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1 Analyse du cadre juridique

1.1 Le cadre juridique français

1.1.1.2 Aspects financiers des ATU

Les médicaments faisant l’objet d’une ATU sont pris en charge à 100% par l’assurance maladie. Ces médicaments sont fournis aux établissements de santé par le laboratoire exploitant, soit à titre gratuit, soit moyennant une indemnité. Le montant des indemnités des ATU est choisi librement par l’exploitant qui doit, conformément à l’article L. 162-16-5-1 du CSS31 (Code de la Sécurité Sociale),

déclarer au CEPS (Comité Economique des Produits de Santé) :

o Le montant de l’indemnité maximale qu’il peut demander aux établissements, ceci dans le mois suivant l’octroi de l’ATU,

o Son chiffre d’affaire pour les médicaments sous ATU et le nombre d’unités délivrées pendant l’année civile précédente, ceci chaque 15 février.

La prise en charge des ATU est faite en sus du GHS (Groupe Homogène de Séjour) et au fil de l’eau. Afin d’être remboursés, les établissements de santé publics et les établissements de santé privés participant au service public hospitalier déclarent les prescriptions de médicaments sous ATU administrés dans leur centre via un outil grâce aux codes UCD (Unité Commune de Dispensation) tandis que les établissements privés ne participant pas au service public hospitalier se voient remboursés après facturation à la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS).

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https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006073189&idArticle=LE GIARTI000037950860&dateTexte=&categorieLien=id

 Il est notable que les ATU tendent à devenir moins nombreuses mais à un prix extrêmement élevé du fait de l’apparition d’innovations de rupture : un changement radical bouleversant les usages et les habitudes.

Selon les chiffres du ministère des solidarités et de la santé, en 2013, les dépenses liées aux ATU représentaient 110 millions d’euros alors qu’elles ont atteint un pic à un milliard d’euros en 2014 et en 2016. Ces deux pics s’expliquent de la façon suivante : en 2014 sont arrivés sur le marché de nouveaux traitements pour l’hépatite C, les antiviraux à action directe, et en 2016 des molécules anti- cancéreuses très onéreuses sont arrivées à l’hôpital. 32

Pour faire face à des ATU de plus en plus onéreuses, les LFSS, à partir de 2017, sont venues durcir les aspects financiers des ATU, au-delà du principe, déjà inscrit dans les textes, d’un remboursement par l’industriel de la différence entre le prix in fine négocié avec le CEPS pour le médicament avec AMM et le prix déclaré de l’ATU.

Depuis la LFSS 2017, l’article L. 162-16-5-1 du CSS fixe une limite aux indemnités remboursées à 10 000€ par patient et par an en prévoyant que « Si, au 31 mars de

chaque année,(…), il apparaît que, pour un médicament dont au moins une des indications est prise en charge au titre d'une autorisation temporaire d'utilisation (…), le montant moyen pris en charge par patient à ce titre pour l'année civile précédente excède 10 000 euros, le laboratoire titulaire des droits d'exploitation de ce médicament, (…) reverse aux organismes mentionnés à l'article L. 213-1 du présent code désignés par le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, sous forme de remises, la différence entre le chiffre d'affaires facturé aux établissements de santé et le montant de 10 000 euros multiplié par le nombre de patients traités. Le nombre de patients traités, et en conséquence le montant moyen pris en charge par patient, sont déterminés au prorata de la durée de traitement moyenne sur l'année civile considérée. »

Il est ensuite précisé que, par dérogation, lorsque le chiffre d’affaires hors taxes, pour l’année concernée, du médicament est inférieur à 30 millions d’euros, le remboursement de l’ATU n’est pas plafonné.

De plus, toujours dans l’article L. 162-16-5-1 du CSS, la LFSS 2017 est venue modifier le montant pris en compte dans le calcul de la remise que le laboratoire exploitant doit reverser, remise calculée sur la base de la différence entre le prix déclaré et le prix fixé ultérieurement par négociation avec le CEPS. En effet, depuis cette loi de financement, le laboratoire doit reverser sous forme de remises, la différence entre le montant de l’indemnité déclarée et le prix net de référence de la spécialité, si ce dernier est inférieur à l’indemnité déclarée.

Notons ainsi qu’avant cette loi, le montant des remises à rembourser, en cas de différence entre les montants, était calculé par rapport au prix facial négocié avec le CEPS alors qu’il s’agit maintenant du prix net, qui correspond donc au prix facial moins les remises (comme par exemple les prévisions quant aux volumes de vente). Ceci engendre des coûts plus importants à rembourser, du point de vue des industriels et vient donc durcir le cadre des ATU.

Cette même loi prévoit également désormais un remboursement à la charge du laboratoire (versus un prix de référence fixé par le CEPS), même en l’absence de prix ultérieurement négocié avec le CEPS, à savoir dans les hypothèses de non inscription du médicament sur des listes de remboursement ou en cas d’inscription sur la seule liste des spécialités agréées à l’usage des collectivités.

 Réglementairement, l’ATU prend fin lorsque le médicament obtient son AMM (plus précisément 1 à 3 mois après l’AMM, le temps que soit mis à disposition les packs commerciaux).

Toutefois, une fois l’AMM obtenue, le médicament ne peut pas encore être commercialisé. En effet, la phase d’évaluation de la demande de remboursement, le cas échéant, et la négociation du prix sont les étapes restantes précédant l’accès effectif du médicament au marché. . Il est intéressant de noter qu’en France, selon le LEEM (Les Entreprises du médicament), il s’écoule plus de 500 jours entre l’obtention de l’AMM et la publication du prix du médicament au JO (Journal Officiel)33.

Ainsi, mettre fin au mécanisme de l’ATU lorsque le médicament obtient son AMM empêcherait les patients de pouvoir avoir accès à leur traitement et ne permettrait pas d’avoir une prise en charge le temps de la phase d’évaluation par la Commission de la Transparence (CT) de la HAS (Haute Autorité de Santé) et de négociation du prix avec le CEPS. De ce fait, une phase dérogatoire dite de « post ATU » vient en relais de l’ATU pendant cette période afin de permettre une continuité d’accès aux traitements pour les patients ayant bénéficié d’un médicament sous ATU et même, l’inclusion de nouveaux patients au sein des cohortes d’ATU préalablement autorisées.

Dans un premier temps, la loi du 29 décembre 201134, faisant suite à l’affaire

Mediator®, a mis en place un dispositif expérimental permettant la délivrance et la prise en charge des médicaments ayant bénéficié d’une ATU, avant qu’ils n’aient obtenu un remboursement.

Ensuite, la LFSS de 2014 a permis la mise en place définitive de ce dispositif suite à quelques ajustements.

L’article L 162-16-5-2 du CSS, consacré à cette période post-ATU (dont le bénéfice n’est ouvert que si l’industriel a fait une demande de remboursement de son médicament après l’obtention de son AMM), dispose aujourd’hui qu’un médicament ayant bénéficié d’une ATU ayant été prise en charge, « peut, à compter de la date à laquelle l'autorisation temporaire d'utilisation cesse de produire ses effets, être acheté, fourni, pris en charge et utilisé au profit des patients par les collectivités publiques pour l'indication ayant fait l'objet de l'autorisation temporaire d'utilisation dès lors que cette indication est mentionnée dans une autorisation de mise sur le marché délivrée pour ce médicament. »

Il est ensuite précisé que la prise en charge sera décidée à la condition que l’indication n’ait pas fait l’objet d’une évaluation défavorable lors de la demande d’AMM.

Cette prise en charge est effective indication par indication, jusqu’à ce qu’un des évènements suivants survienne :

34 Loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du