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Barrières réglementaires, licences, brevets

Cette première rubrique regroupe des barrières objectives qui s’imposent mécaniquement et bloquent directement l’accès au marché. Ces contraintes, relevant du domaine réglementaire ou du droit de la propriété industrielle, ne sont pas, au moins en théorie, susceptibles d’être compensées ou contournées. Le secteur de la distribution est caractérisé en France par l’existence de nom- breuses barrières réglementaires, comme le Conseil l’a rappelé dans plu- sieurs avis (97-A-04, 00-A-06, 04-A-18). Ainsi, dans l’avis 97-A-04 du 21 janvier 1997, le Conseil, répondant à diverses questions posées par le ministre de l’Économie à propos de la concentration dans le secteur de la dis- tribution, rappelait que la législation en matière d’implantation, d’horaires d’ouverture, de droit du travail, crée de nombreuses barrières à l’entrée dans ce secteur. Il indiquait notamment que la réglementation sur les implanta- tions peut offrir un avantage aux opérateurs en place : « Indépendamment

des coûts financiers d’accès au marché (location, construction), la distribu- tion de détail est l’objet d’une réglementation spécifique prévue par la loi du 27 décembre 1973 qui subordonne à une autorisation administrative préa- lable l’ouverture de toute nouvelle surface de vente au-delà d’un certain seuil. Ce seuil a été abaissé à 300 m² par la loi du 5 juillet 1996 qui a par ail- leurs étendu la procédure de l’autorisation préalable à de nouveaux cas. Ce dispositif peut constituer une barrière à l’entrée de nouveaux concurrents et conférer aux opérateurs en place un avantage appréciable. La réduction des possibilités d’extension des surfaces commerciales introduit en effet une rigidité dans la capacité des entreprises à adapter leur offre au développe- ment de la demande, à accroître leur clientèle ou à répondre aux pratiques

d’un distributeur plus puissant qui pourrait profiter d’une position renforcée sur un marché. »

À plusieurs occasions, le Conseil s’est intéressé à des secteurs où l’entrée sur le marché est subordonnée à la détention d’une licence ou d’une autori- sation administrative, tant dans des dossiers contentieux (par exemple dans l’affaire des taxis marseillais, cf. infra) qu’en contrôle des concentrations. Ainsi, dans son avis 06-A-20 du 20 octobre 2006 relatif à l’acquisition de la société Marine Harvest NV par la société Pan Fish ASA dans le secteur de la production, de la transformation et de la vente du saumon, le Conseil souli- gnait : « Dans un second temps, l’élevage de saumon est encadré par l’octroi

des licences délivrées par les autorités nationales, voire régionales limitant la biomasse, correspondant au poids total des saumons en cours d’élevage. Seul l’octroi de licences supplémentaires est en mesure de desserrer cette contrainte. Compte tenu du caractère polluant de cette industrie, les autori- tés norvégiennes accordent très peu de nouvelles licences chaque année et le prix de cession des licences entre producteurs est très élevé ». Dans cette

affaire, le Conseil, après avoir relevé les diverses autres barrières à l’œuvre, dues aux certifications, aux investissements, au besoin en fonds de roule- ment et aux risques financiers liés à l’activité, concluait : « L’ensemble de ces

barrières à l’entrée et notamment les barrières à l’entrée légales rendent peu vraisemblable l’entrée de nouveaux producteurs et sont susceptibles de limiter l’expansion des producteurs présents sur le marché. »

L’avis 05-A-01 du 7 janvier 2005 relatif à l’acquisition de la société Laboratoi- res Dolisos par la société Boiron dans le secteur des médicaments homéopa- thiques fournit un autre exemple intéressant de barrières réglementaires. La principale barrière à l’entrée sur le marché des médicaments « en nom com-

mun » (MNC) était la fixation réglementaire des prix à un niveau très bas :

« La faiblesse du prix fixé par les pouvoirs publics pour les MNC remboursa-

bles (plus de 90 % du marché des SNC94en valeur) à 1,81€ et inchangé

depuis 1988 (soit une baisse de 27 % en termes réels) constitue par elle- même une importante barrière à l’entrée. En effet, comme l’indiquent les comptes d’exploitation des parties à l’opération, il semble que l’activité SNC soit à peine rentable, et ce même pour Boiron qui représente presque 70 % du marché en valeur. Dolisos dont l’activité principale est la production et la commercialisation de SNC (90 % du CA) affiche un résultat d’exploitation négatif depuis 1999. » Pour pouvoir conclure sur les effets vraisemblables de

l’opération et, le cas échéant, suggérer des remèdes utiles, le Conseil a dû considérer deux scénarios alternatifs, en fonction de l’évolution du cadre réglementaire. Dans l’hypothèse où celui-ci resterait inchangé, la concur- rence en prix resterait impossible et le Conseil a considéré que le bilan de l’opération serait neutre, sous certaines réserves relatives à la commerciali- sation et à la distribution des médicaments. En revanche, s’agissant du second scénario, il a indiqué qu’« une évolution de la réglementation qui

libérerait les prix supprimerait les principales barrières à l’entrée sur ce mar- ché, sous réserve qu’elle conduise également à l’allègement des coûts d’enregistrement et que les parties s’engagent à ne pas subordonner l’octroi

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d’avantages aux officines à un engagement d’approvisionnement exclusif en SNC ». Cette assertion comportait, outre une proposition d’engagement

qui s’appliquait aux parties, un message à l’attention des pouvoirs publics : le Conseil les invitait, dans l’hypothèse où ils mettraient fin à l’encadrement des prix des MNC (permettant ainsi à la nouvelle entité d’augmenter ses tarifs), à réduire de manière concomitante les coûts administratifs d’entrée, de manière à rendre le marché plus contestable.

Dans le secteur pharmaceutique, où le Conseil a également traité de nom- breux cas contentieux, les barrières prennent souvent la forme de brevets, qui protègent leur titulaire de toute concurrence, parfois pendant de longues durées. Ainsi, la décision 96-D-12 du 5 mars 1996 relative aux pratiques mises en œuvre par la société Lilly France dans le secteur des spécialités pharmaceutiques destinées aux hôpitaux indique : « Une spécialité pharma-

ceutique ne bénéficie pas de régime dérogatoire au droit commun de la pro- priété industrielle. En particulier, les brevets d’invention confèrent à leur titulaire un droit exclusif d’exploitation vis-à-vis des tiers pendant 20 ans. Dans la pratique, la durée de la protection d’une spécialité pharmaceutique est diminuée du temps nécessaire à l’obtention de l’autorisation de mise sur le marché délivrée par le ministre chargé de la Santé publique (pour une période de cinq ans renouvelable) à laquelle est subordonnée toute com- mercialisation de médicament. En moyenne, un laboratoire, titulaire d’un brevet d’invention, bénéficie d’un monopole d’exploitation de sa spécialité pharmaceutique pendant une durée de dix ans. »

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