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Des arts martiaux hybrides au MMA : l’évolution logique

Chapitre I : Ancêtres et genèse du MMA

3) Des arts martiaux hybrides au MMA : l’évolution logique

Après nous être éloignés historiquement de notre objet de recherche pour y voir des similitudes, mais, également, pour y voir ses racines dans des pratiques telles que la gladiature, le pancrace de la Grèce antique et les différentes luttes traditionnelles, nous avons utilisé la passerelle des duels non sportifs pour prouver que le défi a toujours

animé le cœur des hommes. Cet agrégat d’éléments débouche sur les arts martiaux

hybrides du XXème siècle. Au Brésil, en Europe de l’Est, aux États-Unis ou au Japon,

l’hybridation des formes de combat suit une évolution proche.

3.1) La capoeira

Il est impossible de ne pas associer la capoeira avec le Brésil tant la culture

populaire s’appuie sur cette discipline comme un art martial typiquement brésilien. Si son histoire reste évasive, il est cependant certain que le cinéma et l’industrie des jeux

vidéo s’appuient sur ce « cliché ». 3.1.1) Histoire de la capoeira

La capoeira est ancienne, nous trouvons son existence dès le XVIème siècle pendant

la traite négrière. Elle fut développée par des esclaves originaires d’Afrique dont l’Angola, pour tromper leurs maîtres grâce à un art martial déguisé en danse folklorique.

Des formes proches aux origines similaires se trouvent à Mayotte, Madagascar et la Réunion avec le Moring, à la Martinique et Guadeloupe avec le Ladja, à Cuba (le

Maní), à Haïti (le Pingue), au Suriname (le Susa). Les coups de tête, des gifles (Tapa), des balayages appelés Rasteira et de nombreuses techniques acrobatiques de coups de

pied sont utilisés. La capoeira s’est popularisée à partir du début du XXème siècle en

s’exportant dans le monde sans toutefois s’organiser autour d‘une fédération. Les habitants l’utilisèrent pour apprendre des techniques de défense. De nos jours, des compétitions existent comme l’International Capoeira Competition. Les frappes ne sont

pas autorisées, les combattants-danseurs ou artistes sont jugés à travers leur créativité, leur agilité, leur technique et leur style. Quelques athlètes brésiliens de MMA proviennent de cet art martial : Jean Silva ou encore Marcus Lelo Aurelio. Ce dernier est connu pour infliger des knockouts très spectaculaires à partir des techniques de capoeira. Originaire de Recife au Brésil, Aurelio fonda une école à Vancouver, le Grupo

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Axé Capoeira Vancouver, où ils étaient trois athlètes à combattre dans les règles du mixed martial arts, référencé sur le site de référence Sherdog.

3.1.2) La perception de la capoeira dans les jeux et les films.

Les personnages de films et des jeux vidéo invitent à penser que la capoeira est perçue comme le plus grand art martial brésilien. Nous pouvons citer par exemple Eddy Gordo dans le jeu et le film éponyme Tekken (2009). Le premier combattant de capoeira dans un jeu vidéo fut Richard Meyer dans Fatal Fury en 1991. Les japonais créateurs de ce jeu considéraient effectivement la capoeira comme un des plus puissants arts martiaux. Nous notons également les combattants brésiliens dans les films Never surrender (2009) Undisputed III(2010) et l’Honneur du dragon (2005). Dans les quatre

films, l’acteur américain né au Brésil Lateef Crowder Dos Santos, joue le rôle d’un pratiquant de capoeira. Jusque dans les années 1940, la capoeira était l’art martial le plus pratiqué au Brésil. Sa popularité réside aujourd’hui dans le fait qu’elle n’entretient

pas sa finalité originelle violente mettant davantage en avant sa danse. Ses techniques inspirent notamment de nombreux mouvements de hip-hop.

3.2) L’apport du jiu-jitsu brésilien et de la luta livre

Après la capoeira, nous restons au Brésil pour traiter des disciplines plus récentes que sont le jiu-jitsu brésilien et la luta livre. La présence d’athlètes provenant de ces

disciplines est plus nombreuse dans le MMA.

3.2.1) Le jiu-jitsu brésilien

Nous avons pu constater la baisse des duels armés entre des personnalités de la vie politique et culturelle dès le début du XXème siècle, devenant progressivement un attribut des individus représentants des arts martiaux. Sans quitter une motivation propagandiste

et de la défense d’un honneur, les duels se dépolitisent et se restreignent davantage au

cadre sportif. C’est entre 1895 et 1920 que se développèrent de nombreux défis d’arts

martiaux. Le judoka Mitsuyo Maeda, repéré par Jigoro Kano, fut envoyé pour effectuer un tour du monde afin de promouvoir le judo. Il affronta des combattants issus de divers

arts martiaux, avant de s’installer au Brésil en 1914 où il devint le « père » du jiu-jitsu brésilien. Le jiu-jitsu prit un essor au Japon quelques années après l’interdiction du port

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du sabre en 1876 sous l’ère Meiji et la disparition des castes de samouraïs. Épuré de ses

techniques mortelles, Jigoro Kano fonda l’école Kodokan et ce qui deviendra le judo. Lors de sa tournée internationale, Maeda usa davantage des techniques du jiu-jitsu contre des lutteurs ou des boxeurs américains, anglais, espagnols ou d’autres. À son

arrivée, Maeda reçut le soutien de Gastão Gracie, un homme politique local et influent,

chargé d’assister les nouveaux immigrants venus du Japon, suite à une forte migration,

dès 1870, et une intensification du flux migratoire, dès 1910. Gastão Gracie est lui-même le petit-fils d’un immigré écossais du nom de Georges Gracie. Dans l’intention de

remercier la famille Gracie, Maeda enseigna le judo à Gastão et à son fils aîné Carlos. Ce dernier transmit son savoir à ses frères, dont Helio. Mitsuyo Maeda développa avec les membres de la famille Gracie des techniques innovantes de judo et de jiu-jitsu pour

dominer un adversaire lors d’un combat « réel », donnant naissance au JJB. Sa principale différence avec le jiu-jitsu traditionnel provient de son orientation tournée

vers l’efficacité dans le cadre d’un duel sportif. La notion de compétition grandit. Les frappes n’étaient cependant pas autorisées. Le questionnement de départ d’Hélio Gracie

était la suivante : « Comment une personne plus faible physiquement peut-elle maîtriser un adversaire plus fort ? »99 L’enseignement du JJB se transmit dans toutes les générations de Gracie. Cette hybridation se fit originellement à partir d’un échange de

services entre deux individus provenant de cultures différentes. 3.2.2) La luta livre

Depuis les années 1920, la luta livres’est développée également au Brésil, un sport

de combat sportif sans kimono, ce qui en fait sa principale différence avec le JJB. Née dans les quartiers les plus pauvres de Rio de Janeiro (un développement qui s’oppose

ainsi à celui du JJB avec son équipement et la famille non défavorisée des Gracie), cette

discipline s’est ouverte aux quartiers plus favorisés, puis dans divers pays comme le

Portugal ou la France par l’intermédiaire de Flavio Santiago. De nombreux combattants

de valetudo et de MMA proviennent de la luta livre comme Marco Ruas et ses élèves Johil de Oliveira, Alexandre Pequeno Nogueira, etc.

99T. Janssen, Brésil, un siècle de combat, Label-Anim et 13ème Rue, 2005, Dvd video Fightsport, Antigua, 2006,

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3.3) Le Japon : l’autre pays pionnier

À l’instar de la capoeira pour le Brésil, de nombreux arts martiaux possèdent leur

image adossée à la culture japonaise. La grande variété de ces arts permet d’affirmer que le Japon est également un pays pionnier dans l’émergence de combats hybrides.

3.3.1) Les premières initiatives au Japon

Dans les années 1960, la rivalité entre les différentes écoles de karaté poussèrent Mas Oyama à fonder le karaté kyokushinkai. Afin de prouver son efficacité, Oyama défia les représentants des écoles concurrentes et affronta même des taureaux, brisant

leurs cornes d’un seul coup et à mains nues. En 1980, Kazuyashi Ishii se détacha du

kyokushunkai pour fonder le karaté seidokan. Les tournois de karaté au K.O se

développèrent et s’exportèrent aux États-Unis. Ishi fonda en 1993 le plus grand tournoi de karaté seidokan : le K-1, qui devint le kick-boxing japonais. C’est dans ces rivalités internes que les compétitions s’intensifièrent et se multiplièrent, de la même manière qu’au Brésil.

Au Japon, le combat libre prit naissance sous une forme proche du catch : le Shoot Wrestlingoù le résultat est connu d’avance, mais avec des coups « réels » échangés. Le 25 juin 1976, le catcheur Antonio Inoki affronta Muhammad Ali, le champion de boxe

anglaise. S’il fut très médiatisé, ce combat qui était alors appelé au Japon Ishu Kakutôgi

(ce qui signifie « combat de différents arts martiaux ») fut soldé sur un résultat nul, et ne resta pas dans les annales du sport. Le Shooting se construit sous l’impulsion de Satoru

Sayama. Cette discipline combine différentes techniques de boxe pieds/poing, de lutte et de sambo. Le premier évènement amateur de Shooto est créé en 1986, avec des protections. Le premier évènement professionnel eut lieu en 1989. Ce jour de mai 1989, la première édition vit sept finalisations par soumissions sur sept combats. Le premier K.O intervint seulement lors de la troisième édition en octobre 1989. Contrairement au

valetudo, le Shooto fut marqué par une précocité des règles : pas de combats à mains nues, interdiction des coups des pieds et de genou à la tête d’un adversaire au sol, et

plusieurs catégories selon le niveau des individus (des catégories D et C amateurs

jusqu’aux classes professionnelles B et A). Ce système se retrouve actuellement dans la

fédération française des Sports de Contact et des Disciplines Associées. Le Shooto est

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avec des branches dans une dizaine de pays, dont la Belgique, la Suède, l’Italie, l’Australie, la Finlande, le Brésil.

Sayama voulait allier trois aspects : l’intensité, la compétitivité des sports de combat et le spectacle du catch. C’est dans cette optique que d’autres organisations

japonaises naquirent, tous se déroulant sur un ring. Le Pancrase fut créé en 1993. Les athlètes combattaient sans gants, mais ils ne pouvaient pas frapper le visage de

l’adversaire avec les poings fermés et ils devaient aussi relâcher les soumissions si l’opposant touchait les cordes. À partir de 1998, les règles s’harmonisèrent avec les autres organisations telles que le Pride F.C. De ce fait, nous ne le comptabilisons pas comme du valetudo que nous traiterons plus tard. Les combattants célèbres tels que Bas Rutten et Franck Shamrock furent champions au Pancrase.

3.3.2) La Rings et le K-1 : les dernières formes hybrides avant l’arrivée du Pride

F.C.

La dernière organisation historique est la Rings, de son nom complet : Fighting Network Rings, crée par le catcheur Akira Maeda en 1991. À partir de 1995, les évènements se détournèrent progressivement du shooto-wrestling pour se sportiviser

davantage à l’image du Pride F.C., les combats étaient comptabilisés comme du MMA. Cependant, l’opposition entre Maeda et le multiple champion olympique Alexandre

Karelin qui eut lieu en 1999 était bel et bien du shooto-wrestling. Après une interruption

au Japon de 2002 à 2008 (les évènements n’eurent lieu qu’en Lituanie et aux Pays-Bas),

l’organisation est encore active au pays du soleil levant. Nous avons pu voir que le K-1 fut créé en 1993 en tant qu’organisation de kick-boxing japonais. La première édition eut lieu devant 10 000 spectateurs100. S’agissant exclusivement du pied/poing (règle du

kick-boxing avec les coups de genou sans saisie), le K-1 est un autre grand exemple de

l’intérêt du public pour les sports de combat hybride où le spectacle est porté en

leitmotiv. Son âge d’or se situe entre 1994 et 1999. Après une carrière au K-1, Mirko Filipovic et Mark Hunt brillèrent ensuite en MMA. Multiple champion de kick-boxing japonais, Semmy Shilt fit le chemin inverse au milieu des années 2000.

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Le point commun entre toutes ces organisations est la surface de combat, puisque

nous y trouvons le ring classique. Jusqu’au milieu des années 2000, le Puroresu (lutte professionnelle ou Shooto wrestling) fournit le gros contingent de combattants japonais

en MMA, dont les anciennes têtes d’affiche du Pride F.C. : Kazushi Sakuraba, Kyoshi Tamura, Nobuhiko Takada. Le shooto wrestling était la discipline qui se rapprochait le plus du MMA, avec des combattants qui savaient maîtriser l’art des coups debout et des

prises au sol.

3.4) Le sambo à l’Est ; le no-holds barredà l’ouest

Bien qu’ils soient des disciplines qui permirent au combat hybride de trouver sa

forme moderne avec le MMA, le sambo et le no-holds barred (NHB) ont des différences significatives.

3.4.1) Le sambo

Nous avons cité le sambo parmi les sports de préhension. Présent dans l’ex-Union

soviétique, et plus particulièrement l’ancienne Russie durant le contexte révolutionnaire, il tire ses racines des luttes slaves. Le sambo (abréviation russe d’ « autodéfense sans armes ») illustre l’intérêt pour les « systèmes de combat composite »101. Il récupère ainsi les meilleures techniques de nombreuses luttes slaves, de la boxe anglaise, de la boxe française, du jiu-jitsu et des techniques militaires. Le sambo se divise en trois disciplines proches : le sambo sportif (avec projections et combat au sol), le sambo de combat (avec percussions pieds-poings autorisées) et le sambo de défense (autodéfense

avec toutes les techniques autorisées). L’essor du sambo toucha le judo, puis le combat libre puisque le samboïste russe Oleg Taktarov remporta plusieurs combats à l’Ultimate

Fighting Championship, aux États-Unis. Aujourd’hui, de nombreux combattants tels que les frères Emelianenko (Fedor et Alexander), Sergueï Kharitonov et Andreï

Arlovski proviennent de cet art martial. Nous verrons que les anciens pays de l’Union

soviétique connurent une vaste période dédiée au valetudo et aux tournois sans gants.

101 Voir B. Bronchant dans « Historicité et évolution comparée du sambo », in A. Terrisse (dir.), Recherches en

71 3.4.2) Le no-holds barred

À la suite du « challenge gracie » que nous verrons en détail dans le paragraphe

suivant, ce plan marketing s’exporta aux États-Unis par l’intermédiaire de Rorion Gracie, fils d’Hélio Gracie. Dans le but de promouvoir le jiu-jitsu brésilien, cela

déboucha ainsi sur l’Ultimate Fighting Championship, un tournoi organisé le 12

novembre 1993, à Denver dans le Colorado. Diffusés par le pay-per-view (PPV ou le paiement à la séance), les combats se déroulèrent dans une cage octogonale. Le PPV

garde encore aujourd’hui un lien très étroit avec le free fight. Un tournoi à élimination

directe qui réunit des hommes de différents arts martiaux. Variante du valetudo par la permissivité des règles, le terme américain NHB (« no holds barred ») est associé à ces

tournois où la brutalité est mise en avant, car les règles sont minimisées. L’un des

pionniers du NHB, Orlando Wiet, en parle en ces termes : « C’était le bon temps, l’époque barbare. On était comme les gladiateurs »102. L’adrénaline ressentie lui

rappelle les bagarres de sa jeunesse dans les rues d’Amsterdam : « Dans la cage, on

ressentait une liberté totale. Et on est poussé par l’instinct de survie ». Malgré cela, il estime que la boxe thaïlandaise est plus traumatisante ; l’ancien champion du monde de boxe thaï et mixed martial artist Cyrille Diabate partage cet avis103. Wiet trouve que le MMA est devenu « trop propre », trop standardisé. Les avis tendent à diverger selon les générations de combattants qui ont connu ou non cette période.

C’est un phénomène typique de dé-sportivisation104 où le sport est commercialisé de manière racoleuse et où le spectateur est davantage intéressé par la violence du

divertissement et l’excitation du spectacle que par les performances sportives. Aux États-Unis, l’UFC a ouvert la voie à de nombreux tournois de no-holds barred, qui se multiplièrent à Hawaï et dans de nombreux États américains, avant que la législation

n’intervienne pour interdire ces pratiques. Les connaisseurs se souviennent des

organisations comme l’International Fight League, ou le Superbrawl. Contrairement au

valetudo, les combattants optèrent rapidement pour le port de gants. Ceci est également

102Les propos d’Orlando Wiet, in L’Équipe magazine, « Implacable », n°1584, 28/11/2012, Boulogne-Billancourt, p. 20.

103D’après les propos de Cyrille Diabate, in ibidem, p. 30.

104D’après J. Heilbron, M. Van Bottenburg, « Dans la cage », inActes de la recherche en sciences sociales,

« Pratiques martiales et sports de combat », n°179, septembre 2009, Paris, Seuil, pp. 32-46. Et B. Gaudin B, « La

codification des pratiques martiales », in Actes de la recherche en sciences sociales, « Pratiques martiales et

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une grande différence avec les affrontements rangés dans les classes du streetfight et de sa variante plus codifiée du Bare-Knuckle Fight (un duel de boxe originaire de

Grande-Bretagne et d’Irlande qui ne se déroule pas au sol). Le port des gants obéit avant tout à

la volonté de réduire les blessures aux mains. Le premier porteur de ces gants, David

Abbott, s’explique : « J’ai été dans de nombreux combats de rue, ce que je sais c’est que

lorsque je frappe, mes mains vont gonfler »105. Greg Downey insiste sur l’importance de l’instauration d’une telle règle. Les gants protégeant les mains de l’attaquant affectent le

déroulement du combat en provoquant plus de dégâts sur l’adversaire106. Greg Downey remarque également que les « techniques de finalisation » étaient une nécessité pour les participants : le combat obéit donc à une expérience pragmatique où la technique et le technologique sont pris en compte. Cette expérience permit rapidement au NHB de se démarquer des luttes non sportives communément appelées streetfight. Cependant, un paradoxe est apparu. En effet, en se sportivisant, grâce à des règles obligeant le port des

gants, nous assistions à une spectacularisation de la pratique par l’intermédiaire de K.O

plus nombreux. Nous aborderons cette évolution dans le chapitre suivant.

3.5) La crise des arts martiaux traditionnels

Les premiers UFC et d’autres évènements de NHB marquèrent les esprits par l’engagement de ses combats, sa violence réelle, mais également par une certaine crise des arts martiaux provenant d’individus issus du street fighting.

3.5.1) La relative inefficacité des arts martiaux traditionnels

Parallèlement au mouvement olympique qui se développa autour de l’idée de l’activité physique et sportive, des arts martiaux émergèrent au début des années 1900.

Michel Brousse dans Recherches en sports de combat et en arts martiaux (sous la

direction d’André Terrisse)107 montre les trois pôles qui définissent ces disciplines martiales : les dimensions spirituelles et éducatives, « l’utilitarisme du geste technique »

(l’efficacité) et l’aspect sportif. De nombreux athlètes ne se reconnaissent plus dans

leurs disciplines respectives, car au moins l’un des trois pôles est fragilisé. La

sportivisation toucha de nombreux arts martiaux. Le premier exemple de sportivisation

105 Cité dans C.III Gentry, No holds barred evolutions. The truth behind the world’s most misunderstood sport,

Richardson, Texas, Archon publishing, 2001, p. 81.

106 G. Downey, « Producing Pain : techniques and technologies in No-Holds Barred fighting», in Social Studies

of Science, 37 (2) 2007, pp. 201-226.

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concerne le judo devenu olympique depuis 1964. L’éthique et les valeurs propres au judo furent mises à mal avec le passage du « classique » au « sportif ». Un épuisement

de l’éthique s’opéra, ou du moins se fit ressentir. Si ce n’est pas la mise en compétition qui en est la cause, c’est la crise de l’efficacité qui est mise en avant. Effectivement,

malgré une violence exacerbée, les premières éditions de l’UFC révélèrent l’inefficacité

des arts martiaux traditionnels. À part le jiu-jitsu brésilien qui domina les tournois par

l’intermédiaire de Royce Gracie, d’autres représentants des différents sports de combat furent inefficaces dans les conditions proches du combat « réel ». D’ailleurs, le street fighter Tank Abbott a terrassé la cage de l’UFC avant que les premiers combattants polyvalents du circuit n’apparaissent.

3.5.2) La polyvalence des athlètes : un effet pervers ?