence d’autres références comparables en la matière, les conclusions sont indicatives et les comparaisons à mener avec les précautions qui s’imposent.

Les scores d’échanges langagiers. Le premier registre, l’aptitude à participer aux échanges langagiers et à la conversation, forme le socle de l’interaction. Comme on l’a vu, cet ensemble de capacités est globalement précoce et rapidement maîtrisé. Le score global (cf. Figure III.1) indique que, à 18 mois, les enfants de notre échantillon présentent déjà en moyenne près de 11 des 18 capacités conversationnelles inventoriées (écart type 4,6). Le score atteint 14 à 24 mois (écart type 2), 16 à 30 mois (écart type 1,4), ce qui représente déjà la quasi-totalité des capacités, et il se maintient à ce niveau jusqu’à 42 mois. On peut donc attendre minimalement, dans ce registre, un score global (sur 18) d’au moins 6 chez un enfant de 18 mois, d’au moins12 à 24 mois, 14 à 30 mois et 15 à 42 mois. Si l’on se place au niveau des scores partiels (cf. Figure III.2), on peut attendre des performances assez élevées pour toutes les capacités, mais avec des différences sensibles. L’intelligibilité des messages devrait être assurée dès 24 mois (le score moyen observé à ce âge est déjà quasi maximal : 2.97 sur 3), tandis que l’adaptation à la situation de communication ou le maintien du thème de l’échange ne le sont pas totalement (1.68 et 2.13 sur 3).

Les scores d’utilisation du langage. Le deuxième registre examiné, celui de l’aptitude à exprimer des actes de parole, ouvre à la communication intentionnelle et linguistique. Il est globalement assez précoce et se développe régulièrement. Le score global (cf. Figure III.3) montre que, à 18 mois, les enfants possèdent en moyenne plus de 7 des 21 capacités d’expression communicative inventoriées (écart type 3,9), plus de 11 à 24 mois (écart type 3,2) et plus de 15 à 30 mois (écart type 2,7) – ce qui représente les deux-tiers des capacités examinées. Le score global atteint environ 17 à 36 mois (écart type 2,7) et se maintient à cette valeur jusqu’à 42 mois. Dans ce registre, on peut donc attendre minimalement un score global (sur 21) d’au moins 3 à 18 mois, 8 à 24 mois, 12 à 30 mois et 15 à 42 mois. La considération des scores partiels (cf. Figure III.4) montre des écarts extrêmes au sein des capacités d’expression des actes de parole. L’expression des émotions, précoce, devrait être normalement assurée à 24 mois (score moyen observé : 2.87 sur 3), tandis que la capacité à rapporter ou expliquer un événement, plus tardive, a toute chance de ne pas l’être au même âge (score moyen observé : 0.90 sur 4), mais devrait progresser dans la suite du parcours.

Les scores d’organisation des messages. Le troisième registre, rassemblant les capacités d’organisation des messages, permet la structuration et la cohésion linguistique des discours. Comme on pouvait s’y attendre, il se met en place plus tardivement que les

précédents, mais il se développe rapidement. Le score global (cf. Figure III.5) indique que les enfants de notre échantillon ne possèdent en moyenne aucune des 14 capacités discursives inventoriées jusqu’à 20 mois. Ils en possèdent près de trois à 24 mois (écart type 2,5), près de 9 à 30 mois (écart type 3,7) – ce qui représente plus de la moitié des capacités examinées, une dizaine à 36 mois (écart type 3,2) et près d’une douzaine à 42 mois, soit la quasi-totalité. Pour ce registre élaboré de la compétence pragmatique, on peut ainsi s’attendre à ce que le score global (sur 14) soit encore nul ou quasiment à 24 mois, mais soit d’au moins 5 à 30 mois et 10 à 42 mois. Les quatre scores partiels (cf. Figure III.6) progressent ici de façon similaire sur l’ensemble du parcours, témoignant de la très bonne cohérence interne de ce domaine qui implique la mobilisation des moyens discursifs. On peut cependant signaler un démarrage un peu plus précoce pour la capacité à référer aux personnes de la situation de communication (score moyen observé à 24 mois : 1.81 sur 4).

Analyse du développement : progression, non linéarité, variabilité

En même temps qu’elle établit des indicateurs de référence pour l’évaluation, l’étude contribue à l’enrichissement des connaissances en apportant des résultats inédits sur le développement pragmatique entre 18 et 42 mois. Elle montre que les trois scores globaux résumant les compétences pragmatiques des enfants progressent tous avec l’âge durant la période examinée. Cependant, pour les scores ‘Echanges langagiers’ et ‘Utilisation du langage’, le moment d’émergence des capacités concernées se situe clairement avant le début de cette période, puisqu’à 18 mois le niveau moyen de ces deux scores est déjà élevé. De fait, la progression s’avère pratiquement achevée vers 30 mois pour les échanges langagiers, et quelques mois plus tard, pour l’utilisation du langage dans les actes de parole. Ce n’est pas le cas en ce qui concerne le score ‘Organisation des messages’ : l’acquisition s’enclenche véritablement autour de 18-20 mois et la progression se poursuit tout au long de la période.

Comme celui des indicateurs lexicaux et grammaticaux, le développement des scores pragmatiques présente des phénomènes de non linéarité plus ou moins marqués. Pour les trois scores, on observe une courte période de stagnation entre 18 et 20 mois, suivie d’une intensification de la progression à partir de 20 mois. La progression est ensuite assez régulière pour les scores ‘Échanges langagiers’ et ‘Utilisation du langage’. En revanche, pour le score ‘Organisation des messages’, les fluctuations sont marquées durant toute la durée du parcours : des pics, suivis d’une stagnation ou régression temporaire, se produisent à 27, 30-32, 34 et 38 mois, témoignant d’un accroissement plus accidenté durant la deuxième moitié de la période étudiée.

Dans le développement pragmatique comme dans les autres domaines de la compétence langagière, l’étude a mis en évidence l’existence de variations entre enfants, manifestes pour les trois scores principaux. À 18 mois, les enfants les plus avancés dans le développement pragmatique ont un score que les enfants les moins avancés n’atteindront que vers 30 mois pour la participation aux échanges langagiers, vers 28 mois pour l’utilisation du langage dans les actes de parole et vers 26 mois pour l’organisation discursive des messages, ce qui indique un décalage allant de 12 à 8 mois selon le score considéré. L’ampleur de la variation (donnée dans chaque groupe d’âge par la distance entre les valeurs plus ou moins un écart type à la moyenne) change au cours du temps, de façon différente selon le score. Pour les échanges langagiers, elle est maximale entre 18 et 23 mois et diminue avec l’âge, se trouvant fortement réduite dès 30 mois. Pour l’expression des actes de parole, elle est maximale entre 18 et 26 mois et tend aussi à diminuer légèrement avec l’âge. Pour l’organisation des messages, en revanche, elle est peu manifeste durant les tout premiers mois de l’étude, puis tend à augmenter, atteignant son maximum entre 25 et 32 mois avant de diminuer progressivement. Comme dans les autres domaines langagiers examinés, les périodes de plus forte variation coïncident généralement avec les moments de plus forte augmentation du score. Ce phénomène est particulièrement visible pour le score ‘Organisation des messages’, où l’ensemble du processus d’acquisition se déroule dans la fenêtre temporelle 18-42 mois selon la séquence ‘émergence des capacités - progression rapide - progression plus lente’. La coïncidence entre pics de croissance et pics de variation apparaît aussi dans les données observables des deux autres scores, à cela près que la fenêtre 18-42 mois ne capte pas l’émergence et les premières étapes du processus. Quoi qu’il en soit, pour les trois scores, la variation interindividuelle se trouve très réduite à la fin du parcours - après 40-41 mois, signe que les capacités pragmatiques documentées sont alors globalement maîtrisées par presque tous les enfants.

Vue d’ensemble de l’organisation pragmatique

La comparaison des scores pragmatiques entre eux, rendue possible par l’établissement des scores relatifs dans chacun des trois registres examinés (Section 5), a permis de dégager les lignes de force de l’organisation et du développement des compétences pragmatiques.

Dans le domaine de la participation aux échanges langagiers, la comparaison a mis en évidence que les six capacités sont déjà largement en place à 18 mois, tout en présentant quelques décalages de développement sensibles surtout durant la première partie du parcours.

Le niveau plafond est atteint dès 24 mois pour la capacité la plus précoce, l’intelligibilité des messages, vers 30 mois pour la pertinence de la réponse et la participation aux tours de parole, vers 36 mois pour l’attention et réaction à autrui. Seules les capacités à maintenir et enrichir le thème de l’échange et surtout à s’adapter à la situation de communication continuent de présenter des valeurs un peu plus basses que les autres capacités après 30 mois. Le déficit des performances pour ces deux scores est en partie lié à la présence des items à évolution régressive, moins utilisés par les enfants plus âgés. Pour l’adaptation à la situation de communication, il témoigne en outre de la relative difficulté des enfants à reformuler un message pour capter l’attention de l’interlocuteur.

Dans le domaine de l’utilisation du langage pour les actes de parole, la comparaison des cinq capacités a fait apparaître des développements nettement contrastés. Le niveau plafond est atteint dès 24 mois pour la capacité à exprimer des émotions. Celle-ci jouit ainsi d’un large avantage sur la réalisation des actes de demande d’objet, demande d’information et assertion simple, les trois autres capacités elles aussi déjà fréquentes à 18 mois et se développant de manière relativement synchrone. La demande d’objet est la mieux représentée chez les enfants les plus jeunes, mais, en contrepartie et en lien avec la présence d’items à évolution régressive, stagne dans la deuxième moitié du parcours. La capacité à rapporter et expliquer des événements est la plus tardive : n’émergeant pas avant 20 mois, elle plafonne à la valeur 0.80 à la fin de l’étude, ce qui témoigne de la complexité de la démarche explicative par rapport aux autres actes de langage.

Enfin, dans le domaine de l’organisation discursive des messages, la comparaison a montré un développement synchrone et homogène des quatre capacités sur l’ensemble du parcours. L’enchaînement de phrases, aussi bien que l’utilisation des moyens linguistiques appropriés pour référer aux personnes impliquées dans la communication, pour référer au temps des événements et pour assurer la cohésion du discours, sont toutes des capacités qui émergent entre 20 et 24 mois environ – avec un avantage pour la référence aux personnes. Toutes ces capacités discursives sont en plein essor à 30 mois et atteignent toutes des valeurs plafond ou très élevées à la fin de l’étude. Le léger déficit de performances qui affecte la référence au temps des événements durant les derniers mois du parcours témoigne de la difficulté des enfants à manipuler des temps tels que le futur simple ou l’imparfait.

La comparaison des trois scores pragmatiques globaux donnée ici par la Figure III.16 met en évidence les nettes hiérarchies de développement qui structurent l’organisation de la compétence communicative. Le score ‘Echanges langagiers’, avec un taux déjà élevé à 18 mois et quasi-maximal dès 30 mois, devance de loin le score ‘Utilisation du langage’, aux

valeurs intermédiaires, et plus encore le score ‘Organisation des messages’, à la valeur plancher jusqu’à 20 mois. Malgré la progression notable de ces deux derniers scores après 20 mois, la hiérarchie des écarts entre les trois scores est maintenue jusque vers 29-30 mois, pour s’atténuer ensuite très fortement. Tandis que le score ‘Échanges langagiers’ plafonne, les deux autres scores poursuivent leur progression, modérée et régulière pour ‘Utilisation du langage’, plus rapide et accidentée pour ‘Organisation des messages’.

Figure III.16. Communication - Les trois scores relatifs globaux de communication : valeurs moyennes

Ainsi, tandis que le développement des capacités de participation aux échanges langagiers est quasi achevé dès 30 mois, les capacités d’utilisation du langage pour exprimer des actes de parole et les capacités d’organisation discursive des messages se construisent durant toute la durée du parcours. Cependant, à la fin de la période étudiée, le développement s’avère en bonne part réalisé pour les trois dimensions de la compétence communicative.

Mise en évidence de quelques aspects spécifiques du développement pragmatique

L’analyse détaillée des items (Sections 2, 3 et 4) a fourni de nombreuses informations sur les progressions les plus spécifiques à l’œuvre dans le développement pragmatique.

Gradation des items. L’un des apports est d’aborder la question de la gradation entre les items qui définissent une capacité. Pour chacune des rubriques du questionnaire, une gradation était implicitement présupposée par l’ordre des items choisis pour décrire les comportements possibles de l’enfant. À titre d’exemple, dans les échanges langagiers, la capacité de l’enfant à répondre de façon pertinente à une demande est appréhendée au travers de trois items successifs attendant une réponse par l’action, considérée comme la plus simple

et la plus précoce, une réponse verbale par ‘oui’ ou ‘non’, et finalement une réponse verbale par une phrase, jugée la plus complexe.

La hiérarchie des performances obtenues s’est révélée totalement conforme à la gradation présupposée pour environ la moitié des rubriques, partiellement conforme pour l’autre moitié. Elle est entièrement conforme aux attentes pour trois des six capacités de participation aux échanges langagiers (l’intelligibilité des messages, l’attention et réaction à autrui, la pertinence de la réponse) et pour deux des cinq capacités d’utilisation du langage (l’expression des désirs et émotions, les rapports d’événements et explications). Lorsque la gradation observée s’avère différer partiellement de la gradation présupposée, l’intérêt des résultats s’en trouve majoré, car faisant apparaître des phénomènes moins systématiquement attendus. Tel est le cas pour trois des capacités de participation aux échanges langagiers (l’adaptation à la communication, la conversation et les tours de parole, le maintien du thème de l’échange) et deux des capacités d’utilisation du langage (les requêtes, les assertions simples). Ainsi, contrairement à ce qu’on pouvait penser, des comportements de retrait comme l’abandon du propos ou la rupture du thème de l’échange s’avèrent moins fréquents chez les jeunes enfants que les comportements plus interactifs ou coopératifs, comme la reprise de l’intervention ou le maintien du thème. De même, respecter le tour de parole de l’autre s’avère plus difficile pour la majorité des enfants que prendre l’initiative de l’échange dans la conversation…

Dans certains cas, les hiérarchies examinées sont complexes. Tout en étant conformes aux prévisions globales, les résultats ont permis d’en préciser certains aspects. Tel est le cas, parmi les capacités d’utilisation du langage, pour les procédures de questionnement impliquées dans la demande d’information. L’analyse a montré l’antériorité des questions concernant l’identité et le lieu (‘quoi ?’, ‘qui ?’, ‘où ?’) sur les questions concernant le moment et la cause (‘quand ?’, ‘pourquoi ?’), mais a suggéré aussi des variations subtiles au cours du développement entre identité et lieu, d’une part, et moment et cause, d’autre part. Tel est également le cas pour les différentes capacités d’organisation des messages. Ainsi, l’analyse des procédures de référence au temps des événements a mis en évidence l’antériorité de la référence au présent sur les références au passé et au futur, ainsi que l’antériorité d’emploi du passé composé sur l’imparfait et du futur proche sur le futur simple, mais n’indique pas de prééminence entre référence au passé versus au futur. Quant à l’analyse des procédés discursifs, elle indique un développement simultané des trois procédés examinés, article défini/indéfini, pronom anaphorique de reprise, thématisation.

Items régressifs. Un autre apport des analyses détaillées sur les items est de mettre en évidence l’existence d’items présentant une évolution régressive intéressante pour la caractérisation des processus de développement. Les items régressifs s’avèrent assez nombreux dans la Partie Communication, puisqu’au nombre de huit : deux dans la participation aux échanges langagiers, quatre dans l’utilisation du langage pour les actes de parole et deux dans l’organisation des messages. On se souvient que la Partie Grammaire n’en compte que deux (les formes verbales ‘participe passé employé seul’ et ‘infinitif employé seul’), interprétés classiquement comme des étapes transitionnelles dans la construction de la grammaire.

Une question centrale est celle de la nature exacte des étapes transitionnelles en pragmatique et de leur degré de similarité avec celles de la grammaire. Les items régressifs documentés dans la grammaire sont typiquement des formes agrammaticales témoignant d’un état de développement immature du système linguistique et appelées à terme à disparaître (ainsi, la construction avec participe passé employé seul ‘ papa parti’ sera remplacée par la forme correcte ‘ papa est parti’). La composante pragmatique du langage présente plus de souplesse et de flexibilité que la composante formelle qu’est la grammaire, de sorte que les formes transitionnelles n’y ont pas le statut d’erreur au même titre que les formes agrammaticales et ne sont sans doute pas appelées nécessairement à disparaître. Elles témoigneraient plutôt d’un degré insuffisant d’adaptation à la communication sociale et à ses conventions – justifié par l’âge de l’enfant, en tout cas d’un degré d’adaptation moindre que celui impliqué par les procédures canoniques. C’est ce qui ressort de l’examen des huit items régressifs révélés par l’analyse. Les deux items de ce type dans la participation aux échanges langagiers, l’abandon du propos dans une situation où l’adulte ne prête pas attention à l’enfant (A3a) et la rupture du thème de l’échange initié par l’adulte (A6a), traduisent tous deux un certain désintérêt de l’enfant pour la communication ou l’échange en cours, attitude habituellement jugée moins pertinente qu’un engagement coopératif au regard des règles ou conventions de l’interaction sociale. Les quatre items régressifs servant l’expression des actes de parole – recours à un comportement physique tel que le gémissement pour exprimer une émotion (B1b), recours à un geste de désignation (B2b) ou à un simple mot (B2c) pour exprimer une requête, désignation par un simple mot pour asserter sur un objet (B4b) – correspondent tous quatre à l’emploi d’un moyen physique ou verbal élémentaire mettant en jeu un mode de communication moins élaboré que le moyen linguistique habituellement jugé plus approprié et plus efficace pour réaliser l’acte de parole visé. Enfin, les deux items régressifs dans l’organisation des messages, l’utilisation du prénom (C1a) et l’utilisation du

pronom moi employé seul (C1b) pour référer à la personne propre dans l’échange, correspondent à des moyens langagiers moins adaptés aux besoins et conventions linguistiques de la communication que ne l’est le pronom personnel je. Ces deux items sont ceux qui se rapprochent le plus des formes agrammaticales appelées à terme à disparaître.

Tous ces items régressifs ont en commun une évolution caractérisée par un processus initial d’augmentation avec un maximum atteint entre 22 et 31 mois, suivi d’un déclin (seul exception, l’item B2b, expression de la requête par un geste, est à son maximum dès 18 mois et décline constamment ensuite). Ils ont aussi en commun une grande irrégularité de parcours, marqué par d’importantes et fréquentes fluctuations. Cependant, au-delà de ces tendances communes, leur évolution présente des variantes, visibles à la comparaison des pourcentages