• Aucun résultat trouvé

b. Magmatisme d’arc et inclusions fluides

Une zone de subduction est toujours associée à un arc volcanique, tel que la ceinture de feu, associé aux zones de subduction localisées sur tout le pourtour de l’océan Pacifique. Ces magmas présentent des signatures chimiques et isotopiques mantelliques et crustales, ce sont des produits de fusion partielle du manteau situés sous l’arc volcanique et éventuellement de la croûte de la plaque plongeante plus ou moins contaminés par la croûte de la plaque supérieure lors de leur remontée. Le géotherme d’une plaque océanique est connu, ainsi que le solidus. Or sur le diagramme pression-température, les deux courbes ne se croisent pas dans le cadre d’un environnement sec (sans H2O), on comprend alors que la plaque plongeante et le manteau sus-jacent ne peuvent pas fondre dans ces conditions (Figure 1.11). Une possibilité pour faire fondre le manteau, et éventuellement la croûte, est d’hydrater la zone à faire fondre. L’hydratation d’une roche abaisse la température de fusion et modifie la courbe du solidus de la roche. Un très faible pourcentage d’eau libre dans le

Figure 1.10 – Localisation des zones de fortes conductivités correspondant aux zones riches en fluides salins et des zones serpentinisées. Présentation de deux cas extrêmes : subductions froide (à gauche) et chaude (à droite) (Reynard et al., 2011).

30

manteau suffit pour fondre partiellement le manteau et dans certains cas la croûte de la plaque plongeante, et ainsi générer au niveau de l’arc volcanique des magmas à composition mixte, riches en silice (Figure 1.11).

Figure 1.11 – Graphe mettant en valeur la nécessité de la présence d’eau pour expliquer la génération de magmas associés aux zones de subduction (modifié d'après Brunet et al., 2007). Le solidus anhydre (courbe grise) ne croise pas le géotherme (courbe verte), il ne peut donc pas y avoir de fusion partielle du manteau anhydre. Le solidus hydraté (courbe bleue) croise le géotherme, dans ce cas la fusion partielle du manteau est possible

Des inclusions fluides ont été observées et analysées dans des xénolites de péridotites mantelliques parfois partiellement serpentinisées présents dans des laves issues de magmatisme d’arc. Ces inclusions fluides présentent des concentrations en sels proches de celles de l’eau de mer, et des concentrations de CO2 élevées. Deux hypothèses pour la présence de ces inclusions fluides sont proposées dans la littérature : soit les fluides sont directement issus de la déshydratation de la plaque plongeante et piégés dans les péridotites du manteau sus-jacent, soit les fluides sont issus du dégazage des magmas d’arc (Kawamoto et al., 2013; Kumagai et al., 2014). Dans les deux cas, ces inclusions fluides montrent la présence et la circulation dans le coin de manteau de fluides profonds issus de la déshydratation de la plaque plongeante.

31

I.3.c. Sources d’eaux chaudes salines dans la zone avant-arc

Au Japon, des sources d’eaux chaudes salines ayant des compositions chimiques et isotopiques particulières ont été trouvées à Arima entre la fosse de subduction et l’arc volcanique. Ces eaux sont riches en chlore, sodium, lithium, calcium, strontium, ammonium et potassium et elles présentent des signatures isotopiques en oxygène et deutérium très différentes de l’eau de pluie.

Dans un diagramme δD versus δ18O, les valeurs des sources chaudes se placent sur une droite de mélange entre deux pôles : un pôle de composition isotopique des eaux de pluie et un pôle de composition isotopique de l’eau dans une plaque en subduction à 50-60 km de profondeur (Figure 1.12). Ces données isotopiques permettent d’une part de remonter à la source des fluides aqueux et donc à la profondeur de déshydratation de la plaque plongeante et d’autre part d’attester de remontées de fluide aqueux à travers le coin de manteau depuis cette source.

Les fortes concentrations en sels dissous dans les eaux de la source d’Arima plaident en faveur de la serpentinisation du manteau qui a été traversé par ces fluides aqueux, puisque la serpentinisation consomme de l’eau et a tendance à concentrer les sels dans l’eau résiduelle. Pour que la circulation des fluides à travers la croûte soit possible et que les fluides arrivent en surface, la pression de fluide doit être supérieure à la pression lithostatique. La pression de fluide aura tendance à augmenter si on se trouve dans le cas d’une subduction chaude (Figure 1.10) et qu’une accumulation de fluide s’est formée sous la croûte continentale, ce qui est le cas de la subduction du SE du Japon.

Figure 1.12 – Composition isotopique des eaux chaudes salines de la source d’Arima en oxygène et en hydrogène (Kusuda et al., 2014).

Ces compositions isotopiques montrent un mélange entre un pôle représentatif des eaux de pluie et un pôle représentatif de la composition de l’eau due à la déshydratation de la plaque plongeante à 50-60 km de profondeur.

32 I.3.d. Monts sous-marins dans la zone avant-arc

Des monts sous-marins partiellement ou entièrement serpentinisés (40-100 %) et associés à de l’hydrothermalisme de basse température ont été découverts sous la zone avant-arc de l’arc des Mariannes, au-dessus du coin de manteau. Les serpentines échantillonnées dans ces zones présentent des signatures chimiques et isotopiques particulières par rapport aux signatures des serpentines issues d’interactions avec l’eau de mer. L’hypothèse de mise en place de ces monts sous-marins est la remontée en surface sous forme de diapirs des serpentines qui se sont formées dans le coin de manteau. En effet, les signatures des isotopes de l’oxygène (δ18O = 6.5‰ à 8.5 ‰) et de l’hydrogène (δD = -29.5‰ à -84‰) montrent que la serpentinisation a eu lieu dans le coin de manteau par interaction avec des fluides issus de la déshydratation des sédiments de la plaque en subduction et continue en surface par interaction avec l’eau de mer. La température de serpentinisation dans le coin de manteau est estimée à 300-375°C, d’après les mesures effectuées sur les cœurs des plus gros cristaux d’antigorite, qui sont plus susceptibles de ne pas être affectés par des rééquilibrations avec l’eau de mer et donc d’avoir gardé la signature isotopique propres à leurs conditions de formation (Alt and Shanks, 2006).