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Partie 1 : Introduction et généralités

2. Les modèles expérimentaux de la MA

2.3. Avantages et inconvénients des différents modèles

Modèles naturels :

L’avantage principal de ces modèles est qu’ils reproduisent une MA sporadique (98% des cas de MA) car ils ne sont pas basés sur des mutations FAD, contrairement aux modèles transgéniques, et qu’ils présentent une surcharge amyloïde progressive apparaissant sur des sujets âgés, contrairement aux modèles par injections d’Aβ. Cette caractéristique permet d’étudier, par exemple, l’incidence de différents facteurs de risque sur cette pathologie (Braidy et al., 2015). En revanche, un des problèmes majeurs de ces modèles provient du coût qu’ils représentent : il faut attendre plusieurs années avant qu’ils développent une pathologie qui ne concernera qu’un faible pourcentage d’individus. De plus, ils concernent souvent des animaux domestiques (comme le chien) ou des primates non-humains, ce qui pose des problèmes d’ordre éthique. Un autre inconvénient est qu’il existe peu d’articles sur un même modèle donc peu d’informations sont disponibles et elles sont parfois basées sur des observations qui ont été réalisées sur un petit nombre d’individus et n’ont pas été reproduites (Bons et al., 2006). Pour finir, il n’existe pas, à ce jour, de modèles naturels reproduisant la tauopathie et sa propagation spatio-temporelle spécifique à la MA.

Modèles par injections d’agents pharmacologiques :

Ces modèles sont faciles à mettre en œuvre. Ils permettent d’étudier certains aspects de la maladie. Par contre, ils ne reproduisent pas, ou que partiellement, les deux lésions caractéristiques de la MA (dépôts amyloïdes et TNF). Par conséquent, ces modèles sont relativement éloignés de la pathologie. Modèles par injection de peptide Aβ :

L’injection de peptide Aβ présente l’avantage de reproduire les lésions de type amyloïde de la MA avec leurs effets associés (inflammation, perte neuronale…). C’est une méthode rapide et peu couteuse permettant également de cibler une zone du cerveau.

Le problème majeur de cette méthode est qu’il n’existe pas de protocole standard pour produire un modèle de MA qui serait utilisé par l’ensemble des équipes de recherche. Globalement, il existe un protocole spécifique à chaque équipe. Les différents paramètres qui peuvent varier sont les suivants :

- Taille du peptide injecté. - Forme soluble ou agrégé.

46 - Protocole d’agrégation utilisé : temps d’incubation, température d’incubation, véhicule

utilisé… (Dahlgren et al., 2002).

- Coordonnées stéréotaxiques qui varient pour léser une même zone du cerveau. - Test de mémoire utilisé.

- Souche de rongeurs utilisée (exemple chez le rat : Wistar, Sprague Dawley, Long Evans…) Un autre inconvénient de ces modèles est qu’ils ne reproduisent pas de tauopathie et qu’ils ne sont pas progressifs contrairement à la MA.

Modèles transgéniques :

Les modèles de souris transgéniques ont permis de réaliser d’importantes avancées dans la compréhension de la MA avec notamment l’identification du rôle des différentes mutations impliquées dans les FAD. Cependant, ces modèles présentent plusieurs inconvénients :

- Ils sont basés sur une surproduction de protéine humaine or toute accumulation importante de protéine devient toxique pour les cellules (Elder et al., 2010).

- Une surproduction de la protéine APP n’existe pas dans la MA, or cette surproduction peut influencer d’autres fonctions biologiques, le rôle de la protéine APP étant mal connu à ce jour (Puzzo et al., 2015).

- Les gènes humains utilisés présentent des mutations issues de FAD, or les FAD ne représentent que 2% des cas de MA (www.inserm.fr).

- Globalement, peu de mort neuronale est observée dans ces modèles sauf avec ceux qui comportent plusieurs mutations FAD. Or, chez l’Homme, il n’existe pas de cas avec plusieurs mutations (Elder et al., 2010).

- Les pertes de neurones observées ne touchent que très peu l’hippocampe qui est pourtant une des zones les plus vulnérables dans la MA (Oakley et al., 2006).

- Les modèles APP ou PS1 avec une seule mutation ne présentent généralement pas de dépôts amyloïdes. Chez l’Homme, une seule de ces mutations suffit à entrainer une accumulation de ces dépôts de manière précoce ce qui laisse supposer que les mécanismes d’agrégations ne sont pas identiques (Elder et al., 2010).

- Il existe peu de modèles présentant une tauopathie qui est pourtant présente dans tous les cas de MA. De plus, dans les modèles développant des NFT, ces lésions ne suivent pas la progression spatio-temporelle spécifique à la MA et présentent de fortes lésions de la moelle épinière (Jaworski et al., 2010)(Caillierez et al., 2013)(Ramsden et al., 2005). L’ensemble des divergences rencontrées entre ces modèles et la maladie humaine peuvent expliquer l’échec de plusieurs essais de thérapies lors de leur passage en phase clinique, alors que ces résultats semblaient probants sur ces modèles. C’est notamment le cas de plusieurs essais de vaccination dirigés contre les agrégats de peptides Aβ (Franco and Cedazo-Minguez, 2014).

Il existe une multitude de modèles transgéniques basées sur une combinaison de différentes mutations et de promoteurs différents (plus d’une centaine recensée sur le site www.alzforum.org). L’ensemble de ces combinaisons constitue une véritable « jungle » pour le choix d’un modèle et rend les comparaisons entres différentes études compliquées voir impossibles. De plus, le temps nécessaire à l’apparition des lésions (parfois supérieur à un an) peut être un inconvénient pour l’industrie pharmaceutique.

Modèle : Présence des deux lésions (Dépôts et TNF) Respect de la progression spécifique des TNF Neuro- inflammation Deficits cognitifs Autres

Naturels Oui (microcèbe

et octodon) Non Oui Oui

Attente de plusieurs années. Effectif faible développant

les lésions. Agents

pharmacologiques Non Non ND Oui

Eloignés de la MA. Nécessite une chirurgie dans certains cas.

Injection d’Aβ Non NA Oui Oui

Nécessite une chirurgie. Non progressif.

Transgéniques Oui (pour

APP/PS1/Tau) Non Oui Oui

Attente (parfois 1 an). Basé sur des

FAD. Prix des animaux. APP/PS1/Tau disponible que chez

la souris. Transfert de

gènes Non Oui Oui Oui

Nécessite une chirurgie.

Tableau 5 : Récapitulatif des différents modèles animaux de la MA.

ND : Non Documenté ; NA : Non Applicable

47 Les modèles de rats transgéniques sont quant à eux, peu nombreux et présentent des amyloïdopathies moins marquées et encore plus longues à se mettre en place en comparaison avec les lignées de souris transgéniques homologues (Do Carmo and Cuello, 2013).

Modèles par transfert de gène :

L’avantage principal de cette technique est de pouvoir cibler à un temps donné, une région particulière du cerveau sans toucher les structures alentours (contrairement aux modèles transgéniques). Cet avantage présente un intérêt particulier pour modéliser la MA dont les lésions commencent à se développer à proximité de l’hippocampe.

Un des inconvénients de l’utilisation de vecteurs viraux est que la taille du transgène est limitée. Le génome d’un AAV est d’environ 5 kb, ce qui permet d’insérer un gène d’environ 3,9 kb seulement, après l’introduction de tous les éléments nécessaires à sa transcription (Shevtsova et al., 2005). Un autre défaut de ces modèles est qu’ils sont relativement récents et donc qu’il existe peu de données sur les effets d’un de ces types de vecteurs recombinants. De plus, il existe une variété de différents sérotypes d’AAV qui présentent des tropismes différents pour les neurones. L’utilisation de ces différents sérotypes combinés à différents types de promoteurs plus ou moins forts rend les comparaisons entre les modèles par transfert de gène compliquées.