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2.3 Comportement des billes dans les suspensions biologiques

2.3.3 Bilan des expériences précédentes et choix des billes

Le choix des billes repose sur deux critères essentiels. D’une part, elles doivent immunocapturer les cellules très efficacement et de manière spécifique et d’autre part, leur signal magnétique individuel doit être suffisam- ment faible pour ne pas être détectable par le capteur GMR et limiter ainsi le nombre de faux positifs. Grâce à l’étude décrite dans cette section, il est possible de choisir les billes les plus adaptées à notre étude.

Dans le cas des billes nanométriques (entre 50 et 200 nm), les billes libres seules ne sont pas détectables par le capteur, même à 1 µm de distance. De plus, les billes de 50 nm sont stables en solution et ne forment pas de nombreux agrégats comme nous l’avons vu dans le §2.2.1. Ces deux propriétés sont souhaitables dans le cadre de notre étude. Cependant, ces billes doivent être capables de labéliser très fortement les cellules en moins de 2 heures. D’après la formule (2.1), pour que le champ dipolaire d’une cellule labélisée soit détectable à 20 µm de distance du capteur GMR, il faut qu’elle soit recouverte de :

— 3 000 billes Adem200 (200 nm de diamètre)

— plus de 300 000 billes Micro50 (50 nm de diamètre)

Or, à cause de difficultés techniques déjà évoquées au §2.3.1, il est délicat de déterminer le nombre de billes nanométriques en surface des cellules et aucun moyen technique ne permet d’être sûr qu’une cellule possède le nombre d’antigènes suffisants en surface pour fixer un si grand nombre de billes nanométriques. Ainsi, en l’absence de contrôle visuel rapide pour cette option, l’optimisation de la concentration en billes et du temps de labélisation est une tâche délicate et nous avons préféré sélectionner des billes visibles au microscope optique pour mettre au point notre dispositif sur des échantillons dont la répartition des billes dans les agrégats et sur les cellules peut être vérifiée facilement.

Dans le cas des billes micrométriques (Dyna2.8 ou Dyna1), une bille seule à 1 µm du capteur est détectable. Cependant, en éloignant le capteur du canal une telle bille isolée peut facilement devenir indétectable. Cette idée suggérée par l’équation (2.1) sera reprise et justifiée en détails dans le §3.2. D’autre part, avec ces billes, il est impératif que les agrégats soient peu nombreux et restent petits. En effet, la taille importante de ces billes fait

2.3. COMPORTEMENT DES BILLES DANS LES SUSPENSIONS BIOLOGIQUES 33

qu’il est impossible d’en mettre plus de 38 et 300 (respectivement pour les Dyna2.8 et Dyna1) par cellule, ce qui reste un nombre assez faible. Le maintien d’un contraste important (idéalement d’au moins un facteur 10) entre signaux spécifiques et non spécifiques impose alors un niveau d’agrégation très bas. Ces billes micrométriques ont des moments élevés : pour obtenir un champ minimum de 1 µT à 20 µm du capteur (valeur arbitraire), 4 Dyna2.8 ou 54 Dyna1 suffisent. Au vu des degrés de labélisation obtenus pour ces deux types de billes, les cellules marquées donnent majoritairement des signaux supérieurs à cette valeur lorsqu’elles passent au milieu du canal. Il faut alors s’assurer que peu d’agrégats puissent donner des signaux comparables lorsqu’ils passent au bas du canal.

Les Dynabeads sont donc les billes les plus adaptées dans le cadre de cette étude. Il est cependant indispen- sable de limiter au maximum la formation des agrégats.

Dissociation des agrégats de billes

D’après l’étude précédente, il est préférable de choisir les Dyna1 qui ont un rapport « nombre de billes par cellule/nombre de billes par agrégat » supérieur à celui des Dyna2.8. Cependant, si les Dyna2.8 ne s’agrégeaient pas ou si leurs agrégats pouvaient être disloqués, elles présenteraient un grand intérêt dans le cadre de notre projet. En effet, les cellules marquées de 4 billes sont détectables jusqu’à 20 µm de haut dans le canal (alors que 54 billes Dyna1 sont nécessaires). D’autre part, elles immunocapturent les cellules en seulement 45 minutes (au lieu de 2h pour les Dyna1).

Différents essais utilisant des méthodes physiques et/ou chimiques ont été réalisées pour supprimer les agrégats de billes. Ils ont été effectués à concentration constante de billes (2 106billes/mL). Après l’application de chaque méthode, des prélèvements de 100 µL sédimentés 15 minutes ont été photographiés au microscope optique (grossissement 20X) et 4 de ces photographies par échantillon ont été traitées avec le logiciel ImageJ. Les résultats sont interprétés en comparant la répartition des billes dans les agrégats pour chaque échantillon à un échantillon contrôle n’ayant rien subi.

Les séparations physiques, plus simples à mettre en œuvre ont d’abord été testées, mais aucune n’a donné de résultat satisfaisant comme résumé dans le Tableau 2.6.

Test effectué Résultat

Sonication 30 s Aucune amélioration Sonication 1 min Aucune amélioration

3 cycles de

Aucune amélioration Sonication 30 s/ vortex

3 cycles de

Aucune amélioration Sonication 1 min/ vortex

Filtration sur 5 µm Perte presque totale des billes

Tableau 2.6 –Tests de dissociation des agrégats physiques effectués et leurs résultats.

Les solutions chimiques ont alors été envisagées. Quatre détergents ont été testés seuls, ou en combinaisons : — le SDS (sodium dodecyl sulfate),

— le tween 20, — le triton X-100,

— le CHAPS (3-[(3-cholamidopropyl)dimethylammonio]-1-propanesulfonate).

Le Tableau 2.7 résume la composition des solvants utilisés pour cette étude et les résultats obtenus. La répar- tition des billes en agrégats a été évaluée deux fois, une première fois après resuspension des billes dans le solvant et une seconde après trois cycles de 1 minute de sonication/ 1 minute de vortex. Directement après le mélange, aucune variation significative n’est observée entre les solvants, cette mesure est utilisée pour définir l’état initial des suspensions. En moyenne, 67% ± 5.7% des objets sont composés d’une seule bille.

Nom de Solvant % de % de % de % de Taux de billes seules l’échantillon SDS Triton Tween20 CHAPS après sonication/vortex

A PBS 0 0 0.1% 0.1% 47 % B Eau DI 0 0 0 0 78 % C PBS 0.1% 0 0 0.1% 67 % D Eau DI 0.1% 0 0.1% 0 84 % E PBS 0 0.1% 0.1% 0 67 % F Eau DI 0 0.1% 0 0.1% 75 % G PBS 0.1% 0.1% 0 0 77 % H Eau DI 0.1% 0.1% 0.1% 0.1% 91 %

Tableau 2.7 –Solvants testés pour la dissociation des agrégats de Dyna2.8 et résultats des essais associés. Dans ces

suspensions, les billes sont à la concentration de 2.0 106/mL, c’est à dire la concentration de la solution contenant les

cellules. 40 50 60 70 80 90 100

Résultat des essais de désagrégations

% « d ’agr ég at s » c on st it u és d ’u n e seu le b ille A B C D E F G H

Moyenne état initial + 3 écart-types - 3 écart-types Echantillons 30 µm Etat initial 30 µm A 30 µm D 30 µm H

Figure 2.6 –Etude de la dissociation des agrégats de billes dans les différentes conditions : la donnée qui nous intéresse

principalement est le pourcentage d’objets composés d’exactement 1 bille après ajout des surfactants et sonication/vortex.

Des photographies représentatives des échantillons sont données. L’état initial est la suspension avant les trois cycles de

sonication/vortex, toutes les suspensions sont dans des états très comparables (5% de variations). Seules trois conditions

donnent des résultats significatifs (c’est à dire en dehors de la moyenne ± 3 écart-types des états initiaux) dont un qui agrège les billes et deux qui ont tendance à dissocier les agrégats.

Le pourcentage de billes seules présentes dans chaque suspension après les cycles de sonication/vortex sont représentées Fig. 2.6. Finalement seuls trois milieux semblent avoir un effet significatif pour dissocier les agrégats de billes. La suspension A, semble augmenter l’agrégation des billes de façon assez marquée avec seulement 47% de billes seules, alors que la barre basse de significativité (établie comme la moyenne - 3 écart-types de l’état initial) est à 50%. Cet effet est d’ailleurs assez net sur le cliché de cette suspension présenté Fig. 2.6. D’autre part, les suspensions D et H, semblent avoir un effet bénéfique, puisque respectivement 84% et 91% des objets sont constitués d’une seule bille dans ces suspensions alors que la barre haute de significativité (établie comme la moyenne+ 3 écart-types de l’état initial) est à 84%. Ainsi, les détergents les plus efficaces semblent être le SDS et le Tween20.

Pour savoir si cette solution est applicable aux suspensions cellulaires cependant, il reste à vérifier que les cellules survivent au moins 2 heures dans ces milieux d’intérêt, puis que les anticorps greffés restent fonction- nels. Pour la survie cellulaire, les NS1 ont été préparées dans les tampons suivants :

— PBS, pour l’échantillon contrôle — PBS+ SDS (à 0.1%, 0.03% et 0.01%) — PBS+ Tween20 (à 0.1%, 0.03% et 0.01%)

2.3. COMPORTEMENT DES BILLES DANS LES SUSPENSIONS BIOLOGIQUES 35

PBS PBS + SDS PBS + Tween20 PBS + SDS + Tween 20 PBS + tous détergents

Figure 2.7 – Photographies des cellules après deux heures passées dans les solutions indiquées. La première photo- graphie est issue de l’échantillon contrôle avec un taux de survie des cellules de 96%. Les autres échantillons dont les photographies sont présentées ici contiennent des concentrations en détergent intermédiaires : 0.03% et aucune cellule n’a survécu aux deux heures.

— PBS+ SDS + Tween20 + CHAPS + Triton (à 0.1%, 0.03% et 0.01% chacun)

Après deux heures, les cellules ont été comptées au TC20 (Automated cell counter, Biorad) avec du bleu de trypan, colorant qui marque uniquement les cellules mortes. La survie pour l’échantillon contrôle en PBS a été évalué à 96%. Toutes les autres suspensions ont été évaluées à 0% de survie. Les photographies données Fig. 2.7 confirment bien que toutes les cellules sont mortes, quelles que soient les conditions (hors contrôle). Le détergent, même en très faibles quantités et bien qu’efficace pour dissocier les agrégats, ne peut donc pas être utilisé dans nos échantillons.

Choix des billes

Finalement, aucun traitement efficace n’a été trouvé pour diminuer le nombre d’agrégats de billes Dyna2.8. Par conséquent, les billes Dyna1 ont été sélectionnées. Comme elles sont bien plus nombreuses à la surface des cellules que dans les agrégats, les signaux respectifs seront plus facilement identifiables. Les différents cycles de sonication/vortex effectués sur ces billes n’ont pas permis de réduire l’agrégation.