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VI. PRÉSENTATION DES RÉSULTATS ET ANALYSE

6.1. Bilan annuel

Il ressort de notre recherche que la récurrence des inondations a joué un rôle important dans la manière dont celles-ci ont été médiatisées. Alors que lors des premières inondations les journalistes se sont tenus à simplement rapporter les faits, les suivantes les ont poussés à des réflexions et à élaborer des critiques sur les causes possibles, non pas des pluies diluviennes ou des inondations en soi, mais de l'ampleur des dégâts. Cette évolution montre bien que le problème suscite questionnement et réflexion afin de trouver des solutions adéquates18. Ainsi, à force de se rappeler et de rappeler au lecteur la fréquence et l'ampleur

des inondations des années précédentes, les journalistes cessent de poser l'ampleur des inondations comme un fait, mais en font plutôt une préoccupation, un problème que l'on cherche à solutionner. Et non seulement les inondations sont présentées comme un problème, mais elles se font aussi révélatrices d'autres problèmes sociaux encore plus profonds.

18 Compte tenu du fait que les articles de presse privée proviennent de sources différentes et que quelques-uns

sont rédigés par des acteurs privés et associatifs ayant pris le rôle de journalistes, ils ont été les plus disposés à livrer des avis personnels divers. Toutefois, il est important de souligner que les "véritables" journalistes des deux médias se sont efforcés de garder une distance professionnelle vis-à-vis des faits qu'ils rapportent.

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2007 (Letogolais.com uniquement)

Les premières inondations ont surpris tous les acteurs et ont eu un fort impact sur les populations touchées. Vu l'ampleur des dégâts et la situation dans laquelle se trouvaient les sinistrés, les acteurs nationaux (gouvernement, services techniques, partis politiques divers) et internationaux (France, Croix-Rouge, partenaires financiers et techniques) se mobilisent pour aider et porter assistance aux victimes. Les actions menées étaient en vue de secourir les sinistrés, plutôt que de rechercher des causes autres que les pluies diluviennes à ces inondations.

Vers la fin de l'année, les inondations qui avaient commencé dans le Nord s'étendent au Sud et se généralisent à l'ensemble du pays. Face à une telle situation, le gouvernement lance les premiers appels à l'aide et dresse les premiers bilans de la situation dans le but de réaliser les interventions. Cette année-là, 4 articles ont porté sur les inondations et ont montré leur aspect soudain et désolant. Nous retiendrons quelques titres évocateurs tels que : "Pluies diluviennes au Togo : une dizaine de morts dans le nord" ou encore "Les inondations continuent de faire des victimes au Togo".

2008 (TogoPresse et Letogolais.com)

Les premières inondations surprennent comme l'année précédente, mais des dispositions rapides sont prises par le gouvernement avec l'appui d'acteurs nationaux et internationaux. Le gouvernement privilégie d'abord les conseils de prudence aux populations et prend des mesures de prévention, puis met en place des politiques de gestion des catastrophes. Les mois de juillet et d'août sont marqués par de nombreuses réunions interministérielles et par la priorisation des inondations aux conseils de ministres. L'objectif principal de ces rencontres est de constater les dégâts des inondations, de circonscrire le sinistre et de prendre des mesures urgentes. En août, les réunions de travail se sont centrées sur la

57 recherche de solutions durables par la mise sur pieds de comités de gestion des inondations, l'élaboration du Plan ORSEC19 et la sensibilisation des acteurs locaux.

La destruction des infrastructures et des voies de communication est de grande ampleur et a des conséquences réelles sur les plans économique (flambée des prix des denrées alimentaires), social (déplacement de population) et de la gouvernance (critique de la gestion de l'État et recherche des « causes réelles » de l'ampleur des dégâts). Aussi, les inondations de l'année précédente sont souvent rappelées afin de montrer l'aspect répétitif du phénomène. Dans la presse publique, les visites aux sinistrés et les dons de vivres et de non vivres sont mis en avant. Qu'ils soient l'œuvre d'acteurs nationaux privés, associatifs ou internationaux, les actions de bienfaisance qui se sont fait nettement plus nombreuses que l'année précédente ont rapidement constitué l'essentiel de l'actualité. Le retour des sinistrés à leurs domiciles à la fin des inondations et les quelques cérémonies de prières et de libations, de messes et de cultes d'actions de grâces ont également été soulignées. Les titres des articles sont révélateurs de la mobilisation autour du phénomène. Nous pouvons citer entre autres, "Le sinistre enflamme le prix des denrées alimentaires", "Assistance humanitaire aux sinistrés des pluies diluviennes", "Les musulmans implorent Dieu de tempérer les pluies sur le Togo" ou encore "Inondations au Togo : Appel à l'aide internationale".

2009-2010 (TogoPresse et Letogolais.com)

L'actualité ayant trait aux inondations au cours des années 2009 et 2010 est très homogène. En effet, dès les premières inondations de ces deux années, l'attention médiatique s'est portée sur les tournées de sensibilisation sanitaire aux sinistrés, la sensibilisation préventive aux populations habitant les zones à risque et les visites de terrain pour constater les dégâts. Une fois encore, les réunions de travail, les ateliers, les conférences-débats du gouvernement et les conseils des ministres ont conduit à des actions immédiates de soutien

19 Le plan d'organisation de secours d'urgence (Plan ORSEC), destiné à entrer en vigueur en cas de sinistre

vise la définition d'une procédure d'amélioration des taux de survie chez les victimes de catastrophes naturelles, l'identification les risques potentiels et la description de leurs effets sur les personnes et sur les biens.

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aux sinistrés essentiellement par des dons. En plus de relever l'impact des inondations sur la flambée des prix des denrées alimentaires, la presse publique a relayé l'initiative de l'État de mettre en place des réseaux locaux de prévention et de sensibilisation.

Dans la presse privée, après des lectures différentes de l'ampleur des inondations et de leur caractère cyclique, l'accent est mis sur les efforts d'adaptation. Un projet de mise en valeur des espaces inondables est proposé et les critiques s'accentuent de plus en plus sur la qualité des infrastructures et la bonne gouvernance de l'État. En plus de l'éveil généralisé, qui transparait dans quelques articles, à se poser les « bonnes questions sur les causes

profondes » de ces inondations qui persistent, on note une politisation des actions menées

par les responsables politiques auprès des sinistrés, et même une coloration politique des actions des prêtres traditionnels, censés prédire par leur don de voyance les conditions météorologiques du pays. Par exemple, alors que les députés se préparaient à faire des dons aux sinistrés, « le ministre [de l'Administration territoriale] a attiré leur attention sur le fait

que cette situation malheureuse ne doit pas faire l'objet d'une récupération politique » (08

08 2008).

2011 (TogoPresse uniquement)

Les données de 2011 (voir Tableau 3 : Répartition par an des articles de presse publiés

pendant et en dehors de la période cible (juillet à octobre de 2007 à 2011)) bien qu'elles

proviennent de la période d'avril à juin (pendant la grande saison pluvieuse), ne diffèrent pas grandement de celles des autres années. La presse publique nationale, comme les années précédentes a relayé l'information sur les rencontres des acteurs nationaux publics et internationaux dans le but de prendre des mesures d'urgence pour venir en aide aux sinistrés, les missions de secours, les dons aux sinistrés et aussi la sensibilisation. Sensibilisation des sinistrés sur les maladies liées à l'eau d'une part, et sensibilisation de la population entière sur le civisme et la protection des infrastructures d'autre part. Les éléments nouveaux sont entre autres la validation des plans d'action en réduction des risques de catastrophes par des acteurs locaux, le lancement de travaux d'aménagement et de réhabilitation d'infrastructures, et le rappel des initiatives du gouvernement en matière de

59 politiques, à savoir la Plateforme nationale pour la réduction des risques de catastrophes, le Plan d'organisation de secours (ORSEC) et le Plan national de contingence.

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