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Les auteurs représentés dans les chaînes sur Jérémie : problèmes de sources et d’attributions

CHAPITRE 1 : PRÉSENTATION DES CHAÎNES EXÉGÉTIQUES GRECQUES,

IV. Les auteurs représentés dans les chaînes sur Jérémie : problèmes de sources et d’attributions

Il ne s’agit pas ici de dresser un portrait détaillé des auteurs patristiques cités dans les chaînes, mais d’observer de plus près les scholies qui leur sont attribuées et de rechercher les œuvres dont elles ont été extraites. Je parlerai de la tendance exégétique dont témoignent les scholies de tel ou tel auteur au moment où j’étudierai le projet exégétique des caténistes243.

A. Hippolyte de Rome

(première moitié du IIIe s. ap. J.-C.)244

Une seule scholie apparaît sous le nom d’Hippolyte de Rome dans la chaîne à auteurs multiples sur Jérémie. Il s’agit d’un commentaire tiré du De Christo et Antechristo sur Jr 17, 11245. Puisqu’elle ne concerne pas mon corpus et qu’elle a été bien repérée par M. Faulhaber246, je n’en dirai pas plus.

B. Origène

(≈ 185-254)247

Origène appartient au groupe des trois auteurs les plus anciens représentés dans la chaîne à auteurs multiples, avec Hippolyte de Rome et Grégoire le Thaumaturge248.

136 scholies lui sont attribuées, mais seulement 17 concernent le corpus des chapitres 1 à 4. Pour la partie antérieure à Jr 20, 12, elles proviennent des homélies conservées par ailleurs en tradition directe dans le Scorialensis W III, 19 et sa copie, le Vaticanus. gr. 623

243

Cf. infra, pp. 300-343.

244

Clavis Patrum Graecorum (CPG) n° 1872, t. I, p. 259.

245

PG 10 B 773-776A ; J. B. Pitra, Analecta Sacra Spicilegio Solesmensi parata, t. II (1884), p. 245 et H. Achelis, Hippolytstudien, Texte und Untersuchungen I, 4, Leipzig 1897, pp. 80-81.

246 M. Faulhaber, p. 103. 247 CPG n°1438, t. I, p. 158. 248 M. Faulhaber, p. 103.

et pour la partie postérieure à Jr 20, 12, d’homélies perdues. En plus des scholies de la chaîne sur Jérémie, la tradition indirecte des Homélies sur Jérémie d’Origène fait appel à la Philocalie et aux traductions latines de Jérôme249.

Toutes les scholies attribuées à Origène dans la chaîne à auteurs multiples ont déjà été éditées, mais pas toutes au même endroit. Il importe d’expliquer la raison de cette dispersion dans les quatre ouvrages suivants : l’édition ancienne de M. Ghisleri (1623) présentée plus haut250, l’édition de C. Delarue (Origenes, Opera omnia, vel graece vel latine extant... latine versa, éd. C. Delarue, 7 t., Paris 1733-39) reproduite dans la Patrologie de Migne (PG 13, col. 513-606) et les deux œuvres de E. Klostermann à propos des Homélies sur Jérémie d’Origène : sa longue étude de la tradition manuscrite – Die Überlieferung der Jeremiashomilien des Origenes, Berlin 1897 – et le volume de l’édition elle-même – Origenes, Jeremiahomilien, Klageliederkommentar, Erklärung der Samuel und Königsbücher, éd. E. Klostermann, revue par P. Nautin, Berlin 1983.

Dans l’édition de M. Ghisleri tout d’abord, les scholies d’Origène ont un statut à part. En effet, celui-ci ne les a pas toutes éditées telles qu’elles se trouvaient dans la chaîne. Celles qui étaient extraites des Homélies III, V-VII, XV et XVIII-XX (c’est-à-dire des homélies non traduites par S. Jérôme) ont eu un sort particulier : M. Ghisleri a choisi de ne pas les éditer telles quelles, mais de présenter l’édition des homélies d’Origène dont ces scholies étaient extraites, édition qu’il a confiée à Allatius251. Ces longs passages sont placés après les scholies des autres Pères avec un titre particulier252. Pour ce qui est de notre corpus (Jr 1-4), toutes les scholies qui sont liées à l’Homélie V, c’est-à-dire les scholies n°161a, 162a, 165, 170, 171b, 175b, 176b, 181 et 186a, sont donc absentes de l’édition de M.

249

Pour la tradition manuscrite des Homélies sur Jérémie, cf. SC 232, éd. P. Nautin, Paris 1976, pp. 21-43 et E. Klostermann, Die Überlieferung der Jeremiashomilien des Origenes, Berlin 1897.

250

Cf. supra, p. 15.

251

Voir T. Cerbu, « Allatius et Origène », in Les Pères de l’Église au XVIIe siècle, E. Bury, B. Meunier dir., Paris 1993, pp. 213-226 : « La toute première publication d’Allatius fut l’apport en 1623 d’une chaîne et de huit homélies d’Origène à un commentaire sur Jérémie en trois volumes in-folio, ouvrage énorme édité à Lyon par son ami Michele Ghislieri. Allatius édita les huit homélies non traduites par Jérôme (3, 5-7, 15 et 18-20) ».

252

Cf. M. Ghisleri, t. I, pp. 238-239 le titre : Origenis Homilia tertia in Ieremiam Codicis Graeci Vaticani. Et prima ex octo quae nunc primum in lucem prodeunt ; pp. 321-323 et pp. 328-333 : Origenis Homilia quinta Codicis Graeci Vaticani in Ieremiam, et secunda ex octo adhuc non impressis ; pp. 338-339 : Origenis Homiliae Quintae in Ieremiam Codicis Graeci Vaticani, et secundae ex octo quae nunc primum in lucem eduntur ; pp. 352-354 et pp. 361-362 : Origenis Homiliae quintae in Ieremiam Codicis Graeci Vaticani, et secundae ex octo quae nunc primum in lucem prodeunt.

Ghisleri. Les 8 premières scholies en revanche, c’est-à-dire les scholies 11b, 15b, 16a, 22a, 79b, 104a, 130b et 131a, sont bien éditées telles quelles chez M. Ghisleri. Il faut signaler cependant le cas particulier de la scholie 104a dont le début est une récriture de l’Hom. III, §1-2, non traduite par S. Jérôme, et qui donne donc lieu à l’édition de l’Hom. III, §1-2, tandis que seule la fin de la scholie est reproduite telle quelle. Au total, cette première édition ne présente que 8 des 17 scholies attribuées à l’Alexandrin.

L’édition de C. et V. Delarue reproduite dans la Patrologie de Migne (PG 13, col. 513- 606) sous le titre Ex Origene Selecta in Ieremiam, ne fait que reproduire, quant à elle, les scholies éditées chez M. Ghisleri, qui plus est avec une lacune. En effet à cause de l’omission d’un alinea avant une scholie d’Origène dans l’édition de M. Ghisleri (t. I, pp. 67-68), deux scholies d’Origène ont été omises par C. Delarue, qui a dû croire qu’elles étaient, comme celle qui précédait, de Jean Chrysostome. La Patrologie grecque ne nous présente ainsi que 6 des 17 scholies d’Origène sur le début du livre de Jérémie.

Dans son étude de la tradition manuscrite des Homélies sur Jérémie d’Origène253, E. Klostermann édite toutes les scholies laissées de côté par M. Ghisleri et C. Delarue, c’est- à-dire, pour ce qui est de notre corpus, les scholies n°161a, 162a, 165, 170, 171b, 175b, 176b, 181 et 186a. Pour ces scholies, M. Ghisleri avait fait le choix d’éditer l’Hom. V dont elles étaient extraites. E. Klostermann édite aussi, au même endroit, les deux scholies (15b et 16a) oubliées par Delarue à cause d’un alinea manquant dans l’édition de M. Ghisleri, ainsi que le début de la scholie 104a omis dans l’édition de M. Ghisleri au profit de l’édition de l’Hom. III, §1-2 et par conséquent absente aussi de la PG. Cette étude de E. Klostermann présente ainsi 11 des 17 scholies d’Origène sur le début du livre de Jérémie. D’autre part, dans son édition des Homélies sur Jérémie d’Origène254, E. Klostermann édite en annexe les scholies de la tradition indirecte indépendantes des homélies conservées en tradition directe. Pour les chapitres 1 à 4, sont ainsi éditées les scholies 11b et 22a, pourtant déjà présentes chez M. Ghisleri et dans la PG. La consultation des deux ouvrages d’E. Klostermann permet ainsi d’avoir accès à 14 des 17 scholies d’Origène. L’auteur n’a pas jugé bon de reproduire les trois scholies restantes (79b, 130b et 131a) déjà éditées chez M. Ghisleri et dans la PG.

253

E. Klostermann, Die Überlieferung…, pp. 84-90.

254

Origenes, Jeremiahomilien, Klageliederkommentar, Erklärung der Samuel und Königsbücher, éd. E. Klostermann, revue par P. Nautin, Berlin 1983, p. 199.

Le cas d’Origène est ainsi très complexe, puisque l’édition des scholies qui lui sont attribuées dans la chaîne est dispersée dans plusieurs ouvrages pour les diverses raisons que j’ai évoquées. Il faut consulter tous les ouvrages cités, exceptée la PG qui n’apporte rien de plus par rapport à l’édition de M. Ghisleri, pour avoir l’intégralité des scholies attribuées à Origène dans la chaîne à auteurs multiples.

Passons maintenant en revue les scholies d’Origène, dans l’ordre où elles apparaissent dans la chaîne. Les références aux Homélies sont données d'après l'édition de P. Nautin (SC 232) citée supra :

− la scholie n°11b porte sur Jr 1, 7255. On peut, avec E. Klostermann et P. Nautin256, douter de son authenticité, dans la mesure où ce même verset est commenté dans les Homélies (Hom. I, §6 et §8-9) dans une perspective exégétique très différente : Origène n’y fait aucun rapprochement entre la parole de Jérémie et l’attitude de Roboam et applique la parole : ne dis pas :" je suis trop jeune" au Sauveur, « jeune en vertu de sa naissance corporelle, mais vieux en tant que Premier-né de la création. » ;

− la scholie n°15b porte sur Jr 1, 10 et résume très librement en huit lignes les trente lignes de l’Hom. I, §6, ll. 12-27 et §7, ll. 1-16. Le caténiste ne retient des §6 et 7 de l'Hom. I que deux idées : d'abord le fait que Jr 1, 10 (l'ordre de déraciner et planter les nations) doive être appliqué au Christ et non au prophète, et ensuite le fait que les nations et les royaumes représentent le mal de l'âme humaine. Le §6 étudiait tout le passage de Jr 1, 5 à Jr 1, 10, dans le but de distinguer les paroles qui se rapportent au prophète et les paroles qui le dépassent et se rapportent au Christ. Le caténiste ne retient que ce qui concerne le lemme biblique concerné (Jr 1, 10) et laisse de côté ce qui concerne les autres lemmes bibliques. On remarque que la récriture est assez éloignée du texte d'origine, puisque l'on ne retrouve dans la scholie de la chaîne aucun des termes précis de l'homélie correspondante ;

255

Jr 1, 7 (c’est-à-dire le lemme 11 selon la division du texte biblique dans la chaîne à auteurs multiples) et non Jr 1, 10 comme l’ont indiqué E. Klostermann, OW, p. 199 et P. Nautin (t. I), p. 30. L’erreur est pourtant absente d’E. Klostermann, Die Überlieferung…, p. 101.

256

E. Klostermann le classe parmi les fragments indépendants dans son édition des homélies (OW, p. 199) ; P. Nautin (t. I), pp. 30-31.

− la scholie n°16a porte aussi sur Jr 1, 10 et résume en 18 lignes les 84 lignes de l’Hom. I, §14, 19 - §16, 15 ; l'interprétation détaillée des royaumes et des nations qui correspondent aux divers types de péchés (cf. Hom. I, § 14, ll. 25-34) est laissée de côté, ainsi que les détails sur le mode de l’anéantissement (Hom. I, §15, ll. 7-31). Les phrases interrogatives se transforment en phrases affirmatives :

- Tiv"Tiv"Tiv" ou{tw" makavriov" ejstin wJ" ta;" basileiva" polla;" ou[sa", a}" Tiv" deivknusin oJ diavbolo", basileiva" ou[sa" dunavmewn ajntikeimevnwn, basileiva" kata; ta;" aJmartiva", ejkrizou'n toi'" didomevnoi" uJpo; tou' Qeou' lovgoi": gevgraptai gavr: jIdou; devdwka tou;" lovgou" mou eij" to; stovma sou: ijdou; kaqevstakav se shvmeron ejpi; e[qnh kai; basileiva", ejkrizou'n … (Hom. I, § 14, ll. 19-25) => Makavrion to; toi'" Qeou' lovgoi" ejkrizw'sai ta;" tw'n ajntikeimevnwn dunavmewn basileiva"... (extrait 16a) ;

- [Estw ga;r ejkrerizwmevna ajp jejmou' ta; fau'la, kataskafevnta ta; ceivrona, tiv tiv tiv moi o[felo", eja;n mh; ajnti; tw'n ejkrizwqevntwn katafuteuqh/' tiv ta; kreivttona ………… tiv tiv tiv tiv moi o[felo", eja;n mh; ajnti; touvtwn ajnoikodomhqh/' ta; diafevronta … … … … (Hom. I, § 16, ll. 2-6) => ta; ejnantiva de; dia; tw'n iJerw'n kataskavptetai lovgwn o} dei' prw'ton genevsqai kai; ou{tw" oijkodomei'sqai ta; kreivttona:(extrait 16a).

Parfois, ces phrases interrogatives disparaissent (cf. ejkrizou'n tivna … Hom. I, § 14, ll. 36-37). Les transitions du texte d'origine sont abandonnées (cf. eij qevlei" de; ijdei'n, tivno" eijsi; futei'ai oiJ toiou'toi dialogismoiv, a[koue pour introduire la citation de Mt 13, 28), tandis que d'autres sont ajoutées (kai; ejpi; oijkodomiva" oJ aujto;" lovgo". Fhsi;n gou'n oJ Pau'lo"). Un des passages de l'Homélie (§ 15, ll. 1-6) est traité de manière différente dans la scholie de la chaîne : il s'agit du commentaire des termes "démolir" et "bâtir". Dans l'Homélie, l'insistance est mise sur l'opposition entre la construction du diable sur le sable et la construction de Dieu sur le roc avec la citation de 1Co 3, 9, tandis que dans la chaîne, l'insistance est mise sur le Christ, « fondement infrangible et inébranlable » sur lequel on bâtit l’avenir, et 1Co 3, 10 est cité en complément de 1Co 3, 9 ;

− la scholie n°22a porte sur Jr 1, 13. Son authenticité est tout aussi douteuse que celle de la scholie n°11b, puisqu’elle n’a pas de point d’accroche avec les Homélies. On peut signaler à propos de cette scholie la présence de l’expression kata; qewrivan qui suit immédiatement le nom de l’auteur dans les manuscrits et appartient donc à l’en-tête de la scholie257. Cette notation rare caractérisant le commentaire exégétique qui va suivre « selon le sens spirituel » est sans doute une indication du caténiste, car on ne trouve que trois fois cette expression chez Origène qui, le plus souvent, ne définit pas sa démarche258. Le problème est de savoir pourquoi le caténiste ne donne qu’une fois cette indication, alors que les interprétations d’Origène dans la chaîne évoquent très souvent le sens spirituel ;

− l’extrait n°79b porte sur Jr 2, 21 et provient de l’Hom. II, §1. On remarque que la citation de Sg 1, 13 est très abrégée. La transition entre la citation de Sg 1, 13 et Sg 2, 24 (cf. ei\ta ojlivgon uJperba;" to; rJhto;n ejrw': povqen ou\n qavnato" eijsh'lqen … Hom. II, §1, ll. 4-5) disparaît dans la scholie. Les exemples de la claudication et de la souffrance (Hom. II, § 1, ll. 13-17) disparaissent aussi. La citation de Gn 1, 26 est supprimée (Hom. II, § 1, ll. 18-19). L’idée que la vigne était en totalité vraie et celle que nous sommes tous nés à l’image de Dieu sont inversées dans la scholie par rapport à l’Homélie (cf. Hom. II, §1 ll. 35-40 et retour aux ll. 17-27). En revanche, la précision sur la question posée par Dieu dans le texte biblique : « non pas parce qu’il l’ignore, mais pour parler comme un homme » est propre à la chaîne, ainsi que la citation d’Is 1, 21, ajoutée à la fin de l’extrait, qui n’apparaît pas dans le texte de l’homélie correspondante et donne donc un aspect original à la scholie de la chaîne. D’après la Biblia Patristica, cette citation d’Isaïe n’apparaît que deux autres fois chez Origène, dans la Série de commentaires sur Matthieu (12, 4) et dans les Homélies sur le Cantique des Cantiques (2, 9). Le parallèle n’est pas très probant pour les Commentaires sur Matthieu. Quant aux Homélies sur le Cantique, c’est la deuxième partie du verset seulement qui est utilisée. Dans les autres passages de son œuvre où Origène cite

257

Malgré cette unanimité des manuscrits sur l’emplacement de l’expression, la PG la raccroche à la scholie qui suit (cf. PG 13, 545 A11), contrairement à l’édition de M. Ghisleri (t. I, p. 84).

258

Cf. Commentariorum series in Evangelium Matthaei, éd. E. Klostermann, GCS 11, p. 93, l. 25 ; Selecta in Psalmos PG 12, 1213 B1 ; Selecta in Lucam PG 17, 317 C1.

Jr 2, 21, il n’y a aucune mention d’Is 1, 21, c’est-à-dire de la transformation de Sion en prostituée. Le passage d’Isaïe que l’on trouve à proximité de Jr 2, 21 dans les œuvres d’Origène est plutôt Is 5, 2 : kai; ejfuvteusa a[mpelon swrhc259. On peut émettre plusieurs hypothèses quant à la présence de la citation d’Is 1, 21 à la fin de l’extrait 79b : soit elle a été ajoutée par le caténiste, parce que c’était un lieu parallèle qui lui venait à l’esprit au moment de récrire le passage en question de l’Hom. II, soit elle provient d’un autre auteur, mais a été intégrée par erreur à la suite de la scholie d’Origène, après avoir perdu son attribution260, soit la tradition directe est lacunaire sur ce point et c’est la chaîne qui reflète un texte plus complet des Homélies d’Origène ;

− la scholie n°104a porte sur Jr 2, 31 et provient, en tout cas pour le début, de l’Hom. III, §2, ll. 1-21 résumée en treize lignes. L’expression « d’un point de vue universel » (kaqovlou) est placée au début de la scholie, tandis qu’elle apparaît après la première partie du développement dans l’Homélie (cf. Hom. III, § 2, l. 9). Le texte de la scholie est fidèle au texte de l’Homélie, avec quelques renchérissements en moins (par exemple la répétition de pw'" e[rhmo"). On retrouve bien les mêmes termes et les mêmes expressions, même si le style est retravaillé pour resserrer les idées. En revanche, il n’y a pas de trace dans les Homélies de la deuxième partie de l’extrait dont l’incipit est Fhsi;n ou\n ejntreptikw'". Étant donné qu’il y a une omission, probablement très ancienne, à la fin de la troisième homélie261, on peut supposer que la deuxième partie de la scholie s’en est inspirée. La fin de la scholie seulement, c’est-à-dire ce qui ne correspond à aucun passage de ce qui subsiste de l’Hom. III, se trouve donc éditée chez M. Ghisleri et dans la PG. Pour signaler cette différence de statut entre le début et la fin de la scholie, le fragment est divisé en deux dans le tableau final d’E. Klostermann262 ;

259

Cf. Fragmenta e catenis in Matthaeum, éd. E. Klostermann & E. Benz, GCS 41, t. I, n°178.

260

Malgré une consultation approfondie du TLG et de la Biblia patristica pour l'ensemble des auteurs, je n’ai découvert aucune trace d’une utilisation simultanée des citations de Jr 2, 21 et Is 1, 21.

261

Cf. P. Nautin (t. I), pp. 22-23.

262

− la scholie n°130b porte sur Jr 3, 6 et s’inspire de l’Hom. IV §4, 31-49, dont les idées sont resserrées en dix lignes. Je souligne les éléments communs.

Hom. IV §4 scholie 130b

o[yei o{ti ajnabevbhken ejpi; pa'n o[ro" uJyhlo;n yektw'" kai; ajgaphvsa" megalofrosuvnhn kai; kata; th;n ajlazoneivan kai; kata; th;n uJperhfanivan. }O" de; ajnabevbhke kai; ejpi; pavnta bouno;n uJyhlo;n kai; gevgonen uJpokavtw panto;" xuvlou ouj karpivmou, ajll j ajlswvdou": a[llo ga;r to; ajlsw'de" xuvlon, a[llo to; karpofovron: eij" a[lsh o{tan futeuvwsi xuvla, futeuvousin ouj ta; karpofovra, ouj sukh'n oujde; a[mpelon, ajlla; movnon tevryew" cavrin a[karpa xuvla. Toiouvtou" euJrhvsei" tou;" lovgou" tw'n eJterodovxwn kai; ta; kavllh tw'n piqanothvtwn aujtw'n oujk ejpistrefovntwn tou;" ajkouvonta". {Otan ou\n toi'" toiouvtoi" lovgoi" ti" eJauto;n ejpidw/', pepovreutai uJpokavtw panto;" xuvlou ajlswvdou": oujk ei[rhke panto;" xuvlou kai; sesiwvphken, oujde; pavlin prosevqhke: panto;" xuvlou tou' karpivmou, ajll j ei[rhken uJpokavtw panto;" xuvlou ajlswvdou". Dia; tou'to nohvsei" tiv dhvpote oJ nomoqevth" levgei: Ouj futeuvsei" pa'n xuvlon para; to; qusiasthvrion kurivou tou' qeou' sou, kai; ouj poihvsei" a[lso": e[cei" ga;r kai; to; o[noma tou' a[lsou" ajphgoreumevnon.

jEpi; pa'n de; o[ro" yektw'" ajnabaivnousin kai; oiJ th;n uJperhfavnian nosou'nte" kai; givnontai uJpo; panto;" xuvlou ajlswvdou", ouj karpivmou, ejx ajkavrpwn ga;r ta; a[lsh devndrwn tevryew" cavrin futeuomevnwn oi|"

oi|"oi|"

oi|" eJoivkasi tw'n eJterodovxwn oiJ lovgoi kavllo" e[conte" piqanovthto" ouj tw'n ajkouovntwn ejpistrovfhn. Oi|"Oi|"Oi|" oJ ejpidou;" Oi|" eJauto;n uJpokavtw povreutai panto;" xuvlou ajlswvdou", dididi di jjou|jjou|jjou|jjou| dh'lon o{ fhsin oJ nomoqevth": « Ouj futeuvsei" pa'n xuvlon uJpo; to; qusiasthvrion Kuvriou tou' Qeou' sou kai; ouj poihvsei" a[lso". »

On remarque que le caténiste met le passage à la troisième personne du pluriel. Les répétitions, renchérissements et détails sont laissés de côté (cf. renchérissement des termes megalofrosuvnhn et ajlazoneivan ; répétition de ajnabevbhke ; détails du figuier et de la vigne…). La syntaxe est resserrée, en particulier grâce à des propositions relatives qui permettent de tout dire en une seule phrase (cf. les pronoms relatifs mis en gras) ;

− la scholie n°131a porte sur Jr 3, 7-8 et emprunte divers motifs dispersés dans l’Hom. IV, §1, §4 et §5. D’autres motifs paraissent originaux, comme le deuxième dont la place est curieuse dans l’ensemble. En effet, ce motif vient interrompre le raisonnement portant sur l’attitude de Juda à qui on reproche de ne pas avoir tiré leçon des malheurs arrivés à Israël et anticipe sur le lemme 132 (Jr 3, 9) avec

l’évocation du bois et de la pierre. D’autre part, l’image de la femme qui succède à la femme adultère n’apparaît pas dans l’Hom. IV qui évoque en revanche l’image de l’esclave nouveau venu dans une maison. L’allusion à Is 29, 13 sous- jacente dans le fait d’honorer Dieu "sur les lèvres" n’apparaît pas non plus dans l’Hom. IV. Enfin, la référence au temple et aux coutumes de la loi n’y figure pas non plus. Le tableau suivant récapitule la provenance des divers motifs de la scholie.

Motifs de la scholie caténale Passages correspondants de l’Hom. IV Ce qui aggrave l’accusation contre la tribu

de Juda, c’est qu’ils n’ont même pas été éduqués par les malheurs d’Israël.

Hom. IV, §1, 24-30 ou 53-59 dont l'idée est reprise, mais non les termes.

Et en rendant visible l’insensibilité des idolâtres, il appelle les idoles bois et pierres en passant sous silence les démons qui se tapissent dedans.

?

Or il fallait plutôt que Juda revienne comme une femme qui s’introduit près de celle qui a été chassée pour prostitution. Le grief serait en effet plus important si elle imitait la prostitution de la première.

?

Telle est la demeure des Juifs : il fallait revenir en vérité, mais elle s’est façonnée dans le mensonge en honorant Dieu sur les lèvres,

Hom. IV, §1, 67-68 sans l’allusion à Isaïe Les termes de l'homélie sont repris approximativement.