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Bilan des stratégies alternatives testées

3 The source-sink model of non-domiciliated vectors of Chagas disease

6.1 Bilan des avancées en terme de contrôle de vecteurs non domiciliés de la maladie de Chagas

6.1.3 Bilan des stratégies alternatives testées

Au-delà des inconvénients liés aux coûts et à l’apparition possible de résistances, l’insecticide ne permet d’éliminer les vecteurs qu’à partir du moment où il y a contact du vecteur avec la surface traitée. Or, pour les vecteurs non-domiciliés, il est tout à fait envisageable que le vecteur pénètre dans la maison et trouve son hôte sans entrer en contact avec les murs et les plafonds porteurs d’insecticide. L’estimation de la qualité du contrôle de la transmission vectorielle par la qualité du contrôle vectoriel est donc sur-estimée.

En revanche, les stratégies alternatives que nous avons envisagées ont toutes pour avantage d’agir suffisamment en amont pour que l’impact sur la transmission vectorielle soit au moins proportionnel à l’impact sur l’abondance des vecteurs dans les maisons. À qualité égale de contrôle des populations, les stratégies alternatives suivantes doivent donc être privilégiées par rapport à l’insecticide.

Moustiquaires de portes et fenêtres

Les moustiquaires de portes et fenêtres sont par excellence le moyen de contrôle de l’immigration. Sans surprise, dans la situation du Yucatan où les vecteurs sont stricte-ment non domiciliés, cette stratégie est très efficace, globalestricte-ment autant que l’insecti-cide appliqué de manière optimale.

L’effet des moustiquaires sur les maisons protégées est bien appréhendé par la mo-délisation, en revanche, l’effet sur les maisons voisines, non protégées, change

qualita-moustiquaires mais insuffisante pour décrire les effets de second ordre. Cela montre les limites de cette approche et révèle la nécessité de décrire plus précisément le comporte-ment du vecteur au contact des moustiquaires.

Un intérêt des moustiquaires est la robustesse de leur efficacité face des changement de l’origine ou de la fréquence de l’infestation. En première approximation nous pou-vons supposer que la qualité du contrôle par les moustiquaires soit directement propor-tionnel à la non-domiciliation des populations ; la péninsule du Yucatan étant un degré extrême de non-domiciliation, on doit s’attendre à un effet moins important pour les autres situations, notamment en zone 2 et 5, où la capacité de domiciliation des vecteurs est importante. Dans ces zones, l’intérêt des moustiquaires reste donc encore à démon-trer pour la lutte contre la maladie de Chagas. Cependant la pose de moustiquaires a aussi un impact sur la dengue ou la malaria, souvent présentes en Amérique latine et l’intérêt des moustiquaires devrait être évalué pour l’ensemble de leur impact sanitaire. Moustiquaires de lit

Cette stratégie est celle qui devrait le mieux contrôler la transmission puisqu’elle dresse directement une barrière entre les habitants et le vecteur. En revanche, nos résul-tats suggèrent qu’elles sont peu efficaces pour contrôler les populations non-domiciliées. Cependant, ces résultats se basent sur l’hypothèse que le seul effet de ces moustiquaires est de réduire l’ingestion de sang dont les insectes ont besoin pour survivre. L’observa-tion par Kroeger et al. (1999) d’une mortalité de 10% par nuit dans une pièce fermée correspond à une mortalité bien supérieure à ce qui peut être calculé dans le modèle avec ce moyen de contrôle. Cela indique qu’un autre facteur participe à cette mortalité, et devrait nous amener à ré-estimer à la hausse l’efficacité des moustiquaires de lit, ce qui serait aussi cohérent avec les corrélations observées entre absence de moustiquaires de lit et présence de vecteurs non domiciliés (Enger et al., 2004 ; Guzman-Tapia et al., 2007).

Quoi qu’il en soit, l’effet des moustiquaires de lit sur l’infestation est essentiellement un effet sur la survie des individus. Les moustiquaires de lit peuvent donc être rappro-chée des insecticides. Leur effet est cependant nettement moins important puisque la mortalité par nuit observée avec les moustiquaires de lit (10% d’après Kroeger et al. (1999) est très inférieure à celle calculée pour les insecticides qui est de l’ordre de 50%. En définitive, seule la modélisation de la transmission pourrait amener à réévaluer l’in-térêt des moustiquaires de lit pour la prévention de la maladie de Chagas.

Nettoyage des jardins

Le nettoyage des cours et jardins a été récemment testé sur le terrain (résultats non-publiés) et montre une excellente correspondance de nos prévisions avec les données de terrain. Cette approche est efficace dans la limite de la proportion d’insectes venant des

permet d’envisager un contrôle aux bordures du village avec un autre moyen de contrôle, tel que l’insecticide. Cette stratégie devrait par conséquent être envisagée d’autant plus sérieusement que la taille de la ville est importante et que la dispersion est faible.

Ce type d’action peut être rapproché du contrôle environnemental préconisé dans d’autres situations. Dans la lutte contre le genre Rhodnius en Zone 4 (cf. p.42), il a été identifié que l’élimination ou au moins le nettoyage des palmiers à proximité des maisons diminue de manière importante l’arrivée de vecteurs dans les maisons (Abad-Franch & Monteiro, 2005 ; Sanchez-Martin et al., 2006 ; Fitzpatrick et al., 2008). Plus généralement, il a été mis en évidence que l’élimination des tas de débris ou de grains dans les cours et les maisons (Enger et al., 2004 ; Zeledón & Rojas, 2006) est efficace pour limiter l’immigration et le maintien des vecteurs non-strictement domiciliés.

Ces actions peuvent dans une large mesure être menées à bien par les habitants eux-mêmes, réduisant les coups de mise en place du processus à des actions de sensibi-lisation et d’éducation sur la maladie de Chagas. Pour généraliser ce type de contrôle, au coût limité, un travail de recherche sur les déterminants de l’habitat péri-urbain des vecteurs non-domiciliés de la maladie de Chagas est encore nécessaire.

Stratégies de contrôle comportemental

Deux dernières stratégies ont été testées. Elles ont pour points communs, d’une part, de n’avoir jamais été testées sur le terrain et d’autre part, d’être des exemples de contrôle comportemental. La première est l’utilisation de pièges à l’extérieur des maisons, et la seconde la diminution de l’attraction des maisons.

L’analyse de modélisation montre clairement que le nombre de pièges nécessaires pour atteindre un contrôle équivalent aux autres stratégies nécessite un nombre trop important de pièges. En revanche, la diminution de l’attraction des maisons est assez efficace. Ce résultat signifie qu’il vaut mieux chercher à ne pas attirer, ou même à re-pousser les vecteurs qu’à les attirer dans des pièges en dehors des maisons.

Malgré tout, il est plus simple d’imaginer les pièges extérieurs sous la forme de pièges lumineux, que d’imaginer des maisons moins attirantes. Il est bien connu que la lumière visible attire généralement les Triatominae (Abad-Franch et al., 2001 ; Vazquez-Prokopec et al., 2006 ; Ferreira Fé et al., 2009). Si la lumière est en effet la composante majeure de l’attractivité des maisons, une piste pourrait être la pose de rideaux épais, tirés la nuit, pour éviter que les lumières soient visibles depuis l’extérieur. Des solutions plus élaborées, basées sur l’utilisation de longueurs d’ondes spécifiques pour l’éclai-rage sont aussi envisagées (Moncayo & Silveira, 2009). Plus généralement, des études comportementales recherchant des moyens d’éloigner, ou au moins de ne pas attirer les Triatominae, semblent particulièrement indiquées.

Ce type de stratégies ayant un effet sur l’immigration encore plus en amont que les moustiquaires de portes et fenêtres, leur efficacité est au moins autant dépendante du degré de domiciliation des vecteurs. Leur efficacité décroit donc avec la tendance

l’ensemble des comportements exploitables pour le contrôle, tels que décrits par Lazzari & Lorenzo (2009).

6.2 Vers une modélisation unifiée du contrôle vectoriel

La modélisation des populations et du contrôle de ces populations nous a permis de prédire l’efficacité de plusieurs moyens de contrôle et ces prédictions se sont révélées pertinentes pour celles qui ont ensuite été testées sur le terrain, les mécanismes impli-qués sont donc correctement décrits par la modélisation et permettent d’envisager la modélisation de leur action dans d’autres situation entomologiques. Ces résultats en-courageants me poussent à proposer dans cette sous-partie des développements de la méthode utilisée afin de permettre une meilleure planification du contrôle vectoriel pour l’ensemble des vecteurs de la maladie de Chagas.

Tout d’abord, bilan est fait des autres moyens de contrôle alternatifs à l’insecticide qui pourraient être intégrées à la modélisation, ensuite, je présente comment le modèle doit être développé pour permettre la prise en compte de populations capables de re-production dans les maisons, enfin sont exposés les développement expérimentaux et théoriques prévus pour renforcer la valeur des prédiction et permettre la gestion de stra-tégies composites de contrôle des vecteurs.