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1.3 Avantages et domaines d’application

La spectroscopie intégrale de champ offre plusieurs avantages par rapport à la spectroscopie tradition-nelle. La combinaison de l’information spatiale et spectrale permet de dresser des cartes de flux à certaines longueurs d’ondes et de mettre en évidence par exemple des régions d’excitations/absorptions, de densité de composition, ou de vitesses (à partir des décalages de la raie dans chaque spaxel par rapport à sa longueur d’onde de référence). La soustraction de deux images prises à des longueurs d’ondes différentes peut être utilisée pour mettre en évidence des objets ou des régions d’émission noyées dans le champ d’une source lumineuse (c’est-à-dire Marois et al. (2000)). La conservation de l’information spatiale permet enfin de suivre l’évolution de la PSF de l’instrument avec la longueur d’onde. Cela peut être mis à profit pour extraire les spectres d’une partie du champ de vue ou pour obtenir les spectres individuels de plusieurs sources proches et contaminées (Roth 2006).

Cette technique permet aussi de corriger les spectres finaux des effets de réfraction atmosphérique. En effet, la réfraction induit un décalage de la source avec la longueur d’onde suivant l’angle parallactique. Ce décalage devient non négligeable lorsque l’on observe à haute résolution spatiale des objets proches de l’horizon, et/ou si l’on utilise un intervalle de longueur d’onde étendu. Lorsque l’on utilise un spectrographe classique, l’observateur peut orienter la fente selon l’angle parallactique (si l’instrument le lui permet). Ceci devient, par exemple, impossible lorsque l’on souhaite obtenir le spectre d’une binaire dont les deux composantes doivent être situées dans la fente. Dans le cas d’un spectrographe intégral de champ, ce problème disparaît car la réfraction peut être évaluée et corrigée dans chaque plan du cube.

Enfin, le champ de vue rectangulaire des IFS limite les pertes de flux chromatiques qui affectent les spectrographes, en particulier lorsqu’ils sont équipés de modules d’OA. Ces pertes résultent habituellement de l’élargissement de la FEP et de ses sous-structures (tavelures) avec la longueur d’onde ainsi que de la dégradation de la correction à faible longueur d’onde. Elles dépendent donc intrinsèquement des conditions d’observations et se rajoutent aux effets causés par la réfraction atmosphérique (Goto et al. 2003; Chauvin et al. 2005a).

Pour ces raisons, l’IFS est utilisée pour étudier une grande variété d’objets astrophysiques, en particulier : – Objets jeunes : disques protostellaires, jets, objets Haro-Herbigs, nébuleuses présolaires.

– Populations stellaires résolues.

– Galaxies : galaxies normales, galaxies actives, groupes et amas de galaxies. – Lentilles gravitationelles.

– Planétologie : composition et dynamique des petits corps (TNOs, astéroïdes, composition et dyna-mique de l’atmosphère des planètes.

Chapitre 2

Traîtement des données SINFONI

Sommaire

2.1 Description de l’instrument . . . . 84 2.1.1 Correction du front d’onde avec MACAO . . . 84 2.1.2 Le spectrographe intégral de champ SPIFFI . . . 85 2.2 Modes d’observation . . . . 86 2.3 Traitement des données avec une chaîne de réduction . . . . 87 2.3.1 Stratégie de réduction . . . 87 2.3.2 Utilisation de la chaîne de réduction . . . 87 2.4 Mise en évidence et correction d’artéfacts du détecteur . . . . 89 2.4.1 Mauvaise estimation du biais . . . 90 2.4.2 Anomalie de reset . . . 90 2.4.3 Effet électronique aléatoire . . . 91 2.4.4 Oscillations . . . 92 2.4.5 Rémanence . . . 93 2.4.6 Flux négatif . . . 93 2.5 Optimisation de la réduction . . . . 95 2.5.1 Filtrage des pics par seuillage kappa-sigma . . . 95 2.5.2 Filtrage des mauvais pixels . . . 95 2.5.3 Calibration en longueur d’onde. . . 96 2.5.4 Options importantes lors de la reconstruction des cubes . . . 96 2.6 Effets physiques . . . . 98 2.6.1 Astigmatisme . . . 98 2.6.2 Réfraction atmosphérique . . . 98 2.6.3 Pertes de flux différentielles . . . 99 2.6.4 Résidus de ciel . . . 101 2.7 Traitements résiduels des spectres . . . . 101 2.8 Optimisation de la stratégie d’observation . . . . 103 2.9 Conclusions . . . . 104 L’association de la spectroscopie 3D et de l’optique adaptative est particulièrement intéressante pour résoudre et obtenir les spectres individuels de systèmes multiples (étoiles binaires, compagnons de faible masse,...). En particulier, elle permet de limiter les pertes de flux différentielles et ainsi de préserver le continuum spectral qui est directement relié à la température effective des objets. Enfin, la conservation de l’information spatiale peut être utilisée par des processus de déconvolution pour éliminer la contribution du flux de l’étoile primaire dans les spaxels du compagnon.

Mon travail de thèse m’a naturellement conduit à utiliser le spectrographe intégral de champ SINFONI muni d’une optique adaptative pour obtenir une bibliothèque de spectres d’objets jeunes, compagnons d’étoiles ou isolés. Ces spectres sont analysés dans le chapitre 4. Dans ce chapitre 2, je décris tout d’abord

le fonctionnement de l’instrument. Je parle ensuite des modes d’observations utilisés ainsi que du traitement des données associées. Une troisième partie est consacrée aux problèmes rencontrés. Enfin, je propose dans la dernière partie une stratégie d’observation adaptée pour optimiser l’analyse des données des compagnons de faible masse.

2.1 Description de l’instrument

L’instrument SINFONI (SINgle Faint Object Near-IR Investigation, Eisenhauer et al. 2003; Bonnet et al. 2004) est un spectrographe intégral de champ fonctionnant dans le proche infrarouge (1.1–2.5 µm) et situé au foyer Cassegrain du télescope VLT/UT4. Il se compose d’une version modifiée du module d’optique adaptive MACAO (Multiple Application Curvature Adaptative Optics, Bonnet et al. 2003) qui renvoie la lumière corrigée des anomalies de front d’onde au spectrographe intégral de champ SPIFFI (SPectrograph for Infrared Faint Field Imaging).

2.1.1 Correction du front d’onde avec MACAO

La partie visible (450 à 950 nm) du faisceau formé au foyer du télescope est réfléchie et envoyée sur l’analyseur de courbure de MACAO. Le principe de l’analyseur consiste à mesurer la différence d’intensité lumineuse dans les régions intra et extra-focales du plan pupille qui sonde la déformation locale du front d’onde.

L’image d’une étoile de référence est formée sur un miroir à membrane. Le miroir renvoie la lumière sur une matrice de 60 microlentilles dont les foyers sont situés à l’entrée de fibres optiques monomodes. Les fibres optiques conduisent chaque faisceau sur une photodiode à avalanche.

Le miroir à membrane est excité par des ondes acoustiques à une fréquence de 2.1 kHz, permettant aux plans intra et extra-pupille d’être imagés alternativement par la matrice de microlentilles. La fréquence de vibration de la membrane du miroir est accordée sur la fréquence de lecture des photodiodes. Le contraste dans les régions intra et extra-focales pour chaque sous-ouverture produit le signal de courbure.

Le calculateur en temps réel (RTC) filtre ce signal et calcule les commandes à appliquer aux 60 actuateurs du miroir déformable à la fréquence de 500 Hz. Le miroir déformable est situé sur une monture de tilt qui corrige les anomalies de basculement.

Comme tout système d’OA, MACAO a besoin d’utiliser une étoile naturelle de référence de magnitude

∼17 au minimum qui soit proche de la ligne de visée de l’objet scientifique. Mais bien souvent, ce type

d’étoile n’est pas présent dans le champ de quelques dizaines d’arcsecondes de l’instrument. Pour cette raison, le télescope UT4 est équipé d’un laser qui peut créer une étoile artificielle par l’excitation du sodium ionosphérique à 90 km.

Le but de MACAO n’est pas de rétablir une image à très haut rapport de Strehl (voir la Partie I pour une définition du rapport de Strehl) mais de compenser partiellement la déformation du front d’onde avant d’envoyer le faisceau dans le spectrographe intégral de champ.

Notons enfin que l’instrument est équipé d’une unité de calibration qui permet d’étalonner le senseur de front d’onde et d’acquérir des images de calibrations (flat field, fibres, lampes à arc) nécessaires pour traiter les données.

2.1. Description de l’instrument 85

Fig. 2.1: Organisation des 32 segments d’images une fois dispersés sur le détecteur. Les spectres sont dispersés à la verticale (cette figure ne montre un interval en longueur d’onde restreint). La dimension spatiale est conservée à l’horizontale. Figure tirée du manuel de SINFONI version 10.0.

2.1.2 Le spectrographe intégral de champ SPIFFI

SPIFFI permet la spectroscopie simultanée sur 32 × 64 spaxels avec une résolution spectrale λ

∆λ

moyenne de 3000.

L’instrument est situé dans une enceinte cryogénique qui maintient l’ensemble à une température de 77 K. A l’entrée de l’instrument, le faisceau lumineux passe par une série de préoptiques qui limitent le fond thermique et permettent de sélectionner l’échantillonnage spatial des cubes parmi 25, 100 ou 250 mas/pixels. Enfin, des filtres à bande large (J, H, K, H+K) sont positionnés sur le chemin optique pour supprimer les hauts ordres de diffraction créés lors de la dispersion.

Le faisceau pénètre alors dans un image slicer. Le slicer est composé d’un ensemble de deux séries de 32 miroirs qui redirigent chaque tranche d’image à des angles différents puis recollectent les faisceaux et forment une pseudo-fente. Ces miroirs, d’une épaisseur de 300 µm, présentent des défauts optiques que l’on peut étalonner et compenser lors du traitement des données. La pseudo-fente se présente sous la forme de 32 segments décalés alternativement (voir Fig. 2.1). Chaque segment (slitlet) est dispersé par un réseau sélectionné pour obtenir des spectres en bandes J (1.1 - 1.4 µm), H (1.45 - 1.85 µm), K (1.95 - 2.45 µm), ou H+K (1.45–2.45 µm) à une résolution de ∼2000, 3000, 4000, et 1500 respectivement (voir Table 2.1). Un détecteur de 2048 × 2048 pixels de type Rockwell Hawaii 2RG est placé en sortie du réseau. Au final, chacun des segment a été échantillonné sur 64 pixels horizontalement et dispersé verticalement sur 2048 pixels. SINFONI produit donc des cubes de données finaux contenant 2048 spaxels rectangulaires.

Tab. 2.1: Caractéristiques spectrales de l’instrument

Filters Rλ a λc a FWHM a ∆λb λmin λmax

(Å) (Pixels) (Å/pixel) (Å) (Å) J 1890±45 1.2510±0.0004 4.4±0.3 1.45 1.1 1.4 H 2560±30 1.6513±0.0005 3.2±0.2 1.95 1.45 1.85 K 4400±95 2.2013±0.0007 2.0±0.2 2.45 1.95 2.45 H+K 1570±70 1.9556±0.0006 2.5±0.2 5.00 1.45 2.45 a

Données issues des pages web de suivi de l’instrument, mises en place par l’ESO et valables pour l’échantillonnage spatial le plus grossier.

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