• Aucun résultat trouvé

Ralph Waldo Emerson

II. LES PESTICIDES DANS L’ATMOSPHERE

II.5. Elimination de l’atmosphère

II.5.2. b. La photolyse indirecte ou photooxydation

Les phénomènes de dégradation peuvent également s’effectuer par photolyse indirecte. Les principaux oxydants sont le radical hydroxyle (OH) et l’ozone (O3), ainsi qu’une contribution nocturne du radical NO3 [Atkinson and Arey, 2003]. Les atomes de chlore peuvent également jouer un rôle dans les zones côtières et marines [Atkinson and Arey, 2003] et l’acide nitrique (HNO3) dans les zones urbaines [Atkinson 1999].

La présence d’ozone ainsi que de radicaux OH et NO3 dans la troposphère sont majoritairement la conséquence de réactions photochimiques :

 Ozone : Une partie (environ 20%) de l’ozone troposphérique provient directement de la stratosphère. Les 80% restant sont formés dans la troposphère par réactions photochimiques entre les COV (composés organiques volatils) et les oxydes d'azote, NOx (NO + NO2) en présence de rayonnement solaire [Vingarzan, 2004]. L’ozone troposphérique peut aussi subir une destruction photochimique ou un dépôt sec sur la surface du sol. Au final, les concentrations d'ozone de fond, en valeurs moyennes annuelles pour des latitudes moyennes dans l’Hémisphère Nord, sont comprises entre 25 et 45 ppb [Vingarzan, 2004], mais elles peuvent atteindre 500 ppb dans des zones péri-urbaines très polluées [Finlayson-pitts and Pitts, 2000]. Généralement, les pertes de pesticides gazeux par l’ozone sont faibles. Seuls les composés gazeux possédant une insaturation sont susceptibles de réagir rapidement avec O3

[Atkinson, 1999]. Néanmoins, la présence d’un atome de chlore sur un des carbones de la double liaison engendre une diminution significative de cette réactivité.

 Radical OH : La photolyse de l’ozone a lieu dans la troposphère à des longueurs d’onde comprises entre 290-330 nm et produit l’atome O(1D) (état excité) [Finlayson-pitts and Pitts, 2000]. Cet atome est soit désactivé en O(3P), soit il réagit avec la vapeur d’eau pour former OH :

(R2) O3 + hν O2 + O(1D) (λ < 330 nm) (R3) O(1D) + M  O(3P) + M (M = N2 ou O2) (R4) O(1D) + H2O (g) 2 OH

Les réactions suivantes génèrent également des radicaux OH : (R5) HO2 + NO  OH + NO2

(R6) HO2 + O3  OH + 2 O2

Les radicaux hydroperoxydes, HO2, peuvent provenir de la photolyse d’aldéhydes ou de l’oxydation de COV.

D'autres mécanismes de formation du radical hydroxyle peuvent être importants. Ainsi, dans les zones polluées, la photolyse de l’acide nitreux (HONO) peut être une source significative de radicaux hydroxyles. En raison de sa très grande réactivité, ce radical ne s'accumule pas dans l'atmosphère et la concentration moyenne habituellement admise est de 1×106 molec.cm

-3

[Heard et Pilling, 2003].

 Radical NO3 : La présence de NO dans la troposphère à partir de sources naturelles et anthropiques conduit à la formation du radical NO3 [Finlayson-pitts and Pitts, 2000] :

(R7) NO + O3 NO2 + O2 (R8) NO2 + O3 NO3 + O2

Comme NO3 est facilement photolysé par la lumière solaire (λ < 670 nm) et peut réagir rapidement avec NO, ses concentrations sont faibles le jour mais peuvent atteindre, en valeur moyenne, 5×108 molec.cm-3 [Atkinson, 1999]. Il apparaît que les réactions avec ce radical sont potentiellement des voies importantes de dégradation pour les composés comportant des insaturations ou des atomes de soufre.

Ces dernières années, de nombreuses études sur la (photo)oxydation des pesticides dans l’eau ont été effectuées car il s’agit d’un procédé intéressant susceptible d’éliminer ces polluants lors du traitement des eaux [Burrows et al., 2002]. Toutefois, comme pour la photolyse, ces données sont difficilement transposables à la réactivité atmosphérique en phase aqueuse puisque les conditions, notamment du spectre de longueur d’onde du flux actinique, sont différentes. Quelques données expérimentales existent pour la phase gazeuse

[Feigenbrugel et al., 2006 ; Le Person et al., 2007 ; Munoz et al ; 2008 ; Vera et al., 2008]. Elles sont encore plus rares pour la phase particulaire [Palm et al., 1997 ; Palm et al., 1998 ; Palm et al., 1999 ; Segal-Rosenheimer and Dubowsky, 2007]. Globalement, au niveau atmosphérique, les mécanismes de dégradation sont encore mal connus et les cinétiques sont peu étudiées. De plus, les constantes cinétiques sont souvent surestimées car la température effective dans la troposphère est souvent plus basse que celle utilisée lors des mesures expérimentales [Scheyer, 2004].

De nombreuses déterminations des constantes cinétiques (en phase gazeuse) des COV par rapport aux radicaux hydroxyles ont été effectuées depuis une quarantaine d’années, ce qui a conduit à l’élaboration de procédures semi-empiriques telle que les relations structures réactivité (SAR) [Kwok and Atkinson, 1995]. Vu le manque de données expérimentales pour les pesticides, leurs cinétiques sont souvent estimées à partir de ces SAR. Le principe de ces procédures est la décomposition de la constante de vitesse (kOHtot) d'un composé en une somme de plusieurs kOH correspondant aux différentes fonctions constituant la molécule. Cette approche se base sur quatre voies principales de réactions, supposées additives et mettant en jeu les radicaux hydroxyles :

 Arrachement d’un atome d’hydrogène sur des liaisons C-H ou O-H : k1

 Addition de OH sur les insaturations (C=C et C≡C) : k2

 Addition de OH sur les cycles aromatiques : k3

 Interaction de OH avec les groupements contenant les atomes de N-, S- et P- : k4

La constante de vitesse totale kOHtot (cm3.molec-1.s-1) d’une molécule donnée peut donc être exprimée par la somme pondérée des constantes de vitesse k1, k2, k3 et/ou k4.

Toutefois, peu de vérifications expérimentales sont effectuées afin de savoir si ce modèle, initialement constitué pour des molécules simples (alcanes, alcènes…), est applicable à des molécules plurifonctionnelles complexes comme les pesticides. D’ailleurs, Vera et al. (2008) ont obtenu, pour la réaction de l’hymexazol gazeux avec les radicaux hydroxyles, une constante de vitesse expérimentale de ((4,1±0,7 )×10-12 cm3.molec-1.s-1), ce qui est significativement différent de celle qui a été estimée par SAR (2×10-10 cm3.molec-1.s-1). De plus, les auteurs du modèle structure-réactivité (Kwok et Atkinson, 1995) recommandent d'éviter les extrapolations aux composés organiques non inclus dans leur base de données. Il est probable que l’incertitude des estimations augmente avec la complexité de la structure chimique du composé, surtout si la molécule contient des halogènes, du soufre et/ou de l’azote [Atkinson, 1999].

Non seulement la validité des estimations sur la réactivité des pesticides en phase gazeuse n’est pas avérée, mais, en plus, ces constantes de vitesses sont appliquées à la réactivité hétérogène, faute de données disponibles. De plus, il semble que la nature de la particule sur laquelle est adsorbée le pesticide influence significativement la cinétique de dégradation du composé [Bossan et al., 1995]. Il parait donc essentiel d’effectuer des études expérimentales spécifiques afin de comparer les cinétiques homogènes/hétérogènes et de déterminer l’influence du support.